
me donnoient la même espèce de jaloufie •
que j ’éprouve quelquefois en entendant parler
des enfans Anglois de cinq à iix ans, qui n’ont
pas tant que moi étudié leur langue dans cet
intervalle. Mes petits Oldenbourgeois mar-
quent d’abord l’étendue de.leur poileffion par
un foiTé. Le fable, relevé au dedans, fert de
première elôtûre : de petites branches d’arbis-
feaux plantées dans ce cordon , annoncent
qu’on veut le fixer par leur accroiffement. La
Cabane eft conftruite; fon jardin tracé &
planté ; les terres divifées & fillonnées. Les
plus adroits ont fait la cour ruftique & fés petits,
engards; ils ont même élevé des meules
de paille, & voilà la Colonie en pied. Ailleurs
ils ont dérivé de petits filets d’eau d’un ruis*
feau, & les promenant dans le fable, ils les
ont bordés de digues : ils ont placé dans ces
digues des Eclufes faites, de petits morceaux
de bois, & s’amufent à vuider ou remplir des
étangs intérieurs par leur moyen: J’en ai vu
à l’ouvrage: c’étoit une a&ivité , un air d’in.
té rê t, une complaifance à regarder leur travail
, qui oecailonnoient bien des mouvemens
chez moi,
Voilà ce qu’on peut attendre des indigènes.
Ils fuccent les idées de leur état avec le la it, com-
me leur Langue, ils font Colons nés. Tout leur
: pa-
I p a r o î t beau,bon, aïfé, dans ce qu’ils au ront!
I f a i r e pour la fuite. Ils n’ont pas ces idées de mieux
Iquiinquiètent; ils fe rangent fous la règle fans
■ en éprouver de gène: les défauts même que
Ipourroit découvrir le fpéculateur attentif,
I n ’exiftent pas pour eux. Aider ces, charmans
■enfans à faire fouche, c ’efttout ce qu’on peut
■faire de mieux pour le Pays ; & l’on 'gagnera
■beaucoup à n’y pas mêler les étrangers qui fe-
Iroient imbus d’autres méthôdes & d’autres
■maximes. Je ne prétens pas que cette règle
I fo it applicable à tout Pays ; mais je la regarde
■comme effentielle à ceux dont les moeurs font
■encore fimples.
Ces confidérations montrent un des grands
■avantages de la vie champêtre : avantage qui
■me femble devoir engager les amis de l’Hom-
im e à l’étendre & à la maintenir. Il n’y a
ïpo int de ces gradations de diftinctions & de
■fortunes, qui font tant fouffrir d’individus,
■par l’ambition, par des efforts inutiles, par
Ides chûtes. Le vrai Cultivateur ne voit ces
■différences que de loin; il n’y fonge pas, ou*
Ine s’en occupe, que comme nous des Mille
tune nuits. Il n’a autour de lui que fes égaux-
lil marche fur les traces de fes Pères, & y con- -
■doit fes enfans : fes Générations font une
Ri