
la liqueur le remplace; elle monte \ & continue"
à couler jufqu’à ce qu’il ne refte plus rien dans
le vaiffeau que l’on veut vider.
Par ce moyen , on eft difpenfé du foin de tirer
le vin , de le tranfporter , .& fans prefque .
aucun attention ; & on tranfvafe ou on foutire
les liqueurs , fans les brouiller, ni les mêler avec
la lie qui pourroit fe trouver dans l’ancien tonneau
ou elle s’eft dépofée. Ce fiphon eft connu
fous le nom de pompe.
On eft fouvent obligé » pour goûter le vin , ou
pour donner de l’air à la pièce dont le vin tra-
vailleroit, ou encore pour pouvoir le tirer , de
faire plufieurs ouvertures à la futaille qui le renferme.
Pour cela, on a une efpèce de vrille »nommée
foref, dont les pas font très-peu relevés, avec lequel
les tonneliers percent le tonneau au-deffus du
vin, afin de donner une entrée à l’air, pour remplacer
dans le poinçon le vin qui fort par la ca-
nelle.
Quand on veut tirer par une pareille ouverture
une petite quantité de vin pour l’examiner
ou le goûter, on fait le trou plus bas ; & en-
fuite le vin étant tiré , on ferme cette ouverture
avec un petit cône de bois qu’on nomme foffet.
Les tonneliers font dans l’ufage de faire les foffets.
Leur conftru&ion n’exige pour outil qu’un couteau
, & ne demande pas une grande adreffe.
Ils les font en fe promenant. Ils coupent en pointe
une petite baguette , ordinairement de coudre ,
ou d’autre bois tendre ; ils l'arrondirent, abattent
la pointe , & coupent le foffet à la longueur
d’un pouce ou un pouce & demi. Ce foffet remplit
l’ouverture qu’on a faite avec la vrille : on
frappe deffus affez pour l’y retenir.
Quand on goûte le vin d’un tonneau dépofé
dans fine cave, on le perce dans la partie fu-
périeure , & l’on n’enfonce pas le foffet trop
avant, pour pouvoir le retirer une autre fois ,
s’il étoit à propos de donner de l’air à la
pièce.
Nous avons dit que le tonneau étoit percé d’un
trou dans le bouge, & que cette ouverture for-
moit ce qu’on appelle le trou du bondon. C ’eft
par-là qu’on entonne le vin.
Le tonneau rempli de liqueur, on ferme cette
ouverture avec un bouchon de bois que l’on nomme
bondon. Ce font fouvent les tonneliers qui font
les bondons : nous allons décrire leur pratique. J
" Dans certaines villes où l’on fait beaucoup de
futailles, les tonneliers font faire leurs bondons
par des tourneurs ; & par conséquent ce travail
fait fur le tour , ne demande de nous aucune
explication. Mais les tonneliers dans les campagnes
font eux-mêmes leurs bondons par une méthode
fimple, ai fée & affez précife.
Le bondon eft un coin ou un cône tronqué
de bois , qui a la même forme que l’ouverture
pratiquée à la futaille. Quoiqu’il ait peu de hauteur
; il faut cependant qu’une de fes bafes foit
plus large que l’autre , afin qu’il faffe quelque
réfiftance a mefure qu’on le frappe &. qu’on le
force à entrer dans cette ouverture.
L ouverture du bondon d’une pipe eft plus
grande , & porte plus de diamètre que celle d’un
poinçon. Aofli les dimenfions des bondons doivent
elles être différentes.
Le tonnelier qui fait lui-même fes bondons,'
a'plufieurs morceaux de bois d’un pied de long »
amincis par une de leurs extrémités , de façon
qu on puiffe les manier. L’autre extrémité eft aplatie,
& le diamètre de cette bafe eft égal à celui
du bondon que le tonnelier veut former. Cette
bafe eft garnie-de trois ou cinq pointes de fer,
qui débordent le bois de trois à quatre lignes.
On appelle ces efpèces de bâtons ainfi arrangés,
des mandrins.
Quand le tonnelier veut faire un bondon, par
exemple, pour un quart , il prend le mandrin
qui convient pour cette petite' futaille. Il a de
petits morceaux quarrés d’une douve épaiffe, ou
un bondon d une plus groffe pièce, qu’il veut
diminuer pour le rendre propre à un quart. Il
enfonce les pointes du mandrin dans la planche
ou le vieux bondon. Il l’affujettit ainfi ; & en
retenant le mandrin perpendiculairement, il le
pofe fur le charpi, & taille le bondon en fui-
vant le contour du mandrin. Il l’unit &. l’arrondit.
Quand cette opération eft faite , il retire foit
mandrin de deffus fon bondon.
Il conftruit de la même façon les bondons pour
des futailles , en choififfant H mandrin dont la
furface intérieure garnie de pointes7 a un plus
grand diamètre que celui qui fert pour les quarts.
En ne tenant point fa cochoire perpendiculaire,
mais inclinée & appuyée contre le mandrin qui
eft conique, il donne au bondon la figure d’une
tranche de cône, & en forme une efpèce de
bouchon, ceft-à-diré, un coin circulaire, propre
à fermer l'ouverture dont nous avons parlé.
