
Prod. animales.
qui peuvent être dans une maison : mais ce préservatif ne réussit pas
pour les autres fourmis.
Après une forte pluie, et quelquefois sans cause apparente, on voit
des essaims d’une espèce particulière de fourmis, appelées dans le pays
fourmis de correction, arriver dans les maisons au nombre de plusieurs
millions ; elles piquent fortement si on les excite ; dans le cas contraire,
elles ne font pour ainsi dire que passer avec une activité extraor
dinaire et un bruit remarquable. Elles saisissent parfois sur leur route
des cancrelas et les entraînent.
La fourmi carregadeira, le désespoir des agriculteurs, peut dans une nuit
dépouiller un oranger de toutes ses feuilles ; elle attaque aussi d’autres
arbres. Ces fourmis sont en telle abondance du côté de San - Paulo ,
qu’on a été obligé d’abandonner plusieurs cantons très-fertiles, parce
qu’elles minoient le terrain, coupoient les racines des plantes, dévoraient
les semences , au point qu’il eût fallu un nombre prodigieux de bras
pour les combattre et les détruire : ce sont de vrais fléaux.
Nous ne citerons plus qu’une très-petite fourmi, fort incommode, parce
qu’elle attaque tous les comestibles et particulièrement les confitures. L’exi-
guité de ces insectes leur permet d’entrer dans les armoires les mieux fermées
: le meilleur moyen de s’en préserver est d’isoler les caisses où l’on
craint quelles ne s’introduisent, en en plaçant les pieds dans des vases
remplis d’eau ; on a vu cependant quelquefois ce moyen être en défaut.
Quant aux abeilles particulières à ces climats, « n’estans pas sem-
» blablesà celles de par-deça, dit de Léry (ouvrage cité, pag. 1 6 j ) , ains
>» ressemblans mieux aux petites mousches noires que nous auons en
» esté, principalement au temps des raisins, elles font leur miel et leur
« cire par les bois dans des creux d’arbres, esquels les sauuages sçauent
« bien amasser l’vn et l’autre.»
La cochenille, introduite, comme nous l’avons dit, à Rio de Janeiro
sous le gouvernement de D. Luiz de Almeida, fut cultivée d’abord avec
succès dans le district de Cabo - Frio ; mais ceux qui s’occupoient de
la récolte de ces précieux insectes en ayant altéré le produit par un
mélange frauduleux de farine de manioc, furent cause de la ruine entière
de cette branche de commerce , dont on ne s’occupe plus aujourd’hui.
CHA P IT R E VII.
Des Peuples sauvages de Rio de Janeiro, a l’époque de l ’arrivée
des Européens. •
Si les matières ne sont pas nouvelles,
la disposition en est nouvelle.
PASCA L, Pensées.
Nous nous proposons d’examiner rapidement, dans ce chapitre, quels
étoient les peuples qui habitoient la province de Rio de Janeiro lors de
l’arrivée des Européens sur ces rivages; les moeurs qui les distinguoient,
leur religion, leur industrie, et le gouvernement auquel ils étoient soumis.
Cette esquisse a pour but, ainsi que nous l’avons fait pressentir ailleurs,
de fournir, plus tard, un point de comparaison qui puisse faire juger
des progrès de ces sauvages vers la civilisation, objet de tant de soins
et de tant de tentatives. Nous en puiserons les principaux traits dans
la curieuse relation de Jean de Léry, qui, exacte dans les faits que nous
avons pu vérifier nous-mêmes, a dû pour le reste nous inspirer une juste
confiance.
S. I.er
D e l ’homme considéré comme individu.
Il serait assez difficile de fixer avec précision, pour chaque partie des
districts de Rio de Janeiro, la demeure des nations indiennes qui y étoient
établies. Cette demeure n’étoit pas. fixe; les sauvages en changeoient
suivant leurs besoins, leurs caprices ou leurs craintes : et ce qui tend
encore à environner un tel sujet de ténèbres, c’est que les noms primitifs
adoptés par ces indigènes ne leur ont pas été conservés; les Européens
ont cru devoir y en substituer de nouveaux, dérivés des habitudes ou des
inclinations de chaque peuplade. Dois-je ane flatter d’avoir pu toujours
reconnoître l’identité des unes et des autres de ces dénominations î
Les auteurs les plus anciens qui aient écrit sur le Brésil, nous repré-
Voyage de VUranie. — Historique. p