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années ils comptent trente-fept campagnes 8c trente-
fept vi&oires. Les Allemands ne nous offrent pas
de moins brillans fouvenirs : c’eft la conduite d’une
brigade allemande qui a décidé le gain de la bataille
de Law feldt, &c. Les Suiffes ont conftamment
obtenu notre eftime. Ils n’ont jamais mérité des
reproches ; ils n’ont jamais cherché des éloges :
à Gottingues une pluie les empêche de fe fervir
de leurs armes , ils jettent des pierres. Toujours
ils étoient les premiers au combat, & les derniers
fur le champ de b a ta ille ... 11 exifte un monument
célèbre de leur valeur. A Morat , fur un amas
d’offemens, font écrits ces mots : « les Bourguignons
ont voulu conquérir un peuple libre ; voilà
ce qu’ils ont laiffé ». En rappellant tous ces faits
honorables , nous nous juftinons d’avoir penfé que
vous croirez utile d’admettre les troupes étrangères
dans la proportiôn d’un à huit & demi, & en temps
de guerre , dans telle proportion que le corps lé -
gifla tif détermineroit. Dans le-«nouveau fyftême ,
il nous a femblé qu’il feroit avantageux, pour apurer
les progrès de l’art de la défenfe, de réunir le
génie à l’artillerie. La réunion de ces deux corps
offrirent une économie confidérable.. . La dépenfe
de l’armée, telle que le comité l’a conçue, s’éle-
veroit à trente-deux millions deux cens quarante-
fix mille livre s, & fuffiroit pour faire aux foldats
un fort heureux , pour donner des augmentations
d’appointement à tous les grades , & pour affùrer,
à.la fin de leur carrière, un afyle où les foldats
n’auroient rien à reprocher à la patrie , au fervice
de laquelle ils fe feraient confacrés'.. . . ( Ce rapport
reçoit beaucoup d’applaudiffemens ).
M. Noailles le termine parla leâure d’un projet
de décret conçu en ces termes :
L ’affemblée nationale, d’après le rapport de fon
comité militaire ,. fur le nombre d’hommes dont
l'armée doit être compofée , fur la folde & les ap-
pointemens de chaque grade , a décrété & décrète
ce qui fuit :
A rt. I er. JJarmée fera compofée de 204,619
foldats ou officiers, dont 150,953 en activité , &
50,000 foldats fédentaires dans les départemens.
La proportion des troupes étrangères au refte
de Y armée, en temps de paix, ne pourra être de plus
d’un à huit trois cinquièmes , en comprenant les
Suiffes.
II . La proportion ; de l’infanterie , à la forcé
de Y armée , fera comme trois & un tiers eft à quatre.
L a cavalerie, comme un eft à cinq & ùn cinquième.
III . L'armée françoife , au pied de guerre , par
l ’augmentation que pourront recevoir les troupes
étrangères , fera de 233,730 hommes. La proportion
de l’infanterie à la force de Y armée , fera
alors comme cinq & demi eft à fept. La cavalerie
, comme un eft à cinq & un troifième. L ’artillerie
& le génie , comme un eft à feize fept
neuvièmes»
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IV. La proportion des officiers aux fo](U
dans l’infanterie fera, en temps de guerre , comme
un eft à vingt-huit un troifiemè ; dans la cavaler
ie & les dragons, comme un eft à dix-h u it ; dans
les troupes légères, comme un eft à vingt ; dans
le génie Sc l’artillerie , comme un eft à dix un
troifième.
On demande l’impreffion du rapport & du proiçt
de décret, en y joignant les articles qui ont déjà
été décrétés fur l’armée.
M. Cabales. Il faut fé hâter d’organifer Yarmk •
la fureté du royaume , la paix intérieure, le maintien
de la conftitution , les plus grands motifsnous
y follicixent. L’z/7«ce-préfence un l’pe&acle affligeant-
pour tous les bous citoyens. ( Il s’élève des murmures
; on ohferve que la demande de l’opinant
eft déjà décrétée. M,. Cazalès continue ).
M. le préfident. L’affemblée témoigne le voeu de
décréter l’impreffiôn avant de difeuter.
