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près ces motifs que nous adoptons vos décrets &
.vos loix , fans prétendre porter atteinte à la puif-
fance légitime de notre bienfaifant monarque. Nous
ne ferons jamais effrayés du voifmage d’un peuple
jaloux de fes principes: quelles craintes pourrions-
nous concevoir d’une nation puiffante , q u i, par
un fublime décret, a enlevé notre admiration ,
vient de renoncer à tout projet de conquêtes !
Nous comptons fur la fuite de votre proteétion;
nous vous fupplions de détruire les entraves qui
gênent nos liaifons. C ’eft un bienfait digne de
votre générofité ;*daignez-nous le garantir par un
traité.
A f .... Quand cette affemblée aura été légitimée
par le confentement du pape, .nous pourrons
nous occuper de fa demande.
Af. d'André. Les habitans du Comtatfont maîtres
de reconnoître pour fouverain qui ils voudront.
Je demande que leur adreffe foit envoyée au r o i,
comme celle dAvignon.
Af. Goupil. Je demande le renvoi de l’adreffe
au comité de conflitution.
Af. Bouche. J ’appuie le renvoi aux comités de
conflitution & des domaines, & je demande que
ces deux comités foient autorifes a s informer du
miniftre des affaires étrangères , s’il n’exifte point
un accord entre la cour de Rome & celle de
France.
Af. Frèteau. J’appuie cette propofition d’autant
plus volontiers, que lorfque je me fui^etiré à S.
£ lo u d , pouf porter au roi l ’adreffe <r?ÊjAgnon, la
première queflion que m’ont fait les mnfiftres, a
été de s’informer s’il y avoit quelque chofe de relatif
au comtat Venaifîin.
Af. Dufraiffe. I l eft important que MM. Bouche
& le Camus dépofent les lettres qu’ils ont annoncé
avoir reçues de ce pays, afin que raffcm-
blée nationale & le roi examinent cette corref-
pondance.
L ’affemblée décrète que l’adreffe fera préfentée
au roi , & remife aux comités des domaines &
de conflitution , qui feront autorifés à prendre
tous les éclairciffemens qu’ils jugeront nécef-
faires.
Séance du 26 juin 1790.
Après la leélure de quelques adreffes , M. le
préfident annonce que la députation. d'Avignon
demande à être introduite. Il communique 'la ré-
ponfe qu’il a préparée, & engage l’affemblée à décider
fi cette députation fera admife dans l’intérieur
de la falle ou à la barre.
L a réponfe de M. le préfident eft agréée.
M. Bouche infifte fur l’admiflion de la députation
dans l’intérieur de la falle, — L ’affemblée dé-
fide qu’ils y feront admis.
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Ils le font; & l’un d’eux prononce le difcoufs
dont voici la fubftance :
Députés par un peuple libre, indépendant 8c
fouverain , ce-n’eft pas en vain que nous venons
jurer une fidélité inviolable à la nation françoife....
Nous ne vous rappellerons pas ici en détail toutes
les opérations glorieufes qui ont affuré l’immortalité
de vos travaux : affez d’orateurs vous ont
déjà préfenté le tableau de la profpérité de la nation
françoife. Nous ne vous offrirons point des
conjectures vagues , c’eft par des faits que nous
parlons ; & fi ce langage n’eft pas le plus pompeux
, il eft au moins le plus fincère.. . . En fe
réunifiant à la nation françoife , le peuple d’A vignon
a fans doute prouvé fon admiration pour
elle. O u i, nous ofons le prédire , & peut-être le
temps n’en eft pas éloigné , le peuple françois donnera
des loix à l’univers entier, & toutes les nations
viendront fe réunir à lui, pour ne plus faire
de tous les hommes que des amis & des frères.
Le peuple avignonois a voulu être le premier.
