Cette manière d’opérer la diminution plus (impie,
mais moins favante que la précédente, doit erre
également deftinèe fur la table pour y couper les
pièces & les joindre avec le piomb , en faifant
les mêmes oblervations pour la coupe des pièces
que dans l’article précédent. Elle eft d’ un plus
grand jour, étant moins refferrée par les plombs
qui la joignent.
On n’emploie guère la diminution que dans
les vitraux qui ont trois panneaux de large. Le
vide que lailïeroit dans le' milieu un vitrail qui
dans fa partie quarrée auroit quatre panneaux de
large, devenant trop grand , on ne pourroit qu’y
continuer la façon de vitres pleines dans les deux
panneaux du milieu : ce qui feroit fans grâce , la
u i mi nu; ion n’étant gracieufe qu’autam quelle forme
une efpèce de cadre autour d’un autre objet que
celui que la façon (de vitres répandroit dans tout
lç'vitrail.
On peur inférer de çe que nous venons d’établir
, que les premiers outils de necefiitè pour
le vitrier font une ou plufieurs tables, de grandes
règles pour relever la mefure des panneaux d après
lés challis ou vitraux-, d’autres pour en tracer les
lignes de hauteur & de largeur fur la table, &
d’autres plus petites, dites règles à main* avec un
tenon y attaché ayec clous vers lç milieu , qui
la maintienne fermement & l’empêché de varier
fur le verre, qui foit affez mince pour entrer-fans
réfiAançe dans les finuofités du verre, lequel n’eft
jamais droitj des compas dont un grand, qu’on
appelle, ordinairement ftujfe équerre, pour tracer
fur la table les plus grands compartimens d’un
panneau , ce que les vitriers appellent équarrir ;
& des petits pour y marquer les différens compartimens
des différentes façons de vitres, ou
pour en faire le calibre ; une ou plufieurs grandes
équerres de fer poli, percées d’efpaces en efpaces
pour les clpuer& arrêter fur la table, & à bifeaux
en dehors pour mettre les panneaux à l’équerre,
& y introduire Un côté de la verge de plomb qui
doit les encadrer. Cette équerre peut être d’une
feule pièce ; elle vaut mieux cependant coupée
en deux parties en angle exaâ dans le coin où
elles doivent fe approcher : cette dernière eft
liéceffaire lorfque, la mefure fur laquelle on doit
faire les panneaux ne forme pas un quarré régulier.
Nos anciens joignoient à ces outils le plaque fin
& drague. Le plaquefin étoit un petit badin de
élptnb grand comme la main, & le plus fouvent
de forme ronde.pu elliptique, dans lequel ils dé-
trempojent le blanc dont ils fignoient le verre,
félon la figure qu’ils vouloient lui donner d’après
le§ compattimens qu’ils en a voient tracés fur la
table. Ils fe feryoient à cet effet de là drague , qui
étoit 'compote? d’un ou deux poils de barbe
4e chèvre, longs d’uft doigt, attachés dans ün
tuyau de plume , avec fon manche comme un
pinceau ; on trempoit ces poils da-ss le blanc
liquide & broyé à cet effet, en y ajoutant très-
peu de gomme, afin qu’il-s’attachât fur le verre.
Cet ufage fe conferve encore dans les pièces de
chef-d’oeuvre , dont on relève avec le blanc le
deffein entier de deffus la table fur un feul carreau
ou table de verre, ce qu’on appelle le contre-
ffng, qui refte au juré de chambre, chez qui le
chef-d’oeuvre a été-fait.
Dans le9 autres façons de vitres , les vitriers
ne fe fervent que du calibre dont nous avons
parlé ci-devanr. Ce calibre demande tant de juftefle
& de précifion que, pour conferver la régularité dans
des vitraux fujets à l’entretien, & n’en pas dé*
; ranger l’enfembie , les anciens vitriers faifoient
■ établir en fer ces calibres armés de pointes à tous
les points donnés. Ils appliquoient ces pointes
fur le carton ; & d’après ces points effentiéls , ils
tiroient fur la carte au crayon les lignes néctffaires
pour former les pièces entières, demies, ou quarts
de pièces, qui commençoient & terminoient les
bords de chaque panneau.
