
nale â en efeortant MM. les officiers, n'ont pu
contenir la langue du peuple , qui exhaloit fes
tranfports en bruits injurieux, plus encore qu'en
injures articulées» .
Depuis cet inftant 8e dans ce moment même ,
la municipalité veille par les loix , 8c la garde nationale
furveille par les armes tous les mouvemens
cmi pourroient attentera la fureté des prifonniers.
On atture que le peuple de T oulon, en demandant
toujours qu'on lui biffe jurtice, l'attend avec le
refpeét que la garde nationale lui recommande, 8e
donc la municipali'.é lui a donné l'exemple.
Nous apprenons que depuis ces troubles on a
leme de nouvelles alarmes parmi le peuple de
Toulon. On y a répandu le bruit que des vaiffeaux
■ ennemis s approchaient du port. On ajoute que
ces menees perfides font .faites pour inquiéter les
habitans fur la fidélité des officiers de la marine.
On n'y parviendra point! le peuple de Toulon ef-
_ time la bravoure & la valeur de ces militaires,&
ne peut être ébranlé dans fa confiance en leur honneur
& leur fidélité, il n’a jamais répondu qu'un
^}ot f cette horrible 8cplate calomnie : M. le comte
- d Albert de Rioms efi le commandant du port.
Mémoire rédigé par M. £ Albert de Rioms dans la
prifon oh i l efi détenu , fur les faits du 30 Novembre ô* du premier Décembre iySy.
. “ Lundi dernier , à cisq heures du foir , j’ai
ehaüe de 1 arfenal, les nommés Gofle & Ganiver,'
.majires de manoeuvres, non en tre ten u sd o n t'i
) “ rois mécontent depuis long-tems. Si en les pu-
cinantpavois abule de mon autorité 3 ce feroitau
t o i & a Ton miniftre que je ferois comptable de
cët abus.
“ Le même foir , à environ neuf heures
M. Roubaud & M . de Carpillet prirent la peine
de venir chez moi. M. Roubaud me dit que ces
deux maîtres avoient été lui porter leurs plaintes
qui! avoit refiifé d’accueillir ,, comme n'étant
pas competentde les recevoir; ce confulm'obferva
que plufieurs ouvriers de larfenal lui avoient
paru fort échauffés à cette occafion „ que cela pou-
vo itcau fe r line émeute, & qu'il croyoit qu'il
îerqit prudent de pardonner aux deux hommes
punis. Je répondis que je ne Je pouvois pas fans
compromettre l'autorité déjà trop énervée. Je le
remerciai de fou attention} il m'affura que quoi
qu il arrivât „ la gardé nationale n 'y prendrait
potnt de part ; fur quoi je lui dis qu'il mê faifoit
grand plaifir en me parlant ainfi 5 que les'ouvriers
d? l arienal avoient depuis peu pris avec leurs
Officiers un ton d'irffubordination qu’il fallait leur
faire quitter 3 Se tque, je to is bien .aife d'avoir
«ne occafion de léujr montrer que je> vo-ulois &
gouvois être Je maître de me faire obéir par-eux.
» Le lendemain je fus dans l’arfenal
heures du matin j je m'y fis rendre compte
abfens, l'état s'en trouva confidérablementmointl
que celui que j'avois fait prendre quelques joJ
auparavant des ouvriers enrôlés dans la miliceJT
tionale : rien jufques-là ne m’avoit annoncé uJ
emeute ^quoiqu'on m'ait affuré depuis qu'il avoiil
ete queftion de venir n f attaquër chez moi. A - |
x Yiron neuf heures, on vint me dire qu'une déial
tation du confeil permanent 8c du confeil miijl
cipal fe préfentoit à la porte de Tarfenal-ll
donnai ordre qu'on les fit entrer , lorfqu’unoj
cler me dit qu'ils demandoient à me parler à hfll
porte de l'arfenal, chez moi ou à Thôtel-de-villçM
J® répondis que j'allois fur le champ me rendrèl
chez moi. En e ffet, je fortis de Tarfenal ,acconi-l
pagne de tous les officiers qui s'étoient trouvés!