Place au milieu de la France, ayant les mêmes
moeurs, le même langage , nous avons voulu avoir
les mêmes loix. . . . I l eft temps, avons-nous d it,
que nous cédions Me porter la peine du crime que
nous n’avons pas commis.. . . A peine avez-vous
déclaré que tous les hommes font libres , que nous
avons voulu l’être. Nos municipalités fe.fontor-
ganifées d’après les loix établies par vos décrets ,
& nous étions déjà conftitués , lorfque des brefs
incendiaires & tyranniques , lancés par le Vatican,
font venus frapper d’anathême la conflitution françoife.
. . . ( L ’orateur fait le tableau des difpofitions
préparées fourdement à Avignon , pour tenter une
contre-révolution en France ).
Des hommes armés parurent tout-à - coup au
milieu de la ville : bientôt preffés de toutes parts,
ils abandonnèrent le champ de bataille. Le fan g
pur des citoyens patriotes fut confondu avec celui
des affaflins qu’on avoit | fufcités contre, nous. —
Nos alliés volèrent enfin à notre fecours, & s’ils
n’ont pu nous garantir entièrement des coups qui
nous étoient portés, ils font du moins parvenus
à empêcher la punition prématurée de quelques
coupables, Sc à nous rendre la paix. Le lendemain
de ces feènes de fang & de carnage, les
citoyens aéfifs de tous les diftriéts de la vi\\e d’A vignon
, s’aftemblèrent légalement. C ’eft dans cette
affemblée que le peuple confidérant qu’il ne pouvoir
être heureux & libre que par lji conflitution
françoife , déclara qu’il fe réuniffoit à la France,
qu’il fupprimoit les armes du pape , qu’il y fubf-
tituoit celles du roi de France, & qu’il députoit
vers lui pour lui témoigner le refpeél & la fidélité
que lui vouoient les avignonois. Vous con-
noiffez nos droits , les délibérations de tout le
peuple avignonois. Vous connoiffez nos motifs :
notre roi veut être defpote, & nous ne voulons
plus être efclaves. La France eft libre ; nous ne
pouvons le devenir que paf elle, & nous nous
. jettons
à v 1
jettons dans fes bras. (D e s appîàiidiffemens réitérés
interrompent l’orateur ). Vous accepterez
fans doute un peuple qui vous appartenoit autrefois,
un peuple enfin qui a verfé fon fahg pour
le maintien de vos décrets. — Nous remettons fur
le bureau les délibérations de la ville & de l’état
dAvignon.
M. le préfident. L ’affemblée nationale prendra en
très-grande confidération l’objet de votre million.
I l eft glorieux pour elle d’avoir infpiré aux citoyens
d Avignon le voeu que vous venez d’expri-
mer. Quel que foit le réfultat de la délibération,
la nation françoife fera toujours flattée de votre
affedion & de votre confiance.
Séance du 10 juillet 1790. ; '
Un de Meffieurs les fecrétaires lit une adreffe
des citoyens avignonois , détenus à Orange. —
Nous fommes obligés de recourir à l’affemblée
nationale, pour obtenir la liberté que nous n’avons
pas mérité de perdre , lors des événemens
4u 10 juin. Nous avons été précipités dans des
cachots où nous attendions à chaque inftant, la
mort. Le maire d’Orange crut apporter à Avignon
dé» fecours & des confolations ; il propofa d’emmener
les prifonniers, & nous trouvâmes, notre
falut dans cette tranflation. C ’eft , pour l’aflem-
blee nationale , un devoir facré d’ordonner notre
élargiffement. Nous ne fommes pas fur le territoire
de nôtre véritable fouverain ; & nous réclamons
la protection de l ’affemblée nationale.
Déjà deux étrangers ont été mis en liberté , parce
qu’ils avoient été condamnés par les loix du
royaume ; les prifonniers détenus à Orange, fujets
du fouverain pontife , font aufti étrangers ; ils appuient
leurs demandes fur la déclaration des droits
de l’homme : ils font hommes, ils ont droit de l’invoquer
devant vous. Vous avez dit : « Nul homme
» ne peut, être a'ccufé, arrêté, ni détenu que dans
« les cas déterminés par la lo i, & félon ies formes
» qu’elle a prefcrites». SignéBoYEK, procureur des
prifonniers.
