
plaire aux républicains , qu’ils firent décréter le cé- j;
rëmonial humiliant de Y acceptation. Tout cetecha- I
faudage, comme on voit , n’étoit ni glorieux 3 ni
même sûr > cependant la reine fe trouva forcée de
participer à cette coalition 3 pour ne pas tout perdre.
Elle ofa efpérex. du temps & de l’amour des
François pour leur fouverain , une juftice que les
circonftances fa&ieufes écartoient d’elle , 8c des
brouillons dont on pouvoit la croire complice. Elle
ne l’étoit pas . . . .
T andis que la fa&ion s’occupoit ainfi des moyens
d’ anéantir la monarchie 3 en s’abufant fur un grand
caractère, quelques honnêtes gens affezconnus, 8c
parmi lefquels fe trouvoit l’ étranger dont nous venons
de parler 3 s’occupèrent de fauver la royauté ,
le royaume , 8c le roi > & il avoit été convenu en-
tr’eu x , que le roi paroïtroit à Taffemblée comme
un prince captif ; qu’il accepteroit purement &
Amplement la conftitution , afin d’éviter tout prétexte
de fédition > mais qu’en même terris qu’il
accepteroit , il feroit lire dans l’affemblée 3 des
obfervations extrêmement fortes , qui dévoient
démontrer l’abfurdité , la tyrannie 8c l’incohérence
des nouvelles loix constitutionnelles. Si l’affemblée
n’ avoit aucun égard à ces obfervations 3 8c fi elle
perfiftoit dans fon admiration pour la charte 3 il
répétoit qu’ il l’ accepteroit, en la rendantgarante de
touslesmalheurs qu’elle de voit produire ; mais, dans
tous les cas, il demandoitdeux chofes : d’abord qu’on
révoquât le décret qui ne lui permettoit pas dé
prendre des miniftres dans le fein de l’affemblee j
enfuite , qu’on lui produisît un compte de finance
certifié v ra i, fous peine de la vie par les membres
de l’affemblée & les adminiftrateurs qui le ligne-
roient. Le motif de la première derriande'étoit qu’il
importoit, pour qu’on n’accusât point le roi dans
fon adminiftration , que fes miniftres fuffentchoifis-
parmi ceux qui s’étoient montrés les partifans les
plus ardens de la liberté 5 & il auroit nommé le
lendemain Robefpierre , miniftre des affaires
étrangères 5 Prieur , miniftre de la juftice jPethicn,
de la marine & des colonies > Fmmery , de la
guerre j Salles ou Villette , de l’intérieur $ &
Montefquiou, des finances. Le motif fecret de
cette nomination étoit , après avoir démontré
l’extravagance de la conftitution par le raisonnement,
de la démontrer encore par l’impéritie de
ceux qui l’ avoient le plus défendue. Le motif dè
la fécondé , étoitdemettreau grand jour l'horrible
défordre de nos finances, 8c d’ouvrir les yeux du
peuple fur les brigands qui le féduifoient encore.
Une partie de ce plan fut difciitéele jeudi 8 fep-
tembre., chez. Montmorin > Beaumetz, Lamark 8c
quelques autres afïiftèrent à la difcuffion. On y démontra,
jufqu’ à l’ évidence, la néceflité où fe trouvoit
le ro i, de l’adopter, fi l’on vouloit garantir
la France d’uneinvafion étrangère,relever le crédit
perdu, traiter avec les princes d’une manière honorable
, 8c préparer , pour la France, une conftitution
libre & raifonnable. Perfonne n’ ofa foutenir
le contraire. Mais, dès le lendemain, on s’apperçut
que des intrigues majeures s’oppofoient à fon exécution.
L’étranger & fes amis ne perdirent point de
tems} il fut rédigé, à la hâté , un mémoire en
anglois , 8c ce mémoire fut remis directement au
r o i , qui entend fort bien la langue angloife.
Son efprit jufte en fut frappe ; 8c le plan de Pellenc
lui ayant été préfenté le même jour , il^rejetta le
dernier avec toutes les marques du dégoût qu’ il lui
infpiroit. Les miniftres influèrent ; le roi fut inébranlable.
Ceux-ci, qui virent que, s’ il étoit adopté,
tout étoit perdu pour eu x , avertirent la faftion
dominante de l’afle mblée. Ontint un dernier confeil 3
le r o i , harcelé de tous côtés, leur déclara que ,
puifqu’ ils le vouloient, ilrejetteroit les obfervations
angloife s , mais qu’ il ne vouloit pas davantage de
celles de Pellenc, 8c qu’ il vouloit agir à fa guife.
