
4 4 4 E S S A I S U R L E S MOEURS
On voit aussi en Egypte des individus qui n’ont pour toute industrie et pout I
tout moyen d’existence tpte l'art.assez commun de dresser des singes et autres ani I
maux intelligens à faire des tours pour amuser ie public : d’autres, plus patiens I
exercent dès serpens à danser, ou plutôt à figurer en mesure divers mouvemens indi I
qués par un air joué sur un instrument quelconque ( i ). Ce ci paroîtroit fort extraor. I
dinaire, si l’on ne savoit que les reptiles, en général, ont beaucoup d’instinct, qu'ilsI
aiment la musique, et lèvent naturellement la tête et la partie supérieure du corpsj
au bruit du tambour : ces mouvemens composent leurs danses. Il est aussi facile de I
faire danser les singes, qui sont tous d’une espèce commune dans l’Yémen : |es|
Arabes les y choisissent de préférence pour les élever, parce qu’ils sont plus doci J
que les autres.
Nous ne pouvons nous dispenser, de dire un mot des comédiens et des spectacles
des Egyptiens : on ne se douteroit peut-être pas qu’il y a des acteurs réels
en Egypte et des représentations dans toutes les règles; cependant nous avons vu
au Kaire une troupe de comédiens composée de Mahométans,de Juifs et de Chrétiens.
Leur aspect annonçoit assez qu’ils ne faisoient pas fortune dans le pays. Ils
alloient jouer chez tous ceux qui leur offroient une foible récompense : la cour de
la maison leur servoit de théâtre; un paravent posé dans un coin cachoit leurgarde-1
robe, et c c to it là qu’ils changeoient d’habits. Plusieurs Européens qui habitoicnt
l’Egypte depuis quelques années sans avoir jamais vu de spectacles Arabes, profi- [
tèrent de cette occasion; on fit venir la troupe en question chez un négociant Italien
: elle joua dans un appartement disposé à cet effet. Mais rien ne nous satisfit, î.
ni la. musique, ni les acteurs : nous ne savions., pas encore assez d’arabe pour Ici ;
bien comprendre, et nous pensâmes que ce n’étoit pas la peine de nous faire expli- ;[
quer.lç sens de la pièce ; le tout étoit fort mauvais, dépourvu de grâce et de naturel.
C ’étqit une femme Arabe qui attiroit les voyageurs dans sa tente, les voloit
et les faisoit ensuite maltraiter et partir te lle en avoit déjà dépouillé plusieurs, e f l
devoit sans doute faire subir le même sort à une foule d’autres, lorsqu’un négociant®
impatienté manifesta hautement l’indignation que lui causoit la pièce ; et les autres,]
pour montrer que.leur goût n’étoit pas moins épuré, se hâtèrent d’interrompre lesl
comédiens lorsqu’ils n’étoient peut-être pas à la moitié de la représentation.
Nous aurons encore à parler des a ’imeh, dont nous avons déjà dit quelques]
mots,: comme.çes femmçs-sont très-nombreuses au Kaire, et qu’elles composent en]
quelque,sorte un corps de métier, nous renverrons au chapitre des professions]
ce qu’il nous reste à dire sur leur compte.
( ij On a traité ailleurs des ophiogènes modernes , reste des anciens Psylles. V o y e z la Notice sur Rosette, par|
AÏ. Jollois, ci-dessus, page 354.
CHAPITRE IV]
d e s h a b i t a n s m o d e r n e s d e l’ÉGYP T E . 4 4 c
CHAPITRE IV.
L'H om m e considéré dans la vieillesse. — M o r t et F u n éra illes.
§. I . "
D u Respect p ou r la Vieillesse.
Ce n’est pas toujours parmi les peuples éclairés o ù l’égoïsme et l’intérét, enfans
delà civilisation, se développent, pour ainsi dire, avec les lumières, qu’il faut chercher
l’exercice des vertus naturelles. Plus l’horizon des connoissances s’agrandit
pour lés peuplés , plus ils s’éloignent de la nature. Nous ne porterons pas plus loin
c e t t e réflexion affligeante; e t, sans tenter ici un parallèle difficile, nous dirons seulement,
à l’honneur des Orientaux, que s’ils ont par trop négligé la culture des arts
et des sciences, ils ont su du moins conserver quelques traces des moeurs et des
vertus primitives:
Quoi de plus louable en effet que le respect profond accordé à la vieillesse par
les nations de l’Orient! L ’Égyptien sur-tout se distingue par ce sentiment honorable:
Mahomet l’a consacré dans ses institutions, et a cru devoir en faire un précepte
civil et religieux tout ensemble. Rien jusqu’à ce jour n’a altéré la force de ce
commandement du législateur, et l’état actuel des moeurs lui présage encore une
longue durée. L e philosophe pourroit, au contraire, reprocher aux peuples de
l’Europe, parmi lesquels tous les genres d’industrie et de connoissance ont acquis
la plus étonnante perfection, une indifférence trop marquée pour la vieillesse.
Des lois pleines de sagesse y régissent la société, et attestent le génie et le grand
sens des hommes qui les ont instituées, ainsi que le haut degré de civilisation où
sont parvenus ceux pour lesquels ces lois ont été faites ; mais on est surpris de ne
rien trouver dans ces codes divers qui consacre les devoirs à remplir envers les
vieillards. Il est certain que la vieillesse ne reçoit point parmi nous les égards qui
lui sont dus, et que l’opinion ne l’entoure point de ce respect affectueux et de cette
considération flatteuse dont la nature elle-même semble nous imposer le devoir.
Nous emprunterons à ce sujet quelques réflexions à l’auteur des Lettres sur 1‘Egypte,
quon a si amèrement et quelquefois si injustement critiqué : elles peignent parfaitement
les nuances qui existent entre les usages des peuples de l’Orient et ceux des
peuples de l’Occident, à l’égard de la vieillesse.
« Parmi les peuples policés, où l’on vit moins en famille, la vieillesse n’est pas
» aussi respectée ( qu’en Egypte ) : souvent même elle est un opprobre ; souvent il
” faut que le barbon à cheveux blancs se taise devant le jeune homme orgueilleux,
” et joue comme un enfant pour être supporté dans un cercle. A mesure que le
” poids des années se fait sentir, et que les plaisirs de son existence diminuent, il
• voit qu il devient un fardeau pour ceux mêmes qui lui doivent le jour : quand il
* a plus besoin de consolations, on lui refuse des égards, et les coeurs se ferment
E . M . T O M E I I , 2.c partie. L U