
cette définition diftinâe de chaque pouvoir, qui
feule exclut toutes les tyrannies.
Je dois rappeller à l’aflemblée que les gardes
nationales, dont le zèle eft auffi confiant qu’é nergique
, brûlent de trouver dans nos décrets
leur place conftiuitionnelle , 8c d’y lire leurs devoirs
; mais je conviens que le travail judiciaire
prefle d’autant plus, que trop fouvent la loi rencontre
dans fes principaux organes des adverfai-
res, 8c que des faélions de tous genres peuvent
encore tenter, dans leurs coupables égaremens ,
d’oppofer des obftacles ou des prétextes à l’éta-
bliflement de l’ordre public.
Et peut-être quelque impatience eft-elle per-
mife à celui qui , ayant promis au peuple , non
de le flatter, mais de le défendre, s’eft promis à
lui même, que la fin de la révolution , en le replaçant
exactement où il étoit lorfqu’elle commença,
le laiflerôit tout entier à la pureté de fes fou-
yenirs.
M. de Toulongeon. Tant que le pouvoir judiciaire
n’eft point organifé , nous n’avons rien fait ;
s’il étoit poflible qu’il ne le fut pas pendant que
nous fommes réunis , le pouvoir judiciaire nous
déforganiferoit quand nous ferions féparés. Je demande
que la difcuflion commence demain , & que
tout ce qui concerne la confiitùtion , I’établifle-
ment 8c les fondions de l’ordre judiciaire, foit décrété
pendant la prochaine tenue des affemblées
de département 8c de diftrid , 8c qu’elles ne puif-
fent être féparées ni prorogées , jufqu’à ce qu’elles
aient procédé à l’éledion des officiers qui compo-,
feront les tribunaux.
M. le comte de Clermont-Tonnerre. La motion pré-
fêntéè par M. de Menou me paroit d’une telle importance,
8c tellement propre à rapprocher 8c à réunir
tous ceux q u i, .différant peut-être d’opinion,
ne diffèrent pas de fentiment, 8c font également
attachés à la confiitùtion , que je me reprocherais
de vous arrêter un moment. Si quelqu’un veut parler
contre la motion, je réferve la parole pour lui
répondre.
M. Gonpllleau. Je propofe en amendement,
que la féance du matin ne foit pas divifée en deux
parties.
M. de Montlaufier. Je demande que le comité
de confiitùtion fixe le terme de la feflîon aduelle.
( Il s’élève beaucoup de murmures ). Je le demande
pour la liberté, pour la confiitùtion ; je le demande
pour l’ordre ; je le demande pour la
paix; je le demande pour la tranquillité publique.
Je demande que le comité dife : Voilà
ufie aflemblée permanente revêtue de tous les
pouvoirs; mais ce monftre , fi j’ofe le dire,
ne fera pas éternel. Il faut en fixer là durée ,
foit à fix mdis, foit à un an , foit à deux anSi. .
( Les murmures ne laiflent pas achever M. de Mont"
lauzier ).
_ M. Charles'de Lameth. Ce n’efi point pour combattre
ni M. de Menou , ni M. de Toulongeon , que
j’ai demandé la parole , mais Amplement pour les
accorder. C’eft pour rappeller qu’il y a aujourd’hui
trois femaines que vous avez décrété les articles
qui font prendre à l’armée fa place dans la confi
titution. Ces articles ne font point acceptés. Je
rappelle avec quelle activité l’afleroblée deman-
doit autrefois cette acceptation ; je rappelle qu’à
Verfailles un feul jour s’étant écoulé , Paflemblée
délibéra qu’elle ne défempareroit pas que les articles
conftitutionnels ne fufient acceptés. C’efi avec
cette énergie, c’eft avec ce courage que rien n’a
pu ébranler, que nous fommes arrivés à Pépoque
où nous nous trouvons ; & je puis dire qu’en ce
moment même, nous avons encore befoin de ce
courage & de cette énergie.— Je demande que dans
le jour, M. le préfident fe retire pardevers le roi,
& que demain Paflemblée ne défempare pas que
l’acceptation n’ait été donnée aux décrets conftitutionnels
fur l’armée.
