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Par des hommes qui .ont un efprit 8c des intérêts ,
noo pas. oppofés, mais différens. -j
Je penfe donc que la conftitution du corps législatif
, en une feule affemblée , reduifant à la feule
condition du marc d’argènt l ’éligibilité , n’offre
point une gararitiè fuffifante des droits naturels &
civils quelle déclare acquis aux citoyens.
Trouverons nous cette garantie dans un autre
pouvoir fuprême., celui de la royauté ? Je ; ne le
penfe pas , 'car fon effence eft dénaturée par le
mode de délégation 3 8c par la définition dans la-
quell'éiVOus Pavez retranché; ’
Le roi eft le chef du pouvoir exécutif, fans
l ’ëxercer parTui-même; Jé rie m’élève point contre
cette difpofîtion, la. liberté.ne peut être maintenue
fans la refponfabilité des agens ., la royauté
n’exifte plus fi le prince ell refponfable 5 ainfi le
terme moyen étoit indifpenfable.
Mais la royauté n’exifte pas davantage en la ré-
duifantà la feule direction du pouvoir exécutif dépendant,
par fa. refponfabilité, du pouvoir légiflatif.
L a royauté, dans un état lib re ,. ne pouvant être
jitile que comme contre-poids d’un autre p ouvoir,.
doit en, avoir un propre , indépendant, tel qu’il
fo it , fuffifantpour mettre obftacle, non-feulement
.aux erreurs, mais aux entreprifes^ aux ufurpations
du corps légiflatiF. Ce lu i-ci ayant continuellement
dans fa main, par la refponfabilité , -les moyens
de force, que petit employer le monarque, il eft-
indifpenfable , pour confer.ver l’équilibre des pouvo
irs , que le monarque ai t une puifïancé; morale ,
une volonté fouveraine qui réfifte. en certains cas
au corps légiflatif, 8c qu il foit ainfi partie intégrante
de la fouveraineté ; premier motif pour lui
en imprimer le caraélère , car celui de. chef dû.
pouvoir exécutif, convient également à un doge,
a un ayoyer , au préfident des états-unis..
Quel eft donc, l’attribut effentiel de la royauté ?
le feul qui la diftinguê de's hautes magiftratures ,
c’eft cette indépendance de pouvoir .inhérente à
la perfonne du monarque, par laquelle, non-feulement
il fanétionne ou rejette les aétes du corps
légiflatif, mais il ajourne ou diflout une affëmbléf
dont les entreprifes violentes tendroient à la fub-
. verfion des principes conftitutifs. .
Le roi étant dépouillé de cette-autorité-, quelle;
eft celle que vous lui avez-laiffée pour défendre :fa -
prérogative & fon indépéndance ? I l eft facile de ;
vous démontrer qu’il ne lui enréfte aucune.
L e veto fufpenfîf eft une arme dofit il rie : petit
ufer fréquemment, fur-tout pour maintenir une
autorité contre laquelle toutes, lè s autres font habituellement
dirigées par leur nature &r par l’appui ::j
del’opinion populaire dont elles-émanent.-. j
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Cependant le corps légiflatif réun•i en un feu||
faifcéau contre le trône, tenant aux corps adminifl
tratifs par la furveillance & les aecufations, èftl
non-feulement le centre effeètif de tous les pou J
voirs , mais péut s’emparer, quand il lui plait, del
tous les aétes de l’adminiftration publique , par lest
évocations & l’extenfîon illimitée qu’il peut don.l
n e rà la refponfabilité , fans que le roi y mettel
obftacle.;,' -
Il eft donc dans urie dépendance effective 8c continue
de cette affemblée, qui s’eft donné d’ailleursI
conftitutionnellement une portion confidérable du |
pouvoir exécutif, telle que l’organifation détailléeI
de l’armée, celle de tous les offices & emplois,I
la diftribution des honneur? 8c des récompenfes,!
la difpofîtion des forces militaires dans la réfîdence
du r o i, lorfque c’eft aufli celle de l’affemblée.
