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■ M. l ’abbé.. . . . . . . . , député'de Lyon. Le fils de
M. Guillain s'eft préfenté au eomité'des rapports ,
& a obfervé que deux des témoins qui ont dépote
contre Ton père font récufablës;1 Tun pour avoir [3
il y a trois mois, voulu foule ver le peuplesl’autre,
pour avoir été attaché à fon père en fa qualité de
juge des comtes de Lyon. Je demande qu'il, foit
furfis à la tranflation de trois aCcufès à Paris , juf-
qn'à ce qu'il fe préfente des charges plus fortes
contre M. Guillain.'1
M. l'abbé Maury. Je ne demanderois point, la
parole fi vous adoptiez l3amendement du préopinant
, & fi le rapporteur ne nous a voit dit avec
aflurance : tout eft découvert. J'ai cru qu'il alloit
répandre une grande lumière fur cette affaire , &
cette lumière ne m'a pas éclairé. Puifque tout eft
découvert, les citoyens doivent être tranquilles;
or rien n'eft plus propre à alarmer que ces inquifi-
tioûs judiciaires qu'on vous propofe.
Permettez-moi de faire le rapprochement, de
ce qui a été dit à cette tribune. Un membre
vous a dit au commencement de la féance , que
trois perfonnes ont été pendues a Aix p a r le ,
peuple ; & dans le même inftant le rapporteur
vous propofe d'ordonner à tous les fugitifs de rentrer
en France. i° . Lorfque les trois citoyens d'A/x
ont été pendus , perfonne n'a été arreté. Ici on
vous propofe de traîner.en prifon , comme criminels
, trois perfonnes accuféès de complots
imaginaires , & contre lefquelles il n'y a que
des déppfitions ifolées. L'autorité de trois dénonciateurs
n'eft rien quand elle eft individuelle.
I l ne faut pas que deux ou trois perfonnes puif-
fent dépoler fur des faits de confidence. Alors
ils deviennent dénonciateurs ; alors ils fe dénoncent
euxrmemes comme traîtres-à leurs concitoyens
5 ils doivent être punis avec line grande 1
févéritéi «— Ces témoins font des hommes qui
fe font .faits complices des accufés, difent-ils ,
pour découvrir leurs complots ; mais les accufés
aurdiént - ils donc été-affez abfurdes pour fe fier
à de pareils témoins ? Les ennemis de la révolution
font déjà allez coupables pour qu'on les
accufe d’être abfurdes ; ils ne le font peut-être
pas tant.... .. Les témoins font déjà fufpeéts ; l'un
d'eux eft dans les liens d'un décret.... Mais j'ai
tort de yous faire cette obfervation : vous n'étes-
pas juges. Je ne traiterai donc point la queftion
particulière, mais la queftion de droit public ,
.& je vous propoferai un amendement. Ce n'eft
pas au nom des accufés que je vous parle/c'eft
en leur faveur 5 & certes c'eft une grandè con-
folation pour des accufés, quand ils ne peuvent
pas obtenir juftice, de voir qu'au moins on la fol-,
licite pour eux. ( Il s’élève des murmures. )
Voici moa amendement : fi vous faites conduire
dans les prifons de Paris les trois accufés , je demande
que vous y faffiez .conduire les trois dé- 1
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nonciateurs. Q.üefslfont .les .'çôiipàblês ? V ou s ».
devez pas le .préjuger. Dans une a ffem b lé e jJ
partiale ; il ne doit jr » ÿ r . de : préfomptiorl
faveur de perfonne j ni de prévention c o n tre
Tonne. Que Faites-vous en c e moment ? vou s vout
écartez de la loi, car vous1 avez déjà d é crétéq ù 'a j.
cun citoyen ne pourrait être.détenu qu'en vertu
d'uiV ' décret d'un j u g e compétent; v o u s allez
prôno’ncêr une 'exception ;à cette lo i, à laquelle
je ne m'oppofe pas'5 vous allez faire traduire
dans les^prifons trois accufés j s ils font calomniés
i^iieîs fecours auront-ils' contre leurs' dénoncia-
| teürs^? Eft-cd four'faire,grâce d e les- m ettre fnt
la même ligne avec trois dénonciateurs juftement
méprifés dans h ville de Lyon. Eft-c'e d o n c une
preuve qu'une dénonciation ? Sous l ’ a n c ie n n e p<j.;
lice , lorfqu'une d é n o n c ia t io n e x t r a o r d in a ir e étoit
; faite contre un citoyen ,' on lé' confrontoitavec
fon: dénonciateur.
