
hommes d’une capacité éprouvée dans la leritèur
des premiers grades, puifîent preffer leur marche
& arriver au terme du commandement dans un
âge où les forces morales & phyfiques ne foient pas
encore épuifées, & où l’énergie de l’ame & les
leçons de l’expérience fe réunifient pour faire efpérer
de ces conceptions heureufes qui affurent le fiiccès
des combats.
Enfin, le commandement des a rmées, par les rares
talens qu’il exige, ne peut être évidemment attribué
qu’au roi.
Quant a la proportion à établir entre le nombre
des places attribuées à l’ancienneté , & celles dont
le choix doit difpofer pour la promotion aux grades
où ces deux modes doivent concourir , nous
avons confidéré que l’intérêt du plus grand nombre
& le principe de l’égalité fe trouvoient exclu-
fivement dans le mode de ^ancienneté ; que par
conféquent ce mode avoit pour lui la loi générale,
& que l’évidence de l’intérêt public pouvoit feule
juftifier les exceptions qui y feroient apportées.
Nous avons donc réglé nos difpofitions fur ce principe
unique & décifir, & nous avons attribué à l’ancienneté
tout ce que la poflibilité & le fuccès du
fervice nous ont paru permettre.
Nous avons même fait plus ; nous avons penfé
qu’indépendamment de la néceflité de parcourrir,
par l’ancienneté feule, l’efpace, depuis le grade de
lous-lieutenant jufqti’à celui de capitaine, il étoit
néceflaire d’établir encore deux principes pour régler
la marche de ceux qui arriveroient par le choix :
Tun eft l’impoflibilité de franchir aucun grade ,
l’autre eft la nécefiité de s’arrêter au moins deux
ans dans chacun.
De ces vues & des proportions que nous avons
établies entre le choix & l’ancienneté , nous avons
efpéré , Meflieurs, deux grands avantages ; c’efi
que tandis que l’efpoir de s’avancer par le choix
exciteroit l’émulation , féconderoit le talent & con-
courroit à la difeipline, la certitude d’arriver par
l’ancienneté éloigneroit de tous le découragement,
& exclueroit une dépendance exceflive 7 humiliante
& dangereufe.
Il me refte à vous préfenter nos idées fur le
mode & la nature du choix que nous avons cru
devoir préférer pour la promotion aux diverfes
places. Une vue générale fe préfènte d’abord &
découle des principes que j’ai annoncés, en parlant
de l’impoflibilité de l’ele&ion des officiers par les
foldats; c’eft que ce choix, en aucun cas , ne'peut
être attribué aux inférieurs. La première force, le
premier befoin des armées, c’eft la difeipline ; & ,
comme je l’ai déjà dit, le moyen le plus sûr de
l’anéantir , feroit d’attribuer à ceux qui obéiffent,
le pouvoir de nommer ceux qui dévoient les commander.
En général, le choix fait par les fupérieurs , s’il
eft dirigé par des loix qui préviennent Finjuftice,
l’abus de la faveur, & l’excès de là dépendance ;
ce choix eft à la fois un des moyens les plus doux
d’établir la Subordination, un des moyens les pli
juftes de réalifer & de rendre févères les divers
genres de refponfabilité auxquels peuvent être fou,
mis ceux qui gouvernent & qui commandent.
En admettant ces vérités , nous avons cru quff
l’application exigeoit deux modes de choix diffé-
rens ; l’un , pour élever aux grades , depuis le
caporal jüfqu’au lieutenant; l’autre , à commencer
du grade de lieutenant - colonel qùfqu’au général
d'armée.
Le choix pour les grades de cette dernière claffe •
ne peut certainement être attribué qu’au roi tout
autre fupérieur qui l’exerceroit auroit un pouvoir
qu’aucûn particulier & fur-tout qu’aucun chef de
troupe ne doit pofféder dans un état libre & monarchique.
Nous n’avons donc pas douté, que dans
la néceflité de donner à la volonté , dirigée par
des loix fages, la fon&ion de conférer une partie
des places àu-deflùs du grade de capitaine, le roi
devoit être le feul dépofitaire de ce pouvoir.