Comment trouver, dans cette diftribution, lel
balancement 8c- l’équilibre des pouvoirs dont vous !
avez e ù f intention ? .& fi vous vous rappeliez quel
pour avoir donné un corps à deux abflraétions ,1
la fouveraineté du peuple & la volonté générale, I
vous leur avez fubordonné, dans l ’opinion, les-l
pouvoirs fuprêmes, vous trouverez toutes les for-1
: ces phyliques & morales réunies contre le trône,!
qui doit etre indépendant pour protéger efficace-!
ment vos droits, oc tous les pouvoirs expirans, en!
certains cas , devant ceux qui doivent obéir.
La compofition & les fonctions des corps admi-M
niftrtifs ajoutent à cette démonftration.
La divifîon du royaume en départemens , eft, H
fans doute, une bonne opérations la répartition,■
la perception de l’impôt par les délégués du peu- J. |
pie, l’examen , la révifion de toutes les dépenfes H
qui's’exécutent dans chaque département, font H
encore dans les principes d’un bon régime 5 mais'H
la partie aélive de fadminiftation-j celle qui exige j-".
une refponfabilité. continue peut-elle être avec fu-|
reté exercée colleâivement par les mêmes délé- H
, gués ? n’appartient-elle pas toute entière au pou-H
voir exécutif.
L e roi a la furveillance de' cette adminiftration
peut en annuler les aêtes, 8c fufpendre les agens > H
mais comment feroit-il averti des négligences, H
; des prévarications ? Ces corps étrangers à la cou-M
ronne, aù aucun de fes agens ne peut la repré- H
fenter, fout néceffairement les rivaux de l’autorité H
i royale , 8ctendront toujours, de concert avec le
peuple & le corps légiflatif, a l’énerver.
E n , tranfportant aux eonfeils 8c aux direéloires | • ;
de département une autorité 8c dés fonctions dont H
ils ne devroient avoir que le contrôle, vous vo u s®
êtes privés de la meilleure forme d’adminiftrationqui H
peut exifter,, celle qui place la furveillance à côte H
de l’aètion , 8c l’infpeaion des dépenfes à la fuite |
de leur exécution 5 c’eft ainfi que vous pouviez ■
I affinez ■
■ flurer la meilleure 8c la plus exaête comptabilité j 9 .arl’inftitutiondes chambres des comptes , fi im- 1 portante dans fon o b je t , fi bien combinée dans fon
■ organifation primitive, pouvoit être encore plus
lutileméni remplacéeparles départemens.
i La charte , en n’affigna-nt aucune fonélion pré-
«eife aux municipalités , femble reconnaître le aan-
Sger de cette pumance royaie dont elles fontaujour-
Sd’hui invefties , 8c de leur infufîifance pour l’exe.r-
Bcer > mais fila conftitution ne guérit pas ces deux
■ plaies , qui pourra les guérir ?
H Enfin, meflieurs, fi à la fuite de tant d’entraves
ïmifes aupouvoir exécutif & à fa direction centra]^^ .
|fi après les mefures extraordinaires , récemment
■ adoptées , 8c contre lefquelles je ne ceffe de ré-
Bclamer, je confidère les cas de déchéance du trône
Jque vous avez décrétés , 8c' qu’aucun légiflateur
lavant .vous n’avoit ainfi multipliée & déterminée ,
lie trouve que la royauté , dépouillée dans l’opi-
Inion 8c en réalité de tout ce qu’elle avoit d’impo-
■ fant, n’a plus les moyens d’acquiter ce que yous
lui demandez. ,
Je ne dis rien du nouvel ordre judiciaire, le
fclence de la charte femble un aveu tacite de fes
ænconvéniens.
I Mais l’organifation 8c l’emploi de la force pub
liq u e préfente de bien graves confédérations.
■ Voilà donc la nation toute entière conftituée en
armée permanente j quel a pu être l’objet de cette
Ȏtrange & dangereufe innovation, qui rappelle
■ parmi nous les moeurs des germains , lorfque .tant
P ’autres habitudes 8c d’infticutions les repouffent?
