
l’affemblée repréfentative du Comté Venaifiîn.
Cette ville n’a dû fön falut qu’à fes propres forces
& à la lâcheté de fes agreffeurs, repôuffés,
difperfés, & dont quelques-uns fe ‘ font réfugiés
en Provence. Quoique le calme foit rétabli à Ca-
vaillon , cette ville & le Comtat relient expofés
aux mêmes hoftilités ; ils le font aux fcènes fan-
glantes que la.. faélion ’ avignonoife cherché à re-
nouveller parmi nous après en avoir donné l’horrible
exemple. '
Si ces fcélérats étoient livrés à eux-mêmes ,
notre patrie , laffe de fouffrir leurs attentats ,fau-
roit 's’en garantir. Mais il eft poffible , il eft à
craindre que leurs manoeuvres & la hardieffe de
leurs; impoftures n’indnifent en erreur des François
de; notre voifiUage , & qu’on-ne leur faffe;
voir^dès ennemis dangereux dans des voifiriSTzélés
pour leurs.^intérêts ^-paifibles obfervateurs des loix
qu’ils; fe: font données, loix dont rheureUfe. conformité
atvec'cellès de la France , fèmbîeroit
fournir un nouveau' titre de bienveillance & de
rapprochement. De grands malheurs peuvent rélu
lter de ces' fédiuftions. Déjà nos compatriotes
en; ont éprouvé lesfuneftes effets. Au tableau
rapide que nous venons de foumettre à vos regards,
nous ajouterons quelles calomniés d’Avignon
ont déjà entraîné des incident• fâcheux ; un Courier
du vice-légat -qui , - pour éviter le bureau
d'A v ig n o n , juftement fu fp e â :fe rendoit à Orange,
a été arrêté par des hommes de cette v ille, &
conduit à la municipalité , qui l’a mis en liberté,
& lui a rendu Lès' dépêches.
On n’a point permis à- la-' garde nationale de
Caderouffe de 1 traverfer le terrritoire d’Orainge,
pour fe rendre aux ordres de Taffemblée rèpr-é-
fentative ; quèlqu'escaiffes d’armes ont été faines
par la gardé nationale d’Orange , & font encore
détenues; plufieufs particuliers du Comtat, voyageant.
pour leurs affairés, ont été infnltés dans le
voifinage dè leur' patrie. Enfin , le 7 oâobrê , le
directoire du départemeut des Bouches du Rhône ,
par un arrêté motivé fur ’la fable infenfée-des prétendus
raffemblemens de troupes & de canons, à
Carpentras ,'follicitë contre nous des mefure-s telles
en’on en prendront : envers des -ennemis- â'écfôrés.
Nous ne faurions repouffer plus péremptoirement
ces injuftes opinions, qù’en apprenant à
cette augufte affemblée qu’immédiatement après
les nouvelles reçues des hoftilités cemmifes lp r-6
contre Cavaillôii, & avant de pourvoir à la dé-
fenfe de cette v ille, l’àfiemblée repréfentâtive du
Comtat à-envoyé des députés & écrit aux-principales
municipalités voifmes du Comtat,: ainft
qu’aux trois départemèns qui lè-toucHent y pour
les prier d’envoyer, 'aü milieu de nou s,1 vérifier
les faits, & s’affurer de' 1-horreur descalomniés
par lefquèllcs on s’efforce d’iriqüiétër leur vigi-
lence. Déjà le maire du Saint-Efprit s’eft rendu à
cette invitation , & , foit à Gavaillon , foit à Car-
pentras , a reconnu l’abfurdité des impoftures
d'Avignon. Ces démarches publiques nous garan-
tiffent que l’affemblée nationale de France ne fera
pas long-temps en doute fur les vérités qu’on lui
a diftimulées, & que des informations authentiques
lèveront les nuages répandus par la main de
l’intrigue & de la calomnie.
On a tellement.empoifonné les mefures les plus
fuiiples, les plus légitimes des Comtadins, qu obligés
de tirer ; la moitié ! de leur fubfiftance du
territoire de France , on a effayé de -porter obfta-
cle' à fes àpprovifionnemens , - eii nous peignant
comme des accapareurs de,grains. Ainfi quelques
caiffes d’armes, à peine fuffifantes à notre dé-
fènfe légitime , ont été travefties en préparatifs
imménfés d’agreftion.