Il eft important pour la liberté publique que
Ces formes foient obfèrvées, car vous fa v e z que |
la liberté publique eft compofée des libertés individuelles.'
L'innocence q u i ne peut obtenir
que fon élargifîement, feroit-elle trop favorablement
traitée, quand elle feroit en concurrence
avec la calomnie ? Tout citoyen qui dénonce
doit dire, au ju g e : je demande qu'on arrête un
tel c i t o y e n , mais je demande qu’on m 'a r r ê te avec
lui. Voilà le langage de la probité , de l'honneur;
voilà ce qui 'donne à fout citoyen le d ro it de.
dénoncer légitimement fon concitoyen.... Vous
n avez pas plus de raifon de croire c o u p a b le s les
accufés que les témoins ( Il s'élève des murmures).
J 'i g n o r e lî dans cette partie de la faite o ù l'on,
m interrompt, il y a des lumières qui ne parviennent
pas ju-fqu'à moi : quant à moi,-je déclare que,
parfaitement impartial relativement aux accu fés,,
relativement aux témoins, tout mon d é fît eft dé
ne r ie n préjuger. Si vous aviez- pris pour les dé-'
nonçiateürs de M. Lautrec., les mêmes mefures
que celles que je vous propofe aujourd'hui, ils
n£. fer o ie n t pas reftés impunis. La parité eft par-
fai te : les dénonciateurs de M. Lautrec étoient
atifii fufpséts que ceux des accufés de Lyon..'..
Il y a une confidération plus importante en faveur:
des accufés : l'interrogatoire n'a pas" été fa it par
des jugés. Les officiers municipaux font des en-,
quêteurs d'eftime & de patriotifme, mais ils ne
font pas prépofés par. la loi pour in t e r r o g e r les
citoyens; Ceux de Lyon ont fait le rple d e cap-
tureurs, car iis n'avoient pas le droit de décréter;,
ils ■ ont interrogé les accufés fous chattre privée,:,
tandis que Ix . publicité d é f i n t e n j o g a t ô i r e a été
ordonnée• p a t . v o s décrets.' Quand je v o u s pro-•
pofe de faire' arrêter les "dénonciateurs, c e n’eft
pas que je confente au décret qui v o u s eft pro-,
pofé; mais puifqu’il faut céder à la majorité,^
dirai- a cette majorité : l'e x e m p l e d e M . Lâutrey
doit vous apprendre que tes a c c u f a t e u r s n e font
?as
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f t s infaillibles, & que les accufés ne font pas
îoupaMës,
■ M Sarnave. Le préopinant vous propofe d’exer-
| des fonàions qui ne peuvent être remplies
• e parles juges. Vos fondions doivent fe réduire
lîa furveillance qu'exige la fûreté publiqueÆailïez lux iu^eslefoin de capturer. Si les témoins doivent lire arrêtés, c'eft aux juges à le prononcer. Je
■ afie à Tamendêmenf que j'avpis moi-meme a pro-
L e r ; les deux derniers articles du projet de décret
du comité font trop.foibles. La fociété a non-
feulement le droit de rappeler tous les fonftiaa-
tiairespublics & tous les falariés ; mais elle a encore
L u i ae fupprimer leurs offices, s’ils n'obéiffeut
kas j fa requifition, 8c s'ils refufent de lui prêter
Iferment de fidélité,-Je demande donc que les
Eancoisfugitifs, fonéüonnaires publics ou falariés,
foient tenus de rentrer, non-feulement dans le
royaume, mais de prêter le ferment civique ; 8c
lu'en cas de réfiftance , ils foient privés de leurs
infions 8c'traitemens.
I L'affemblée décide qu'il n’y a pas lieu à délibérer
fur l'amendement de M. l’ abbé Maury.
