
Habitans
primitifs.
Parmi les ornemens des hommes, nous citerons encore un grand
croissant d’osbianc poii, qu’ils pendoient à leur cou; des colliers de coquillages,
d’autres faits avec les dents de leurs ennemis, et quelques-uns
d’une espèce de bois très-noir; des pendans d’oreille aussi d’os bianc;
des jambières composées de fruits secs enfilés, contenant intérieurement
de petites pierres et résonnant comme des grelots ; enfin divers ouvrages
en plumes, tels qu’une sorte de grande houppe ronde en forme de cône
tronqué , qu’on suspendoit en bandoulière aux reins, avec une corde en
coton.
Les plus grands guerriers, pour montrer combien ils avoient tué d’ennemis
, massacré et dévoré de prisonniers, s’incisoient les bras, les cuisses
et autres parties du corps ; et pour rendre ces marques plus apparentes ,
ils les teignoient en noir, ce qui formait alors un tatouage indélébile.
Souvent iis se peignoient la peau de diverses couleurs ; ou bien, après
avoir haché très-menu de petites plumes rouges, et s’être frotté d’une
certaine gomme, ils se couvroient en entier de ce duvet, ce qui leur
donnoit l’air le plus étrange.
Lacoifîùre des femmes étoit moins compliquée que celle des hommes;
elles laissoient pendre leurs cheveux de toute leur longueur, sans les couper
en aucune manière. Jamais elles ne perçoient ni leurs lèvres ni leurs
joues; mais elles portoient à leurs oreilles, largement trouées, d’énormes
pendans « blancs, ronds et aussi longs, dit de Léry, qu’vne moyenne
» chandelle de suif : quand elles en sont coiffées, cela leur battant sur
» les espaules, voire iusques sur la poictrine, il semble à les voir vn
* peu de loin, que se soyent oreilles de limiers qui leur pendent de costé
» et d’autre.» A leurs bras elles portoient aussi de grands bracelets d’os
blancs polis.
Rarement les voyoit-on comme les hommes se barbouiller le corps,
les bras et les jambes ; seulement elles aimoient à peindre sur leurs joues
des volutes ou spirales de couleurs nuancées, et n’oublioient point de
marquer d’une teinte bien apparente la place de leurs sourcils et de
leurs cils. «
L attrait qu’elles avoient pour le bain est digne de remarque ; et tel
jour, on pouvoit les voir s’y plonger plus de douze fois successives.
LIVRE I.er — De F r a n c e a u B r é s i l in c l u s iv e m e n t . i 5 1
Leurs maisons , longues d’environ cent cinquante pieds, mais beaucoup Rio de Janeiro,
moins larges, arrondies par le haut, figuroient assez exactement une Habitans
tonnelle de nos jardins. Plusieurs naturels habitoient sous le même toit; rf c \ '
. . . . Habitations.
et quoique sans ‘séparation qui jpût borner la vue, chacun y avoit son
rang à part, le mari, ses femmes et ses enfans séparés. Ordinairement
ils ne restoient pas au-delà de cinq à six mois dans un même lieu ; passé
ce terme, ils emportoient par pièces leurs maisons, et alloient les établir
à un quart de lieue et même à une demi-lieue plus loin. Ils pensoient que
ce changement étoit nécessaire à la santé, et que, s’ils faisoient autrement
que leurs ancêtres , ils mourroient.
Une méthode simple et ingénieuse qu’ils suivoient pour préserver des
insectes leurs ornement de plumes ; se réduisoit à les placer dans des
tubes en bambous, bouchés ensuite avec un tampon d’étoupe imprégné et
recouvert de cire.
Leur manière d’allumer le feu ne différait point de celle qu’il est assez
curieux de retrouver chez tous les peuples sauvages, et qui consiste dans
le frottement de deux morceaux de bois dont un est tendre et l’autre dur.
Au reste, leur amour pour le feu étoit extrême, et rarement les voyoit-
on arrêtés dans un lieu sans en avoir, sur-tout la nuit.
L’usage de fumer le tabac n’étoit répandu que chez les hommes..; ils
se servoient, à cet effet, d’espèces de cornets faits de feuilles, qu’ordinairement
ils portoient suspendus au cou.
S. I I I .
De l homme réuni en société.
Nous n’avons aucune donnée, même approximative, sur le nombre Population,
d’individus dont chacune des nations brésiliennes étoit composée: mais
on sait que les sauvages habitoient dans des villages qui renfermoient parfois
jusqu’a six cents âmes réunies ; que ces villages, extrêmement multipliés,
éprouvoient defréquens changemens de place, et néanmoins conser-
voient toujours le même nom.
Les Toupinambas et les Tamoyos, remarquables, dit-on, par la justesse Caractère,