
puisqu’avec les Français le nombre des courses dans la ville s’est prodigieusemen
accru. Les âniers suivent en courant à pied, et portent à la main une petite
baguette de fer chargée de grelots; le bruit de ces grelots fait trotter l’âne : s’il n
va pas assez vite, lânier le pique avec le même instrument, qui est aigu àl'un j
de ses extrémités.
On trouve au Kaire de très:bons mulets, qui servent aux cheykhs de la religion
et aux principaux négocians : ils coûtent aussi fort cher.
Avant l’arrivée des Français au Kaire, il n’y avoit que les Mamlouks qui eussent
le droit daller a cheval ( r). Ils ne montoient que des chevaux entiers ou des ju-
mens. Leur usage étoit de courir au galop ou de marcher au pas : on a remarqué
qu ils n alloient jamais au trot. Us exerçoient leurs chevaux à se précipiter l'uni
contre I autre, à se cabrer en s’approchant, à se dépasser et à revenir : les cavaliersI
s’escrimoient au sabre. Une de leurs évolutions favorites étoit d’arrêter court leutl
cheval au milieu du galop le plus impétueux. Ces mouvemens brusques et pé j
nibles exposoient le' cheval à de faux écarts et lui brisoient les jarrets : aussi la plu-1
part de ceux qui avoient été exercés d’après les principes des Mamlouks, se ressen-J
toient de ce défaut; ils avoient les jambes excessivement foibles. Nous avons re|
marqué de plus quils avoient pour la plupart quelque chose de roide et de gênél
dans les mouvemens : cela p rovenoit sans doute des entraves qu’on leur mettoit anil
pieds de très-bonne heure.
Il est rare de trouver en Egypte des chevaux coupés : on les monte dès l’âge Ici
trois ans, et, passé dix ans, on n’en fait presque plus de cas. Il y a de très-teamj
chevaux dans la race Égyptienne, qui du reste n’est pas la même dans toutelaj
contrée. Ceux de la haute Égypte sont les plus estimés : ils ont, comme tous tel
chevaux Arabes, la jambe line et grêle, l’oeil v if, la tête droite, la croupe tombamej
et moins charnue que nos chevaux Normands ; leurs mouvemens sont élégans, etl
leur pas est agreable, sur-tout lorsqu’ils n’ont pas été gâtés par la manière de manégerj
des Mamlouks : cependant ils n ont peut-être pas toute la noblesse et tout le feul
de nos beaux chevaux de bataille ; des Français connoisseurs ne leur trouvoient pas|
autant de moelleux dans le mouvement du galop. Mais ils sont loin de se conserver|
aussi long-temps que les nôtres, et de pouvoir supporter les mêmes fatigues. Ils!
ont la réputation d etr’e tres-agiles, et de 1 emporter sur tous les chevaux du monde!
pour la vitesse de la course ; cependant nous avons vu une jument Française de-l
vancer de beaucoup un bon cheval Arabe (2).
Les chevaux: entiers sont bien moins vioiens que les nôtres : tout se passoitl
assez tranquillement dans les quartiers de notre cavalerie, quoiqu’il n’y eût que des!
chevaux entiers. Il est meme facile de les retenir aux approches d’une jument.
(1) On assure que M. Rosetti, consul d'Autriche, poumons. Les Orientaux ont des é t r i e r s d'une très-graodcl
voulut prendre un jour cette liberté, et que le peuple le largeur, qui leur servent en même, temps d’éperons;il
força de mettre pied à terre. suffit d’un coup pour déchirer le flanc du cheval. Leur
(a) Les chevaux en Égypte demandent les plus grands bride est dure; et la manière dont ils s’en servent brise
soins : après la plus petite course, un domestique doit les bientôt la bouche de leurs chevaux, qu’on ne peut pli»
promener jusqu’à ce que la sueur soit essuyée ; sans cette arrêter que par saccades, une fois qu’ils ont pris le grand,
précaution, ils ponrroient mourir sur-le-champ : ils sont, galop,
en général, ombrageux et fort sujets à la maladie des
Pendant notre séjour en Egypte, le prix ordinaire d’un cheval étoit de douze à
vingt louis : il faut observer que les Mamlouks faisoient encore des remontes à
cette époque.
Les Arabes ne montent guère que des jumens, et attachent beaucoup d’importance
à maintenir les bonnes races pures de tout mélange ; ils constatent avec le
p lu s grand soin, et même par témoins, la généalogie des chevaux de race. Une
jument de la race nommée kcyt, la plus illustre de toutes, est sans prix; elle se
vend jusqu’à cinq ou six mille francs. Nous en avons vu deux ou trois d’une très-
grande beauté.
L e s petits chevaux Arabes qui se font le moins remarquer par l’élégance de leurs
f o r m e s , ont des qualités qui les dédommagent de cette médiocre apparence; ils
s o n t ordinairement plus vîtes que les autres, et résistent beaucoup mieux à la fatigue.
§- VIII.
Moeurs des A rabes de la B ahyreh. |
Dans la province de Bahyreh, entre Alexandrie, le Kaire et la branche gauche
du Nil, on peut compter sept principales tribus d’Arabes, dont plusieurs y sont
établies depuis un temps immémorial.
Les Henâdy et les Geouâby sont les deux plus nombreuses de ces tribus. L a première
peut former une population de trois mille individus, tant hommes que
femmes. La seconde compose en quelque sorte un petit peuple pasteur : elle est
gouvernée par un grand cheykh qui tient cette charge de ses ancêtres; sa famille,
étant la plus puissante, exerce l’autorité suprême par droit de succession, et sans
qu’il existe de lois positives. T o u te la tribu est divisée en trois grandes classes, qui
se subdivisent encore en familles. L e lieu du campement est le même pour tous.
Chacun a ses troupeaux autour de sa tente : ces troupeaux consistent en chameaux
et en petit bétail. Un Arabe d’une condition médiocre peut avoir quatre, cinq ou
six femelles de chameau et deux mâles, outre le petit bétail qu’il possède en grand
nombre.
Les tribus changent de place à des époques à peu près réglées. L ’espoir de
trouver les pâturages nécessaires à la subsistance de leurs troupeaux détermine
leurs déplacemens. C ’est ainsi que les Geouâby se rendent chaque année de Maryout
dans la haute Égypte ; qu’ils vont dans la vallée des lacs de Natroun, et transportent
dans les villes une grande quantité de sel natron. Les fermiers du sel indemnisent
ces sortes de commissionnaires par un salaire que l’usage a déterminé.
Ce sont encore ces mêmes Arabes qui vont acheter dans les oasis des dattes
fraîches ou sèches qu’ils vendent ensuite aux petits marchands de l’Égypte.
Us ont des moeurs simples et pastorales qui les éloignent du brigandage : on peut
tout au plus en accuser quelques individus de leur petite nation. ■ y a peu de
vols parmi eux ; ces vols sont punis sévèrement par les cheykhs.
Durant les marches, qui se font toujours fort lentement, les hommes dans la force