Mais il nous a paru que d’autres confédérations
dévoient nous diriger fur l’avancement dans les grades
inférieurs , depuis le foldat jufqu’au lieutenant. Le
mérite des hommes qui rempliflent ces places ,
confiftant davantage dans l’afliduité à leurs devoirs,
dans le zèle pour le fervice, dans l’intelligence
journalière de leurs fondions, que dans des talens
qui ont reçu tout l’éclat d’une éducation foignée;
ce mérite ne peut être jugé ni parle roi, ni même
par ceux qui gouvernent en fon nom ; ces droits
ne peuvent être juftement reconnus que par ceux ;
fous les yeux defquels ils s’acquièrent, & en leur;
remettant la préfentation des fujets , vous faites
tournerauprofit.de la difeipline, de lafubordi-i
nation , fi difficile à obtenir pour ce grade immédiatement
fupérieur , toute l’influence de bienveillance
& de fortune que vous remettrez entre leurs
mains.
Nous avons cru que les fous-officiers , à qui juf-
qu’à ce jour les loix militaires n’ont donné, aucune
influence fur l’avancement, de leur camarade, pour*
roient avec utilité pour le fervice, partager avec
le chef de leur compagnie & celui du régiment,
le droit d’élever jufqu’à eux un foldat ou un fous-
officier de grade inférieur.
Non-feulement cette forme eft propre à attirer
aux fous-officiers, de la part de leurs inférieurs
immédiats, une obéiflance & un refpëél, que l’expérience
prouve chaque jour qu’il eft extrêmement
difficile de faire obferver ; mais en intérefiant les
fous-officiers à faire de bons choix pôur l'honneur
du grade auquel ils appartiennent, elle exerce, &,
pour ainfi dire, elle cultive en eux un fentitnenr
de délicateflè & de fierté, qui ne fauroit être trop
encouragé dans le militaire.
L’élévation aux différens gradés de fous-officie^,’
doit être opérée par le cjhoix fuccefiif du capitaine
& du colonel ; niais ce choix ne petit s’exercer que
parmi les fujets tjui auroient été préfèntés par &
fens-.efficiers du grade auquel le candidat doit être
1 par-là , on fiait pour l’égalité tout ce qui eft mili-
virement poflible, en âppellant à concourir au choix
ceux des ftipérieurs qui fe rapprochent le plus de
l’état de camarade ; par-là aufii on obtient la plus
grande probabilité d’avoir de bons fujets, puifque
après s’être garantis, par la défignation des fous-
officiers , l’honneur & la probité de ceux qu’ils pré-
fentent, on s’aflùre , par le choix du capitaine &
du colonel, la fageffe & la capacité de celui qu’ils
; croient devoir employer.
Enfin, nous avons été déterminés à vous pro-
pofer cette méthode, en obfervant qu’elle étoit celle
qui formoit ces compagnies, ft juftement célèbres,
de grenadiers françois ■, & par les excellens effets
qu’elle a produits dans quelques régimens, où des
chefs amis du foldat ont eflàyé de l’employer;
I la compofition des fous-officiers y a été reconnue,
par expérience, meilleure que dans toutes les autres.
L’ordre & la difeipline y ont été entretenus par-
! fairement par l’influence de ce moyen,
i Ces épreuves, jointes aux raifons que je viens
de développer , nous ont paru ne devoir laiffer
aucune incertitude fur l’adoption d’une forme, qui
d’ailleurs, eft propre à remplir les voeux raifonna-
bles de tous les foWats & de tous les fous-officiers
i de 'iarmée.
Il me refte à dire comment le foldat parvenu au
premier grade de fous-officier , arrivera enfin à ce-
[jui d’officier, & fera fait fous-lieutenant.
