
bandes dans le haut Comtat, & ancien deferteur j
françois, fut bientôt en infurreftion. On arrache
onze de ees malheureux du château ou on les
avoit dépofés, & fous les yeux du détachement
françois ; femblables aux cannibales , ces bandes
les traînent hors des murs. On leur donne un
confeffeur, & là on les affaffine à coups de fufil.
Cet atroce Clément forçoit les pères & mères
de ces malheureufes vi&imes à ailifter à cet affreux
fupplice. ( L ’affemblée frémit d’indignation
).
Dès que la nouvelle nous parvint, nous convînmes
d’en arrêter les fuites. Mais à l’inftant
même, il fallut fe multiplier; le complot paroif-
foit formé d’affaffiner tous les détachemens de
l’armée avignonoife, à leur rentrée paifible dans
leurs foyers : c’étoit dans les communes où il y
avoit eu le plus de divifion ; l’humanité nous
donna des ailes ; nous nous trouvâmes à Tioleurre,
à l’Iile , dans quelques autres communes , à l’inf-
tant où les facrifices inhumains alloient commencer
; & à force de foins, de prières , de raifons,
de menaces , nous parvînmes à rétablir le calme.
L ’expérience prouva bien alors combien non réclamations
avoient été juftes , & combien nos
forcés étoient infuffiiantes. D ’apres rimpoffibilite
d’obtenir des troupes de ligne , & la nécefîité du
refus j nous crûmes devoir employer les moyens
que nous fournifïoit la loi du 4 juillet ; & demander
en conféquence des gardes nationales. Nous
crûmes qu’il feroit plus ailé d’obtenir quinze
ou dix - huit cents gardes nationales , qui nous
promettoient des reffources fuffifant.es pour eon-
folider cette paix que la loi nous çhargeoit
d’établir ; & que d’ailleurs mille cinq cents
gardes nationales pris dans les trois dépar-
temens 8c environs , ne pourroient pas affoiblir
leurs forces. Nous en obtînmes, non fans beaucoup
de difficultés & de nombreux refus : dès
que nous pûmes en placer dans divers points du
Comtat , de manière à prévenir les affaffinats ,
nous crûmes qu’il étoit important d’infpirer la
confiance à tous les partis, de fournir a tous les
émigrans du Comtat les moyens de rentrer dans
leurs foyers ; nous adreffâmes à cet effet aux
commandans divers , une *inftruftion dans laquelle
nous recommandions la plus grande impartialité,
proteftion 8c fûreté à tous. Nous fîmes rendre
la liberté à des prifonniers chers a tous les partis,
& notamment à M. Croix , implique dans 1 affaire
du malheureux' Lavilafle , maire de Vaifon.
L a confiance & l’ordre fe rétablirent en effet, tous
les émbrans rentrèrent, ou purent rentrer dans le
Comtat ; ce fut après ces mefures que l’affemblée
électorale engagea les communes à s’affembler,
& à émettre , conformément aux préliminaires de
. pa ix, un voeu fur leur fort politique , qui pût être
préfenté par elle , lorfqu’elle prendroit un parti
ultérieur fur fes droits, au fujet des états d1 Avignon
& du Comtat*
A cette ; époque, les membres de la médiation
furent appellés par les circonflances à des occupations
différentes ; Avignon étoit devenu le centre
des affaires, 8c l’un de nous y refia ; il falloir
qu’un autre fur veillât les opérations de l’affemblée
électorale , pour la contenir dans les bornes qui lui
étoient preferites par le traité. La demande 8c les
fôllicitations des communes qui fe plaignoient de
la préférence accordée à Avignon, firent juger qu’il
étoit important que l’un de nous fe rendît à leurs
defirs, & diffipât les calomnies que les ennemis
du bien public 8c les écrivains qui leur font vendus
ne cefferoient de répandre ; je fus chargé
de cette million, & je déclare à l’augiifte affem-
blée qui m’èntend, que fi toutes les communes
du Comtat n’ont pas alors joui de la paix la plus
parfaite, & les individus de la fûreté la plus entière
& de la liberté des fuffrages la plus abfohie ,
la plus indépendante , moi feul j’en fuis & m’en
rends refponfable. Déjà grand nombre avoient
émis leur voeu lorfque'je mè fuis préfenté chez
elles ; plufieurs l’ont émis en ma préferice ; à
Valréas , par exemple , chef lieu du parti qui tient
au pape, l’âffemblée s’eft tenue fous la prote&ion de
cent cinquante gardes nationales françois, fous nos
yeux.Sc ceux des huffards qui nous accompagnoienr.'
