
Ces travaux etoient a peine finis, quil fut ordonné aux ingénieurs-géographes
de se rendre au Kaire ; ils arrivèrent dans cette capitale de l’Egypte vers la fin
de septembre 1798. Us furent occupés de divers levés particuliers ; et M. Jacotin,
l’un d’eux, fut chargé de lever le plan des environs de la ville, tandis que
M. Testevuide, leur chef, s’occupoit d’un travail préparatoire pour la confection
dune carte de 1 Egypte: il avoit choisi 1 échelle d’un mètre pour 30000, qui
correspond a celle d une ligne pour 34 toises 4 pieds 4 pouces ( environ 3 lignes
pour 100 toises ).
Cette échelle étoit suffisante pour exprimer sensiblement tous les objets ; une
plus grande eut entraîné beaucoup plus de travail, sans atteindre le but qu’on
se proposoit, d’avoir très-promptement la carte projetée. On étoit, en outre,
forcé de restreindre le travail et de s’attacher d’abord à ce qui étoit indispensable,
attendu que les ingénieurs étoient réduits à un très-petit nombre, plusieurs
d’entre eux ayant préféré de passer dans d’autres corps, ou d’exercer des places
civiles, plutôt que de suivre leur profession, qui devoit ctre pénible et même
périlleuse dans un pays tel que l’Égypte.
C e projet de M. Testevuide touchoit à sa fin ; il alloit s’occuper des modèles
et des instructions qui devoient assurer l’uniformité d’exécution : mais il périt
victime de l’insurrection du Kaire, le 21 octobre 179 8 , non loin de la maison
du général Caffarelli, qui l’avoit appelé (1). Ses travaux furent alors suspendus,
et ils ne furent repris que long-temps après.
A cette époque, les eaux du Nil commençoient à diminuer; mais elles ne
permettoient pas encore de parcourir l’Égypte : cependant le désir et le besoin
de connoître le pays se faisoient sentir vivement. Dans les mois de septembre
et d’octobre, M. le général Andréossy, secondé par quelques ingénieurs (2),
avoit levé le plan du lac Menzaleh; il avoit reconnu la langue de terre qui
sépare ce vaste lac de la mer, e t, en la mesurant exactement dans toute sa longueur,
qui est de plus de 89000 mètres, il en avoit fait sonder toutes les
passes. C e travail important fut extrêmement utile pour connoître les communications
de Damiette avec la Syrie..
MM. les officiers du génie avoient déjà fait, à la même époque, diverses
reconnoissances : M. Souhait, ch e f de bataillon, avoit reconnu le cours du Nil
(1) II étoit parti le matin de la maison de l’Institut,
la ville étant dans le plus grand calme. M. Jomard devoit
l’accompagner dans cette course ; le hasard fit qu’il
le quitta en route, et il échappa ainsi aux poignards
des fanatiques révoltés. Les ingénieurs Duval, Thévenot,
le dessinateur Duperrès et d’autres, le chef de brigade
Shulkowski, le général Dupuis, commandant de la
place, et plus de soixante Français, furent égorgés dans
lesrues, et l’ingénieur-géographe Delaroche fut blessé à
la tête. Deux cents Français périrent dans cette terrible
journée.
M, Testevuide étoit auteur du cadastre de la Corse,
que M. de Choiseul fit commencer et que M. Necker
continua comme devant servir de modèle-pour un semblable
travail en France. II venoit de le terminer, lorsqu’il
passa en Egypte à l’âge de soixante-trois ans, avec
M. Jacotin, l’auteur de ce Mémoire, et M. Simonel,
tous deux ses neveux et ses principaux collaborateurs.
Son dévouement, son zèle et ses services étoient dignes
d’un meilleur sort.
Les instrumens de topographie déposés dans la maison
du général Caifarelli furent pillés ou détruits par les
rebelles ; ce qui fut un nouvel obstacle pour les travaux
de la carte.
