
Objet
du voyage;
préparatifs
et départ.
à ces timides nautoniers ¿qui osoient à peine abandonner ia rive du sol
natal, pour entreprendre, sur une frêle écorce, les plu§ courts trajëts !
Mille obstacles s’opposoient à un essor plus hardi. L’expérience n’exis-
toit point encore pour eux ; et ces théories profondes, fruits pénibles de
l’étude et du temps, restoient entièrement à créer. Que de malheureux
voyageurs, errant alors en aveugles sur un élément inconnu, exposés
sans défense à toute là fureur des tempêtes-, devinrent victimes de leur
impéritie et de leur audace, et payèrent d’une mort obscure leurs premières
tentatives !
Un tronc d’arbre, une barque grossière, servirent d’abord à établir des
.communications entre les deux rives d’un fleuve, entre un continent et
une île voisine ; moyen de transport simple, peu dispendieux, qui dut
plaire à l’industrie et recevoir des améliorations successives : cependant le
navigateur se tint long-temps renfermé dans les bornes étroites .où la
crainte avoit resserré sa marche; enfin, le savoir naquit du besoin même,
et l’on vit arriver l’époque où d’intrépides pilotes osèrent s’élancer vers
la pleine mer.
N’ayant encore pour guides que les astres, et des moyens plus ou
moins imparfaits d’en mesurer la hauteur, la navigation resta dans l’enfance
jusqu’à la découverte de la boussole ; elle n’atteignit depuis le haut
degré de perfection où elle est parvenue de nos jours, que lorsqu’on eut
réussi à reconnoître en mer la position exacte du vaisseau,
i S’il est vrai que l’invention de la boussole soit due au hasard , il n’est
pas moins certain’ que c’est à la persévérance, au génie des géomètres, à
l’habileté des artistes, que la marine est redevable des méthodes et des
instrumens qui servent aujourd’hui à déterminer les latitudes et les longitudes
avec une précision qui surpasse, on peut le dire , tous les besoins
et toutes les espérances.
Les travaux des successeurs de Vascp de Gama et de Christophe
Colomb perfectionnèrent la géographie du globe, dont ces hommes extraordinaires
avoient agrandi le théâtre. Les premières expéditions furent
entourées de tout le merveilleux qui dev'oit accompagner la découverte
de continens et d’archipels sans nombre. Des descriptions où l’on aimoit
à voir représentés les grands-et sublimes tableaux d’une nature toute
nouvelle, commandèrent et produisirent l’admiration. De l à , ce vif
intérêt qu’on a toujours accordé et que l’on accorde encore au récit des
voyages lointains.
Le but essentiel de ces navigateurs audacieux fut d’étendre les relations
commerciales , ou de rechercher l’existence de ces mines précieuses dont
les produits ont depuis inondé le monde. Mais ce n’est qu’au dix-huitième
siècle qu’est dû l’honneur d’avoir fait fleurir le véritable esprit de découverte,
c’est-à-dire, le goût des voyages entrepris sans aucune vue d’intérêts
mercantiles , dans le seul espoir d’accroître le domaine des sciences
et de perfectionner l’histoire de l’homme.
On ne doit plus se flatter aujourd’hui que ce soit la rencontre inopinée
d’une grande étendue de terre qui puisse attirer l’attention publique.
Le globe est connu dans ses masses principales ; il ne reste qu’à
revenir sur des détails, pour éclaircir la science géographique plutôt que
pour l’augmenter ; aussi, cette limitation de nos courses maritimes doit-
elle donner aux expéditions nouvelles un caractère analogue à leur objet.
Il faut donc que les voyageurs renoncent à étonner par ia grandeur de
leurs découvertes; leur mérite ne peut plus consister que dans l’exactitude
de leurs travaux et dans l’attention minutieuse qu’ils auront apportée
à leurs observations. Cette tâche, il est vrai, est plus utile qüe brillante ;
elle ne peut être célébrée comme les entreprises de ces fameux navigateurs
dont le nom se perpétue avec la terre qu’ils- ont montrée aux autres
hommes : mais, qui le croiroit d’abord ? avec moins d’éclat elle offre aussi
plus de difficultés. On pouvoit, autrefois, reconnoître l’existence d’une
île et en tracer les principaux contours, sans qu’il fût nécessaire de s’approcher
beaucoup au-delà du point choisi pour le mouillage : on doit
aujourd’hui pénétrer en quelque sorte jusque dans les moindres enfon-
cemens, reconnoître les récifs, sonder toutes les passes ; et -l’on conçoit
que cette obligation deviendra d’autant plus périlleuse, qu’on sera plus dépourvu
de ressources en cas d’accidens , ou plus éloigné des pays civilisés.
On ne saurait, sans doute, nier l’utilité des reconnoissances hydrographiques
; mais il est impossible de ne pas convenir aussi que ces
sortes d’opérations, exigeant maintenant, pour être bien faites , un temps
très-considérable, ne permettraient point aux observateurs de se livrer,
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Objet
du voyage^
préparatifs
et départ.