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quoique les Turcs commissent ce dernier procédé. On a vu quelquefois deJ
kykhyeh vouloir forcer les votes pour l’élection d’un cheykh; mais alors tous )e1 chefs de bains se réunissoient, et s’opposoient à cette violence illégale.
Nous avons estimé le nombre des ouvriers à la journée à quinze mille p0ur J
ville du Kaire, dans le premier chapitre de cet ouvrage : on peut diviser cettS
masse d’hommes en trois classes.
La première est la plus misérable : elle se compose de dix mille individus Cefl
hommes, employés à des travaux secondaires, ne reçoivent qu’un paiement t r è l
modique et suffisant à peine à leur existence. Us sont vêtus d’une simple chemise'
bleue, en étoffe de laine, attachée au milieu-du corps avec une corde : leur té J
est couverte d’un feutre blanc , et leur logement se compose d’une espèce d e l
hutte, qui leur coûte par mois dix parats de loyer. T o u t leur ameublement s i
compose d’un fragment de natte, où ils couchent avec leurs femmes et leurs cnfl
fans. L ’ouvrier de cette classe peut gagner environ quinze parats par jour, et s i
femme (car il n en a jamais qu’une) se livre aussi à quelque occupation, moinï
lucrative encore, et qui lui rapporte au plus quatre ou cinq parats. Ces malheure J
ne mangent point de viande : ils achètent du pain, des portions de légumes c u i t l
ou des oeufs. L homme dépense quelque argent au café, fume de très-mauvail
tabac, et s’enivre en mangeant du chanvre vert préparé, excès qui lui devient!
presque nécessaire. La femme porte aussi une chemise bleue, et les enfans vont ■
nus ou couverts de lambeaux.
La seconde classe se compose de trois mille journaliers, qui, sans être réduit!
tout-à-fait à la même indigence, n’en sont pas moins bien à plaindre. Leur salami
n es t pas plus fort que celui des premiers, quoiqu’ils soient considérés com m l
des espèces-de sous-conducteurs de travaux; mais ils font quelques légers profits su r i
les autres. Leur logement est un peu plus commode et mieux garni. Leur garde-rokï :
se compose de deux ou trois chemises, qu’ils portent quelquefois les unes surlesi
autres. D u reste, leur manière de vivre est la même que celle des premiers. 1
On peut ranger dans la troisième classe deux mille ouvriers un peu plus aises:,
ceux-là sont comme des chefs d atelier. Ils logent dans un édifice où plusieut^B
longues galeries conduisent aux divers appartemens : ces constructions ressemMenI
assez a des cloîtres. Chaque ouvrier habite une chambre, -et fait préparer se s |
alimens chez lui : c est sa femme qui est chargée dé ce soin. Il paie trente médin^B
de loyer par mois, possédé une natte, un matelas d’étoupe, quelques coussins mal^J
couverts, une ou deux marmites, et autres ustensiles de peu de valeur. Mais c e f l
qui le distingue particulièrement des autres, c’est qu’il porte des habits, un châlel
de mousseline ou de laine autour du tarbouch pour former le turban. Ses véte-^|
mens de dessous sont en toile, et, outre la robe de laine, il a encore le deffÿeh ( i , B
manteau de laine noire, et le milâyeli (2), longue pièce d’étoffe de coton a v e cd d l
carreaux bleus et blancs. Tous ces objets qu’il renouvelle à mesuré qu’ils vieil-^B
lissent, peuvent lui coûter, neufs, vingt pataquès. Cependant ces ouvriers n’ont pas^J
un salaire beaucoup plus fort que les autres; mais ce qui les met un peu plus à leur'
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a i s e , c est qu ils sont toujours employés, comme plus connus et plus habiles. Leurs
femmes ont une chemise noire pour se parer, et deux ou trois bleues pour tous les
jours. Elles s occupent alaver et a filer du coton, et ce travail leur rapporte encore
quelque modique salaire.
Le nombre des domestiques employés au Kaire s’élève, comme nous l’avons dit
à l’article de la population de cette ville, chap. 1.” , à trois mille : on peut les
considérer comme formant trois classes distinguées entre elles par la nature même
de leurs occupations; ce sont les sâys (1) ou palefreniers, les farrâchyn (2) et les
itaouàs ( 3 )• -
Le.says dort auprès des chevaux dont il est chargé de prendre soin. II n’a
presque point de salaire, car on ne lui donne qu’un ou deux parats par jour et
une ration de pain (un rotl et demi) : mais il fait une foule de petits profits illicites,
et reçoit souvent des étrennes; en un mot, il vit à son aise. L a plupart de
ces valets ne sont point mariés; ils sont propres, bien vêtus, et se distinguent par
leur adresse a manier les chevaux. Ils sont naturellement arrogans et entêtés; mais
ils ne se livrent à leur emportement qu’entre eux, et ont la plus grande soumission
pour leurs maîtres.
On peut comparer le farrach a une espèce de valet-de-chambre. C ’est lui qui
a.soin des meubles, qui veille a la propreté intérieure des maisons et à l’éclairage.
Il habite chez son maître, et ne quitte son logis qu’en se mariant. Pour
prendre ce parti, il attend qu il soit devenu chef. Il est toujours bien vêtu. C ’est
cette.classe qui contribue aux plaisirs dépravés des maîtres : le farrâch pousse en
cela la complaisance aussi loin qu on le desire. Son salaire n’est pas fixé ; il dépend
de la volonté du maître.
Ces domestiques devenus chefs ont une et quelquefois deux maisons peu étendues,
avec une femme dans chacune. Leur ameublement est assez riche, et leurs
femmes possèdent quelques bijoux.
Les Orientaux de distinction se font précéder par des domestiques à p ie d ,
armés d’un bâton, pour écarter la foule et leur faire faire place. Ces valets se
nomment qaouâs, mot que l’on pourroit traduire en français par celui d’huissier. Us
portent les ordres de leurs maîtres en ville et dans les villages voisins. On choisit
pour cet office Atsfellâh et des hommes de la campagne, parce qu’ils ont une appa-
renceet une stature plus imposantes que les habitans des villes. L e qaouâs n’a point
de salaire; il ne reçoit que le pain: mais il se dédommage bien de cet inconvénient
' »« dépens de ceux à qui il porte des ordres ou des messages de la part de son
maître,.sur-tout lorsque celui-ci jouit d’une grande considération; il n’est sorte
davanies et d’exactions qu’il ne commette à son profit. Chez les grands, le qaouâs
est ¡ exécuteur des spoliations et des vengeances : c’est lui qui applique les coups
e bâton à ceux que son maître veut punir ou insulter. II fait descendre de cheval
les personnes que l’on peut assujettir à cet affront; e t , sous le dernier gouvernement
des Mamlouks, les Européens eux-mêmes n’étoient point à l’abri de cette
msnlte. Ces domestiques sont presque tous mariés : ils ont une femme vêtue
^ U*aL (2) cfcatjS pluriel de farrâch jSPJs (3)
& TOME II, 2.« partie. V v v