
d’une armée ennemie ,. par des acclamations tu-
irmltueufes , par des cris de défefpoir qu* on prend
pour des transports d’admiration , que doit s’exprimer
le voeu légal d’un penple, fur-tout quand
ce voeu eft évidemment contraire à Ses intérêts.
Toutes les paroiffes du Cointat qui avoifinent
Carpentras , font fous le joug d’une garnifon avi-
gnonoife. Du haut de leurs remparts, ces héros
citoyens voient leurs campagnes ravagées par
les brigands d'Avignon. Ils tentent tous les moyens
poffibîes,. pour diminuer les dangers qui les envi- !
ronnent. Eh î quelle ame généreufe ofera les
blâmer, ou fe faire un titre de leur détreffe, pour
les détacher de leur légitime Souverain ! La ville
de Carpentras eft trop malheureufe, pour que je
puiffe la croire coupable. Il eft évident qu’elle
cherche à écarter , jufqu-’au dernier, prétexte de la
guerre exécrable qui lui attire tant de défaftres 8c
tant de gloire. Une longue anarchie, des Subornations
de toute efpèce , quatre Sièges foutenus
avec honneur , l’ivreffe militaire, l’exaltation fi
naturelle après tant d’exploits, ont pu faire oublier
un in fiant, à mes braves concitoyens, leurs principes
& leurs intérêts. Mais fi vous voulez démêler
les véritablesfentimens de Carpentras 8c du Comtat,
ces fentimens profonds-que vous-retrouverez dans
tous les coeurs y dès que l’ordre & le calme feront
rétablis , voici , Meilleurs , un aéie authentique
& récent qui vous les fera connoître. Je fuis loin*
d’adopter tous les principes politiques qui en rem—
pliffent le’'préambule. Je ne prétends-même donner
aucune autorité aux a «fies çmanés de cette affem-
felée repréfentatiye-, qui a été forcée, malgré tous-
les faâieux qui la dominoient, d’exprimer le véritable
voeu général du .Comtat. Mais enfin le voici
ce voeu, dont les organes-, ne doivent- pas- vous
paroître fufpeâs..
Déclaration de l'affemblée repréfentative du Comtat-
V&naijfin, du z décembre ipp o.
L ’àflemblée repréfentative du Comtat Venaiifin,
confidérant :
Que la cefTatfon du paâe fociâl ne peut s’ef-
feftuer que par le refus confiant & réitéré d’en
remplir les conditions efTentielles, ou par la vio-
ration manifefte des droits imprefcriptibles- du
peuple ;
Qu’une nouvelle affociation politique ne fauroit
fe former quîaprès la rupture de ce paéfe publiquement
avoué , 8c, fans les préliminaires qu’exigent:
la foi. des traités & l’honneuf des nations -y
Que cette affociation ne pourroît être légale,
qu’avec un caraâère recormoiffable de permanence,,
qui éloigne tout foupçon- de projet ultérieur & de
changement prémédité ;
Qu’une pareille affociation étant un. a£fe libre
& ferme de la. volonté générale., feroit nulle , il.
elle fe trou voit déterminée par là crainte ou provoquée
par la force ;
Que l’énoncé de cette volonté générale & le
droit de l’intèrroger , appartient exclufivement aux-
véritables repréfentans du peuple ;
Que le maintien du paéte fopial repofe fous la-
fauve-garde fpéciale 6c la furveillance immédiate’
de ces repréfentans;
Qu’une fois affemblés, ils ne peuvent être révoqués
que félon les formes preferites , 8c après
l’exécution littérale ou interprétative de leur mandat
, fu.-tout quand ils ont été appellés pour raffermir
les bafes primitives , 8c les garantir des-
efforts oppofés ,.mais également fubverfifs du pouvoir
abfolu 6c de la licence ;
Que tour voeu exprimé partiellement , & à leur
infil- feroit nul 6c illégal , comme étant une*
furprife criminelle faite aux membres de l’état, 8c -
l’effet préparé de quelque tumulte 6c des clameurs-
d’une faôion aveugle ou défefpérée ;
Que folliciter ce voeu partiel 6c le légitimer,
c’eft confacrer l’anarchie, exciter la révolte, réveiller
toutes les pallions, établir une lutte mortelle de
l’intérêt générai contre les intérêts particuliers,
allumer tous les foyers de difeorde, féparer les*
membres du corps politique 6c en amener la diffo-
lution totale c’eft donner à, l’univers un funefte
exemple, qui finiroit par divifer les plus grands^
empires , les partager en une infinité de fanions-
incohérentes, anéantir les fociétés les mieux cimentées
,. 6c réduire le genre humain en hordes*
fauvages 6c ennemies ;
Déclare à l’Europe entière , que rien ne pourra
l’engager à trahir le plus- facré de fes devoirs
celui de ne démentir jamais le caractère ineffaçable
de loyauté , précieux héritage du peuple Venaiffin
qui en a donné toujours des preuves, même aux
comtes de Touîoufe, fes anciens princes , ,après en
avoir été abandonné :
Déclare donc de la manière là pins folemnelle
que ce penple eft inviolablement attaché au faint-
f iè g e 6 c qu’elle lui renouvelle en fon nom
fuivànt le mouvement de fon propre coeur , les-
proteftations d’une éternelle'fidélité, 6c charge deux,
députés d’en porter à Rome le glorieux témoignage :
Déclare encore regarder toute lciffion de fon
territoire comme un attentat au droit des gens,.