S’il arrive qu’un bondon fe trouve trop petit
pour l’ouverture de la pièce; pourlo.s, au lieu
8’en faire un autre , on prend des chiffons de
toile, quelquefois garnis de glaife ou de graine,
& l’on en entoure ce bondon pour augmenter
fon diamètre, & le faire tenir dans l’ouverture,
fans qu’il laiffe perdre la liqueur.
Le chiffon fert aufli à remplir les plus petits
efpaces , que le bois moins élaftique garniroit
mal.
Nous ayons dît: que fouvent , fur-tout dans
les provinces, les tonneliers fendoiéât eux-mêmes
l’ofier dont ils fe fervent pour attacher leurs
cercles ; & nous avons promis , en parlant des
cercles & de l’ufage que l’on y fait de l’ofier,
de donner les moyens qu’ils emploient pour le
fendre. Nous ne l’avons pas placé à l’article du
reliage des tonneaux , afin de ne point interrompre
ce que nous y traitions.
Les tonneliers achètent Vofier. Les vignerons
le cultivent fouvent dans les filions de leurs vignes.
Nous avons dit qu’on employoit,, pour faire l’ofier,
l’efpèce de faule dont l’écorce eft rouge. On coupe
tous les ans dans l’hiver les jeunes pouffes de
ces arbres, quand la fève commence à y monter.
Les vignerons vendent cet ofier, partie aux
vanniers, pour être dégarni de fon écorce , partie
aux tonneliers, pour conferver fon écorce, mais
être fendu, & devenir propre à lier leurs cercles.
Les tonneliers des environs d’Orléans prétendent
qu’il faut que leur ofier foit fendu en trois
ou en quatre , & que les petites branches feulement
partagées en deux, ne feroient pasjaufli bonnes.
J’augure que par l’obfervation ils fe font affu-
rês que ces branches féparèes feulement en deux
dans leur diamètre , en fe léchant , travaillent, &
peuvent encore fe refendre, fe partager & perdre
de leur force. Quoi qu’il en foit, pour les
partager en trois ou en quatre 7 voici comme
s’y prend le tonnelier, ou le vigneron feadeur.
Il prend une branche d’ofier , & la tient par
ion bout menu , qui termine la-pouffe de la dernière
année. Il la partage avec un petit couteau
à courte lame, & un peu recourbé , en quatre
parties, d’abord en deux, enfuite en trois ou en
quatre, feulement dans la longueur', de quelques
pouces , de façon que la branche foit divifée en
portions égales qui fe réunissent toutes au centre
; enfuite avec fes doigts, il oblige chaque brin
de commencer à fe quitter; & quand il les a
ainfi féparés dans une partie, il fe fert du fen-
doir ,.qui eft un petit bâton arrondi , aifé à manier,
& dont l’extrémité eft partagée en trois ou
en quatre quarts par des filions qui les féparent.
Ces^ filions font formés pour recevoir les trois
ou les quatre parties de la branche, & les angles
que forment ces filions étant un peu tran-
chans, fervent à divifer la branche.
Le tonnelier ayant une fois placé les extrémités
de la branche fur le bâton ou fendoir, ne
fait plus que les appuyer fur les angles , en pouffant
de l’autre main le fendoir. Il parvient ainfi
à divifer les branches en trois ou en quatre parties
jufqu’à l’extrémité la plus menue & la plus
pointue de la branche. Il arrange fon ofier fendu
par bottes de cent ou cent cinquante brins, &
enfuite il le met dans un lieu frais, pour qu’il
s’y conferve fouple. Quand il veut s’en fervir,
il le met encore, comme nous l’avons dit, tremper
dans l’eau. Si la branche eft petite , on n’emploie
que l*a lame du couteau pour faire la première
divifion , qu’on conduit à la main jufqu’à
fon autre extrémité.
Quand le tonnelier l ’achète du vigneron tout
fendu , il le paie deux fols & demi ou trois fols
le cent, fuivant les années.
Les tonneliers fournissent encore quelquefois
les râpés. Ce font des copeaux de bois de hêtre
bien fecs, que l’on imbibe dans de bon vin très-
coloré , & qui a ce qu’on appelle du corps. Les
tonneliers les font, & les fourniffent aux marchands
dé vin , qui les vendent aux particuliers
qui en ont befo.in, ou qui s’en servent eux-mêmes
pour donner de la couleur & de la force aux
vins foibles , ou éclaircir ceux qui font louches.
On fait paffer les vins qu’il faut rétablir, une ou
deux fois fur ces copeaux; & on prétend que
le bois de hêtre dont ils font faits , communique
au vin une faveur agréable.
E x tra it du Mémoire de -M. Fouge-
, 'r o u x , et des notes de T E d iteu r.
De la construction des foudres , et des
moyens de les affranchir, lorsque
ces grandes tannes ont contracté un
mauvais goût.
Les ouvrages qui dépendent de l’art du tonnelier
font fans doute remarquables par la {implicite
de leur çompofidon , leur folidité, leur
force, Si leurs commodités mais l’on ne peut
voir fans étonnement ces tonnes monsrrueufes,
qui contiennent quelques centaines de muids de
liqueur, connues en Allemagne fous le nom de
foudres y ou de légrefafs. Par ieur moyen on peut
{ rassembler de groffes provifions de vin dans ua