On v o it, d’après ce que nous venons de dire,'
qu’il ne s’agit à préfent que de couper le verre
pour le meure enfuite en oeuvre , en joignant
toutes fes différentes parties avec le plomb. Comme
nous nous fommes affez étendus fur la manière
dont les anciens coupoient le verre le plus épais,
foit avec l’émeril, foit avec la pointe d'acier le plus
dur, & celle du fer rouge , qui fervoit à conduire
la première langue ou fêlure qu’elle y avoit formée
à l’éndroit qui avoit été mouillée du bout du
doigt humeélé de falive , en faifant prendre au
verre telle figure que l’on defiroit fuivant la ligne
tracée ;nous nous contenterons avant que de paffer
à l’ufage de la pointe de diamant, dont les vitriers
fe fervent avec plus de diligence, de remarquer
que cet ancien ufage de couper le verre n’eft pas
fans utilité de nos jours , & que c’eft par une
fuite de cette ancienne manière qu’un vitrier
économe & adroit qui aperçoit dans un plat de
verre, entier d’ailleurs , quelque langue qui pour-
; roit préjudicier à la totalité du plat, fait la conduire
où il veut avec yn fer chaud ou un petit
bout de bois allumé.
Ce ne fut que vers le commencement du fei-
z'ème fiècle, que l’ufage du diamant pour couper
le verre s’introduifit parmi les vitriers. Il paroît
que cette découverte, comme tant d’autres, fut
l’effet du hafard. Il avoit fallu bien des fiècles
pour apprendre aux hommes que le diamant,
cette efpèce de caillou dont l’extérieur annonce
fi peu l’excellence , qui reffemble affez ordinairement
à un grain de fel ou à un fimple caillou
> d’un gris blanchâtre, terne & fale, étoit la plus
éclatante, la plus riche & la plus dure production
de la nature. On ne connut bien le mérite de cette
pierre pféeieufe, qu’après qu’on eut découvert l’art
de la tailler ; art qui ne date pas même de trois
cents ans, & qui eft dû à Louis de Befquen , natif
de Bruges. Ce jeune homme de famille noble,
qui n’étoit pas deftiné au travail de pierreries ,
# qui fortoit à peine des claffes, avoit éprouvé
par hafard que deux diamans s’entamoient fi on
les frottoit un peu fortement l’un contre l ’autre-.
C’en fut affez pour faire naître dans une tête in-
duftrieufe & capable de méditation , des idéés
plus étendues. Il prit deux diamans , les monta
fur du ciment, les égrifa l’un contre l’autre, &.
«mafia foigneufement la poudre qui en provint ;
enfüite à l’aide de certaines roues de fer qu’il inventa,
il parvint par le moyen de cette poudre
à polir parfaitement le diamant, & à le tailler de
la manière qu’ il le jugeoit à propos ; il en fit fortir
parles facettes ccs jeux de feu qui, éblouiffant
les yeux, jettent un éclat fi brillant.
Une fi belle découverte piqua vivement la
magnificence des grands , qui ne connoiffoient dans
le diamant que des bruts ingénus, des pointes naïves,
à angles & facettes tranfpar entes , tirant furie noir,
I fans beaucoup de jeu ni de vivacité, n’ayant
prefque d’autre effet que des morceaux d’acier
[ uni, tels que l’âgraffe du manteau qui fert.aü
facre de nos rois (qu’on croit être du temps de
| faintLouis) & ceux de plufieurs reliquaires ornés
de pointes naïves, noires & fans agrément pour
la vue, que l’on voit dans les tréfors de nos plus
riches églifes.
Cette découverte étoit encore dans fa primeur,
lorfque François Ier. curieux d’hiftoire naturelle,
& fur-tout appliqué à la connoiffance des métaux
& des pierres , occupé des foupçons d’infidélité
qu’il craignoit d’éprouver de la part d’Anne de
Piffeleu, fa favorite, & ducheffe d’Eftampes ,
effaya de graver fur le verre avec le diamant de
fa bague , la rime qui fuit, & qui fe voit peut-
être encore dans un cabinet du château de Chambord,
à .côté de la chapelle ;
Souvent femme varie.
