
5nS A R M
Toutefois, Meilleurs, je conçois difficilement
comment aucun de vous pourroit kéfiter à engager
fa foi à la nation, ainfi qu’elle le prefcrit à
tous les citoyens. Que faut - il donc promettre ?
l’exécution des loix faites par les repréfentans de
la nation , acceptées ou fanftionnées par fon chef
héréditaire. Certes fi une telle autorité peut être
méconnue, il n’en eft point*de légitime fur la
terre, il n’y, a plus de gouvernement, plus d’empire
, plus de fociéte. ' ' ' -
J’adreffe ceci à l’efprit jufte, capable de faifir
la vérité: mais qu’il faut plaindre l’homme qui
ne verroit dans la nouvelle conftimtion, que,des
loix auxquelles il peut refufer d’obéir , & dont
l’ame indifférente & froide n’eft point faille du
çaraélère de grandeur & de dignité qu’elle imprime
à l’efpèce humaine 1 .
Malheur fur-tout au militaire qui ne fent pas
combien les fonâioris de fon état en font anno-
blies I Sans donte il avoit l’honora’ble emploi de
. défendre le pays où il fe trouvoit exifter ; mais
auffi il contribuoit à y maintenir un ordre de chofes
. peu avantageux à une grande partie de fes çonci-
, toyens. Déformais c’eft vraiment une patrie , une
. mère commune qu’il aura à défendre , des loix à
. la coutèftion defquelles il 'aura eu part,'un gouvernement
combiné pour opérer le bonheur de
'tous , digne en un mot que celui que fa naif-
fance n’y a point attaché, l’adopte par choix &
par prédileélion.
Tels font les motiS de patriotifme qu’auront
dorénavant les militaires français ; mais quelle fa-
. tisfeéfion ne doivent pas éprouver ceux qui com*
pofent aujourd’hui l'armée, en fe voyant appellés
par d’heureufes çirconftances, à fonder dans un
grand état ; & préparer âinfi par - tout, le règne
de la liberté , de la juftice & de la raifon !
Je dois auffi, Meilleurs , vous faire remarquer
combien les loix données au militaire par l’affem-
blée nadonale, font fagement adaptées à l’efprif
de cette profeffion. Vous n’y trouvez point ces
diflinélions mortifiantes, ces aviliffantes exceptions
qui flétriffent le coeur & glacent l’émulation ; ces
abus ont difparu. Tous les honneurs de la carrière
font offerts à qui veut les mériter: avec des
vertus & des talens, un foldat peut monter au
rang de général.
Avec quel, difcernement nos légiflateurs nont-
ils pas concilié dans les règles de l’avancement,
ce qui eft dû à la longueur & la confiance des
fervices, avec ce que le bien public exige qu’on
accorde au talent, qui peut rendre des momens
donnés par certains hommes au fervice de l’état,
plus utiles que la vie entière d’un grand nombre
d’autres ! Car , Meffieurs , je dois vous le déclarer
an nom du ro i, vous n’avez plus à craindre que
dans les choix qui lui feront attribués, une aveugle
faveur ou des avantages de naiffançe , évanouis
devant la raifon, aient déformais pue influence
dopt vous vous plaindriez avec juffïcc, Le roi fent
A R M
trop combien eft beau le privilège qu’il a de û
compenfer 4e mérite, de diftinguer les h om m !
que la nature a voulu diftinguer elle-même
faire ainfi fervir à l’utilité publique les qualité
dont il'—lui a plu de les orner.
Vous reconnoîtrez encore avec gratitude, Mef.f
fieurs , ce que l’affemblée nationale a fait n0J
améliorer votre fituation.
Forcée par les befoins urgens de l’état de comj
mander-«' des claffes nombreufes , d es facrificesj
pénibles, il femble qu’elle fe foulàgeoit de tant
de rigueurs, en ordonnant de -votre fort ; la paie
des foldats, les appojntemens des officiers ont été
augmentés , des retraites honorables ont été
affinées à. tous. Mais je ne m’étendrai p as fur ce
fujet ; je ferois fâché, je vous l’avoue, de vous!
trouver trop fenfibles aux avantages que je viens
de mettre fous vos yeuxi La prorefïion des armes*
n’eft celle de l’homme fort , que parce qu’elle
exige, non-feulement le facrifice de la vie, maisj
encore parce qu’elle condamne à de lo n gs tra*j
vaux , à des privations de toute efpçce. E h ! fans!
cela , qui ne voudroit donc infcrire fon nom parmi]
les défenfeurs de la patrie, & jouir, d e la confi-J
dération que l’opinion publique attache par-tou t!
à ce titre ?
Au refte , il eft. encore d’autres vertus nécef-j
faires au militaire, & fans lefquelles pp n’en!
mérite point le nom,
L’expérience de tous les pays & de tous les
temps a prouvé que la difcipline & la fubordina-i
tion peuvent feules rendre les armées capables d’agir]
& de remplir le véritable objet de leur deftina-f
tion. Des troupes indifciplinées font au - dehors!
l’objet du mépris de l’ennemi, au-dedans elles font
l’effroi du citoyen; leur valeur, leur audace, dirigées
par le vrai patriotifme, fonç la fu reté, la
gloire des empires; égarées par la licence, elles
en çaufeiit bientôt la défolation & la ruine.
