
imniftrc. J’appuie ma motion fur la prudence
& fur la fagefîe de vos précédens décrets. Vous
ne voulez point empiéter fur les droits du -pouvoir
exécutif. Je fais bien que ce n’eft pas un
moyen d’obtenir de la. faveur dans cette affem-
blée, que de placer fur la même ligne la nation
& les minières. Je dirai qu’il s’agit ici d’une partie
intégrante du pouvoir conflituant ; car on ne peut
rien faire fans le roi. J’entends toujours dire : La
nation a intérêt de faire telle çhofe , donc cela
eft du reffort du corps légiflatif. Mauvais raifon-
nement. Vous mettez aimi entre vos mains tous
les pouvoirs. Nous venons de jurer folemnelle-
ment de maintenir la conftitiition ; je ferai fidele
à mon ferment : je ne fouffrirai pas qii’on y porte
atteinte en'confondant les pouvoirs qui doivent
être féparés. J’appuie la demande qui a été faite
de l’ajournement.
M. Crillon. Vous avez décrété un mode' d’avancement
, qui allure aux anciens militaires un
traitement honorable, qui ne les mette point à la
merci de l’intrigue & de la faveur. Ce principe a
eû l’approbation de toute l'armée ; & ce n’eft'pas
là-demis qu’il y a des inconvéniens. On nous pro-
pofe de porter un décret qui mette un obftacle
aux changemeus de l'armée : il s’agit de favoir f i ,
par ce décret, en y rénffit ; pour moi, je ne le
crois pas. La meilleure conftitution eft celle où les
pouvoirs font diftinâs & féparés : il s’agit de favoir
auquel appartient la queftion que nous agitons
aujourd’hui. U eft déjà décrété qu’à l’affemblée
nationale appartient de fixer le nombre d’hommes
qui doivent compofer l'armée , 8c la folde qu’ils
doivent avoir : ce qui refie' n’efl plus que dé détail.
Par exemple, quelques - uns prétendent que
les régimens d’infanterie doivent être compofés
de quatre bataillons, & ceux de cavalerie , de fix
efeadrons ; d’autres en veulent moins. Voilà le point
de difficulté. Il faut toujours que le minïflre préfente
à l’a Semblée un plan d’organisation de Yarmée ; 8i lorfqir’il aura été adopté , on pourra décréter
qu’il n’y fera fait aucun changement fans le consentement
du corps légiflatif. Pour réfumer en
deux mets roiite mon opinion, je .penfe que l’examen
du plan du miniflre ne nous regarde que fous
les rapports économiques & conflitutionnels, & non
l’ous les rapports militaires.
M. Dubois de Crancé. Si cette propofition eft
adoptée, .je n’y demande qu’un feul amendement ;
c’eft que M. Necker foit chargé du rétabliffement
des finances , & M. le garde - des - fceaux, de
î’organifation de l’ordre judiciaire.
MM. Sérent & Tracy adoptent, avec quelques
légères modifications, l’opinion de M. Crillon.
MM. Menoii 8c Brogîie foutienaent la motion
de M. Noailles.
M. d'Ambly. On nous propofe d’adopter uriplaj
que nous ne connoiflons pas ; on veut nous faire 1
juger comme des aveugles. Le roi a l’intention de
rendre tous les François heureux : laiffons-le faire-
cela lé regarde. Nous lui dirons: Nous ne voulons
vous donner que tant d’argent ; il ne vous en
appartient pas davantage.
M. Puçy. Quelques opinans font partagés pour
favoir s’il appartient à l ’aflêntblée oc déterminer
la proportion qui doit compofer l’hiérarchie des
différens grades de Y armée. Lorfque l’affemblée a
décrété qu’aux légiflatures feules appartenoit le
droit de fixer les appointemèns de chaque grade, les
règles d’admiffion 8c de promotion, elle a défigné
les objets de fa compétence. I l n’y a aucun rifquel
a attribuer au pouvoir exécutif le droit de fixer le
nombre.d’individus de chaque gra d e ;il ne peut
.dans aucun cas, defirer une mauvaife conftitution
militaire , 8c quand même il voudroit tourner
contre la nation les forces dont il eft dépofitaire,
il feroit toujours de fon intérêt d’avoir une amk\
bien conftituée. I l ne faut pas cumuler tout le
poids à l’extrémité du levier qui doit maintenir
l’équilibre politique ; l’affemblêe. , en s’arrogeant
des pouvoirs qui ne lu i appartiendraient pas,
effraieroit par un nouveau genre de defpotifmeJ
non moins redoutable que celui que nous ayons
renverfé.
