
me tems celle où il doit fe diriger avec le plus de
prudence; car dès qu’il s’y embarque, il eft environné
d’Ecueils.
L ’Homme qui naît au fein de la Religion révélée,
& qui a reçu ces Notions que l’on nomme vulgaires
, n’éprouve aucune difficulté, & j’oie dire
qu’il eft le plus fatisfait des Hommes ; il paflèroitavec
férénitéau-travers delà vie,fans fouhaiter fortement
de fâvoir fur lui* même plus qu’il ne fait; convaincu
que tout ce qu’il defire d’en mieux connoître, fera
dans la fuite une partie de fon Bonheur.
Mais on vient lui parler de quelque chofe qu’on
nomme la Science: il eft féduit par les côtés flatteurs
fous lesquel s’annonce ce nouvel objet : il
commence à fe rendre raifon de chofes qui lui pa-
roifloient au-defîùs de l’Intelligence humaine, & il
conçoit l’efpérance de pénétrer beaucoup plus avant.
Enchanté d’une efpèce de lumière que quelques
Hypotbèjes jettent fur l’Univers, il commence à
penfer que les Hypothèfes font des P r i n c i p e s : il
fe plait à cette nouvelle face des chofes , parce
qu’il voit que chacun peut faire des H y p o thè s e s :
& lorfqu’il en a fait lui - même, & qu’elles cadrent
un peu avec les Phénomènes, il s’imagine que nouveau
Prométée il pourroir bien ¡un jour ravir Je
Feu du Ciel pour animer I’H o m m ï . Dans ces
momens critiques, où l’Amour-propre eft en jeu, des
Hommes plus avancés que lui dans cette Carrière
brillante le perfuadent flms peine; que l’Entendement
huhumain
doit tout comprendre, & que ce qu’if
ne comprend pas n’efl que Vifions. Il fe livre fans
f réfiftancc ii cette flateufe idée ; & fe croyant enfin deve-
[ nu l’Interprète de la Nature, il veut à fon tour in-
I ftruire ceux qu’on lui nomme les Ignorans. ” Eve*
I „ féduite par le Serpent fubt'tl, aborda, contre les
I „ Ordres de fon C r é a t e u r , VArbre de la Scien-
I „ c e ; & dès qu’Elle eût goûté la douceur perfide
I „ de fon Fruit, Elle voulu produire chez, A d am le
I „ même délire . . . . Mais bientôt, ils reconnurent
I „ qu’ils étoient Nüds. ” C ’eft ainfi que l’Homme
t s’ehnivre du breuvage empbjfônné de la fauiïè Scien-
I ce; & pendant les délires,de fon imagination il fe
I croit au rang des Dieux. Mais lorsqu’il vient à cher-
I cher XArbre de V i e ; quand il COnfidèré ce qui le
I touche de plus près, les Règles de fit Conduite &
I les Fondemens de Tes Efpérafices ; il fe trouve ban-
I ni du Jardin d'Héden : & plus malheureux que nos
I premiers Parens, qui retournèrent a leur divin G u id e ,
I il fe trouve fur une Mer immenfe, fans Pilote, fans
I Gouvernail, fans Ancres, & fans efpoir de trouver
I aucun Port. Tel eft l’Homme qui a prêté l’oreille aux
I doux leures de l’orgueilleufe Science, & qui, pour
I l e phifir imaginaire de palper tout I ’U n ïv e u s , l’a
I compofé dans fa tête de ce que peuvent connoître
! fes Sens.
Averti de bonne heure par un fage Pilote (à)*
I j’ai été allez heureux pour échapper au danger 9
dans
mon Père.
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