
De l’homme
comme
individu.
parut aussi de la même manière; les selles redevinrent naturelles, et
Bourdier recouvra la santé i4d jours après sa première sortie du poste,
c’est-à-dire, en tout, après huit mois et demi d’hôpital.
» L’observation dont nous venons de rendre compte prouve combien
la nature a de ressources; car certes, je n’ose pas attribuer une
guérison aussi inespérée à l’usage de l’acétate de potasse, mêlé à de
l’eau de pourpier, qui fut administré durant quelques jours dans le
dernier temps de la maladie, quoiqu’on ait reconnu, en plusieurs cas,
les bons effets de ce médicament. II faüdroit plus d’un fait du même
genre pour y reconnoître le seul agent d’une pareille cure.
Non-contagion de la dysenterie. — » Heureusement pour notre équipage
, la dysenterie ne fut point contagieuse ; car comment pouvoir s’en
préserver à bord d’un navire où les hommes sont presque toujours en
contact, et où le service médical, pour être bien fait, exige des personnes
qui en sont chargées les plus grands soins et une présence continuelle
parmi les malades, ne fût-ce que pour surveiller les infirmiers.
Tout cela ne peut se faire sans étrè exposé à de fréquens attouchemens
et aux miasmes qui se dégagent du lit des malades. S’il y avoit eu la
moindre disposition à la contagion, l’infirmier eût été des premiers attaqué;
car, obligé chaque jour de vider et de nettoyer les bailles d’aisance,
il le faisoit, quoi qu’on eût pu lui dire, constamment sans user
d’aucun moyen préservatif. Moi-même je ne laissais passer aucun jour
sans vérifier, par l’état des digestions, quels étoient les progrès du mal,
ne prenant d’autre précaution que d’avoir un mouchoir devant les organes
de la respiration, et encore pas toujours. Cependant la maladie ne m’a
point atteint.
” Peut-être ce que nous avons été à même d’observer pourra-t-il servir
un jour à la solution de la question, encore indécise, de la contagion
ou non-contagion de la maladie qui nous occupe.
» Nous ajouterons que , bien qu’on ne doive rien négliger pour
rechercher les causeis prochaines de la dysenterie, soit dans les localités
auxquelles elles appartiennent, les latitudes, l’air, les eaux, les ali-
mens, $cc., soit dans le tempérament des individus, leur manière de
vivre, & c ., nos observations ne sont encore ni assez avancées, ni
LIVRE II. — Du B r é s i l à T im o r i n c l u s i v e m e n t . 607
assez profondes, et nos instrumens de physique pas assez perfectionnés, J le Timor,
pour nous dévoiler, à cet égard, les secrets de la nature. De l’homme r o ' . .. comme
Causes de la dysenterie. —— « Si quelqu’un étoit tenté d’admettre la cha- individu,
leur comme seule cause occasionnelle de la dysenterie dans les régions
équatoriales, nous lui dirions qu’aux îlqs Moluques, aux îles des Papous,
placées sous la ligne, la chaleur et l’humidité sont aussi fortes qu’à
Timor, et que cependant nous n’y éprouvâmes aucun symptôme de cette
phlegmasie; qu’il en a été de même aux Mariannes, où nous fîmes
un long séjour, et où plusieurs de nous, obligés de faire à pied et à
l’ardeur du soleil de grandes courses, n’éprouvèrent aucune indisposition.
» Lorsque nous quittâmes les îles Sandwich pour nous rendre au
Port-Jackson , des pluies fréquentes entretinrent à bord beaucoup
d’humidité : c’est à cette circonstance que j’attribue la réapparition
de la dysenterie, dont trois hommes de l’équipage furent attaqués.
Pour cette fois, la température peu élevée de l’atmosphère, jointe à
des vents assez forts , rendit la maladie bénigne ; et cependant, au
début, les symptômes inflammatoires parurent assez graves ; les selles
glaireuses, accompagnées de sang, s’évacuoient avec de vives épreintes
et des douleurs abdominales très - fortes. L’opium et les mucilagi-
neux firent avorter et guérirent radicalement cette maladie en peu de
temps, quoique les personnes qui en étoient attaquées eussent eu l’imprudence
de taire leur mal pendant trois ou quatre jours. Le tempérament
sanguin d’un seul individu nécessita l’emploi des bains entiers
et des fomentations. II est à remarquer que tous étoient des jeunes gens,
dont le plus âgé avoit à peine 18 ans.
Marche à suivre dans le traitement de la dysenterie. — « La dysenterie,
quoique bien reconnue depuis long-temps pour une inflammation de la
partie inférieure du tube intestinal, n’avoit pas été néanmoins soumise à
un traitement plus rationnel. Aussi est-ce seulement depuis qu’un homme
de génie (M. Broussais ) a jeté un si grand jour sur les inflammations
en général, que celle-ci a pu être combattue par des procédés vraiment
méthodiques. Avant cette époque, en effet, que de vacillations dans les
idées sur l’emploi de telle ou telle substance, sur l’époque de la maladie