M. Cabales. J’ai fait, il y a déjà plufieurs jours,'
la motion, qu’on s’occupât fans délai de Yarmk &
je veux la motiver aujourd’hui. ( On ohferve de
nouveau qu’il y a un décret, & que c’eft d’aii-
leurs le voeu de toute l’affcmblée ).
L’affemblée décrète l’impreffion de l’expofé du
travail du comité militaire , fait par M. Noailles,
du projet de décret, & des articles déjà décrétés
fur Varmée.
M. Cabales. Je dois motiver la motion que j’ai
faite...
On décide de paffer à l’ordre du jour.
M. Foucault. J’avois demandé l’impreffion du
plan du miniftre de la guerre , arrêté au confcil du
roi : je ne fais pourquoi il ne nous a pas encore
été diftribué ; je renouvelle ma motion.
..Séance du jeudi 1$ juillet 179,0.
M. Noailles. Le comité militaire, pour terminer
complètement fon travail, a hefoin de l’application
d’un nouveau principe. Par le décret du 28
février, fur la marine, Vous avez décidé que le
droit de ftatuer fur le nombre d’officiers qui doivent
compofer le corps de la marine, appartient aux lé-
giflatures, & par celui du 28 juin , vous avez décrété
que la folde des différens grades de Yarméi
vous appartenoit ; je demande qu’en, expliquant
ces deux décrets, l’affemblée nationale confacre le
principe qu’au corps légiftatif appartient le droit
de fixer le nombre d’individus de chaque grade
qui compoferont Yarméc. Voici, en conséquence,
le projet de décret que je vais vous foumettre.
« L’affemblée nationale , expliquant fes décrets
du 28 février & du 28 juin , décrète qu’il appartient
au pouvoir légiftatif de fixer le nombre
d’individus de chaque grade qui doivent
compoic1'
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fompofer les troupes nationales & les troupes de
ligne ».
M. iFimpfen. Je ne connois pas le fervice de
la marine ; mais j’entends un peu le fervice de
terre. Si l’affemblée nationale décide que c’eft à
[elle à fixer le nombre d’individus de chaque grade,
elle décréterait l’organifation entière de Y armée ;
ce qu’elle a déclaré elle-même n’être point de
[fon reffort : fi elle déclare qu’il doit y avoir tant
de colonels , tant de capitaines , c’eft comme ft
elle difoit qu’il doit y avoir tant de régimens ,
tant de compagnies.
M. Noailles. Le préopinant eft dans l’erreur ; il
Vagit d’un principe, & il faut le pofer.
' M. Wimpfen. Si vous décrétez le principe , il
[faut néceffairement décréter les conféquences ;
par-là vous ne donnez qu’un état précaire aux
[militaires aujourd’hui je fuis capitaine , demain
[je ne fuis plus rien.
: M. d’Ambly. Je demande qu’on parle Tucceffive-
s ment pour, fur & contre ; on faifira par ce moyen
[la difeuffion ; cela vaudra mieux que de parler
[tous à la fois fur le même objet fans nous en-
[tendre.
M. Fréteau. Comme nous ne fommes point au
fait.de la queftion , je demande que M. le rapporteur
veuille bien répondre aux ohje&ions qui
lui ont été faites. Il y a , je fuppofe, aujourd’hui
j80 régimens, demain vous déciderez qu’il n’y en
; aura plus que 60 ; voilà donc '20 colonels fans
état, & par conféquent la totalité peut s’inquiéter
de fa fituation.