M. de Montmorency. La motion de M. de Menou l
par fes motifs & par fes avantages reconnus , ne
demande pas une plus longue difcuflion : je propofe
de délibérer fur le champ , 8c d’adopter l’amendement
de M. Goupilleau. Je demande la
queftion préalable fur la prapofmon de M. de
Montlauzier. Il me femble extraordinaire qu’à l’infi
tant même où nous témoignons le defir d’accélérer
nos travaux , on vienne les arrêter encore.
No'ûs ne pouvons fixer un temps que nous ne coii-
noiflons pas, & dont la durée dépend peut-être
de plwfieiirs motions comme celle-là.
M. de Sj Martin. Vous (avez que tous ces
grands corps appelles parlemens, font anti-révolu-
tionaires. Une lettre que j’ai reçue hier de Tou*
loufe m’annonce que ce parlement fe diftingue
par fon . ariftocratie. Il emploie toutes fortes de
moyens polir empêchèr l’exécution de vos décrets
, 8c notamment la déclaration pour la contribution
patriotique. La chambre des vacations
travaillé beaucoup , mais elle ne juge que- les
grands procès par écrit , 8c très-peu de procès
d’audience : les audiences ne durent qu’une demi-
heure.
MM. de Cazalès & de Lautrec demandent la
preuve de ces faits.
M. I évêque de Dijon. Je regarde la motion de
M. de Menou comme une addition au réglement..
L’afîemblée a fouvent dérogé à ce réglement ; je demande
qu’elle prenne l’engagement de ne déroger
jamais à l’ordre de travail propofé, quand il fera
décrété.
On ferme la difcuflion.
Uamèndement de M. Goupilleau eft adopté ;
c'eft-à-dire, qu’on retranche du projet de décret
l’article II & IIL
La propofirion de M. Toulongeon eft ajournée.
M. Montlauzier demande avec infifiance qu’on
délibère fur la fienne.
L’aflTemblée décide qu’il n’y a pas lieu à délibérer.
Le décret préfenté par M. de Menou eft
adopté.
M. de S. Fargeau. Je demande la divifion de 3a motion de M. de Lameth, & je penfe qu’il faut
fe borner à charger M. le préfident d’infifter près
du roi fur l’acceptation des décrets rendus fur la
confiitùtion de l’armée. Il eft inutile de développer
les motifs de prudence, de refpeâ & de
politique fur lefquels ma demande eft appuyée.
La motion de M. de Lameth eft divifée 8c décrétée
conformément à l’avis de M. de S. Far-
geau.
Séance du. iç avril vyço.
M. le Chapelier. Le comité de confiitùtion doit
arrêter vos regards fur un objet de la plus haute
importance , parce qu’il eft le dernier efpoir des
ennemis de la patrie, le terme auquel ils fe flattent
de faire échouer la confiitùtion, de détruire 4a liberté publique, & les efpérances de bonheur
que l’afiemblée nationale a fait concevoir à tous
les François ; nous voulons parler du projet de re-
nouveller cette aflemblée. Ces ennemis fe fondent
fur ce que quelques députés ont des mandats à
terme-; ils confondent tous les principes pour s’af-
ftirer les moyens de les violer ; ils abufent même
de la compofition vicieufe de Vafiemblée nationale.
