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couleurs : ce linge sert tout ensemble d’échiquier et de boîte pour enfermer |
pions et les pièces après la partie.
Il y a plusieurs autres jeux d’adresse qui demandent aussi plus ou moins ([c
combinaisons. Celui quon nomme manqaleh, «dix/*, qui se joue à deux avecdeu
planches où sont creusés six trous, dans chacun desquels les joueurs mettent si
petites pierres ou autant de coquilles, est fort en vogue. Il en est de même dt I
celui que les Arabes nomment tâb ou-douk, dont le savant T h . Hyde parle fort au I
long, et qui est encore en vogue parmi les Orientaux : il se joue avec des pions de
diverses couleurs, en Syrie avec vingt-un, en Égypte avec dix-neuf ou dix-sept
mais toujours avec un nombre impair, que chacun place dans la rangée exté-1
rieure en commençant la partie. Nous avons vu jouer le tâb ou-douk chez des!
Maronites au Kaire : ils avoient une planche à quatre rangées, et dans chacune ill
y avoit vingt-un carrés. Les joueurs ont de plus quatre petits bâtons plats, noirs I
d ’un côté et blancs de l’autre. Lorsqu’on joue en plein air, on jette ces bâtonsI
contre un couteau fiché en terre, ou contre une aiguille à emballer plantée dans un I
sofa, lorsque deux marchands jouent dans leur magasin. L ’un engage la partiel
à droite, et l’autre à gauche, afin que les pions se rencontrent. Quand le premieral
amené tâb, c ’est-à-dire, trois blancs et un noir ( i ) , il avance un des pions délai
première rangée dans la case voisine de la seconde, sans cela c’est le tour de l’autre; I
ce qui dure jusqu’à ce que l’un des deux ait amené tâb. Chaque pion delà rangée!
extérieure ne peut être remué la première fois qu’après qu’on a amené tâb. Voici les|
autres coups : douk-etneyn, ou deux blancs et deux noirs; après ce coup, on avance!
de deux cases l’un des pions auxquels le coup tâb a déjà fait faire le premier pas !
Trois douk el-talât, ou trois noirs et un blanc ; après ce coup, on peut avancer un|
pion de trois cases : quatre arba’ , ou quatre noirs, font avancer un pion de quatre!
cases; setteh, ou quatre blancs, gagnent six cases; et le joueur qui amène tâb arba ou i
settch, continue toujours et fait avancer ses pions. Celui qui a poussé les siens jus-l
qu a la seconde rangée, les lait rétrograder dans la troisième, et réciproquement I
de l’un à l’autre, jusqu’à ce que l’un des deux ait perdu tous ses pions.
Les Turcs et les Arabes jouent aussi à pair et impair. Nous avons vu au Kaire!
des chrétiens indigènes enfoncer une pièce d’argent en terre, et jouer à la toucherI
en lançant une boule. C e jeu a ses règles comme les autres; le cas où les boulesdeB
deux joueurs se rencontreroient, est prévu. Nous avons négligé de prendrenote!
des lois qui règlent ces sortes de jeux, et nous pensons que le grand nombre desl
lecteurs nous pardonnera volontiers cette négligence.
L exercice favori des Osmanlis et des grands parmi les Turcs est le maniement du ■
cheval; c est aussi en quoi ils font consister principalement le talent militaire. L e s l
grands personnages du Kaire se réunissent deux fois par semaine dans une grande I
place nommée mastabeh; ils se font accompagner d’une multitude de domestiques I
et d esclaves, tous a cheval comme eux. On s’exerce au geryd, c’est-à-dire qu’on s e l
divise en deux partis qui se chargent au grand galop : chacun est armé d’un bâton I
( i) T h . Hyde d it trois noirs et un blanc ; l’un de nous a donc été mal informé, ou bien les règles de ce jeu varient
suivant les pays cù il est répandu.
d e s h a b i t a n s m o d e r n e s £>e L’é g y p t e . 4 4 l
de palmier, long de quatre pieds et de moyenne grosseur; on Je lance horizontalement
et avec une extreme roideur contre son adversaire : il est des cavaliers qui
emploient une telle vigueur a cet exercice, que si leur coup porte, il peut briser
les os de celui qui le reçoit ; mais 1 adresse consiste a éviter le bâton, et même à
le recevoir dans la main. Nous avons connu un seigneur qui, dans sa jeunesse,
avoit eu un bras et une jambe casses de cette maniéré. Ceux qui préfèrent s’exercer
au tir, posent un pot [ bardak] sur un monceau de sable, et le visent avec un
mousquet chargé à balle, en courant de toute la vitesse de leur cheval. On se sert,
pour cet exercice, d’une arme à mèche, quoiqu’on ne manque pas de mousquets à
ressort. Les jouteurs n’en usent ainsi que pour mieux assurer leur coup, parce qu’en
courant à toute bride, l’a ir, vivement ébranlé, empêcheroit sans douté les étincelles
de pierre à feu d’atteindre la poudre, et les mèches parent à cet inconvénient.
Les seigneurs s’amusent encore à tirer de l’arc. O n voit dans la place plusieurs
petites colonnes érigées en l’honneur de ceux qui ont fait preuve d’une force extraordinaire
dans cet exercice. Lorsque le Nil a atteint une partie de sâ.hauteur,
les grands du Kaire se divertissent dans leurs bateaux, qui sont d’une magnificence
remarquable; ils vont à la rame sur les grandes places de Birket el-Fyl et de XEzbe-
lytli: ils aiment alors à faire tirer des feux d’artifice, et à prendre avec eux des
musiciens qui les égaient pendant leurs promenades sur l’eau.
Les gens du commun ont aussi leurs exercices : ils singent les hommes distingués,
et font en petit ce que les autres font en grand. Nous avons vu, par exemple,
les domestiques des principaux personnages du Kaire s’exercer à lancer un bâton
de cinq à six pieds de longueur dans une direction horizontale : C’est ainsi qu’ils
seformoient au geryd; ils commençoient à pied, afin d’être plus habiles pour
jouter a cheval. L e peuple et même les fellâh s’escriment avec de grands bâtons,
en observant certaines règles. L ’usage est de faire avec le bâton, au commencement
du jeu, certains mouvement, qui sont apparemment une espèce de salut;
après quoi chacun s’efforce de frapper son adversaire à la tête, seule partie qu’on
doive viser. L’adresse consiste à parer le coup ; et cette lutte ressemble assez à l’art
des bâtonnistes, si connu en Normandie et en Bretagne. D ’autres gladiateurs Égyptiens
tiennent un bâton dans la main droite, un petit coussin dans la gauche, et
dirigent leurs coups sur les bras seulement. C e t exercice se nomme la’b elkab. Nous
avons vu aussi en pleine rue des lutteurs qui n’avoient pour tout vêtement qu’un
haut-de-chausse fort étroit; tout leur corps étoit frotté d’huile; ils se saisissoient et
cherchoient à se terrasser: mais leurs mouvemens étoient sans vigueur; ils n’avoient
ni adresse, ni vivacité. Après plusieurs minutes employées à des gestes, que l’on
peut à peine nommer des efforts, l’un des deux se laissoit tomber, et la lutte se
terminoit là. Ces lutteurs n’oseroient pas montrer leur habileté en Perse, où l’on
excelle dans les exercices du corps : mais ils attirent encore l ’attention en Égypte;
et, dans tous les états du Grand-Seigneur, on n’en voit guère de plus adroits.