auprès de moi. Je fus extrêmement furpris de me|
trouver au milieu d'une foule de gens qu'il t j
fallut traverfer, 8c q u i, malgré la préfence dJ
M. le conful qui me joignit fur ces entrefaites !
Prêts à m'attaquer, ae furent contenus que p»|
Je çortége d'officiers clont j'étois entouré. Nousl
arrivâmes à la porte de l'hôtel que j'habite, ouf
vouloit y entrer en fou le , j'en fis défendre l’en-l
tréë. M. Roubaud lui-même , & M. Barthelemil
qui l’accompagnoit, furent froifles} l'épée dsl
M. de Saint-Julien fut brifée; une canneàlamtl
qu'il portoit, lui. fut arrachée des mains, foJ
chapeau lui fut- enlevé, & ce ne fut qu'aveJ
beaucoup de peine Se de danger qu'il fe fauvj
dans l'hôtel. J'y étôis dans la grande faîle balleI
avec MM. Rouba'ud 8c Barthelemi, 8c nous njl
fûmes pas plutôt entrés , que ces metteurs me I
dirent qu'ils me demandoient inftamment & poutl
l'amour de la paix ,, la graçe des deux hommes f
que j’ avois punis. Je répondis affez long-tems quel
je ne pouvois pas, fans me d éshonoreraccorder |
une grâce qui ae pouvoit que paroître forcée I
aux yeux d'une populace qui n'en deviendrai |
que plus infolente. Enfin \ cédant aux inftances I
de^ ces deux officiers municipaux , je leur#!
qu ils m arrachoient cette' grâce malgré moi > M
. puifqu’ils la croyoient abfolument nécef
faire, il me falloit bien y confentir. Dans Tinter-1
valle, j'avois donné ordré què deux détache-1
mens de canoniers-matelots, de cinquante hommes L
chacun , fortifient des cafernes , 8cfe milfent en
bataille fur la.place. Ces déux détachemens fê J
tenoient prêts , & je les avois deftinés pour ren- ■
forcer les poftes de l'arfenal au befoin.
M L'apparition de ces troupes affedta défagréa-
blemént M. le conful, je les fis retirer fur-h'
champ dans leur caferne j mais en le faifanr, N
} qhfervois à M. Roubaud que'la foule qui entou-1
r^it l'hotel^, augfhentoit a vue d’ geil, & qu'eu
réiionçant ’pour Ta p aix , aux moyens de défenfes I
qui dépendoient de m o i, je *dëvois compter lilj
■ C§ûx qui gtoîënt en fbh pouYoir. 11 répondit î
«êla de la manière la plus pofitive, que jepouvois
être tranquille , 8c qu'il alloit pourvoir à tout.
| Cependant, à peine fut-il fo r t i, que la foule
. ligmentant.toujours, on commença par jétter des
Berres aux fenêtres. J'envoyai un officier-major
TThôtel-de-ville pour réclamer la loi martiale 5
on répondit qu'on alloit envoyer des compagnies
de la garde nationale, qu’on alloit ordonner de
f 4i(Cper les attroupemens j mais on fe refufa à
proclamer la loi que je réclamois. Il arriva en
I Éffet deux compagnies de milices, dont une s’em-
[ para des portes de l ’hôtel, 8c l'autre borda la haie
K long de la terrafle qui donne fur la place j cela
n’empêcha pas que M. de Bonneval, appuyé fur
! le balcon, & caufant avec MM. Hébert 8c Du-
B n d , capitaines de la milice , ne fût blefle à la
l ïiain 8c à la tête par un coup que lui porta un
Bolontaire de cette milice. C e fut peu après que
r M. de Saint-Julien, q u i, comme je l'ai d it, avoit
ftté défarmé de fon épée en entrant chez m oi, 8c
f oui étoit reforti pour s'armer d’un fabre , fut af-
failli fur la place , renverfé par terre , 8c blefle
I de plufieurs coups. Il alloit périr , quand un offi-
ilier de la garde nationale 8c un brave volontaire ,ƒ
au péril de leür propre vie , l’enlèvèrent à
[ces affaflins, & cela au moment o ù , fuivi de
quelques officiers, j’étois forti pour le dégager ,
t aux rifques de tout ce qui pouvoit en arriver.
Je rentrai fur le champ, 8c fans qu'aucun de
l'nous eût tiré l’épée} mais le danger d'être atta-
llu é 8c forcé dans l'hôtel paroiflant devenir plus
I %e(fant, je fis demander au capitaine, commandant
le fécond bataillon de Bàrrois, qui ce jour -
[ là avoit été mis à' mes ordres , de m’envoyer
Cinquante -hommes pour la garde intérieure de
Bhôtel. Pendant ce tems , il arriva^- des troupes
nationales qui rétablirent l'ordre , en écartant de
!• la maifon ceux qui l’attaquoient à coups de pierre.