Cetteréfolutiondéconcerta encore les intrigans.
Ils tremblèrent que le roi ne tirâ t, des obfervations
qu’ on le forçoit de rejettter, quelques paragraphes
plus que fuflifans pour battre en ruines la befogne
de l’affembléè, & en manifefter la turpitude aux
yeux de. l’Europe. On fit donc jouer de nouveaux
refforts , 8c Thouret fut élevé à la préfidence. On
inventa mille moyens d’ effrayer le-roi j on fit faire
de mauvais pain > on le fit renchérir ; on fit menacer
le maire de Paris , de la fatale lanterne ; on re-
préfenta au- roi le plan de 1 affaflinat de la. famille
royale, fi l’ invafion avoit lieu y la certitude de
la banqueroute qu’on feroit retomber fur lu i, les
departemens irrités , la guerre civile , 8c tous les
malheurs prêts à fondre fur le royaume, fi. 1 acceptation
n’étoit pas entière. Cependant on n’igno-
roit pas qu’ il n’y avoit que les princes qui puffent
ramener l’ordre, & prévenir la banqueroute 5 que le
peuple en vouloit beaucoup-plus al affemblee,qu au
roi 5 8c que l’ opinion dominante en France 3 etoit
contraire à la conftitution. Le roi oppofoit-a tou t,
fa majefté, l’intérêt du peuple , fa proteftation
du n juin , fa religion qu’ on lui faifoit apoftafiçr,
fa confcience que l’ on violoit. La reine infifta ,
lui montra de plus grands malheurs dans l’ invafion
de fes frères, que dans fa.condefçendance pour
le délire du peuple. Duport-Dutertre fondit en
larmes 5 8c , pour achever d’ébranler la confiance
du r o i , on lui peignit le fupplice de fes trois
braves gardes-du-cops , 8c de fous les prifonmers
de la révolution. La fenfibilité l’emporta fur le
raifonnement. Le r o i, vaincu, promit tout ce que
l’on voulut , le dimanche au foir. Alors parut
Thouret, qui confirma toutes les craintes, exagéra
encore les aangers, & finit par propofer une lettre
rédigée par lui 8c Emmery -..elle fut adoptée. Leroi
la tranfcrivit 8c l’ adreffa le fur-lendemain a Baffe
mblée nationale. Il eut l’attention de garder 1 original
, & il fit bien , comme on le verra ci-après.
Cependant l’entrevue dePilnitz avoit eu lieu le
d’août, 8c , dès le 8 feptembre, le comité diplomatique
8c le roi avoient connaiffance de la
déclaration mutuelle de l’empereur 8c du roi de
Pruffe, ainfi que de l’appel qu’ils faifoient à toutes
les puiffances de l’Europe, pour la délivrance du
roi de France : appel motivé expreffément fur la
requifition de Monfieur8c du comte d’Artois. Cette
efpèce de.manifefte ne fervit qu’ à donner plus d'activité
aux foliieitations des chefs de parti.
Le roi vint à l’afïèmbléele lendemain de fa lettre,
légalifer la conftitution, & s’y lier par le noeud
du ferment. Un inftinêt qui trompe rarement le
peuple, lui défendit de fe liyrer à la joie conf-
titutionnelle qu’on lui ordonnoit de t moigher. Le
roi ayant renoncé aux marques de l’ordre du Saint-
E fp r it, on entendit des femmes du peuple dire
publiquement-:, ce ferment là ne vaut rien, il n’avoit
pas fon cordon bleu quand il l’a fait. En un mot,
de' toutes les fêtes que l’on donna au peuple , il
ne parut vraiment fenfible qu’à la délivrance du
r o i, & à celle de fes ferviteurs. Le refte ne fut
qu’un vain bruit, & des feux d’artifice.
Les républicains, qui feuls avec les monarçhiftes
ont été conféquens dans cette révolution , ne virent
dans cette forme à*acceptation , que la certitude de
l’ efclavage pour la nation. L’orateur du peuple eut
la hardièffe de publier , le jour même de l’acceptation
du ro i, un N°. qui portoitpour titre : le roi
la reine & la Fayette dignes du dernier fupplice.
M. Gorfas, écrivoit, le lendemain de l’illumination :
Ils ont illuminé, les badauds ! je n en ai rien
f a i t , moi, & je fais bien pourquoi. De leur côté ,
les membres royaliftes ne voulurent point affifter
â l’affemblée le jour du ferment royal. Louis XVI
s’ en apperçut $ 8c le chagrin qu’il en éprouva,
fut le prélude des chagrins plus cuifans que lui
préparoit la fécondé légiflature. Perfonne n’y fut
donc trompé , que ceux qui voulurent bien l’être.
