
celui qui. y tombe, maudit infiniment le fort ; il
craint que le.s malheurs d’Avignon ne réagifl'ent
fur Orange ; ç’eft d’après cela qu’il follicite des
troupes réglées , tant pour Orange que pour Avi-
Snon‘ ^ otre comité a penfé que dans aucun cas,
on ne pouyoit en envoyer à Avignon.'— M. de
Broglie fait leélure d’un extrait des regiftres de la
• municipalité d'Orange, en date du 7 juillet, d’où
il réfulte que M. Jofeph Richier, capitaine en fe-
• cond de la compagnie de Saint - Martin , commandant
le détachement envoyé à Avignon ,
annonce que la raifère eft à fon comble , & qu’il
y a tout à craindre pour cette ville. — M. Broglie
fait enfuite leéhire d’un projet, dont voici l’extrait.
,
L’a Semblée nationale, après avoir entendu fon
comité des rapports , décrète que fon préfident fe
retirera par-devers le roi, ' à l’effet de fupplier fa
majefté d’envoyer à Orange des troupês de ligne
pour faire le fervice extraordinaire , dont la garde
nationale a été chargée jufqu’à préfenr.
L’affemblée ordonne l’ajournement à la féance
✓ du famedi an foir. -
Séance du ty juillet lypo.
M. de -Broglie. Avant de vous rappeller le point
_©u vous avez laiffé hier l’affaire d’Orange, je vais
vous annoncer que le voeu du comité eft de vous
engager à prendre le même parti que vous avez
pris pour les- colonies ; c’eft-à-dire , à nommer
parmi les membres de J’aflèmblée un comité de fix
n!5. re£’ pour s’occuper exclufivement de cette
affaire. Il vous a été fait leéture hier de la lettré
du maire d’Orange, par laquelle il vous apprend
,que le lervice devient de jour en .jour plus
pemble a Avignon ; que la mifère y .e f t à fon
comble , & qu’il efl même à craindre que . les
■ malheurs de cette ville ne réagiffent fur Orange.
Je vais vous faire une fécondé leâure du projet
de decret que je vous ai préfenté hier au nom du
comité des rapports.
L’afiemblée- nationale , après avoir entendu
le conipte qui lui a été rendu par fon comité
des rapports , des,lettres. & procès-verbaux en
7 îui,iet. ’ adreffés par M. le maire
oc MM, ^es officiers municipaux. d’O range, a
décrété & décrète que-fon préfident fe retirera
pardévers le ro i, à M e t de fiiplier fa majefté de
donner les ordres les plus' prompts pour qu’il foit
.envoyé à Orange le nombre de troupes de ligne,
qui fera jugé nèceffaire, pour veiller au maintien
de la tranquillité publique & à la fureté de cette
ville.
M. Bouche. La caufe des troubles à!Avignon efl
connue , & je penfe' qu’elle vous honoré" ; c’efl
le defir de vivre fous votre conflitution qui caufe
fon agitation paffagère. Le Comtat Venaiflin ,'oii
depuis le mois de décembre, un efprit malin fouffie
fe venin de làriftocratie (on applaudit dans la
partie droite ) ; le Comtat Vènaiffin, dis-je, n’étoit
pas difpofé à fuivre cet exemple, & ftteftpif
tout en oeuvre pour arrêter les démarches de la
ville d'Avignon. Les moyens que cette petite province
a imaginés n’ont enfin occafionné une explo-
fion & une fin, qu’après que trente patriotes de
la ville: Avignon eurent été couchés fur le carreau ,
que le refte repouffa la . violence par la force légitime.
La garde nationale de la ville d’Orange ,
efl venue à leur fecours ; & c’eft alors qu’on
a remis entre ^fes mains vingt-quatre prifonniers ,
inflrumens funeftes des troubles qui ont agité
Nîmes, Uzès, &. quelques villes de Provence &
du Dauphiné. Aujourd’hui la ville d’Orange vous
demande du fecours ; vous ne pouvez le lui re~
fr}fer 5 elle follicite auffi en faveur d Avignon, &
vous ne croyez pas pouvoir, fatisfaire à cette dernière
inftance, fous prétexte que cette ville n’efl
point françoife. Mais beaucoup de perfonnesigno-
rent peut-être que vous y avez des greniers à
fel j des entrepôts de tabacs : tous ces objets demandent
votre proteâion ; vous la devez à une
ville françoife par fes principes , à une .ville qui
efl utile .à votre commerce, & envers laquelle vous
! êtes engages , par des traités particuliers. Tandis
< que vous différez, une ville voifine, où fe trouve
le cratère de cette infernale machination , tente
de s’emparer de quatre-vingts canons qui font dans
la ville d’Avignon 3 pour les faire tranfporter dans
les villes les plus ariflocratiques du midi. C ’efl
alors que les troubles deviennent de plus en plus
redoutables. Dans le moment où je parle , le mi-
niflre envoie à Avignon, un régiment fuiffe. Pourquoi
tin pareil ordre ? la ville ne veuf recevoir que
les troupes que l’affemblée lui enverra.
