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avoir ni liberté ni bonheur.J’ai'perfiftéloflg-temps
dans cette espérance, & ffta réfolutionn’ a changé
qu’ au moment, où elle m’ a abandonné.
Que chacun fe rappelle l’époque où je me fuis
éloigné de Paris •* la conftitution étoit prête à s’achever
, & cependant l’autorité des loix fembloit
s’affoiblir chaque jour. L’opinion loin de fe fixer ,
fe fubdivifoit en une multitude de partis . Les avis
les plus exagérés fembloient feùls obtenir de la
faveur: la licence des écrits étoit au comble: aucun
pouvoir n’étoit respe&é.
Je ne pbuvols plus reconnoître le caradlère de
la Volonté générale, dans des loix que je voyois
par-tout fans force & fans exécution. Alors , je
dois le dire , fi vous m’euflîez préfenté la conftitution
> je n’aurois pas cru que l’intérêt du peuple ,
règle confiante & unique de ma conduite , me
permît de l’accepter. Je n’avois qu’ un fentiment :
je ne formai qu’un feul projet. Je voulus m’ ifoler
de tous le s partis , & favoir quel étoit véritablement
le voeu de la nation.
' Les motifs qui me dirigèrent ne fubfiftent plus
aujourd’hui. Depuis lors , les-inconvéniens & les
^ a u x , les abus dont je me plaignois , vous ont
frappés comme moi. Vous ayez manifeftéla volonté
de rétablir l’ ordre. Vous avez porté vos regards
fur l’indifcipline de l’armée. Vous avez connu la
néceflité de réprimer les abus de la prefie. La ré-
vifion de votre travail a-mis au nombre des loix réglementaires
plufieurs articles qui m’avoient été
prefentés comme .conftitutionnels.Vous avez établi
des formes légales pour la révifion de ceux que
vous avez placés dans la conftitution. Enfin, le
voeu du peuple n’eft plus douteux pour moi s je
i’ ai vu fe manifefter à la fois , & parfon adhefion
à votre ouvrage, & par fon attachement au maintien
du gouvernement monarchique.
J’açceptè donc la conftitution : je prends rengagement
de la maintenir au dedans, de la défendre
contre les attaques du dehors , & de la faire exécuter
par tous les moyens qu’ elle met en mon
pouvoir.
te déclare qu’ inftruit de l’ adhéfîon que la grande
majorité du peuple donne à la conftitution, je
renonce au concours que j’avois réclamé dans ce
travail, & que n’étant responfable qu’ à la nation ,
nul autre , lorfque j’y renonce , n’auroit le droit de
s’en plaindre.
Je manquerais cependant à la vérité , fi je difois
* ue j’ ai apperçu dans les moyens d’exécution &
’adminiftration,toute l’énergiequiferoitnéceflaire
pour imprim r le mouvement 8c pour conferver
runité dans toutes les parties d’un lî vafte Empire.
JVIais puifque 1-s opinions font aujourd’hui divifé^s
fa r c e s objets, je xonfens que l’expérience feule
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efi demeuré juge. Lorfque j’aurai fait agit aye*
loyauté tous les moyens qui m’ ont été remis , aucun
reproche ne pourra m’être adreffé ; & la nation
dont l’ intérêt feul doit fervir de règle, s’expliquera
par les moyens que la conftitution lui a refervés.
Mais, meflieurs. pour l’affermifTement de la li+
berté, pour la Habilité de la conftitution, pour le
bonheur individuel de tous les François , il eft des
intérêts fur lefquels un devoir impérieux nous pref-
crit de réunir tous nos efforts. Ces intérêts font
le respedl des loix , le rétabliffement de l’ordre &
la réunion de tous les citoyens. Aujourd’hui que
la conftitution eft définitivement arrêtée, des François
vivant fous les mêmesloix , ne doiventconnoî*
tre d’ennemis que ceux qui les enfreignent. La dif-
corde & l’anarchie : voila nos ennemis ççmmuns.
