
Portrait
des habitansl
voyageur qui aura été placé dans. des conjonctures plus favorables.
Quelques notions sur la population actuelle et sur son prodigieux accroissement
depuis un siècle, termineront cet article : je les dois à M. Thomas,
commissaire de marine d’un mérite distingOué
Le Gentil de la Barbinais rapporte que, lors du voyage qu’il fit à
Bourbon, en 1 7 1 7 , on n’y comptoit encore que neuf cents personnes
libres, parmi lesquelles six familles blanches seulement, et onze cents
esclaves; les derniers recensemens, faits en 1 8 1 7 , après le laps d’un
siècle, donnent les résultats ci-après ;
Blancs. ............ . j ÿ 0 ames.
Libres (1)................ . . . 4 4 4 2 .
Esclaves . ^ V 5 9 '
T otal ... ¿8 8pi.
Cet accroissement considérable peut être attribué à la salubrité du
pays , mais sur-tout a la liberté du commerce, dont cette île a joui pendant
un temps considérable.
Un auteur original dont le manuscrit inédit (2) m’a été communiqué
à l’Ile-de-France, trace ainsi le portrait des habitans de l’île Bourbon :
«Grands, vifs, bien faits, d’une complexîon robuste, adroits tireurs,
habiles cavaliers : telles sont les qualités physiques du créole bourbonnais.
Fier et orgueilleux, d’un caractère altier, il est très! dispose à
traiter tout le monde en égal; généreux, aimant le luxe et la dépense,
(1) Nous avons dit qu’il faut entendre par ce mot les noirs et les mulâtres qui ne sont
pas esclaves.
(2) Ce manuscrit est un poëme en sept chants sur l’île Bourbon, écrit d’ürt bout à l’autre dti
style le plus ridicule, mais contenant néanmoins une foule de notes qui ne.sont dénuées pi
d’importance, ni d’intérêt. Le poëte, après avoir fait à sa façon l’apologie de son style entre
en matière; et parlant d’abord de la découverte de l’île par D. Mascarenhas1, il continue’ ainsi i
Et fixant de ces superbes monts
En groupes ramassés’ les rapides tronçons*,
« Sol ignoré, dit-jl, il faut que je te peigne,
I Mon nom sera le tien, île de Mascareigné. » •
II opère aussitôt; aidé de son crayon,
De cette île il traça la situationI &c.
' Cet, écrit bizarre Paroît remonter à l’année 1779. En disant cfùe ¡’auteur é|pit cVéole, je me
hâte d’ajouter que Bourbon' donna aussi le jour à Parny.
LIVRE. IL — Du B r é s i l à T im o r i n c l u s i v e m e n t . 435>
il 11e consulte pas toujours les moyens qu’il a, d’y satisfaire ; ardent en
amour , peut-être a-t il aussi quelques dispositions à la jalousie* D’un
caractère naturellement guerrier et courageux, les Bourbonnais ont
plus, d’une fpis signalé leur bravoure, soit,dans ncxs armées, soit sur
nos vaisseaux. » Je ne verrais pas quel changement on pourrait faire
aujourd’hui, à ce tableau,? -
Les, commandeurs d’habitation exercent parmi les noirs des fonctions
analogues à celles de chef d’atelier. Çe sont , des noirs esclaves comme les
autres ; mais on leur accorde certaines prérogatives qui, en flattant .leur
amour-propre .et leur intérêt, les rendent plus attachés à leurs maîtres.
Dans les anciennes habitations, le titre de .commandeur est presque, toujours
héréditaire ; dans les nouvelles , au contraire, on les choisit parmi
les noirs les plus intelligens et les plus fidèles. Beaucoup de maîtres
leur font apprendre à lire et à écrire : ils viennent alors. àA; secours de
l’indolent cultivateur. On leur fait teïiir les comptes .de dépense, les
registres ; des noirs., &c. Mais trop souvent i’exçès d’autorité qui résulte
d’une telle confiance, pousse plutôt les noirs à secouer le joug qu’il ne
les maintient dans la soumission; aussi a - t - o n toujours vu,: dans les
révoltes', ces commandeurs se mettre à la tête des mutins , les exciter
contre leurs, maîtres , et tirer ainsi de leur influence ,le plus funeste parti.
, A Bourbon, comme à l’Ile-de-France, et probablement dans toutes
les colonies où l’on emploie des esclaves à la culture des terres , il y a
des gens qui font métier de leur vendre de l’arack , liqueur, avons-
nous dit, pour laquelle iis sont passionnés. Vaincu par cet. appât séducteur,
le noir qui n’a ni le courage de résister à la tentation, ni
l’argent nécessaire-pour y céder, vole son maître, et trouve communément
dans le cantinier lui - même un recéieur complaisant. Ces larcins
multipliés sont notoires : mais les agens subalternes de la police , soit
incurie,, soit peut-être connivence ,. secondent trop mollement les propriétaires
pour qu’ils puissent s’en garantir. Ceux-ci atteindraient vraisemblablement
ce but,- s’ils accordoient, à titre de récompense, une
ration d’arack à leurs noirs. J ’en ai connu qui le font avec succès : leurs
noirs sont plus sédentaires et iis ont beaucoup moins de propension à
dérober.
Remarques
sur
file Bourbon.
Quelques
usages.