
moniâque fort peu agréable. Ce fut de ces amas de plantes que sortirent
trois quadrupèdes, gros comme de petits chiens, mais très-bas
sur leurs jambes , ayant des formes ramassées, mais, point de queue
apparente : ils nous parurent fort agiles. L ’obscurité m’empêcha de les
observer assez pour pouvoir les rapporter, avec exactitude, à quelque
espèce connue.
» Des courlis noirs et blancs, des huîtriers noirs, à bec et à pattes
roses, pechoient sur les rochers que la mer laissoit à découvert : nous
tuâmes un de ces derniers, et nos matelots prirent beaucoup de crabes
jaunes. A l’époque où ils viennent de changer d’enveloppe, ces crustacés
sont fragiles et maladifs, et en cet état il est aisé de s’en emparer ;
leur nombre étoit considérable au point que nous les foulions aux pieds.
En plusieurs endroits, nous vîmes des ossemens de baleines à moitié
ensevelis dans le sable; je rapportai-aussi une mâchoire de morse.
» Le lendemain 1 4 , nous nous dirigeâmes vers le cap de l’Inscription.
Le pays que nous parcourûmes dans un assez grand espace, présentoit
sur tous les points le même aspect, c’est-à-dire, des sables et des arbrisseaux.
La cote, qui d abord étoit fort basse, nous montra ensuite un
pan de rocher assez eleve, et séparé du reste des terres par la mer qui
1 entoure entièrement dans les grandes marées. Nous vîmes au sommet
une espèce de tourelle ronde, haute de six pieds; c’étoit le nid d’un
autour a ventre blanc et a dos gris, construit assez régulièrement avec
des branches mortes de mimosa ( voyez pl. 1 3 ) : l’aire ’ en étoit peu
profonde, en sorte que l’oiseau poùvoit facilement voir au-dessus des
bords; nous y trouvâmes un seul oeuf ovalaire, de couleur fauve, avec
des plaques brunes, et de la grosseur dé celui d’une poule. Au bas du
rocher, le sol étoit couvert d’ossemens de quadrupèdes et de débris de
poissons, de reptiles, de crustacés, &c. &c. Le genre d’existence de ces
oiseaux voraces les force en quelque sorte à vivre solitaires : ils consomment
en effet une si grande quantité d’alimens, que plusieurs de leurs
familjes , réunies sur le même lieu, auraient beaucoup de peine à s’y
procurer une nourriture suffisante.
» A partir de ce point, la côte est taillée à pic et s’élève verticalement
de 150 à 200 pieds. Lès lits de grès qui lui servent de noyau
LIVRE II. — Du B r é s i l à T im o r in c lu s i v e m e n t . 4 5 7
ne se montrent à nu qu’au sommet; plus bas elles sont recouvertes par
de légères couches de sable provenant des éboulemens.
I » Afin d’apercevoir plutôt le poteau auquel étoit fixée la plaque d étain
que nous devions rapporter à bord, plusieurs d entre nous cotoyoient la
falaise, tandis que d’autres marchoient plus avant dans les terres, dou
l’on pouvoit embrasser un plus vaste horizon : j étois de ces derniers, ce
qui nje procura l’avantage de tuer une très-petite espèce de gobe-mouche ,
"revêtue des couleurs ies plus riches et les plus agréables. Bientôt après ,
les cris de mes compagnons m’avertirent qu’on venoit de trouver I inscription
objet de nos recherches: je me hâtai d arriver pour contempler
ce monument informe par lui-même, mais précieux par les dates et les
noms qu’il rappelle. Le poteau où avoit été clouée cette médaille gigantesque
étoit détruit, et on ne la trouva elle-même sur le sable qu’en
s’aidant de la description fidèle qui avoit été donnée de son gisement.
» Après quelques instans de repos, on se remit en route pour rejoindre
l’embarcation : la chaleur étoit forte ; cependant nous hâtâmes notre
marche,, parce que nous étions à jeun et que nous n’avions avec nous
aucun moyen de nous désaltérer.
» Nous arrivâmes assez à temps pour que MM. Fabré et Ferrand
pusséht aller renouveler à midi leurs observations de la veille sur le
cap Leviliain. Nous dînâmes ensuite; après quoi, tous nos effets étant
rembarqués, nous nous mîmes en route à six heures du soir pour rallier
la corvette. La mer étoit belle, ce qui nous permit d’abord l’emploi des
avirons pour nous élever au vent. On mit ensuite à la voile, et nous
étions heureusement parvenus jusqu’à moitié à-peu-près de la distance
qui nous séparait de la baie de Dampier, lorsque , sur les dix heures,
nous fûmes tout-à-coup assaillis par une brise très-forte et contraire, qui
fit grossir la mer de manière à nous donner des inquiétudes. M. Fabré
n’hésita pas à faire vent arrière, dans l’espoir de rejoindre le point de
la côte que nous venions de quitter; mais la nuit ne nous.permettant
pas de bien juger notre position, il s’en fallut beaucoup que nous pussions
trouver un lieu de débarquement aussi commode que le premier.
Engagés parmi les hauts-fonds, et ayant échoué plusieurs fois, nous
Mmm*