
Perfonne ne répond : Or fi vous.êtes obligés
de convenir que ce fonctionnaire public aura le
droit de tirer vengeance de fon calomniateur, à
plus forte raifon devçz-yoüs convenir qu’il a le
droit d’obtenir la vengeance des loix > JS s’il peut
tirer vengeance de celui qui l’aura calomnié en
:préfence de dix perfonn.es , à plus forte raifon
aufli pourroit-il exiger réparation de celui qui
l’aura diffamé à la face de tout l’empire.
A infî , en Amplifiant les principes fur le projet
de décret du comité , il elt certain que les aéles
d’adminiftration doivent être fournis a la cenfure
publique ; maïs la liberté de calomnier la probité
des perfonnes & la droiture de leurs intentions
ne doit pas être permife. V o ilà , je crois , où
nous fommes d’accord.
M . Roedcrer. Je demande à expliquer l’opinion
qui fait l ’objet de la controverfc j alors feulement
nous pourrons être d’accord.
M. Dandré. Puifque je viens de citer en toutes
lettres l’article du comité , & que l’affemblée me
' paroît d’accord, je demande qu’on aille aux voix.|
- M. Robefprerre. M. Dandré •& les autrés par-
:tifans du comité femblent quelquefois fe rapprocher
des principes pour s’ën éloigner fur le champ.
M. Dandré paroît dans la dernière partie de fôn
opinion déterminé à nous accorder.... ( Il s’élève
des murmures ).
M. Regnaud de Saint-Jean d'Angely. Je demande
que le préopinant veuille bien indiquer la corporation’
dont il eft le, chef.
M. Robefpierre. Je m’en vais fatisfaire à l ’in- j
terpellation du priopinant. Quand j’ai dit nous 3
je parlois de ceux que la queftion inté'rêfle, c’eft
à-dire , de la généralité des citoyens : ce font
les droits de là nation que je réclame contré un
article qui me^ plroît les attaquer. Je dis’ donc
que M. Dandré paroiffoit accorder le droit d’une |
cenfure falutaire & libre fur les aéles d’admirtif- i
tration ; fi l’article-rempliffoit cet objet , alors
on pourroit dire que nous fommes d’accord, mais
il ne le remplit pas.
Qu’eft-ce que la liberté d’exercer la cenfure 11
( On murmure ) La puiflance.des comités s’étend-
elle jufqu’à parler aufli Iong-tems qu’ ils veulent, &
à ne laiffer parler perfonne ? Je dis que cette cenfure
fur les a clés d’adminiftration ne pourra pas s’exercer
fans q u e , en vertu de l’article qui vous eftpro-
pofé , on puifle pourfuivre le cenfèur comme .calomniateur.
Par exemple, un miniftre parlant toujours
de patriotifme & d’ordre public, peut mettrè J
une négligence coupable dans l’exécution des loix I
relatives à la défenfe du royaume,. entretenir dés j
intelligences fccrettes avec les ennemis d.u dehors, j
Je demande fi le droit du citoyen fe réduira à I
I dire très-modeftement , très-refpeélueufement
I M. le miniftre a négligé de porter tel corps de
troupes fur les frontières, ou n’aura-t-il pas le
droit de d ire , s’il en a-le c o u r a g e j ’apperçoisj
dans fa conduite un plan de confpiration contre
le falut public ; j’invite mes concitoyens à le fuf.
veiîler. ( On murmure. — Les tribunes applau-
di.nent ).
Voici un autre exemple. Un général prépofé;
a la défenfe de nos frontières a exécuté un plan
dont'le réfultat devoir être de livrer la nation |
.tous les fléaux de la guerre domeftique. Sc extérieure.
Je fuppofe que j’aye eu des indices certains
de ce crime, comme tout homme de bonne
foi & clairvoyant a pu en avoir, je ne pourrai
donc pas provoquer la furveillance publique fm
un t '1 homme fans être puni comme calomniateur!
Je d s que par la nature des chofes l’intention
de faire le mal touche de fi près à l’aétion même.,
qu’il y a une connexité fi évidente entre le crimes
confbmmé' & l’intention du crime'’, qu’on ne
pourra dénoncer un délit d’adminiftration fans
rifquer d’être' pourfuivi comme calomniateur des
intentions.
A quoi fert cette diftinélion qu’ il eft fi facile
d einder dans fon ufage entre un délit commis &
l’invention, fi ce n’eft à gêner la cenfure fur tous]
les points.
Confultons l’expérience. Sur ioo accufations intentées
par l’affemblée nationale ellè-mêmè contre
des citoyens, 99 font 'reliées fans preuyes. Si!
M. Bouillé eût été dénoncé comme un homme 1
méditant des projets contre la patrie, le citoyen!
clairvoyant & zélé, qui en eut découvert les j
indices fans eh découvrir encore les preuves juridiques,
nleut-il pas pafte pour calomniateur!
( -Les tribunes applaudiflent ;). Pour appuyer la
vérité de cette obfervation, je rappellerai : l’en-j
-gouement général excité en faveur'du patriotifme
& /du zèle de cet officier, les éjogés qui lui ont
été- prodigués par l’intrigue; -, & les remerciemeils
•même furpris à la fagefte de raflemblée nationale.
( On applaudit ). Lorfque les chances de l’équité
font tellement incertaines en faveur de T un & |
de l’autre fyftême , .je demande s’ il faut privé j
la fociété de l’avantage fuprême d’ une cenfure
illimitée fur les fanclionnaires publics.j je demande
que là rédaction plus précife de M. Larochefou-
cault foit préférée' à celle du comité.