Mal habii qui s’y fie.
taille, furent appliqués à cet ufage. On appelle
diamans de bord ces petits diamans qui font ordi*
nairement bruns. Ils devinrent d’autant plus utiles
que le verre devenant plus mince de jour en jour,
avoit befoin , pour être coupé fans dommage * d’un
outil plus léger, &. qui par là convenoit d’autant
mieux à cette légèreté de main, fi nécellaire à un
vitrier. -
Entre les différentes couleurs de diamans (car
il y en a de blancs, qui font les plus eftimés
dans la joaillerie ; d’incarnats, de bleus couleur
de faphir, de jaunes, de vert de mérou feuille morte)
l’expérience fait préférer parles vitriers ceux qui
font de couleur incarnate , ou qui en approchent
le plus, & qui comme ils difent, font de couleur
de vinaigre. Ils fe vendent chez les lapidaires
au poids de grain. Les plus eftimables font
ceux dans lefquels une bonne vue peut découvrir
plus de pointes ou de coupes, parce que ces
pointes étant plus ou moins fujettes à s’adoucir
par un long ufage, un diamant qui a plus de pointes,
peut fournir plus de coupes.
Autrefois les vitriers plus jaloux de ‘leur in-
duftrie, montoient eux-mêmes leurs diamans dans
des viroles de fer rondes, qui venant en diminution
vers leur pointe, fe terminoit Vers, le haut
par un manche de buis , ou d’é b è n e o u d’ivoire ,
à leur choix. Ils fe fervoient »^pOiir inférer le diamant
dans le creux de la viré le, de cire d’Efpagne qui
fe contenant dans une confiftance mollatiè dans
la virole qui avoit été chauffée, leur donnoit le
temps de les tourner & retourner fur les pointes
ou coupes qu’ils croyoient les plus avantageufeÿ,
jufqu’à ce qu’ils euffent bien rencontré pour la
pofition de leur main. Les uns , en effët, en coupant
le verre, ont lé poignet plus ou moins rerfr
verfé, ou en devant, ce qui dénoté’ une maïh
pefante; en arrière, ce qui procure plus de légèreté;
ou fur le côté , hors de la règle , ce qui
fair varier la coupe & eft bien moins fur )l où e-n
-penchant fur la règle, ce qui donné à la: main
plus d’appui, par conséquent plus de furbtê, &
à la coupe une direction plus égale. De là vient
■ qu’un vitrier peut rarement & difficilement fe'fèrvir
•du diamant d’un autre.
L’effet de l’impreffion d’une des pointes de ce
diamant fur le verre, fe fit remarquer non-feulement
par la gravure des caraftères qui y refirent
tracés, mais encore par le jour qui s’étant
fait fous les traits, laiffèrent apercevoir que les
parties- en étoient défunies & coupées; ainfi un
nouvel hafard prouva que le diamant étoit très-
propre à couper le verre, & donna lieu fans doute
â l’ufage qu’on en fit par la fuite à cet effet. Les
recoupes qui reftoient de la taille des diamans ,
devenus plus à là mode ; & les plus petits de
*es diamans qui ne purent fouffrir ïégnfage & la
Cependant quelques vitriers qui épronvoient à
leurs dépens que leur main étoit moins fûre ,
crurent fe procurer un expédient plus utile en
faifant enchaffer cette virole d'ails une- autre'\ fur
laquelle du côté de la coupe étoit,brafçç une
petite plaque d’acrer qüi leur fervôiridé conduite;
& c’eft lé nom qu’ils donnèrent 'à cettèJ rfouv.çUe
monture, qu’ils trdînôieht au long dé la règle.
Enfin, depuis quelques années, ils ont confié
le foin de monter leurs diamans à des hommes
q u i, adroits à faifir lapente naturelle de la'main