
Le commerce de l’Arabie avec l’Orient se faisoit généralement par
les ports de la Mer Rouge et par ceux de l’Océan qui i’avoisinent ; et
l’on voit les Arabes, depuis 12 0 4 , où ils arrivèrent à Achem, jusqu’en
1 4 p 5, époque de la conversion des Moluques au mahométisme, s’y établir
en grand nombre et y développer leurs opérations. Il est peu douteux
que l’augmentation de ce commerce, dans les xn.e et xm.e siècles,
n’ait été une conséquence des croisades, qui firent que les nations de
l’Orient et de l’Occident se connurent mieux entre elles, agrandirent
réciproquement leurs idées, donnèrent aux nations de l’Ouest un goût
plus prononcé pour les productions de l’Orient, et occasionnèrent par
conséquent une plus grande demande de ces dentées dans les marchés
de l’Arabie. Ainsi les consommateurs d’Europe ignorèrent jusqu’au
x v .e siècle (1), malgré le voyage du Vénitien Marco Polo, le nom et la
situation des pays qui produisent ces denrées (2) auxquelles depuis
long-temps ils attachoient un si haut prix.
Ce fut en 1 4 <? 8 que la navigation hardie de Vasco de Gama, au-delà du
Cap de Bonne-Espérance, vint changer la face générale du commerce,
resté presque stationnaire depuis trois mille ans.
Dès-lors les Portugais se précipitèrent à l’envi sur la route que ce
navigateur célèbre leur avoit ouverte : ce ne fut toutefois que onze ans
plus tard qu’ils atteignirent l’archipel d’A sie, et deux années après encore
qu’ils s’établirent à Malacca, dont ils venoient de faire la conquête.
Albuquerque, qui y commandoit, expédia une escadre, sous les ordres
d’Antonio de Abreu, pour soumettre les Moluques; mais cet officier ne
put arriver qu’à l’île d’Amboine.
Une tentative plus heureuse eut lieu en 1 5 2 1 , sous les ordres du
capitaine Garcia Henriquez, qui, à sa grande surprise, vit bientôt lui-
(1) Crawf. op. cit. t. III.
(2) Ii paroît, d’après le D.r Vincent,que les Sabéens et les Gerrhçens, peuples qui habitoient
I’Arabie-Heureuse, furent, dès les temps les plus reculés, les facteurs intermédiaires qui alloient
chercher les aromates et les autres richesses de l’Orient, pour les vendre ensuite aux Égyptiens
et aux Phéniciens, lesquels les achetoient d’eux sans s’informer d’où elles provenoient originairement.
Voilà pourquoi les anciens attribuent à I’Arabie-Heureuse beaucoup de productions
de l’Inde, et même de la Chine et des Moluques; voilà aussi l’origine de cette richesse et
de ce luxe des Sabéens, dont tant d’auteurs grecs et romains font des tableaux si brillans.
(Géogr. de Ment, et Maltebrun.)
même arriver aux Moluques, et du côté de l’E s t , les vaisseaux espagnols
de Magellan, qui exécutoient le premier voyage autour du monde.
A cette époque, douze ans s’étoient écoulés depuis l’arrivée des Portugais
dans l’archipel indien ; et ii seroit bien extraordinaire qu ayant
dès 1 5 12 abordé à Célèbes, ils n’eussent point encore découvert l’île
Timor, qui en est si peu éloignée, et qui depuis long-temps devoit etre
fameuse (1) par l’excellence du bois de sandal quelle produit. Quelque peu
vraisemblable que soit une telle supposition, je n’ai pu cependant trouver
la preuve positive du contraire dans les nombreux ouvrages que j ai consultés
(2). II faut donc laisser l’honneur tout entier de la découverte à
Juan Sébastian del Cano, successeur de Magellan, qui, le 2 6 janvier
15 2 2 , vint aborder à la ville d Amabam (3% dans le voisinage de
Batouguédé, sur la côte Nord-Ouest de Timor. Quoi qui! en soit, une
circonstance assez importante à noter, cest que Pigafetta, historien de
l’expédition, ne parie nullement de cette île comme d’une nouvelle
découverte.
Del Cano resta dix-sept jours sur la côte de cette île ; il y fut visité
(1) Les Chinois répandus depuis tant de siècles dans cet archipel, dévoient faire déjà, du
bois de sandal de Timor, un des principaux articles de leur trafic; et ce qui prouve encore
que la valeur de ce bois étoit connue comme objet d’exportation, c’est que les compagnons de
Magellan en embarquèrent à tim o r, qui leur fut offert par les naturels. ( Voyez la Relation de
Prgafetta. ) '
(2) Tels sont les suivans : Histoire des découvertes et conquêtes des Portugais, par le P. Lafiteau.
As décodas de As ia , de Joaô de Barros e Diego do Couto.
Asïa portuguesa, de Manoel de Faria e Souza.
Histoire des conquêtes des Portugais dans les Indes o r ien ta le s ,^ le P. San-Domingo; Cet
ouvrage, écrit en portugais, m’a été communiqué à Timor; je le crois fort rare en Europe.
Collectiones peregrinationum in Indiam orientalem et occidentalem iT c ., fratrum de Bry et
Meriànî. v
Conquestas de las islas Molucas, por Bartolomeo Léo de Argensola.
Relation de divers voyages curieux, par Melchisédech Thevenot.
Histoire générale des voyages, par Prévost.
Lettres édifiantes.
History ofthe Indian archipelago, by John Crawfurd.
Historia général de Felip inas. ¿7"c., por el P. Fr. Juan delà Concepcion.
A chronological history o f the discoveries in the South Sea, by James Burney.
Histoire des navigations aux Terres australes, par le président de Brosses.
Beschiyvinge van Amboina Ù'c., door Franc. Valentyn.
Primo Viaggio intomo alglobo Ù c ., da Ant.° Pigafetta.
(3) Voyez planche 1 5 , par 1220 4 3 'de longitude.