
Colonie portug«
Je crois devoir joindre ici la
description d’un pilon brésilien
que M. le docteur Quoy a remarqué
dans une ferme, au milieu
des montagnes dos OrgaSs,
sur la route de Rio de Janeiro
au Nouveau-Fribourg : on en
voit le dessin ci-contre. Sur une
fourche en bois c g , de sept pieds environ de hauteur, repose une sorte de
grande cuiller b d , maintenue à son milieu c par un axe en fer. Un fort
pilon d e , fixé à angle droit à l’extrémité opposée de la cuvette, entre
dans un mortier F , de deux pieds de hauteur, et sert à y broyer ou du riz
ou du mais. La cuvette b de la cuiller, placée sous un courant d’eau a ,
se remplit, et, acquérant par ce moyen une pesanteur plus considérable
que celle du pilon qui lui fait contre-poids, s’abaisse, et force celui-ci à
s’élever: par suite de cet effet de bascule, l’eau de la cuvette s’épanche,
le pilon emporte à son tour l’équilibre, et retombe de tout son poids ;
mouvement alternatif qui se répète aussi long-temps que l’exige la quantité
de grain à triturer. Ce rustique appareil, peu dispendieux, se recommande
, comme on voit, par son ingénieuse simplicité.
Les ouvriers charpentiers de Rio de Janeiro , ceux en particulier qu’on
occupe à l’arsenal de la marine, sont adroits et intelligens ; lorsqu’ils
sont bien dirigés, ils exécutent de forts bons ouvrages; mais comme en
général ils n’ont point de théorie, il ne faudroit pas les abandonner à eux-
mêmes. Les menuisiers et les ébénistes travaillent fort bien aussi ; on ne
peut guère leur reprocher que de manquer de modèles élégans et du
génie inventifflui sait en créer. Les tonneliers, qui sont en grand nombre,
excellent dans leur profession. II n’en est pas de même des charrons ; on
ne se procure à Rio de Janeiro des roues bien conditionnées qu'en les
faisant venir d’Europe.
Emploi des substances animales. — On prépare au Brésil une assez grande
quantité de cuirs de boeuf, et ion apprête aussi, en blanc, les peaux de
quelques autres quadrupèdes, et même de serpens; la plupart se débitent
sur les lieux et servent a divers usages économiques. Indépendamment
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d’une tannerie à quelque distance de la capitale, il y en à une autre assez Rio de Janeiro,
importante dans la ville même. « Mais elle est loin, dit M. Lamarche, du
r . r Colonie portug.-
degré de perfection qu’on remarque dans nos grands établissemens du
même genre en France. J ’ai compté dans celui-ci de quatre-vingts à cent
fosses creusées dans le sol et maçonnées. Toutes les peaux y sont habillées
à la chaux, quelques-unes à la jusée, et jamais à l’orge ni au sel.
Le tan qu’on y emploie se retire du palétuvier qui contient le principe
tannin en abondance. Les feuilles a.vec leurs pétioles sont écrasées ou
plutôt hachées au moyen d’une roue dont la circonférence, garnie en
lames de fer, tourne dans une auge en bois où ces feuilles-sont placées.
Un cheval fait mouvoir cet appareil, qui ressemble assez exactement à
celui dont on se sert en Normandie pour écraser les pommes à cidre.
» Les cuirs qui sortent de cette fabrique sont en général très-spongieux,
et par conséquent fort inférieurs à ceux de France. Cette défectuosité
ne peut provenir que d’un vice de manipulation, puisque les cuirs crus
du Brésil, lorsqu’ils ont été tannés en Europe, sont les plus estimés de tous.
La v ente de produits aussi médiocres ne sauroit être que d’un foiblerapport. «
Un petit nombre de tabletiers font avec l’écaille des peignes et divers
menus ouvrages.
Emploi de substances mixtes. — On compte dans la ville une multitude
de tailleurs portugais, brésiliens, français, anglais et allemands , parmi
lesquels il y en a d’assez habiles. Les cordonniers ne sont pas rares non
plus, mais la plupart-sont mauvais : au reste, on trouve toujours à acheter
en ville des chaussures mieux faites, provenant soit d’Angleterre, soit de
France. On citeroit ici l’adresse des brodeurs et des passementiers, s’ils ne
manquoient trop souvent de goût dans leurs dessins. La profession des tapissiers
, particulièrement chargés de la tenture des églises, est, dit-on,
extrêmement lucrative; aussi cette classe d’artisans est-elle très-nombreuse.
A l’exception des guitares, qu’on fabrique assez bien dans le pays,
tous les instrumens de musique qui se vendent chez les luthiers sont
apportés d’Europe. Quelques tourneurs font au tour à pointe des ouvrages
passables, mais peu délicats; ils travaillent à - la-fois le bois et les métaux:
ceux qui se servent du tour en l’air sont encore plus médiocres.
L’établissement appelé Trem de guerra, ou manufacture d’équipemens
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