• Si ce*régiment entre par d’autres ordres que par
les vôtres’ , tout efl perdu-pour Avignon & le
Comtat Venaiflin , ce pays gangrené d’inimité
contre votre.conflitution. Je. fuis l’organe des provinces
du midi; elles réclament la pôffeflioh d’A vignon
’ les gardes nationales là regardent comme
leur foeur. Son plus cruel ennemi dans ce moment,
c’eft une ville, françoife , qui n’en éfl étoi— ■
gnçe que d’un quart de.lieue : c’eft - là qffon a
fabriqué 18 mille cartouches , & c’eft auffi .là, à
ce que fon affure, que vos ennemis tiennent leur
conciliabule. Avignon demande du fecours , &
y^us ne pouvez lui en refùfer. Si la brave & gé-
nereûfe gardé nationale, parifienne n’en étoit pas
auffi éloignés , comme nous la verrions voler à
fon fecours ! avec quels efforts magnanimes on la
verroit rétablir .dans cette contrée l’abondance &
la paix ! Mais les gardes nationaux d’Orange font
fans doute ici préiens ; ils m’ent,endent ; ils font
François ; ils fe fou viennent dé l’expéditiondel’ar-
mée bordeloife pour Montauban- ;..ils favent' que
l’autel de la patrie efl par - tout., où il y a des
hommes a c ô n fo le r& que la patrie des infortunés
eft par-tout ou il y a des hommes qui Ont
le coeur des François. — Voici.le projet de décret
que j*ai â vous propofer."
L’aftemblée nationale décrète qu’il fera dominé, ]
pour s’occuper de l’affaire d'Avignon, un comité i
de fix membres , chargé d’en faire le rapport fous
quinzaine; décrète en outre que fon prefident fe
retirera pardevers le roi - , pour le fupplier de
donner des ordres pour qu’il foit envoyé des
troupes à ;. . . & à Villeneùve-lès-^Vtg'no/z, & que
là elles attendent- les ordres du pouvoir exécutif,
d’après les décrets de l’aflemblée nationale.
M. l’abbé Maury. La queftion qui vous eft fou-
mife en ce moment, & fur laquelle vous avez
’entendu votre comité des rapports, étoit fimple
dans fon origine ; le feul objet véritablement digne
"d’intérefler votre humanité , c’étoit rélârgiffement
des prifonniers détenus à Orange-. ( Un député d’Orange
prétend que M. l’abbé Maury s’écarte de la
queftion ). Je ne fais pourquoi la queftion: s’eft
généralifée", & comment Jës.vues . du préopinant .
lui ont donné de nouveaux objets. qui dévoient
lui être .étrangers. Jé ne cherche point pour cela à
éluder la véritable queftion ; je rappelle feulement
ce qu’à dît le préopinant. Il vous a; entretenu de
Nîmes, d’Uzès, d'Avignon, du Comtat Venaiflin ,
& le.fort des prifonniers d’Orange èftpréciférnent
le.feul point dont -il.n’ait pas parlé. ( Cinq à fix
membres de la partie gaucn.einterrompent & prétendent
que ce n’eft pasMà la queftion.). L’anaiyfe
èft exafle, & ce n’eft pas moi que Vous pouvez
'acculer de s’écarter de la queftion. ( Lés murmures
de ceux qui àyoient déjà interrompu l’orateur recommencent
). M. l’abbé Maury defeend de la
tribune. — On l’invite à continuer fon difeours.
" M. l’abbé Maury. Des murmures bien prononcés,
m’annoncent de ne pas plaider une caiife qui pour-
roit compromettre des intérêts plus chers que ceux
que je défends. J’abandonne la parole.
M. le préfident. Le calme des délibérations & la
liberté des opinions eft la première loi de cette
affemblée. J’avois fupplié de ne pas interrompre
l ’orateur ; on l’a fait & on a eu tort. Je prie M.