■ M. Carafes. Ce n'eft pas une chofe facile, que
ie déterminer jufqu'à quel point l'intérêt public
»eut autorifer le corps légillatif à entreprendre
fur la liberté particulière , puifqu'il èft incontef-
iable que la liberté pubKque n'eft que le réfultat Je toutes les- libertés individuelles, La fociété a
gins doute le droit d'impofer à. tout fonâion-
.iaire qu'elle falarie, les conditions les plus convenables
à l’intérêt public; mais j'e fais aufti que
lotfque le Iégiftateur a changé entièrement les
Joix de la fociété, il a dégagé tous les citoyens
||es liens qui les tittachoient à leur patrie. Quand
■ exnreffion de la volonté générale a renverfé la
Bonftitution d’ un pays pour en établir une nouvelle,
la minorité a, le droit de dire : donnez-
Énoi ma propriété", & je m'expatrie; j’ ai coji-
ira&é avec vous, fous une conftitution qui m'ac-
’fordoit le bienfait de la protection ; en détruisant
cette conftitution, vous m'avez dégagé de
mies fertnens ; fe dois être libre de fortir d’une
jatrie dont les loix ne me plaifent plus.
B ( On applaudit ). Çe principe, je le répète ,
ne peut etre contefté d'aucun de ceux qui m'in-
Berrompent, s'ils font conféquens aux principes
qu'ils ont établis ; je les invite à, fe rappeller
Qu’ils ont donné des éloges & des applaudifle-
Biens à la mémoire des proteftans qui ont quitté
m France lors de la révocation de l’édit deNantes,
: ÿ rce qu'ils ne vbuloient pas fe foumettre à cet
gdit. J'adopterois. le principe que le Iégiftateur
#eut impofer aux fonctionnaires publics & aux
falariés toutes les,-, conditions qn'il juge convex
e s ; mais fans détruire tout principe de juf-
vous ne pouvez priver de leur traitement
Ajfemblée Nationale. Tçm. IL Débats«
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ceux à qui ces tçaitemens n'ont été donnes qu'en
compenfation d’ une propriété. Les princes du
fang ont un traitement, mais c'eft une indemnité
du patrimoine qui leur a été enlevé, ( Il
s'élève des murmures ). On ne foutiendra pas
fans doute que les "princes de la maifon de
France font nés fans propriétés ; on ne. foutiem
dra pas que fi l a nation n'avoit pas voulu rendre Le
domaine indivifîble 8c inaliénable, les princes
n’euifent confervé chacun un domaine particulier
; on ne foutiendra pas fans doute que les
apa.nages foient une compenfation .égale de ces
portions de domaines dont on les a privés. Les
apanages ou les traitemens qui les remplacent
font donc, entre tes mains des princes , non
pas un falaire, mais une propriété ; ils doivent
être fournis aux mêmes règles que les autres
propriétés. Je pourrois ajouter une confidération
importante contre la propofition qui vous
eft faite, de rappeller lés princes ; je ne ferai
que l'indiquer feront-ils en furèté dans ce
royaume ? .( I l s'élève des murmures).
M. l'abbé Maury ( s'avance au milieu de la
faite). Qui veut m'afîurer de ma vie ?
M. Carales. Je crois pouvoir me. difpenfer
d'entrer dans les triftes détails qui pourroient-
appuyer l’ obfervation que je viens de faire. Je
me contente de demander l'ajournement concernant
les réfugiés françois.
M. Ledeift de Bcutidoux. La queftion n’ in-
térefle pas un grand nombre de citoyens; elle
n'eft pas conftitutionnelle : on peut donc la traiter
à préfent. Tout le monde a le droit de quitter
fon pays., & d'emporter fa propriété individuelle:
ainfi la queftion eft fimple ; les apanages font-
ils une propriété individuelle ?
M. Barnave. Cette queftion ne doit pas être
traitée en c e moment ; je ne l'ai pas préjugée
par le décret qui vous eft propofe , puifqu'il n'y
eft queftion que de traitement & de falaires , &
non pas d'apanages,
M. Riquetti {dit Mirabeau l'aîné). M. Bouti-
doux vient d’avancer un principe qu'il a dit
plufieurs fois n'être contefté par perfonne. J’ea
prends aéfce, & je déclare que je le contefte.
Il eft faux que les membres de la dynaftie, aient
les mêmes droits que les autres citoyens. Quoique
les projets des ennemis de la révolution ne
paroiflent pas mieux conçus que leurs fyftêmes
politiques * les défordres qu'ils excitent dans l'in-
térieur’tfo royaume , les inquiétudes &: les" alarmes
qu'ils produifent , tout me femble provoquer
votre furveillance & yotre févérité : non
que je craigne pour -la liberté, qu'une grande
narion a acquife, & que trois millions d'hommes
-défendent ; mais dans tous les cas il eft iov*
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