J ’ai fourni,: fur la réclamation de la municipalité,
une garde pour la police & la fûreté de l’af-,
femblée , 8c Paffemblée a voté pour la cour de
Rome. A Pilefne , à Sérigan , à Villedieu , il eft
arrivé la même chofe, 8c Les voeux de ces communes
ont été pour la cour de Rome ; il efi donc
ïmpoffible de révoquer en doute la liberté quia
préfidé aux voeux émis. Par-tout j’ai prêché la
p a ix , l’uniori, la concorde 8c la liberté des opinions
; par-tout je les ai rétablies, & j’en appelle
fur la vérité de ces faits, non pas aux foixante
communes qui veulent être françoifes ; j’en appelle
aux chefs de ceux qui ont voté en feias contraire.
Cette délibération d'Avignon & du Comtat a été
faite au mois de février , à une majorité de foixante-:
huit communes contre feize, mais rejettée comme
n’ayant pas été prife librement ; cette délibéra-:
tion , dis-je , s’eft faite de nouveau au mois de
juillet , fous la proteéfion 8c "la garantie de la
France’, fous l’influence de la plus imperturbable li-
berté,& elle a produit les mêmes réfultats rcinquante-
quatre communes votent la réunion à France , dix-
hnit confervent la délégation du pouvoir exécutif au
pape, & douze »occupées de leurs travaux, réfutent
de s’affembler de nouveau ; mais elles
font du nombre de celles qui , en février, avoient
voté pour la réunion à l’empire François. Il y a
donc une majorité toujours aufli prépondérante
pour cette réunion. D ’après le compte que j’ai
eu l’honneur de vous rendre, vous avez vu que
la médiation a fait ceffer toutes les hoftilités entre
les peuples d'Avignon & du Comtat ; qu’elle a rétabli
par-tout la paix; qu’elle a fait-rentrer dans
les communes du Comtat tous les émigrans que
les troubles en avoient éloignés| elle a donc rempli
le but que l’affemblée nationale s’étoit propofé
dans fon décret du 2,5 mai: conformément aux.
préliminaires, les communes fe font occupées ,
au foin de la paix & de la liberté , de leur fort
politique.
L ’affemblée électorale a recueilli ces voeux 8c
les a dépofés devant vous : la médiation a donc'
encore rempli le but de la loi du 4 juillet , dont
l ’exécution lui étoit confiée ; mais ces deux opérations
principales ne font pas celles peut - être
qui ont coûté le plus d’embarras aux commiffaires
médiateurs chargés de l’exécution de vos décrets :
jettes au milieu d’un peuple d’accord fur un feul
point, le defir de la paix & de la réunion à l’empire
François , mais divifé dans tous les autres intérêts
, dans un pays fans gouvernement , fans
ordre judiciaire , déchiré par toutes fortes de paf-
fions, de petits intérêts-, de petites rivalités, vos
commiffaires , feul objet de la confiance publique
, fe font vus accablés de toutes les efpèces
d’affaires, de toutes les efpèces de querelles, de
toutes les réclamations , 8c en même temps déchirés
, calomniés tour-à-tour par tous les partis,
dont les paffions fe trouvoient contrariées.