•l’abbé Maury , au nom de l’affemblée , de remonter
à la tribune. -
M. Vabbé Maury. Je ne croyois pas m’écarter de
l’état de la queftion, en- fuiÿant la route qu’avoit
• tracée M. Bouche. Je devois penfer que. puifqu’on
-avoit la liberté indéfinie de s’écarter d’iin rapport
, cette liberté devoit exifter pour tous les
. membres; de l’affemblée. Je fais bien qu’il n’eft
queftion que de la ville d’Orange, &, cependant
M. Boùche vous a toujours parlé d'Avignon, du
. Comtat Venaiflin , en tâchant de .vous faire ap-
; percevoir, à travers ce nuage d’ariftocratie dont
; il. s’eft enveloppé , des principes ariftocratiques ,
• qu’il combat avec un zèle fi édifiant depuis le
commencement de cette affemblée. Il m’eft fans
.doute permis de dire que les troubles de Nifmes
n’ont aucun rapport avec les troubles d’Avignon ;
que ces premiers. ont eu pour prétexte là caufe
de la religion. On fait que Nifmes contient des
proteftans parmi fes habitans , & il n’en exifte-
pas à Avignon. Quels rapports peuvent donc avoir
entre eux des troubles fi différens les uns des
autres ? Ou il faut renoncer à ce fyftême, fi fou-
vent mis en ufâgé, de nous préfenter les villes
de Nifmes & Uzès comme le théâtre du fanatifme ;
C11 -il faut avoitèr que les troublés d’Orange n’ont
rien de commun.avec ces deux villes malheureufes.
On vous a parlé de la ville d'Avignon comme de
votre propriété : le moment n’eft pas venu de
prouver là légitimité du faint-fiège; c’eft une ville
dont il jouit depuis plus de 400 ans , une ville
prifé trois fois par la France & toujours reftituéè.
Louis XIV & Louis X V la rendirent volontairement
à fon foüvérain légitime ; & l’on peut fou-
tenir que ces trois^ entreprifés rétractées font le
plus beau.titre de fâ propriété. Clément V I l’acheta
en 1348 :cîe Jeanne , reine de Sicile. Elle à eu de
tout temps une admihiftrâtiôn féparée & des titres
différens de ceux du" Comtat. Nous fommes bien
loin de nous oppôfer à cétte partie du décret,
par laquelle on propofe de fupplier le roi d’envoyer
des rroupes à Orangé. Nous defirons qu’elle
foit défendue ; que le maire citoyen eftimable ,
jouiffe des avantages qu’il nous a procurés à nous-
mêmes, ; mais fi l’on donnoit plus d’extenfion à
cette difpofition , on préjugeroit .la grande .queftion
fur laquelle l’Europe entière; a, les yeux ouverts:,
celle de favoir s’il eft permis à une ville
dé changer^ de domination & de fouverain.-
La ville d’Avignon n’a point demandé de troupes
étrangères : fi de nouveaux troubles nous prépa-
roient de nouveaux malheurs , alors nous aurions
recours peut-être à la proteâion de François ; mais
nous ne leur demanderions pas de protéger la révolte.
( Je demande , s’écrie M. Bouche , que l’orateur
déclare s’il eft François.; car, s’il èft étranger
, il doit defeendre à la barre ). Je ne regarderai
point comme une peine de defeendre à la
barre. Cet ordre , s’il m’étoit donné par l’afi'em-
blée , m’honoferoit, parce qu’il attefteroit mon
refpeâ & mon patriotifme. La France ' eft bien
maîtreffe de difpofer dç fes■. troupes à;fon gré ;
mais on ne peut pas s’emparer du territoire d’autrui.
Je lé répète encore : fi l’embarras des cir-
cohftances exige des fecours étrangers^ les François
ne nous abandonneront pas. La ville d’Orange
n’a-t-elle pas déjà eu la gloire de faire cefler 'les
meurtres ? Elle a par malheur été trompée fur
ces hommes morts martyrs de la patrie , -dont le
gibet eft devenu un autel patriotique qui immortaliféraîleur
nom dans cette malheureufe province._
Nous vous demandons que l’affemblée fe borne
à accéder aux voeux de la ville d’Orange ; mais
que le décret qu’elle rendra n’indique en aucune
manière les fecours que l’on peut porter à Avignon.
La France a folemnellement renoncé à tout efprit