
n’apprennent pas même à lire : s’il s’en trouve quelques-unes qui possèdent et
talent, chose bien rare, elles l’ont reçu dans le harem; des hommes d’un fpP
avancé et privés de la vue ont été leurs précepteurs : ceux-ci peuvent tout au
leur apprendre à réciter des versets du Qorân, et c’est à quoi se borne à peu 9
l’éducation morale du sexe en Egypte,
Rien de plus bruyant qu’une école publique en Egypte , les enfans apprenant il
écrire les caractères de l’alphabet, les syllabes et les mots, en même temps q u ’f l j
s’exercent à les prononcer. On ne leur fait lir e , écrire et apprendre que des
passages du Qorâti : voilà à quoi se réduit J a première éducation. Tous fe
écoliers réunis dans la même enceinte récitent et apprennent à haute voix jJ
leçons qui leur ont été données ; on peut dès-lors se faire une idée du bruit
qu’on entend dans la classe : il faut que les maîtres en aient une bien grande ba-l
bitude pour y résister. Les enfans, outre l’usage qui leur est commun dans tous
les pays de chanter en récitant leurs leçons ou en lisant, ont encore en Egypte
l ’habitude de balancer continuellement la partie supérieure du corps ; et ce mouvement
perpétuel, joint aux sons discordans de toutes les voix, fait des écolesl
Arabes un spectacle assez singulier pour un Européen. Les enfans qui manquent
à leurs devoirs ou à leurs maîtres, sont châtiés très-sévèrement; la punition
ordinaire consiste dans un certain nombre de coups de geryd ou branche
dattier sur la plante des piedf.
Lorsque les écoliers ont fait des progrès dans l’écriture et la lecture, on leur!
apprend à écrire sous la dictée. Les maîtres ne se chargent point d’enseigner ï
leurs disciples la prière ni les lois du prophète. Toutefois le Qorân est le seul
livre des premières études. L e père est tenu d’initier son fils à la loi de Mahomet!
c’est lorsque l’âge de puberté approche que le père commence ses premières
leçons : l’enfant ne peut assister aux prières publiques qu’après la circoncision]
et nous avons dit précédemment à quel âge cette opération se fait.
11 nous reste maintenant à parler des écoles primaires et de leur fondation.
Un fait assez remarquable, c’est que les écoles publiques ne doivent leur existent*
qu’à la charité, et qu’elles sont en grand nombre dans les villes de quelque impôt]
tance. Un homme riche prélève d’ordinaire sur l’héritage qu’il laisse à ses enfans
une somme destinée à la fondation et à l’entretien d’une école publique. Voila
comment la générosité et le dévouement bien entendu des particuliers suppléen*
à la coupable indifférence du gouvernement. Saris les bienfaits des riches, l’Égypta
et la Turquie entière seroient tout-à-fait privées des premiers élémens de fms-1
truction. Souvent la somme affectée à l’entretien de l’école est assez forte pou*
.qu’un nombre plus ou moins considérable d’enfans pauvres puisse être nourri,!
habillé et instruit aux frais de la fondation. Les parens des élèves qui ont une!
petite fortune paient au maître une légère rétribution ; le prix varie depuis trois*
jusqu’à vingt médms par semaine. Les écoles publiques sont fort nombreuses au!
Kaire et dans les villes principales. Il est rare qu’il s’en trouve dans les villages : les!
pères qui veulent y faire apprendre à lire et à écrire à leurs enfans, sont obliges!
de les envoyer au cheykh de la mosquée.
Les chrétiens ont aussi leurs écoles ; elles se soutiennent; comme fes couvens,
par les aumônes et les dons pieux : les maîtres vivent des modiques rétributions
qu’ils prélèvent sur leurs, écoliers. Dès que les enfans commencent à savoir
lire, on met entre leurs mains les psaumes de David, qu’on nomme en arabe
tl-M o zâm y r ( 1 ).
La direction, et, pour ainsi dire, la propriété des écoles appartient de droit au
descendant ou à l un des héritiers du fondateur. Il peut Ja vendre, ou s’en démettre
en faveur d’un autre. Cependant il est essentiel que le professeur qu’il institué
soit capable de remplir ses fonctions, et qu’il sache le Qorân. Si le qâdy juge qu’il
est au-dessous de son emploi, il peut obliger le directeur propriétaire à choisir
un autre suppléant. Mais la profession d’instituteur est peu surveillée ; elle ne jouit
même que d’une bien foible considération. Si le maître a l’art d’attirer un grand
nombre d’écoliers, il peut espérer quelques avantages; sinon il végète dans un état
voisin de l’indigence, et ne doit attendre aucun encouragement.
Le qâdy a l’inspection spéciale des écoles primaires; lorsque ce magistrat s’aperçoit
que les fonds destinés à l’entretien de ces établissemens et à celui des écoliers
sont détourncs de leur objet, il a le droit de forcer ceux qui en ont la direction
Je se confonner aux voeux du fondateur.
§. IV .
Sciences et A r ts.
L es jeunes gens qui, au sortir des premières écoles, desirent continuer leurs
études, se familiarisent avec les livres qui y ont rapport : ils vont à la grande mosquée
d el-Azhar entendre les discours et les explications des cheykhs. Cette mosquée
est en quelque sorte l’unique université de l’Egypte : elle possède un corps
de quarante à cinquante professeurs; et dans le nombre, il en est cinq ou six qui
sont très-suivis. Du reste, les sciences qu’ils enseignent se réduisent à bien peu
de chose : ils ne professent guère que le Qorân et les traditions de ses premiers
disciples. Us expliquent les dogmes, les lois, la prière, le pèlerinage, et toutes les
autres pratiques que Mahomet a recommandées. Chaque secte a ses auteurs classiques,
qui ne diffèrent point entre eux sur les articles principaux de la foi.
Le prophète Arabe sentoit bien que des lois fondées sur la religion même acqué-
roient une force nouvelle; il a donc eu la profonde politique d’enchaîner toutes
les institutions, et de donner aux devoirs que la société impose à l’homme un caractère
presque aussi imposant qu’aux obligations de l’homme envers Dieu : il n’a
fait quun même corps des préceptes sacrés et de la législation civile, et les professeurs
se-gardent bien de les séparer dans leurs leçons. Us expliquent rigoureusement
•out ce qui est écrit dans un des chapitres du Qorân, en s’attachant aussi à faire
connoitre la véritable valeur des mots. C ’est ce qu’ils nomment la grammaire ou
le nahouy, c’est-à-dire, la langue pure, celle des premiers patriarches. Les plus
I1) Je® j i l - La version Arabe dont ils se servent a été imprimée sur le mont Liban,