Les jours & les nuits Ont été occupés pendant
trois mois à éteindre ou à prévenir des haines.;
& pourquoi ne le dirions-nous pas , Meilleurs ,
puifque votre eftime & votre approbation doivent
être notre récompente ? il nous falloir du courage
& des forces plus qu’humaines. Cependant malgré
tous nos foins, ces haines toujours combattues,
mais non moins adives, en raifon même de leur
rapprochement , ont en dernier lieu produit dans
la ville d'Avignon une expiofion coupable. Mais
les rnouvemens défordonnés d’une commune n’ont
aucun effet fur les quatre-vingt communes qui com-
pofent le Comtat, & les intérêts privés qui les ont
produits n’ont rien de commun avec l’intérêt général
public. J ’étoïs dans le Comtat lors de ces mou-
vemens ; j’accourus, mais trop tard, pour me
joindre à mes collègues 8c en arrêter les fuites. Mon
collègue , témoin de ces faits privés , va vous en
rendre compte. Cependant, qu’il me foit permis
de rappeller une erreur qui a été commife dans
le fein de cette affemblée : ce n’eft point, comme
on l’a dit-, à la querelle d’unhuffard avec un Avi-
gnonois, qu’il faut attribuer ces troubles , mais
bien à l’effet des haines privées , du defir des
vengeances 8c de l’infatiable defir de les fatisfaire.
A Dieu ne plaife que je fouffre qu’on inculpe des
troupes de ligne dont la conduite a été fi honorable,
fi patriotique & fi exemplaire! Si nous avons
à nous plaindre de l’incivifme de quelques individus
, l’époque du ferment en a purgé leurs corps ;
mais les huffards du cinquième régiment , le
deuxième bataillon du régiment de Sonnemberg,
ont conftamment donné les preuves d’un courage,
d’un zèle , d’une difcipline , d’un patriotifme à
toute êpfèùvé.' ( On applaudit ). Puiffertt tous les
corps , pour le bonheur de mon pays, fe modeler
fur leur conduite ! & puiffé-je voir l’affem-
blée nationale, par une mention honorable , 8c
fur la foi de mon honneur, acquitter envers eux
la reconnoiffance publique , & donner à leurs
compagnons d’armes un puilîant motif d’encouragement.
( Les applaudiffemens recommencent ).
M. Verninac-Saint-Maur entre dans le détail
des derniers mouvemens qui ont eu lieu dans le
Comtat.
M. l’abbé Maury paroît à la tribune.
Toute la partie gauche réclame l’ordre du
j our.
M. le préfident. L ’affaire d'Avignon n’eft point
aujourd’hui à l’ordre du jour ; vous favez qu’elle
a été ajournée à lundi-: ainfi vous n’avez pas la
parole.
L ’affemblée paffe à l’ordre du jour.
M. l ’abbé Maury. Je. me porte accufateur de
Meflieurs les commiffaires fur ma tête, fur ma
refponfabilité. Je m’engage à les fuivre devant le
tribunal' d’Orléans.
La partie gauche demande que M. l’abbé Maury
defeende de la tribune.
M. l’abbé Maury continue à parler au milieu
des plus violens murmures.
M. le préfident. L ’affemblée m’autorife-1 - elle à
me fervir du pouvoir qu’elle m’a donné pour faire
defeendre M. l’abbé Maury de la tribun e ?
L ’affemblée, par une délibération expreffe, donne
cette autorifation au préfident.
M. l’abbé Maury defeend de la tribune.
Les commiffaires médiateurs font introduits dans
la falle , au milieu des plus vifs applaudiffemens
de la partie gauche 8c des tribunes.
Séance du lundi 12 feptembre 1791.
M. de Menou. Avant de faire mon rapport, j’ai
l’honneur d’obferver que l’affaire d'Avbnon a été
difeutée , il y a quelques jours, chez M. le garde
du fceau, dans un comité tfès-nombreux , com-
pofé de tous les députés des départemens voifins
d'Avignon. Hier j avois convoqué pour le foir les
comités diplomatique & d’Avignon , pour leur
. communiquer mon rapport ; il ne s’y eft rendu
perfonne. Ceft donc, le réfultat des conférences
tenues chez M. le garde du fceau que je viens
vous préfenter.
' M . l'abbé Maury. L ’ufage confiant dans cette
affemblée , eft de n’entendre jamais que des rapports
de comité : celui qu’on vous annonce n’eft
donc pas conforme à l’ufage reçu : je defire
F f f f f 2