Je les combattrai de tout mon pouvoir. Il importe
que vous & vos fuccefleurs me- fécondiez avec
energie j que fans vouloir dominer la penfée , la loi
protège également tous ceux qui lui foumettent
leurs actions j que ceux que la crainte des perfé-
cutions & des troubles auroit éloignés de leur patrie
foient certains d’y trouver en y rentrant, la
fureté & la tranquillité, &pour éteindre les haines ,
pour adoucir les maux qu’une grande révolution entraîne
touiours à fa fuite ; pour.que la loi puiffe
d’aujourd’hui commencer a recevoir une pleine
exécution , confentons à l’ oubli du pafle , que les
accufations & les pourfuites qui n’ont pour principe
que les évènemens de la révolution , foient
éteintes dans une réconciliation générale.
Je ne parle pas de ceux qui n’ont été déterminés
que par leur attachement pour moi : pourriez-vous
y voir des coupables ?- Quant à ceux qui par des
excès où je pourrois appercevoir des injures per-
fonnelles , ont attiré fur eux la pourfuite des loix ,
j’ éprouve à leur égard que je fuis le roi de tous
les françois. Louis..
Paris, le 13 feptembre .1791.
P. S. J’ ai penfé, meflieurs, que c*étoit dans
le lieu même où la conftitution avoit été formée,
que je devois en prononcer Vacceptation folemnelle:
je me rendrai en conféquence demain, à midi, à
l’affemblée nationale.
Séance du 14 feptembre 1791.
M. lepréfident. Le roi eft en marche pour fe rendre
à l’afTemblée , je n’ ai pas befoin ae rapptlk r le
décret qui interdit à tous les membres, le droit
de prendre la parole tant qu’il fera dans cette
enceinte. Dans le moment où le roi prêtera fon
ferment, l’ affemblée doit être aiïifle.
M. Malouet. il n’y a pas un feul cas où la nation
aflemblée ne feconnoifle le roi pour fon
chef , je demande que pour le refpedt dû à fo
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*ara£ère , l’ affemblée relie debout tant qu’ff fera
.fréfent.
M. Dandrl. Voici ce qui s’efl obfervé à l’ouverture
des états-généraux , & ce qui doit s observer
encore. Le roi eft entré dans la falle ,
en s’eft levé ; le roi a parlé, lés députés fe font
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pedtable 8c pur à la plus belle couronne de l’uni*
vers 5 & ce qui vous le garantit, lire, c’ eft l’im-
périffable autorité d’une conftitution librement
décrétée } c’eft la force invincible d’ un -.peujÿp
qui s’eft fenti digne de la liberté ; c’eft le befoin
qu’une aufli grande nation aura toujours de la
monarchie héréditaire.
{aflis & couverts.
Un huijfier. Voilà le roi.
! Le roi entre dans la falle accompagné de tous
fes miniftres , n’ayant d’autre décoration que la
croix de S. Louis. L’aflemblée fe lève 5 le roi
va fe placer à côté de M. le préfident. Sa ma-
rjefté prononce le difeours fuivant.
» Meflieurs , je viens confaçrer ici folemnel-.
! îement Y acceptation que j’ai donnée à l’adte confié
titutionnel 5 en conféquence, je jure ( l’affem- j blée s’ aflied ) d’ être fidèle à la nation &: à lo i,
\ d’employer tout le pouvoir qui m’eft délégué à
I maintenir la conftitution décrétée par l’ aflem-
| blée nationale conftituante, & à faire exécuter
[ les loix. ( Le roi s’ aflied.)
. » PuifTe , cette grande 8c mémorable époque ,
! être celle du rétabliflement de la paix, de l’union,
& devenir le gage du bonheur du peuple & j .de la profoérité de l’empire ». (L a falle retentit
[, des cris de vive le roi !
Le miniftre de la juftice préfente au roi l’adle
: conftitutionnel à ligner5 fa majefté l’ a ligné.
M. Thouret, préfident de l’alfemblée, répond
| au roi.