(2) M. Févre, ingénieur des ponts et chaussées;
MM. Potier et Bouchard, élèves de l’école polytechnique;
M. Tirlet, alors chef de bataillon d’artillerie, et
M. Sabattier, chef de bataillon du génie, accompa-
gnoient le général.
Li A L A K l t L) Il LECjYFTE.
depuis le Kaire jusqu’à Atfyh ; M. Geoffroy avoit donné une reconnoissance,
faite à vue, de la route du Kaire à Sâlehyeh, et de ce poste au pont dit du
Trésor, sur la route de Syrie ; M. Crepin avoit également tracé de la même
manière les canaux de Filfel, d’Abou-Meneggeh, et une partie de celui de
Moueys. Ces diverses reconnoissances, toujours faites à la hâte et souvent sous
le feu de l’ennemi, furent utiles dans le moment; dans des temps plus paisibles,
elles furent remplacées par des opérations plus régulières.
Tels sont les travaux qui se trouvoient faits au moment de l’insurrection du
Kaire ; les troubles étant à peine apaisés, on continua les opérations avec une
ardeur nouvelle. M. Nouet, secondé de M. Coraboeuf, détermina la position
des principaux minarets du Kaire, du vieux Kaire, de Boulâq et des environs.
M. Jacotin termina le plan qu’il avoit commencé des environs de ces villes,à
l’échelle d’un mètre pour 5000, et leva le plan de l’île de Roudah à celle d’un
mètre pour 1666 mètres, qui correspond à 1 ligne pour 1 toise 5 pieds 5 pouces
6 lignes f II fut envoyé ensuite à Qatyeh (1), à vingt lieues dans le désert,
pour reconnoître la route de Syrie et les environs de ce poste important, ainsi
que ses communications avec le lac Menzaleh et avec Belbeys par la vallée de
Saba’h-byâr.
M. Nouet, accompagné de M. Coraboeuf, partit avec une commission qui
sortit du Kaire, le 23 novembre 179 8 , pour aller visiter la partie orientale de
la basse Egypte. Il détermina les positions géographiques de plusieurs lieux
remarquables, notamment Damiette, Tennys, les bouches de Dybeh et d’Omm-
fàreg, Belbeys, &c. , ensuite Soueys : il rentra au Kaire le 6 janvier 1 7 9 9 .M. Simonel fut chargé de lever le plan de la ville de Boulâq et des environs
a 1 échelle d’un mètre pour 1666.
L e 16 novembre 1798, M. Schouani reçut l’ordre du che f de l’état-major
général de partir pour la haute Égypte : attaché à la division du général Beiliard
il fit la reconnoissance de tout le pays que ce général parcourut, depuis le Kaire’
jusqu au-dela des cataractes et sur les rives de la mer Rouge.
Vers le meme temps, M. Lathuille fut envoyé à la division du général Lanusse
il reconnut la province de Menouf et une partie de celle de Gharbyeh
M. Bertre fut chargé spécialement du levé de l'intérieur de la province du
Fayoum dans 1 Égypte moyenne, et, sa mission remplie, il fut envoyé à Semennoud
pour lever la province de Gharbyeh; mais les événemens ne lui permirent
pas de s en occuper.
L e 16-janvier I 7 9 9 , M. Jomard avoit rejoint M. Bertre dans le Fayoum -
il leva une partie des provinces de Gyzeh, de Beny-Soueyf et du Fayoum - il
reconnut la partie orientale du lac Qeroun. Avan t de quitter le Kaire, ¡1 avoit
achevé le plan détaillé de la citadelle, à l’échelle d’un mètre pour ,000, correspondante
a celle dune ligne pour 1 toise 11 pouces 4 lignes
■ H B W M 9 1 9 à AIexandrie’de cette ville et prendre le nivellement des hauteurs. 9 B f environs
(0 L’orthographe suivie dans ce Mémoire es, celle de IWrrrge. ( ci-après, au chapitre ,v.)