Quoique en général l’ancienneté nous ait paru un
! mode d’avancement peu applicable à ceiix dont la
[ capacité n’a pas fubi l’épreuve d’un examen, .nous
n’avons pas penfé que ce principe pût s’appliquer
juftement à ceux que le choix a fucceflivement portés
au premier grade de fous-officiers. Si d’une part
il eft avantageux pour la difeipline & pour la honne
compofition des corps, que le choix des officiers
confère une partie des places aux fous-officiers, qui
doivent être admis parmi eux, il eft également convenable
que le fort d’un fous-officier, qui auroit
affez bien mérité pour être promu au grade immédiatement
inférieur à celui de fous-lieuienant, ne
dépende pas néceffairement pour le refte de fon
avancement de la volonté de les chefs. Ici les motifs
Refont plus entièrement les mêmes que pour l’avancement
aux différens grades de fous-officier : le candidat
a plus de droits acquis à s’avancer, & les offi-
cier$, à qui feuls le choix peut en être remis, ne font
pasauffi près du rang de camarade , & ne feroient
pas guidés dans leur choix par des motifs exaélement
«s memes que ceux qui pourroient porter les capo-
as’aflocier un foldat ; il nous a paru , en un mot,
Mcffieurs, que le paffage au grade d’officier ne ref-
|3embloit exaélement ni à ce qui lui eft fupérieur, ni
jace (jui lui eft inférieur ; qu’il .devoit être régi par
^ne réglé mixte. Que la difeipline auroit d’avantages,
1 la moitié des places de fous-lieutenant affeélées
?ux fous-officiers, étoit au choix des officiers du
corps, .& que la juftice exigeât que l’autre moitié
fût affûtée à l’ancienneté!
Ainfi le foldat que fa bonne, conduite aura porté
par le choix jufqu’au premier grade defous-officier,
fera dès-lors affuré d'arriver, par l’ancienneté feuie ,
aux grades fupérieurs, & fa carrière militaire n’aura
d’autres limites que la durée de fes fervices.
En adoptant ces principes, nous croyons que lVr-
mee françoife fera â l’abri de ces changemens contir
nuels,qui depuis tant d’années y entretiennent l’inquiétude
& y portent le découragement ; mais leur
application au moment aéiuel, n’eft pas auflî facile
& ne fauroit être àuffi parfaite qu’elle le fera dans
l’avenir.
En vous préfentant ces principes , j’ai fuppofé
l’armée active exiftant ifolément & puifant toujours
en elle-même les individus qui doivent remplir les
grades qui vaquent fucceflivement. C ’eft ainfi en
effet qu’elle devrait être, & c’eft ainfi qu’elle fera ,
quand toutes les traces des anciens abus auront entièrement
difparu.
- Mais ce moment n’eft-pqs encore arrivé. Par une
fuite dés opérations, des chângemens, des réformes
auxquelles les miniftrés qui gouvernoient l’armée fe
font fucceflivement livrés , il exifte hors de l’armée
Une multitude ; d’officiers dont l’aâivité eft fuf-
pendue, dont un grand nombre demande à être employé
, & dont quelques-uns ont drbit de l’obtenir.
/ Nous avons penfé, Meflieurs, qu’il étoit d’une
grande iimportance, ifoit pour l’intétêt du fervice ,
foit pour la juftice qui eft due à ceux qui s’y livrent
aéiivement , que l’arrivée aux grades ne fût pas
pour ainfi dirè engorgée, que l’avancement de ceux
qui fervent ne fût pas confidérablement retardé par
le partage qui ferait fait-des emplois entre eux &
cette efpèce à’armée d’officiers oifive & expeftante.
Perfuadés de la néceflité de prendre des mefures dé-
cifives à cet égard, nous avons réduit la faculté
d’être employés, à ceux qu’un droit évident & une
capacité préfumable y appellent tous. Ceux auxquels
les ordonnances ne donnoient pas le droit d’être
remplacés, ceux dont l’ancienneté des fervices réclame
des retraites , ceux qu’une longue inaflivité a
rendus pour ainfi dire étrangers au fervice, nous ont
paru ne devoir point être appelles à concourir aux
emplois vacans : une partie confidérable étant ainfi
éloignée, nous avons deftiné à ceux qui reftoient
une part d’avancement fuffifante pour attacher au
fervice ceux qui ont un goût décidé pour cette pro-
feflîon, fans porter le découragement parmi ceux à
qui des fervices actifs, & non interrompus, ont
donné les premiers droits,
Après vous avoir fait connoître les principes généraux
qui nous ont guidés fur l’admiflion à l’avancement
, il me refte à mettre fons vos yeux l’ana-
lyfe rapide des difpofitions qui nous ont paru devoir
en être la cqnféquence.
Vous avez vu la néceflité exigée par la nature des
chofes & le bien du feryiee, d’admettre immédiate