6c les auteurs ou inftigateurs de ce délit comme
criminels de lèfe-fociété, 8c rappelle au giron de
cet état , les communautés qui, par fédu&ion ou
contrainte , en ont été traîtreufement féparées ; les-
exhorte de confulter leurs véritables intérêts, d’ob-
ferver religieufement leur premier ferment, d’abjurer
tout efprit de parti., tout fëntiment de haine,
d’écouter la voix tendre de leur patrie, 8c de
fermer l’oreille aux perfides infinuations de ces
hommes faéïieux, ennemis de la félicité publique,,
qui s’alimentent du défordre , s’élèvent fur des
ruines: tyrans fous un mafque hypocrite., ils o u tragent
la vraie lib e rté q u i conûfte dans la. foi*
miffion à la volonté générale 8c le refpeâ profond
•des loix:
Protefte définitivement contre toute violence
ou infraélioq, contre toute entrée fubite ou approche
coaéfive de. troupes , en un mot contre
tout aéle, de quelque nature qu’il puiffe être, attentatoire
aux droits facrés du peuple Venaiffijp ;
mettant fa caiife au tribunal fouverain des nations,
6c dévouant fes calomniateurs à la jufte réprobation
de la poftérité.
‘Collationné par nous préfident 8c fecrétaires.
L avondez , curé, préfident ; Gautier , chanoine ;
Guimet , Petit , T rescartes , fecrétaires.
M. Lavie. Je protefte ic i, au nom de tous les
colons , qu’ils n’entendront qu’avec exécration
ce que vient de dire M. l’abbé Maury. — La dif-
euffion eft fermée.
M. de Virieux. Je demande à faire leâure d’un
projet de décret.
M. de Cabales. Je demande la- queftion préalable
fur la propofition de vos comités , en ce
qu’elle eft entièrement contraire aux décrets que
vous ayez rendus.
M. de Virieux. Si la queftion préalable paffe, je
n’ai plus rien à dire, 8c je vais mettre mon décret
dans ma poche. — L ’affemblée décide qu’il
y a lieu à délibérer, fur l’avis des comités. Une
agitation très-violente fe manifefte dans la partie
droite.^ — M. de Cazalès fait d’inutiles efforts
pour obtenir la parole.
M. de Vineux. Voici mon projet de décret.
L ’affemblée nationale ne délibérant pas, quant
à préfent, fur les troubles d'Avignon 6c du Comtat
Yenaiffin ; 6c confidérant qu’il importe d’y rap-
peller le bon ordre 6c la paix , oc que le pape
6c le peuple de ces contrées ont manifefté ce
voeu, décrète que le roi prendra des précautions
pour affurer le, retour de la paix ; de l’ordre, 8c
pour empêcher que la fermentation qui règne à A v ignon
6c dans le Comtat, ne porte le trouble dans
les départemens voiftns.
M. Dupont. Ce ne font pas des commiftaires
civils qu’il faut envoyer, mais des miniftres médiateurs.
Je propofe en conféquence un projet
de décret conçu ainfi qu’il fuit :
L'affemblée nationale décrète que fon préfident
fe,retirera par-devers le ro i, pour le prier d’envoyer
dans l’état d'Avignon 6c dans le Comtat
Yenaiffin , quatre miniftres plénipotentiaires médiateurs
, à l’effet d’y rétablir la paix 6c d’y proposer
le mode de convocation d’une affcmbiée où
puiffe être manifefte paifiblement le voeu de la
majorité : fe réfervant l’affemblée nationale de
prononcer fur ce voeu libre 6c paifible quand il
fera connu.
M. Prieur. Je demande la priorité pour le projet
du comité.
MM. DufraiJJk & Madier. Il faut confulter-l’af-
femblée par appel nominal. — L ’affemblée con-
fultée par affis 8c levé, accorde la priorité à l’avis
du comité. —- On demande l'appel nominal fur
lé fond. — On fe difpofe à procéder à l’appel
nominal fur l’article qui rétablit la réunion.
M. de Murinais. I l faudra lever la féance quand
l’apptl nominal aura été fàit._
M. de Cabales. Si l’article eft rejetté, il faut que
raffemblée nationale convienne loyalement 6c
franchement de ne plus fouffrir qu’on parle ici
dC Avignon.
M. Rabaud. On doit mettre aux voix en même
temps tous les articles du projet ; toutes fes parties
font liées entre elles ; la totalité du décret eft
l’expreffion entière de votre volonté. Vous ne
voulez pas un des articles fans l’àutre. Je vous
invite , au nom des départemens méridionaux , qui
font enflammes, à ne pas donner dans le piège
qu’on vous tend. Vous devez fentir les dangers
auxquels vous expoferiez la France, fi vous abandonniez
ce pays a deux armées qui font en pré-
fence. Je ne répondrai point aux infinuations
odieufes 6c perfides de M. l ’abbé Maury. Votre
mépris 6c celui des bons citoyens en fera juftice.
( On applaudit. )
M. de Clermont-Tonnerre. J ’invoque le réglement,
qui porte , que quand un décret renferme des dif-
pofitions diftin&es , elles doivent être délibérées
lèparément. C ’eft aufti le fahit public, c’eft l’amour
de la paix qui nous animent. Comment vient-cn
rejetter fur ceux qui s’oppofent à la réunion une
inlènfibilité coupable ? ( il s’élève des murmures. )
Je fomme M. le préfident, 6c cette motion liera
appuyée, de mettre aux voix cette divifion.
(U n e partie du côté droit fe lève pour appuyer
cette propofition. )
L ’affemblée délibère fur la divifion.
M. de Cabales. Entendez- vous des cris dans les
Tuileries ? — La partie droite fe lève en tumulte
6c fe répand au milieu de la falle.
M. de Murinais. Il faut lever la féance ; nous ne
pouvons pas - délibérer ici. — Quelques minutes
fe paffent dans une très-grande agitation du côté
droit.
M. de Murinais. Je demande que la municipalité
6c la garde nationale foient fommées d’afîurer la
liberté de la délibération.
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