Vous demanderez quel' to r t. quelles opinions,
quels■ trimes ont pu attirer, de la part de la
fa&ioir avignonoife'; des procédés auffi odieux?'
Notre crime, notre feul crime eft d’avoir voulu
être libres fous le prince qui nous gouverne depuis
fix fiecles avec paternité, d’avoir fu concilier
lé .refpetft & la reconnoiffance de fon autorité
avec le recouvrement de nos privilèges &
l?ad option de vos principales- loix ; d’avoir, en
un mot, fu. confolider 110s droits, fans oublier
nos devoirs. Ces fentimens, cette conduite , ré-
préhenfibles, fans doute , aux .yeux des perturbateurs
& des ennemis de l’humanité, forment
nos titres à. votre eftime & à votre bienveillance.
L’augufte affemblée qui s’occupe avec tant de courage
clu bonheur des François , ne fera pas in-
fenfible aux calamités, dont un peuple irréprochable
eft menacé., Ses anciennes liaifons avec la
France , le bon voifinage les droits de l’humanité
, ceux de notre indépendance , ceux de notre
foibleffe même , l’engageront à faire cefîer des
entreprifes dangereufes. Elle préviendra , dans la
fagefte, les funeftes efforts par lefquels on cherche
à tromper nos voifins , à faire, naître entre
eux & nous des inimitiés fans but, & -à provoquer
des agreffions-contre un peuple d’amis;' elle
ne permettra pas que des tranfports commerciaux
de . comeftibles & d’armes entre: les deux
états foierit interrompus; enfin , nous ofons attendre
de fa ■ généreufe équité, que par un témoignage
d’eftime envers .1 affemblée repréfentative
du Comtat Venaiffin , .elle fera tomber les- ru-,
meurs infâmes , fi indécemment,. fi opiniâtrement
répandues fur lés difpofitioiis de'Ads. compatriotes.
Telles font les demandes que nous prenons là
liberté de foumettre aux lumières 8c à la jüftice
de l’affemblée nationale dè France. Nous lui rappellerons
encore celles qui font l’objet de l’adreffe
qui lui a été envoyée le 11 juin , par 1 affemblée
repréfentative du Comtat Venaifiîn. Notre caufe
a été déjà inftruite par des écrits qui peut-être
auront..fixé l’attention _de quelques-uns de fes
membres. En comparant la mefure, la véracité,
les. allégations jinconteftables , avec les libelles
qu’on nous a oppofés, votre candeur y reconhoîtra
le fceau de la vérité & le langage cle ci-
citoyens dignes d’intéreffer les reftaurateurs de la
liberté.
Séance du 16 janvier lyçi, .
M. le préfidènt fait leâure d'une lettre de M.
Duportail. Le miniftre rend compte à l’affemblée
nationale des nouvelles qui lui ont. été apportées
par un officier du régiment de Soiffonhois, envoyé
par le- lieutenant-colonel dè ce 'régiment ,
en garnifon à Avignon. Soixante-cinq hommes de
ce régiment & fix de la compagnie de Penthièvre
font partis avec la garde nationale d'Avignon,
pour aller affiéger Carpentras.
Om demande le renvoi de la lettre aux; comités
des rapports & diplomatique.
M. Charles Lameih. Il me fenible qu’il fini droit
attendre des nouvelles plus détaillées. ( Il s’élèvd
des murmures. ) M. le préfidènt, je yous prié de
m’accorder la parole plus paifiblemènt. Je ne dis
pas qu’il faut- attendre pour envoyer cette note
au comité, mais pour en rendre compte à Paf-
femblée ; on ne peut pas prendre un parti fur
cle fimples nouvelles qui nous font envoyées par
le lieutenant-colonel du régiment dè Soîfforinois ,
fur le compte duquel je ne dis encore rien. Je
penfe dôric que le rapport né doit être fait qu’après
des nouvelles officielles.