Affurémerit , Meffieurs , votre choix ne feu
pas dputeux , vous ne fouffrirez pas que l’époque
de la liberté de la France foit celle du déclin de
fes armes ; vous voudrez au contraire qu ’on les
voie briller déformais d’un nouvel éclat; vous
voudrez continuer d’être craints de nos ennemis,
& chéris de vos concitoyens. Mais permettez-moi
une obfervation importante. La France a des voi-j
fins jaloux depuis long - temps de fa prpfpérité:
ces puiffances rivales ont des troupes belliqueufes,
bien difciplinées, parfaitement inftruites dans toutes!
les parties de l’art militaire. Songez que pour les
combattre, il faut nous donner lés m êm e s avau*
tages : c’eft à tort que l’on .croiroit que la valeur j
peut îu p p lé e r à tout ; l’hiftoire d é p o fe contre ce
fyftême ; & fans confulter fes foftes, fuivonsles
éyénemens de la p r é f e n te guerre entre les RuljeSj
& les Turcs: n’y ,voit-on pas la fcience niiliratrej
des premiers t r io m p h e r conftamment d e lavaleun
des- aptres , à qui cette même valeur femble m
A R M
^rvir qu’à les précipiter comme des viéHmes fans
jdéfenfe foiK le glaive de leurs ennemis ?
f Or Meffieurs, vous n’ignorez pas que les évé-
Lemens qui ont eu lieu depuis deux ans, ont
[fiilpendii dans Vannée les exercices, les inftruc-
tions de tout genre ; hâtons-nous donc de les reprendre
, hâtOHS-nous de nous remettre au niveau
de nos belliqueux voifins : l’a&ivité & l’intelligence
Wont la namre a doué les François, vous feront
Ecquérir en peu de temps ce qu’un travail long
[&pénible apprend lentement aux peuples qui nous
Environnent*
A R M
peliez-vous qu il a débuté fur 4a graflde fcène du
monde par mériter dans un autre hémifphère le
nom de rejlaurateur des droits des hommes, & que
bientôt apres, il 1 a obtenu parmi nous ; eût - il
acquis ce titre glorieux, fi fon coeur n’eût aimé
vraiment la liberté? Soyez donc bien fûrs qu’il
n’exigera rien de vous qui ne foit conforme à la
loi ; mais attendez-vous auffi qu’il déploiera toute
l’énergie du pouvoir qui lui eft confié, pour af-
furer l’exécution de ce qu’elle prefcrit véitable-
ment : auffi l’exigent le bien public, le maintien
de cette même liberté, votre gloire, & celle de
la nation entière.
Quant à moi, Meffieurs , fi j’ai l’honneur d’être;
près de Varmée , l’interprète des volontés de Ton
chef fuprême , c’eft que j’ai cru être fûr que-les
ordres que j’aurois à en recevoir & à vous transmettre
, ne feroient, dans aucun cas, en oppofi-
tion avec* mon attachement aux vrais principes
de la conftitution. C ’eft vous dire, & i’ofe en
prendre l’engagement folemnel devant la nation ,
que je ne contribuerai jamais à l’exécution de rien
qui puiffe leur porter atteinte. ( On applaudit
dans toutes les parties de la falle. )
ARMEMENT, voye^ A ngleterre , Brest i
Marine.
ARMES. Le tranfport des armes hors du
royaume a été plufieurs fois défendu par l’âffem-
blée ; cependant on, s’y eft fouvent plaint du
manque d’exécution de fes ordres à cet égard.
Séance du 4 juin ijpo.
M. de Sillery. Malgré les ordres qui prohibent-
la fortie des armes hors du royaume , plufieurs
plaintes font parvenues à votre comité des re-^
cherches. La municipalité de Nantes vient de faire
arrêter cent fufils deftinés pour Genève. Le comité
a cru devoir vous propofer d’autorifer la municipalité
à renvoyer les armes au dire&eur de
la manufoéhire d’ou elles fortent. Au moment où
les gardes nationales ne font point années , où
elles éprouvent beaucoup de difficultés à s’armer ,
il eft ridicule de permettre que les armes fortent
du royaume.
M. le Couteulx de Canttleu. Le moyen d'affiirer
la tranquillité, c’eft de conferver au peuple fon
travail. La fabrication des armes peut être une
branche d’induftrie utile au royaume. Je penfe
donc que loin d’en empêcher la fortie , il fau-
droit empêcher au contraire l’entrée dés armes
étrangères dans le royaume.
M. de Sillery, Encore faut-il les déclarer avant
que de les foire parvenir aux frontières, & que
les majxufo&ures ne les faffent pas paffer en contrebande.