S ire , de longs abus , qui avoient triomphé
ij des bonnes intentions des meilleurs rois, & qui
I auroient bravé fans cefle l’autorité du trône , op-
I; primoient la France. ( Le roi refte aflis , le pré-
I fident s’ aflied.)
Dépofitaire du voe u , des droits, & de la puif-
fance du peuple , l’aflemblée nationale a rétabli ,
par la deftrudtion de tous les abus, les folides
, bafes de la profpérité publique.
' Sire, ce que cette aflemblée a décrété , l’ ad-
I héfion nationale le ratifie : l’exécution la plus
j> complette dans toiutes les parties de l ’empire ,
a attelte l’aflentiment général. Il déconcerte les
I projets impuifians de ceux que, le mécontente-:
1' ment aveugla trop long-tems fur leurs propres in-
I térêts. Il promet à votre majefté qu’elle ne vou-
! dra plus en vain le bonheur des françois.
L’ aflemblée nationale n’ a plus rien à defîrer
I * en ce jour à jamais mémorable , où vous con-
■ fommez dans fon fein par le plus folemnel en^
| ' gagement, Y acceptation de la royauté conftitu-
I tionnelle. C ’ eft l’attachement des* françois, c’ eft
I |eur confiance , qui vous défèrent ce titre ref-
Quand votre majefté, attendant de l’expérience'
les lumières qu’elle va répandre fur les réfultats-
pratiques d e là conftitution, promet de la mair-
tenir au-dedans, & de la défendre contre 1 s
attaques du dehors, la nation fe repofant & fur
la jultice de fes droits, & fur le fentiment de
fa force & de fon courage, & fur la loyauté
de votre co-opération, ne • peut connoître au-
dehors aucun fujet d’alarmes , & va concourir ,
par fa tranquille confiance , au prompt fuccès de
fon gouvernement intérieur.
Qu’elle doit être grande à nos yeux , fire ,
chère à nos coeurs ; & qu’elle fera fubîime dans
notre hjftoire, l’ époque de cette régénération
qui donne à la France des citoyens , aux françois
une patrie j à v o u s , comme ro i, un nouveau
titre de grandeur & de gloire \ à vous encore
, comme homme, une nouvelle fource de
jouiflances, & de nouvelles fenfations de bonheur
1
On applaudit à plufieurs reprifes. Le roi fort
de l’affemblée au milieu des cris de vive le roi.
-- L’aflemblée en corps accompagne le roi jufqu’au
château des Tuileries , au milieu des cris d’ allé-
grefîe du peuple , d’une mufique militaire &
de plufieurs falves d’artillerie. Vo yez la première
partie de l’ ouvrage.
Mais tandis que le roî dotînoit fon acceptation
à l’aéle conftitutionnel, lé parti de l’oppofition ,
la minorité de l’aflemblée, les chefs de la no-
blefte émigrée déclaroient qu’ils ne voyoient
dans la. démarche du roi qu’un a£té forcé , la
pénible contrainte d’un prince prefîe entre l’alternative
de perdre fa couronne , de Commencer
une guerre terrible ou de fouferire aux volontés
d - ceux qui avoient fu s’emparer de l’autorité 8c
former une puiflance fupérieure à la fienne.
Nous ne rapporterons pas toutes les pièces
que le parti de l’oppofition fit alors paroître ,
nous donnerons feulement la principale , celle
qui femble porter un caractère public par la figna-
ture des membres qui l’ ont fait paroître. Nous
y joindrons un petit écrit qui a fait beaucoup
‘de bruit & que l’ on aflîiroit dans le tems contenir
un récit exâ£l de^ intrigues qui ont eu
. lieu pour déterminer le' roi, à accepter l’adle conf-
[ titutionnel. Enfin nous terminerons cet article
par le compte rendu à l’aflémblée nationale de
j l’ effet qu’ a produit dans l’étranger, la notificà-
| tion que le roi y ’ à fait faire de fon acceptation