après, 8c au moment où le détachement de
■ Parrois que j'avois demandé , arrivoit, je vis
B L de la Jarre , qui me d i t , de la part du conful , :
f on me conjuroit de mettre une confiance en-
Bfère dans la milice nationale qu’elle avoit les
Brares précis de garder l’hôtel , 8c de ne pas
lÿouffrir qu’on s’y introduisît malgré moi. Je^ ré-
I «pondis à M. de la Jarre que je ne pouvois mieux
B u i témoigner combien je comptois fur les afiu-
B ance? qu’il me donnoit, qu'en renvoyant au
^Huartierle détachement de Barrois que j’avois cru
Bteoeffaire à ma défenfe. Je crus d’abord avoir à
m ^piaudir du parti que j'avois pris. Les troupes
m ^ z l e s entourèrent 1 hôtel avec beaucoup
B * ordre fia iouie fe diflipa, Sc je crus il bien au
U tranquillité , que j'envoyai prier B Ie confu de faire, retirer iss troupes natio-
^paies g,r de ne me )aj^er qU-une garde de vingt-
B cinq uoua'nes, à M. le confu irépondit qu’ il
■ croyoir convenable de laifier deux compagnies.
■ B étoit pfes d’une fifcùre, un gran'd nombre d’ offi-
■ «ers, Quelques ôto-dfficiersde caùoüûièrs-riateiots
forrirent pour aller dîner, bientôt le nombre des
gardés nationales augmenta ; j’ignore fi toutes les
compagnies y vinrent, il y en avoit sûrement la
plus grande partie. L’hôtel fut invefti de tous des
cô té s , l’entrée 8c la fortie en furent interdite s
à tout ce qui étoit au fervice de'la marine, 8c
ce ne fut pas fans peine que je pus faire avertir
M. Roubaud de l’état des chofes. Il m envoya
trois membres du confeil permanent pour en
prendre particulièrement connoiflance ÿ 8c re-i
tourner lui en rendre compte. Jufqu’a leur arrivée
, la port© avoit été défendue avec Beaucoup
de courage 8c de fuccès par un officier de
la garde jnationalë 5c quelques brigadiers } mais.à
l’entrée des envoyés de M. Roubaud, plufieurs volontaires
les fuivirent dans la falle , & refufèrenc
de refortir avec eux. Je n avois alors, près de
moi, au plus, qu’une douzaine d'officiers armés
de leurs epées feules. Les volontaires vinrent à
m oi, me déclarèrent, du ton le plus abfolu,
qu'ils vouloient que je leur livrafle M. de Broves,
major de vaifleau , qu’ils accufoient d'avoir donne
ordre aux détachemens des canonniers-matelots »
q u i, le matin , s'étoient afîemblés fur la place ,
de faire fe u , Je niai le fait en les afîiirant, conformément
à la vérité , que. les armes n’étoient
pas chargées. Tout fut inutile} 8c après avoir
fubi l'humiliation de toutes’ fortes de menaces •
pendant près d'un quart-d'heure, je me vis force
de leur livrer M. de Broves, fur les promettes les
plus fortes qu'il ne feroit maltraité en rien , . 8c
qu'on vouloit Amplement s'affurer de lui. M. M.<r-
relles 8c M. Martin, l'un colonel, l ’ autre major
de la milice nationale , m'affurèrent qu'ils me re -
pondoient de lui fur leurs têtes , ainli qu’un des
trois membres du confeil permanent qui avoient
été envoyés par M. Roubaud. Celui-ci étant refifr
à l’hôtel lorfque fes deux collègues furent rendre
compte à -M. Roubaud , j'envoyai tout de fuite
au -conful 8c à M. Carpillet, pour leur faire part
de ce qui venoit d’ arriver. M .d e Carpillet vint
avec M. Barthélémy , me préfenter une proclamation
que le confeil avoit ordonnée , & me der
mander fi je penfois qu'on dût y ajouter quelque
chofe. Je répondis que non , mais qu’ il falloir que
les volontaires vouluffent obéir : .ils le voulurent
fi peu , qu’un quart-d’heure après la fortie de
M.. de Carpillet 8c de M. de Barthélémy , la,porte
fut forcée parles volontaires , qui entrèrent en
foule, malgré les efforts de plufieurs de leurs
officiers qui vouloient les en empêcher. Je îr.e
préfentai a eux pour leur demander ce qu'ils vou-
foient : Nous voulons M. de Villages , me dirent-
ils , il faut que nous V ayons ; 8c fur le refus que, je
leur fis , ils fe faifirent de moi : quelques - uns
voulurent s’y oppofer} mais le nombre des mutins
l'emporta j mon épée me fut arracnee , 8c je tus
mené au palais à travers les huées 8c les inlultes
de la populace. Quelques volontaires cherchèrent
à m’ attommer en chemin , tandis que d autres me
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