M. Noailles. Puifque je fuis interpellé, je dirai
Mue la motion que je fais n’a d’autre but que d’empêcher
que ces changemens qui ont fait la défoliation
de Y armée , ne puiffent avoir lieu déformais :
[jamais le fort de Yarméc ne fera certain, ft ce'n’eft
[pas la nation qui l’affure. Si l’intérêt public e$ige
tune réforme, la nation ne la fera, jamais fans ré-
compenfer ceux qu’elle fupprimera. Il ne faut pas
[que la fantaifie d’un minière puiffe créer ou fup-
primer un corps. Il faut que le militaire, qui em-
brafle cette carrière ait la confiance qu’il parviendra
aux grades ; que le fous-lieutenant foit fûr
[de devenir lieutenant , le capitaine colonel, &
kinfi de fuite. Il faut pour cela que vous con-
jrioifliez la proportion relative des grades ; s’il en
etoit autrement , un miniftre pourrait faire un
.tegiment où il n’y aurait que des colonels. ( Il
peleve des murmures). Ceci eft dans l’ordre des
jCnofes poffibles : nous fommes entourés d’anciens
[militaires, peut-être écartés des grades par la fa-
[Veur & l’intrigue ; voulez-vous leur foumettre ce
[plan ? j’y confens. Je réclame feulement ce prin-
pipe, « Que la nation feule a le droit de fixer la
[proportion, tant des foldats que des officiers de
Ajjtmblée Nationale. Débats. Tome II.
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Yarméc françoife. ( On applaudit dans line grande
partie de la falie & dans toutes les tribunes ).
M. de Liancourt. A entendre le préopinant,
on pourrait croire que l’affemblée ne s’eft pas
encore occupée de fouftraire les militaires de
tout grade à l’arbitraire miniftériel ; il faut donc
rappeller qu’il y a déjà quatre mois que nous avons
porté un' décret formel fur ce point. L’affemblée
a rempli avec la plus fcrupulenfe exadirnde le devoir
qu’elle s’étoit impofé de ne donner qu’au mérite
les différens grades militaires. On vous pre-
pofe aujourd’hui de décréter qu’aux légiftatures
appartient le droit de fixer le nombre d’officiers
dont fera compofée Y armée; il faut pour cela une
difeuffion longue & férieufe : ne perdons pas de
vue la divifion fi importante des pouvoirs. On dit
que l’affemblée l’a déjà décrétépour Y armée navale ;
je ne vois pas trop quel eft fon rapport avec les
troupes de ligne ; vous avez décrété que le miniftre
vous préfenteroit un plan. Il eft néceffaire
que vous le connoiftiez, & que vous l’ayez approfondi,
avant de prendre aucune délibération.
En conféquence , je‘ demande que la motion de M.
de Noailles foit ajournée.
M. Dubois de Crancé. Il eft temps que l’affem-
blée prononce fur cette matière. Le premier plan
du miniftre étoit compofé de façon qu’en réformant
26,000 hommes^ on conferveroit tous les états-
majors, & dans un moment où il eft fi néceffaire
de mainte’nir la bonne intelligence, on {imprimerait
un nombre infini de bas-officiers. Le comité
s’en eft tenu aux bafes décrétées par l’affcmblée :
on dit que ceci eft du reffort du pouvoir exécutif ;
fi cela eft , nous pouvons adopter , même far,s
le conncître, le plan du nîiniftie de la guerre. 11
en doit être tout autrement, fi l’affemblée fe rappelle
qu’elle s’eft réfervé l’organifation de Yarméc.
Vous connoîtrez le travail du miniftre, puifque
vous en avez ordonné l’impreffion ; on ne peut
plus vous le fouftraire : mais le comité militaire
demande que vous expliquiez votre décret, parce
qu’au bout de fix mois de travail , ce miniftre
vient de mander au comité, qu’il étoit chargé de
l’oganifation de Yarméc, 8c qu’il ne devoir compte
de fon travail' qu’à l’affemblée. Ce que je dis là
eft prouvé par le fait : le miniftre a mandé au
prévôt des maréchauffées que l’intention du roi
étoit de fupprimer les fous-lieutenans ; voici un
fait dont je peux dépofer les pièces fur le bureau.
Il eft de l’intérêt de la nation d’organifer Y armée
d’après les principes les plus fages j cet intérêt
eft—il le même dans le pouvoir exécutif? Je réponds
que je ne le crois pas. J’appuie donc la
motion de M. Noailles, & je demande qu’il foit
permis au comité militaire d’examiner le plan du
miniftre , ou bien il faut anéantir les précéderas
décrets.
M. Raynaud de Montlaujîer. On ne peut
rien ftatuer , avant de connoître le plan du
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