; M. de Latour-Maubourg. Les trois comités, d’Avignon
, diplomatique & des rapports fe font affem-
blés hier, & ont appris divers détails cle l’affaire
dont le miniftre vient de vous prévenir. Le dimanche
9 , après la meffe du régiment, la garde
nationale d'Avignon- eft venue trouver les foldats
dans leurs cafernes, & les a emmenés au cabaret;
lorfqu’ils ont été un peu dans le vin , on a danfé
des farandoles , genre d’amufement proferit depuis
quelque temps par les ordonnances militaires, Le
lieutenant-colonel crut de fon devoir çle pré*
venir les officiers municipaux , & de raffémblèr
fon régiment dans ces quartiers ; car malgré la
demande dii miniftre, on n’a pu les réunir dans
lin feul ; ils -font toujours reftés en quatre quartiers
divers. Le lieutenant-colonel s’apperçut qu’il
lui manquoit beaucoup de monde ; alors i! commanda
d’aller chercher les drapeaux , afin qu’à ce
fpeâacle les fôldats difperfés fe réunifient. N
Lorfque Iè régiment vint à paft'er devant le palais
du vice-légat, la garde nationale , fous les
armes, le reçut militairement , mais lui fit dér-
fenfe de paffer outre , ou qu’elle alioit faire feu.
Le commandai; t fit halte, & dès qu’il fe fut ap-
perçu que fon opiniâtreté pouvoir caufer le trouble,
il fe replia fur l’hôtel-de-rille, pour y aller prendre
des ordres* Il témoigna fes inquiérudes aux officiers.
municipaux. . . . On fat un fécond appel-;
& le commandant s’apperçoit qu’il manque une
compagnie entière, & vingt-cinq grenadiers. Un
lieutenant du régiment avoit été retenu par le
peuple, & én’avbit pu fe>retirer qu’en montrant
deux piftolets qu’il vini dépofer , entre les mains
d’un officier municipal, eiî lui (Jifant puifqu’ils
ne me font plus néeeffàires . je vofis les,remets.. . .
A dix heures .& demie du foir,, la garde nationale
partit avec 74 hommes de Soiffonpois , 6
de Penthièvré , & avec.plufieurs pièces de canon,
pour faire le fiége de Carpentras. Depuis ce temps ,
le régiment de Soiffonnois eft retenu comme pri-.
fonniér .; les. -officiers, fjont infultés même par les
poftes de,, gardes .nationales : peut-être en ce moment
plufieurs font-ils égorgés; car je fuis fur
qu’ils auront mieux aimé mourir., que de manquer
à leur devoir. Je demande donc .que le roi foit
fupplié de donner des ordres pour faire fprtir fur
lé champ le régiment de Soiffopnois de la ville
d'Avignon. Je réponds fur.-ma tête de la vérité.,
du récit que je viens de faire.
M. d’André.'Les trois torn'ités qiii s’étoient raf-
fembléshier pour cette affaire , a voient arrêté
que le régiment de So'iffonnois feroit in'cëffammènt
retiré ; le refte des mefures à prendre exige une
nouvelle délibération.'
La pro.ppfition de M. Latour-Maubourg eft
unanimement adoptée.
M. le préfidènt. M. de Noailles m’obférve que la
compagnie du régiment de Penthièvre, auffi en
garnifon à Avignon , eft dans le même cas , &
qu’elle doit auffi être retirée.
Cette propofition eft adoptée.
M. Bouche. L’ëffemblêe' n’à point entendu ce
que vous venez de mettre en. délibération.
'M. le préfidènt.v J’ai ; fait -part''à i’affenablée : de la
propofition de M. de Noaiiies ; je l’ai mife aux
v o ix , & elle a été adoptée.
Séance dit Mercredi. 16 janvier, 17pi.-
Un de MM. les fecrétaires fait leâure d’une
lettre du préfidènt de l’affemblée l e Carpentras ;
elle eft ainfi' conçue
« Pénétrés d’une vive douleur , plongés-: dans
les alarmes, 8c entourés de périls, nous venons
dépofer dans le fein de l’affemblée que vous pré--
fidez, nos preffantes réclamations fur le traite.-
ment inouï que nous éprouvons à l’aurore de
la liberté dont l’iaffcmblée; nationale fait jouir la
France ; au fein même'de .cette France, fi chère
à nos coeurs , nous fofnmesi «opprimés ; àc, fous
le prétexte ■ fpecieux de nous rendre libres ,' ori
. veut nous affervir on veutr rompre tous lés liens
fociaux , on veut nous livrer à la fureur d’une
faâion ennemie de tout ordre & de notre propre
tranquillité ; votre décret fur la ville d'Avignon
nous faifoit efpèrer le calme , &■ il eft devenu
pour nous lin . moment d’oragè.
Une treupé de brigands ifortis des murs d'Avignon
avec de l’artillerie, accompagnée cl’une partie
de- foldats indilciplinés de Soifibnnois & de