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et dont on ne cultive qu’une foibie partie, ont beaucoup nui à l’établissement
des fermes agricoles, parce que les cultivateurs se sont trouvés
forcés de s’éloigner de plus en plus des rivages de la mer, du bord des
rivières et des routes praticables. On ne voit qu’avec peine la grande
quantité de terres incultes qui existent aux environs de Rio de Janeiro,
et même autour de la rade, où sont, sans contredit, les lieux les mieux
placés pour la facilité du transport des récoltes. Mais c’est bien pis
quand on s’avance à quelques lieues dans l’intérieur du pays, puisque à
peine trouve-t-on, sur une surface de plusieurs lieues carrées, un petit
nombre d’arpens de terre en culture. »
Quel dommage qu’un si beau pays ne soit pas exploité par une nation
active et intelligente ! car telle est la température de ce climat, qu’à côté
des productions du nouveau monde pourroient croître la plupart de
celles de l’ancien continent.
Outils, ustensiles, &c. — Les procédés les plus répandus pour diminuer
le travail, bonifier les produits, sont souvent ici ignorés ou dédaignés
(1). La houe à long manche est l’outil le plus commun et à-peu-
près le seul à l’aide duquel on remue la terre, soit dans la grande, soit
dans la petite culture. La charrue est presque inconnue, et n’est employée
que sur quelques terrains anciennement défrichés ; dans ce cas, c’est la
charrue à un soc et sans roues dont on se sert. Pour la coupe des bois,
on a des haches, des serpes et serpettes de différentes sortes, depuis
huit jusqu’à dix-huit pouces de longueur, et, dans quelques jardins,
des ciseaux pour tondre les haies. Citer encore l’emploi de caisses, de
vases, de pots à fleur, d’arrosoirs uniquement en fer blanc, d’échelles,
de claies pour passer les terres, de vans en roseau très-bien faits, ce sera
compléter, à bien peu près, l’énumération des outils et des ustensiles qui
composent le bagage du laboureur et du jardinier.
Quand les chemins le permettent, ce qui n’a guère lieu qu’aux
(1) Parlant ici en termes généraux, nous sommes loin de vouloir comprendre dans nos allégations
les belles cultures du Jardin botanique, dont nous avons déjà entretenu nos lecteurs.
Mais ce que nous avons omis de dire, c’ est que ce jardin doit son origine à un Français, qui fut
appelé de la Guiane par M. le comte de Linharès, pour fonder ce nouvel établissement sur le
pied de la Gabrielle de Caïenrte.
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environs et même assez près de la capitale, on se sert, pour voiturer les
récoltes, de charrettes de deux sortes : les unes, à roues pleines fixées à
l’essieu, sont attelées de deux, quatre, huit ou dix boeufs, et font en
roulant un bruit effroyable; les autres, de plus petites dimensions, ont
des roues à rais, et une ou deux bêtes suffisent alors pour les traîner.
Mais plus communément les produits de la terre voyagent à dos de
mulet. Les brouettes brésiliennes sont remarquables par leur imperfection,
ce qui justifie suffisamment sans doute la préférence qu’on donne
aux paniers pour les transports à bras.
Engrais. — Dans cette enfance de l’art, le soin d’amender les terres a
été fort négligé. Même.à peu de distance de la capitale, ce n’est que
dans ces derniers temps qu’on s’est avisé d’utiliser les excrémens des bestiaux.
On consacre aujourd'hui au même usage, des bagaces de cannes
à sucre qu’on a laissées pourrir en tas, mais non dans des fosses. La
paille étant fort rare et le fourrage fort cher, peu de personnes donnent
de la litière à leurs animaux domestiques ; de là résulte une assez grande
rareté des engrais produits de cette manière.-
Opérations de culture. — Pour mettre un terrain vierge en culture , on
commence par abattre avec la hache les bois qui le couvrent; on les
brûle sur place, sans déraciner en aucune sorte les troncs, qu’on a
coutume de laisser saillir d’une certaine hauteur hors du sol ; on gratte
ensuite plutôt qu’on ne fouille la terre avec la houe, et l’on sème ou l’on
plante aussitôt ; la Providence fait le reste. Il n’est pas rare qu’après deux
récoltes successives, on laisse un champ long-temps en jachère.
Les plantations de cafeyers se font dans les terrains montueux ; elles
y réussissent fort bien et donnent un fruit de bonne qualité, peu estimé
cependant en Europe, à cause de la manière vicieuse dont il est récolté
et mondé : sa couleur se perd faute de soins ; beaucoup de grains sont
cassés, parce que l’usage des machines propres à les dépouiller de leurs
enveloppes est presque inconnu au Brésil ; c’est à l’aide du pilon et du
mortier qu’ils détachent la pulpe et brisent la coque du café ; et cette
opération se fait avec si peu d’intelligence, que le grain finit souvent
par être réduit en pâte.
M. le comte de Gestas, qui s’est adonné avec autant de soin que de
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