
droite. Nous arrivâmes à fon fommet dans une
heure & demie. Un grand troupeau de Gemfles y
pâturoit,fous la garde d’un feul Berger, qui fe retire
la nuit dans une petite hutte. Nous fûmes
auflitôtenvironnés de tout le Troupeau: c’eit l’allure
de ces animaux, lorsqu’ils font refté longtems
dans des Montagnes folitaires. Près de là , une
autre Croix fert de limite entre la Tarentaife & la
Val-d'Aojte. Ce paffage étoit encore couvert de
grands amas d’anciennes neiges, bien qu’au coeur
de l’Eté ; & nous vîmes qu’il en étoit tombé la
veille fur toutes les Sommités du voifinage.
„ Nous avions à l'Eft l'Allée blanche, Vallée
qui descend à celle dç Cormayeur, où nous voulions
aller. Vue de ce lieu, elle eft très pittoresque;
maison n’y découvre point tous les beaux
détails qu’elle préfente quand on la fuit. Elle pa-
roît être à peu près parallèle à la Vallée de Cha-
mouni ; mais les pentes font en fens contraires.
Sa direâion, dans le fens où nous l’avons parcourue,
eft environ de l’O. S. O. à l’E. N. E.; elle
fuit les derrières du Mont-blanc & de la Chaîne des
Aiguilles; & comme elle fe joint encore dans ie
bas avec la Vallée du Colde Ferret ,e lie forme, vue
du Col de la Sègne , une perspeéiive très longue.
La Vallée du Colde Ferret, après avoir confervé
quelque tems la direâion de V Allée r blanche ^ remonte
en tournant un peu à la gauche, & conduit
à un paffage en Valais t qui descend à Or fier es &
^e là à St. Brancbier. Toutes les eaux de ces
deux Vallées fe réunifient dans celle de Cormayeur,
paffent enfuite dans la Val-d'Aojle} & vont joindre
le Fâ près d'Torde. „ Du
,, Du Col de la Sègne, on voit encore le fommet
glacé du Mont-blanc auNord, à la diftance d'environ
deux lieues. Il s’élève comme une Nue au*
deffus des Aiguilles, parce que celles - ci cachent fa
bafe, & font qu’on ne voit que fes Glaces. Les
Montagnes delà droite de la Vallée font Schijleufes,
& leurs vaftes talus n’ont point de coupures profondes.
Lors donc que ces talus font couverts de neige,
ainfi que le fond de la Vallée, ils doit en re-
lulter le coup d’oeil d’une longue furface blanche
parfaitement unie. C’eft fans doute ce qui a
fait donner à cette Vallée, le nom A'Allée blanche.
,, Après avoir descendu la Montagne de la Signe,
nous fuivîmes à notre gauche le pied de
deux Pyramides, dont la première nous montra
le, moellon le plus extraordinaire que nous eus-
frons vu encore. Sa pierre eft comme une brèche,
compofée de pièces calcaires , argilleufes , micacées
, traverfées de veines de fpatb & de quartz;
& les blocs doïit la rupture avoit été déterminée
par d’anciennes fentes, étoient tapiffés de petits
crijlaux de rocbe. Quel mélange ixngulier ! Qu’eft-
ce encore ici qui eft le plus ancien ? eft-ce le vh
trescible le calcaire ou Je réfraffaire? Tout eft confondu,
& la maffe elle-même, prife dans fon en-
femble, ne fournit aucun indice de fa formation.
Les crijlaux de rocbe fans doute, ainii que les veines
de quartz & de fpatb qui tapiffent ou remplis-
fent des fentes, ont une origine poftérieure à celle
la Montagne,comme toutes les drufes,& les veines
quartzeufes ou fpatbeujes, qu’on voit dans toutes les
espèces de pierres ; mais il n’y arien de plus dans
tou