Notre obligation eft d’éclairer ceux, qu’on
veut égarer. C’eft fans doute une vérité incontefi
table, que la fouveraineté réfide dansîa nation,
8c que la 'nation peut retirer les pouvoirs qu’elle
a délégués ; mais ce principe eft fans application
dans la circonftance préfente. Ce feroit détruire la
conftitution , que de renouveller Paflemblée chargée
de la faire, avant qu’elle fût finie. La confti-
tution , dans tous les temps, doit être fixe ; de
fimples législatures ne peuvent la changer ; l’aflemblée
qui forme la conftitution , a des pouvoirs
différons de.ceux'des législatures : celles-ci ne doivent,
pas toucher à la conftitution à laquelle elles
font foumifes. . _.. Chargés., par nos mandats ,
d’examiner la conftitution, nous avons été créés
par le .peuple aflemblée conftituante. Nous avons
'Commencé la confiitùtion ; notre devoir eft de la
finir : la nation, par des aiftes multipliés, a con-
facré notre pouvoir. Si line autre aflemblée étoit
élue , & qu’elle n'eût pas les mêmes pouvoirs que
celle-ci, la conftitution feroit imparfaite. Si les
pouvoirs étoient les mêmes, cette aflemblée pourvoit
faire des modifications 8c prendre des mollirions
contraires t voilà ce qn’on fe promet des in-
finuafions perfides que l’on a répandues. II fera
fans doute facile de trouver des erreurs dans les
inftitutions nouvelles ; la nation , à une époque
donnée , fera revifer la conftitution ; mais il faut
laifler les pafiions s’éteindre & les regrets s’oublier.
Que Paflemblée dife donc aux nouveaux corps
adminiftratifs , qu’il eft des gens qui voudraient
voir périr la conftitution & la liberté , & renaître
la diftinftion des ordres , la prodigalité du revenu
public, 8c les abus qui marchent à la fuite du défi
potifme...
M. T abbé Maury. I l faut envoyer ces gens-là
au châtelet. (Extrême agitation des voiftns de
M. l’abbé Maury ; grands cris ; menaces du gefte
8c de la voix ).
M. le préfident. Quand, on fe permet d’interrompre
un opinant , de l’interrompre avec violence
, 'ce n’eft pas à cet opinant que l’on manque,
mais à toute Paflemblée : M. l’abbé, je vous rappelle
à l’ordre.
M. le Chapelier. Nous parlons dans ce moment
d’après la connoiflance des mouvemens qui fe font
dans les provinces. Ne craignons pas que l’on dife
que nous voulons perpétuer notre million : au
zèle que nous mettons dans nos travaux , à la
fréquence de nos féances , le public ne fe laifle
pas tromper ; il fait ce que coûte à chacun de
nous uu an d’abfence , loin de fa famille , loin
de fes affaires ; 8c que fi nous écoutions notre intérêt
particulier , nous demanderions bientôt à
nous retirer dans notre patrie ; mais nous nous
devons à l’état.. . . Il eft ■ impoflible que la confi
titution ne foit pas faite par une feule aflemblée ;
il eft impoflible qu’elle le foit par deux. Nous ne
pouvons encore indiquer la fin de nos travaux ; mais
dans bien peu de mois nous déterminerons cette
époque. Il feroit d’ailleurs peut-être impoflible
de faire en ce moment les élections dans les af-
femblêes qui vont fe former : aucun département
n’eft encore en état de déterminer le nombre de
députés qu’il devra fournir , parce que le calcul
des bafes fur lesquelles la proportion doit être établie
, n’eft point encore fait. . . Une autre quefi.
tion fe préfente. Plufieurs députés ont des pouvoirs
limités ; il eft impoflible qu'ils foient remplacés
à l’expiration de leurs pouvoirs : fi cependant
ils fe retiraient, Paflemblée ne devrait point
=s’en appercevoir, elle n’en feroit pas moins complète
oc légale: chaque député n’eft pas le député
d’un haiiliage ; mais nous verrions avec regret des
collègues éclairés s’éloigner de nous. Ces principes
nous aflùrent l’avantage de les conferver: les
mandats donnés pour une= année avoient pour
objet la réforme de la conftitution : les commet-
tans croyoient que l’année feroit fuffifante ; c’eft
à cette .daufe intégrale que toutes les autres dardes
•font foumifes ; c’eft .elle qui fixe l ’étendue & h