On demande le renvoi au comité des rapports.
Af. Malouet. Je fais la motion , & je ne la
motive pas, parce qu’elle eft dans les principes de
l’affemblée nationale & de la conflitution françoife
, d’ordonner fur le champ Pélargiffement des
détenus à Orange,
On demande de nouveau le renvoi au comité
des rapports.
M'. Crillon le jeune. Les princes de l ’aftemblée
ne laiffent en effet aucun doute fur la motion du
préopinant ; ainft , on ne fauroit trop lui faire
droit : je demande que le rapport de l’adreffe
qu’on a lue foit fait demain à deux heures,
AJftmbléc Nationale. Tome II. Débets,
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Af. Vabbé Maury. S’il y avoit un corps de délit,
un procès-verbal, une inftruétion juridique, je vo-;
terois moi-même^pour le renvoi au comité des rapports
; mais il n’y a rien de tout celai Immédiatement
après les troubles d Avignon , M. Defmares ,
maire d’Orange , digne de remplir les fondions
municipales que vous avez-environnées de tant de
gloire, digne de l’approbation de l’affemblée, déclara
qu’il prenoit les prifonniers fous fa protection
; non pour leur donner une nouvelle prifon,
mais, pour offrir un afyle. Vingt-quatre citoyens ,
un octogénaire & deux fsptuagénaires font depuis
un mois détenus à Orange ; aucune voix ne s’eft
élevée contre eux. Ils réclament la jùfticc de l’affemblée
, qui ne voudra pas reconnoître de cou.- ,
pables, quand il n’y a pas de délit ; qui ne voudra
pas, aux yeux de l’Europe,être la geôlière
des étrangers. Je réclame avec eux , en ce moment
, votre juftice. Je vous remercie au nom de
mes concitoyens, de la proteélion que vous léun
avez accordée : je vous remercie, vous dont l’humanité
a , à votre infu , fauvé la vie à vingt-
quatre citoyens. Je réclame pour eux l’humanité
qui, dans des légiflateurs, ne doit être que la juftice.
.( Le côté droit applaudit -).
M. Rober[pierre. 'Vous ne pouvez juger fans con-
nolffance de caufe. Il eft arrivé au comité des
rapports des pièces importantes, qui vous prouveront
que la liberté des prifonniers détenus à
Orange tient à d’importantes queftions. Vous vous
doutez que des a étions & des principes contraires
au voeu & à l’intérêt dans Avignonois & de la liberté
ont occa donné cet emprisonnement. Si vous
adoptiez la propofition faite par M. Malouet &
appuyée par M. l’abbé Maury, vous prononceriez
contre le. peuple d’Avignon. . . . ( M. Cazalès
interrompt & demande la parole ). Le feul point
à décider eft de favoir fi l’affemblée nationale
veut prendre une connoiflance exaéte de l’affaire
avant de la juger. ( L ’opinant eft interrompu par
le côté droit, d’où partent ces mots : « elle ne le
veut pas » ) . D ’après les efforts que l’on fait pour
que cette affaire ne foit pus exaélement connue ,
il eft évident que c’eft ici la caufe de l’ariftocratié
contre les peuples & contre la liberté ; j’en at*
telle ceux qui murmurent & m’interrompent.
On demande le renvoi & l’ajournement.
M. de Cabales. L ’affembîée nationale eft-clle le
juge des citoyens d Avignon ?
M. Malouet. Si l!affcmb!ée ne veut pas rétablir
elle-même les lettres de cachet , il n’y a nul
doute fur la queftion de favoir fi la liberté fera
rendue à des citoyens étrangers, détenus, fans ac-
eufetion.
M . Virieu. Les ennemis de la liberté individuelle
p euvent fente demander l’ajournement.
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