M. Pédon. Je croyois tous les membres d’accord
fur le fond ; mais je vois par la manière ■
dont on veut pofelr la queftion, qu’il eft poflible
qu’on ne s’entende pas. Il femble que quelques-]
uns voudroient accorder au roi le droit d’orga-
nifer Y armée prefque exclufivement : on n’a pas
fans doute intention d’ôter au pouvoir îégiflaiifl
t fon influence légitime ; & cependant on le prop
o s aflez formellement : le roi a toujours le droit
de fanélionner ou de ne pas fan&ionner ; c’eft-la
où fe borne fon pouvoir, c’eft-là ce qui le rend:
partie intégrante du pouvoir légiflatif.
A1. d’Ejlourmel. Je demande qu’on faffe une fécondé
leaure du proje^de décret. ( On fait cette
le&ure )* Je demande actuellement à zM. Noailles
fi c’eft au nom du comité militaire qn’il propolel
ce projet de décret.
M. Noailles. J ’a i déjà dit que c’étoit en mon
propre nom.
M. d'Efiourmel. En ce cas , j’en demande le renvoi
au comité militaire.
M. Noailles. S i l’affemblée renvoyoit au cofflit
m ilitaire, elle lu i feroit perdre du temps mut»
ment. E lle doit bien vo ir que fi j’ai fait cette m I
tion , c’eft que les membres du comité n etotf I
pas d’accord entre eux,
I M Alexandre Lameth. J ’ajouterai peu de chofes
I aux obfervations qui ont été faites fur cette quef-
I tjon. ;e dirai feulement que l’article eft im plicite-
I ment renfermé dans les décrets que vous avez
I adoptés' fur cette matière. Vous avez décrété
I -u’aUx légiflatures appartenoit le. droit de fixer
K le nombre d’hommes qui doivent compofer Yar-
I mit , la folde des grades » & c* foutiens que
K ce n’eft que lorfque l’affemblée aura décrété la
I proportion de l'armée , qu’elle pourra prononcer
I fur cet objet. Il eft néceflaire que le comité fafte
I le devis de l'armée, après avoir examiné les fron-
I dères : on détermine , par exemple , qu’il faut 150
mille hommes ; pour les folder, il faut déterminer
I [ combien il y en a dans chaque grade. Les foldats
coûtent moins que les officiers ; on ne peut donc K préfenter des bafes fans connoître parfaitement ces I détails. Je demande que la propofition de M. K Noailles foit adoptée.
I Ml Dubois de Crancé. Pour éclairer la difeuftion, I je demande que la dernière lettré du miniftre
■ au préfident du comité militaire foit lue dans I îaflemblée.
Après une difeuftion aflez longue , dans laquelle
a encore parlé M. Erneric, qui a demandé qu’on
voulût bien entendre le/apport du miniftre , avant
de ftatuer fur celui du comité m ilitaire, en déclarant
que tous deux contenoient des difpofitions
contre lefquelles il s’éleveroit de toutes fes forces,
on a fait la leéture de la lettre du préfident du
comité militaire au miniftre de la guerfe avec
la réponfe de ce dernier. I l réfulte de cette ré-
ponfe que le miniftre a fait un plan , dont les
bafes font', à peu de chofe près , femblables à
celles propofées par le comité, & qu’il eft réfolu
de le mettre fous les yeux de l’affem bléepour le
foumettre à la difeuftion du comité militaire.
Séance du /p juillet 1790.