M. Duport. Il n’éft pas douteux que dans un
pays ou- l’on veut des moeurs, la calomnie doit
être pourfuivie. Le Comité a cependant fait une
diftinélion-entre' les fonélionnaires publics & tes
firhpjes citoyens.;Si l ’on calomnie un nomme privé,
aucun intérêt public n’a pu être le but du calomniateur
, & il. doit être puni févè'rement. Mais
la néceflité de furveiller les fonctionnaires, exige
[ q u ’il n’y ait pas.trop de danger à les attaquer.
[ C’eft pour cela qu’en foumettant leurs aéles à l'a
■ cenfure, il n’y a que la droiture de'leurs inten;-
ï rions qu’on ne puifle pas volontairement calomnier .
■ Dans un pays où la calomnie feroit ouvertement
I permife, il n’y auroit point d’opinion publique j
1 on rendroit indifférens tous les motifs qui peuvent
■ la faire redouter, & bientôt les accufations.de
■ tout genre feroiënt ft rtombreufes, & par-là même
Bon y auroit fi peu de fo i| que fi le fonélionnaire
B n’étoit pas guidé par fa probité, il ne pourroit
■ pas être réprimé par l’ opinion. La diftinétion de
i fa cenfure & de la calomnie n’ a échappé à per-
Bfonne. Vous avez dit dans lë premier article ,
B que je crois inutile de rapporter.... (On demande
B à aller aux voix. ) Voici le véritable fens du co-
| mité : io. Tout ce qui eft cenfure eft permis j
2”. toute opinion hazardge , quoique reconnue
Bfauffe, ne peut-être punie j 30. laNealomnie vo-
I lontaire doit être punie.
K La difeuflion eft fermée.
| : M. Thouret fait leélure du paragraphe.
; - '
K M. Prieur. Je demande qu’on y joigne l’amer.-
■ dement de M. Larochefoucault, qui confifte a
■ dire que le droit de s’expliquer fur tous les aéles
■ émanés des pouvoirs publics appartient à tous
Ries citoyens.
I M. Thouret. Vous avez afluré cette liberté
■ dans le premier titre de votre aéîe conjlitutionnel.
B Hier encore, vous avez dit que nul homme ne
B pouvoir être recherché pour raifon des écrits qu’ il
B auroit fait imprimer fur quelque matière que ce
if foit. Il eft queftion ici d’exprimer les feules ref-
■ tnélions qui peuvent réprimer les abus. Nous
■ les.avons limitées aux calomnies volontaires, &
■ tout ce qui n’eft pas cela, eft dans la liberté
■ générale déjà exprimée.
1 M.Sillery. On fait qu’ordinairement les miniftres
■ ont une: grande opinion d’eux-mêmes ; il eft pof-
■ fiblé que le public pçnfe différemment,. Je demande
■ n ce fera calomnier un miniftre, que de dire qu’il
■ eft un fot.
K M. Salles. Je propofe par amendement, de faire
I commencer le paragraphe par ces mots : la een-
■ fure la plus illimitée eft permife à tout homme $
■ mais les calomnies volontaires , & c .
B M. Thouret. :Si l’aflëmbléë n’ eft pas bleflee de
k 1 imper fe él ion réelle de cette rédaélion, elle peut
■ 1 admettre , car, au fond, c’eft l’avis du comité.
■ L afTemblée adopte l’amendement de M. Salles’
; j deuxième paragraphe de l’article premier eft
■ décrété en ces termes :
■ La cenfure fur tous les aéles des pouvoirs conftitués
eft permife 5 mais les calomnies volontaires
contrela probité des fonélionnaires publics &contre
la droiture de leurs intentions, dans l’exercice de
leurs îonétions, pourront être pourfuivies par
ceux qui en font l ’objet.
M. Thouret fait leélure du troifième paragraphe
de l’article premier.
Les calomnies ou injures contre, quelques perfonnes
^ue ce foit , relatives aux aérions de leur
vie privée, feront punies fur leur pourfuite.
Ce paragraphe eft décrété.
M. Thouret fait leélure de l’article IL
Art. IL Nul ne peut être jugé, foit par la voie
civile, foit par la voie criminelle, pour fait d’écrits
imprimés ou publiés , fans qu’il ait été reconnu
& déclaré par un juré j 10. s’il y a délit dans
l’écrit dénoncé >2°. fi la perfonne pourfuivie en
eft coupable.
M.. Thouret. Le comité a penfé qu’il devoit
retrancher le fécond paragraphe de cet article
qui fe trouve dans l’imprimé.
L ’article II eft décrété.
M. Thouret. Je pafte aux délais à fixer dans les
cas de l’abdication préfumée du roi.
Art. I. S i , un mois après l’invitation du corps
législatif, le roi n’a pas prêté lë ferment exigé, ou ft
après l’avoir p rê té , il fe rétraéle, il fera eenfé
avoir abdiqué la royauté.
Cet article eft adopté.
M. Thouret fait leélure, de l’article II.
II. Si le roi étant forti du royaume , n’y ren-
troit pas dans le délai de'deux mois, apres l’ invitation
qui en feroit faite par une proclamation
du corps législatif, il feroit eenfé avoir abdiqué
la royauté.
M. Prieur. Dans la pofîtion où le comité fuppofe.
le royaume , les mefures les plus promptes
doivent être prifes j on ne peut alors fuppofer au
roi des intentions pacifiques. Dans le délai de deux
mois , il pourra parcourir toutes les coilrs de l’Europe
, & lever une armée. Je demande qu’il foit
dit : « Si le roi étant forti du royaume , n’y rentre
pas dans le délai qui fera preferit par la légif-
lature
M ..........Je fuis d’ avis de réduire la loi à un
mois.
M. Guilleaumme. Je prie le comité de vouloir
bien nous dire à compter de quel jour courra le délai
j je penfe que ce doit être du jour de la proclamation
dans le lieu des féances du corps législatif.