Il courut dans ce tems-là un bruit qui ne fut
point démenti : que le jeune Sourdis , partant pour
Coblentz , eut,' le famedi ,-.une entrevue avec le
r o i, 8c que ce prince le chargea de recommander
aux princes fes frères, d’empêcher, lors de l’invafion
, les émigrans françois. de fe mêler aux
Allemands , afin qu’ils ne fe trouvaffent point dans
la neceflîté de tremper leurs mains dans le fang
de leurs compatriotes. Cette anecdote ferviroit à
• jetter un grand jour fur l’opinion du r o i , & fa
conduite dans toute cette affaire, fi les évènemens
fubféquens ne l’avoient mis à même de tout dévoiler
librement.
Ainfi fe confomma une acceptation qui tint quelque
mois toute l’ Europe en fuspens ,& pour laquelle
on continua de voir un roi probe, forcé par des
împulfions pufillanimes, de fe côalifer avec les
fcélerats qui avoient perdu fon pays ; ce fut ainfi
Eu. ./ e P^para cette longue fuite de malheurs
qui 1 àttendoit, pour n’avoir jamais donné fa confiance
à des hommes courageux 8c honnêtes, voulant
la liberté 8c le bien ; 8c avoir toujours fait
le facrifice de fa confcience 8c de fon peuple à
des frippons, 8c à des imbéciiles qui n’eurent
jamais d’autre mérite que celui de répandre des
terreurs adroites.
Rapport fa it a tajfemblée nationale y par M. de
M.ontmorin, miniftre des affaires étrangères , le
31 octobre 175)1 , imprime par ordre de l'affemblée
nationale y fur la notification de / ’A C C E P T
A T IO N aux cours étrangères.
Meftieurs , vous aVez demandé à connoître l’état
de nos relations avec les puiffances étrangères.
Sur le compte que j’en ai rendu au roi, fa majefté ,
à qui feule eft réfervée, par la conftitution, cette
partie de l’acjminiftration du royaume , m’ a ordonné
de vous en faire connoître ce qui pourroit
être néceffaire ou utile à la fuite de vos travaux.
Nos relations officielles, avec les cabinets de
l’Europe étoient prefque toutes interrompues depuis
le mois de juin dernier : il feroit fuperflu d’en
rappeler les caufes, elles font affez connues.
Je crois cependant devoir obferver ici que les
puiffances étrangères ne connoiffantquë le roi, nos
ambaffadeurs & envoyés accrédités auprès d’elles,
n’ayant de. lettres de créance que du roi, 8c ne
pouvant être écoutés que lorfqu’ils parlent en fon
nom, l ’interruption de toute communication officielle
étoit une fuite néceffaire de l’état des chofes
qui exiftoit en France à l’époque dont je parle. Je
ne prétends pas conclure de cette obfervation ,
qu’il n’exifte , de la part des puiffanc *s étrangères,
aucune indifpofition contre la France. J’en con-
cluds feulement que cette conduite qu’on a voulu
préfenter comme une infulte à la nation françoife ,
n’étoit que conféquente aux principes reçus juf-
qu’ à préfent , 8c même admis par notre nouvelle
conftitution.
Immédiatement, après avoir accepté l’aéle constitutionnel
, le roi a notifié cet événement impo r-
tant de fon règne ajoutes les puiffances > je vais ,
Meffieurs, vous faire la le&ure de la lettre de notification
de fa majefté , & de la lettre circulaire
ue fa i écrite, par fon ordre , à tous nos ambaffa-
eurs 8c miniftres auprès des puiffances étrangères.
Lettre de notification du roi aux puiffances étrangères,
dé fo n A c c e p t a t io n de latte conftitutionnd.
« L’affemblée nationale vient de me préfenter
« l’a&e conftitutionnel qu’elle a décrété 5 & je me
« fuis détermine à l’accepter, parce que je dois
oc le regarder comme le réfultat des voeux de fa
c« grande majorité de la nation. Je m’empreffe de
cc faire part de cet événement à votre majefté,
c« connoiffant l’intérêt qu’elle prend à la profpé-
<* rité de la monarchie Françoife , ainfi qu à tout
« ce qui me concerne perfonnellement. Je prie
« votre majefté d’être perfuadée que ce change