■ Il étoit, fans doute, utile d’avoir une milice
«ion foldee proportionnée à l’armée de ligne j
fmais tous les citoyens aétifs convertis en gardes
Imtionaîes, l’ufage habituel des armes féparé d’une
Idifcipline févère, les fonctions, les travaux mi-
|iitaires fe mêlant à tous les aètes, à toutes les pro-
■ feffions civiles j jé vois dans ces nouvelles difpofi-
Jtions plus d’inquiétudes que de fureté , plus de
■ mouvcmens que d’harmonie-s 8c une perte im-
■ nenfe -de temps 8c de travail qui font la feule
■ propriété du pauvre.
■ ' Quant à l’aélion 8^ à la dire&ion de la force
publique pour l’ordrè intérieur , la condition
M être requis par les officiers municipaux , eft une
Jfage mefüie j mais la tranquillité publique ne
poit cependant pas dépendre de la complicité de
ou des officiers du peuple I
P f .le pouvoir exécutif , fous fa refponfabilité ,
■ doit être autorifé, comme en Angleterre , à l ’em-
î>l°i de la force lorfqu’elle, eft néceffaire. ,
Si des principaux points de la conftitution je
JpalTois aux détails 8c au claffement- des objets,
jadopterois une autre méthode & plus de cott-
Ajfenzblû Nationale, Tom. IL î)ébats.
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cifion j car il eft des détails qui me paroiffent
inutiles.
Je termine ici mes obfervations, 8c je ne me
flatte pas de faire adopter les amendemens qui en
réfultent j mais je ne faurois accorder mon fuifrags
à une conftitution contraire aux principes que je
viens d’expo fer. J ’y foumettrai ma conduite eu me
rangeant déformais en filer.ee dans la clafie de ceux
qui obéiftetit. Je me borne à demander , fi l’affi tablée
ne juge pas à propos de délibérer fur mesob-
fervations, qu’on accélère les mefures qui doivent
affûter la plus parfaite liberté du r o i, 8c que
la délibération fur ;a charte conftitutionneile fie
termine par un appel nominal.
Envoi a M. Chapelier, qui m a interrompu.
Vous n’avez pas voulu m’entendre, moniteur,
vous aurez la peine de me lire , & vous me feriez
grand plaifir de me répondre.
Je vous ai laiffé. travailler fan? interruption pendant
deux ans 8c demi, à un ouvrage que vous
appeliez fuperbe ; il eût été jufte de m’accorder
une demi - heure pour en dire mon avis. — Je
vous prouverois bien, par vos propres axiomes ,
que le refus eft déloyal & inconitiiutionnei; mais
jaime autant que nous reliions chargés vis-à-vis de
nos contemporains & de Ja poftérité, vous de la.
refponfabilité de votre admiration , moi de celle
de mes cenfures.
M a l o u e t .
Séance du 9 août. M. Thouret. L ’affemblée va
continuer à s’occuper du titre premier. Le s d if ficultés
qui fe font élevées hier ont été appla-
nies au comité, où fe font rendus MM. Buzot
& Péthion. 11 a.été queftion de bien fixer l’objet
de ce titre, en tête duquel nous avons place la
déclaration des droits'. En la rédigeant, vous
vous êtes occupés de rechercher quels étoient,
antérieurement à la conftitution politique , les
«droits individuels de l’homme. Vous les avez reconnus
8c confacrés d’une manière générale qui
s’applique également à tous les hommes, & qui
doit fervir de règle à tous les gouvernemens j
..enfuite faifant la conftitution françoife, il a fallu
mettre ces droits fous la garantie de cette^conf-
titution. Le titre qui eft fournis à votre difcufïion,
coi ;ti. nr cette garantie. On a demandé quels éteie nt
ces moyens ? C ’eft d’abord la conftitution. Elle
donne L-s moyens qu’elle a pour elle-même. Il
n’eft pas néceffaire de les rapporter dans ce titre
primitif, il fuffit qu’on E s rencontre dans les
aétes du gouvernement auxquels ils corn fpen-
dent. (’)uant à la liberté de la preffe , nous avons
tous ''té d'accord, 8c furies principes qui doivent
h. prot g-;r, 8c fur la nécefïité d’établir une ré-
preifion c antre les délits 8? les crimes qui pour-
rojent réfulter de fes'abus. Pour rafturtr contre
N '