M. Noailles. S i la propofition que j’ai déjà faite
d’attribuer au corps légiflatif le droit de fixer le
nombre des individus de chaque grade, qui doivent
compofer Y armée, eût été énoncée avec plus
de détail, elle auroit obtenu I’affentiment général.
Il s’agit de diftinguer les différens pouvoirs. Ce
n’eft pas dans le fein de cette affemblée qu’on
voudroit enlever à la nation un droit conftitu-
nonnel : je vais rappeller les principes. Le pouvoir
exécutif ne peut exifter féparément des autres pouvoirs
politiques ; il ne peut exifter qu’aux conditions
fous lefquelles la nation a voulu qu’il exiftât ;
d ne peut avoir de forces que celles que la nation
a voulu lui confier. L ’organifation de ces
forces appartient à la nation ou à fes repréfen-
îins-j & non pas à lui-même ; car il eft bien évident
qu’on ne peut pas lu i laifier le droit de fe
conftituer 8c de s’organifer. I l eft néceflaire de
rappeller les décrets précédemment rendus ' fur
l'armée. Vous avez décrété le 28 février , qu’au
corps légiflatif appartenoit le droit de ftaruer fur
la fomme à défigner annuellement pour les dé-
penfes militaires , fur le nombre des hommes
dont doit être compofée farmée , fur la folde
de chaque gfade, fur les règles d’admiflion au fer-»
vice 8c d’avancement dans tous les grades , fur
les formes des, enrôlemens 8c les conditions du
dégagement , fur l’admifiion des troupes étrangères
au fervice de la nation, fur les lo ix relatives
aux délits & peines m ilitaires, 8c enfin.fur
le traitement de Yarrnèe en cas de licenciement.
Par votre décret du 26 juin , vous avez appliqué
toutes ces lo ix à l'armée navale, 8c vous avez ajouté
qu’à chaque légiflature appartenoit le droit de fixer
le nombre d’individus de chaque'grade, qui doivent
entrer dans la marine. Je vais vous donner lecture
du décret que j’ai déjà eu l’honneur de vous
propofer.
« L ’affemblée nationale, expliquant fon décret fur
Y armée., en date du 28 février , 8c conformément
à celui du 26 juin fur l'armée navale, a décrété 8c
décrète qu’il appartient au corps légiflatif de fixe r,
fur la propofition du pouvoir exécutif, le nombre
d’individus de chaque grade dont l'armée doit être
compofée, & l’organifation, tant pour les troupes
nationales , que pour les troupes étrangères à la
folde de la France».
Cette propofition eft inutile ou néceflaire : £r
elle eft inutile , il falloit le dire de bonne - foi &
convenir que , quoique le décret du 28 février
n’ajoutât pas- de chaque grade , ces termes étoient
fous-entendus, fur - tout d’après le décret du 26
juin. Ou la propofition étoit néceflaire, & en ce
cas il eft inconcevable qu’elle n’ait pas été adoptée;
car on n’ira pas jufqu’à foutenir que les droits du
pouvoir légiflatif doivent être moindres fur Y armée
de terre que fur Y armée navale.
Nous fommès précifément dans la fituation du
parlement d’Angleterre. S i on vouloit faire quelques
changemens dans l’organifation de l'armée de
. cet empire , le pouvoir exécutif viendrôit propofer
ces changemens au corps lég ifla tif, qui délffié-
re ro it, amenderoit, ftatueroit & renverroit au pouvo
ir exécutif pour fan&ionner. I l eft donc necef-
faire que le pouvoir exécutif préfente fon plan au
corps lé g ifla tif, qui délibérera , & fera les changemens
qu’il croira convenables au bien pu b lic:
autrement le pouvoir exécutif pourroit augmenter
certains grades dans une proportion ridicule ; ainfi
vous auriez des foldats & point dé armée. On a cherché
à perfuader qu’il feroit poflible qu’il n’y eût
aucun militaire dans l’affemblée nationale. S i le
hafard l’avoit ainfi compofée, je ne voudrois pas
dire pour cela qu’elle feroit hors d’état de d élii
, bérer fur ce qui concerne Y armée. Lo u vo is, d’Ar-
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