
T A I L L A N D E R I E (Art de la )
L A taillanderie eft l’art de fabriquer des ou- .1
vrages de fer.
On peuf réduire à quatre claffes les ouvrages
de taillanderie; favoir, les oeuvres blanches, la
vrillerie , la grofferie, & les ouvrages de fer blanc
& noir.
Les oeuvres blanches font proprement les gros
outils de fer tranchants & coupants, qùi fe blanchiment
, ou plutôt qui s’aiguifent fur la meule,
comme les cognées, ébauchoires, cifeaux , planes,
ferpes , bêches , couperets, faulx , & autres inf-
truments de cette elpèce. Ce travail ne différé
de celui du coutelier que par la grandeur des
objets : voye£ C outelier.
Il eft intéreffaut, dans Tacquifition des divers
inftruments. dont nous venons de parler-, de
pouvoir reconnoître ceux qui font bien fabriqués,
dont les parties font également dures, &
oui coupent par tout de même. Comme la faulx,
par exemple , eft un infiniment extrêmement
lo n g , il arrive bien fouvent qu'elle eft: moins
chauffée dans de certains endroits que dans d’autres
; ainfi la trempe n’ étant pas égale, il en
ré fuite que l’outil n’a point par - tout la même
dureté.
On s’apperçoit aifément de ces défeéluofités ,
en pafTant doucement fur le tranchant une pierre
à aiguifor, dont on eonnoîi la dureté. Selon que
cette pierre mord plus ou moins, cm saffure fi
le tranchant que l’o:'. veut effayer eft bien égal ,
s’il eft plus dur dans certains endroits que dans '
d’autres, ou s’il eft trempé au .degré q .’il faut.
£Jes miirres, couteliers & les taillandiers n ont
pas d’ autres fecours que la meule a aiguifer ,
pour connoî re parfaitement la qualité du tranchant
qu’ils affilent.
La claffe de la vril'erie , ainfi nommée des
vrilles, petits inftruments qui fervent à faire des
trous dans le bois, compren 1 tous les menus
ouvrages & outils de fer & d’acier qui fervent
aux orfèvres , graveurs , chauderonniers , armuriers
, fculpteurs, tonneliers, relieurs , menui—
fiers, &c.
Dans ta claffe de la g'ojjirie font tous lés plus
gros ouvrages de fer qui fervent particulièrement
dans le ménage de la cuifine, quoiqu’il y en
ait auffi pour d’autres ufages : ceux-ci font forgés
, & limés enfuite jufqu’à un certain point.
Ce travail ne différé point de celui du ferrurier :
voyeç ce mot.
Enfin, la quatrième claffe comprend tous les
ouvrages qui fe peuvent fabriquer en fer blanc
& noir par les taillandiers, ferblantiers, comme
des plats, affiettes, flambeaux, Ôte. voye^ Ferblantier.
Tous ces différents ouvrages de groffe & menue
taillanderie fe peuvent faire également par
tous les maitres taillandiers de Paris ; mais ils
forment, pour ainfi dire , quatre fprtes de métiers
dans la même communauté.
La taillanderie eft comprife dans ce qu’on appelle
quincaille ou quincaillerie , qui fait une
des principales parties du négoce de la mercerie.
La communauté des taillandiers de Paris eft
d’autant plus confidérable , qu’elle renferme en
quelque forte, comme on l’a dit, quatre communautés
réunies en une feule.
Les maîtres de cette communauté font qualifiés
taillandiers travaillant en oeuvres blanches,
groffiers , vrilliers , tailleurs de limes, & ouvriers
en fer blanc &. noir. La qualité de taillandier
eft commune à tous les maîtres : les autres qualités,
fans divifer la communauté, fe partagent
entre quatre efpéces d’ouvriers, qui font les taillandiers.
travaillant en oeuvres blanches, les taillandiers
groftiers, les taillandiers vrilliers v, tailleurs
de limes, & les taillandiers ' ouvriers en
fer blanc & noir.
Les ftatuts des uns & des autres font les mêmes
, à proportion de ce qui peut être propre
à chacun d’eux , dont il eft traité dans des articles
particuliers de leurs ftatûts communs, qui
furent réformés ou plutôt renouvelés en 1 572 ,
en conféquence de la déclaration de Charles IX,
concernant la jurande.
Quelques omiffions ayant été faites dans les
premières lettres , les taillandiers en obtinrent
d’autres le 9 janvier 1573 du même R oi, &
encore
'encore de troîfièmes de Henri III en , ea-
regiftrées au Châtelet & au parlement la même
année.
Ce font ces réglements qui s’obfervent encoré,
à l’exception d’un feul article concernant les ap-
prentifs, qui fut ajouté dans les lettres de confirmation
obtenues de Louis XIII en 1642, &
de ce qui peut être arrivé de changement fous
le règne de Louis X IV , par rapport à l’augmentation
des droits, à caufe de l’union & incorporation
faite à la communauté au mois d’avril
1691 , pour les charges de jurés en titre
d’office.
Quatre jurés gouvernent la communauté, dont
deux font élus tous les ans.
L’apprentiffage eft de cinq ans : le chef-d’oeuvre
eft donné aux afpirants à la maitrife par les'
quatre jurés & huit bacheliers., dont deux doivent
être de chacun des métiers de la taillanderie,
& ce chef-d’oeuvre doit être des ouvragés
dont l’afpirant a fait apprentiffage.
Tous les maîtres doivent avoir un poinçon
pour marquer leurs ouvrages ; ceux qui fe forgent
fe marquent à chaud, les autres feulement
à froid.
Enfin, quoique ces quatre efpèces d’ouvriers
femblent avoir peu de rapport entre eux pour
leurs ouvrages, il eft néanmoins permis à chacun
d’eux de travailler à tout ce qui peut fe
fabriquer dans les quatre métiers , fuivant les
ftatuts.
Par l’édit du mois d’août 1766 , les taillandiers
font une même communauté avec les ferru-
riers St les maréchaux groftiers. Les droits de
réception font fixés à 800 -livres.
Tailleur de limes.
Le tailleur de limes eft celui q u i, après avoir
préparé des morceaux de fer d’une longueur, largeur
St épaiffeur proportionnée aux limes qu’il
veut faire, en rend la furface raboteufe ou bériffée
d’inégalités , à d’aide defquelles on j>eut téduire
en pouflière les corps les plus durs.
La machine dont on fe fert pour tailler les
limes St les râpes, eft: de plufieurs fortes. Il y
en a qui font uniquement deftinées pour les
grandes limes, St d’autres pour les petites. La conf-
truélion des unes St des autres a pour objet que la
lime avance à la rencontre du cifeau qui doit
la tailler, d’une quantité uniforme à chaque levée
de marteau ; que le marteau leve également à chaque
paifage d.e levées fixées fur l’arbre tournant,
afin que tes entailles que forme le cifeau foient
d’une profondeur égale , & que le cifeau , relevé
par un reffort, fe dégage de lui-même des tail-
es de .la lime.-
Arts 6* Métiers. Tome VIII,
Machine à tailler les limes.
La machine eft mue ordinairement par iine
roue à aubes ou {à pots. L’arbre porte un hé-
riffon dont les alucnom conduiient les fufeaux
d’une lanterne portée par un arbre horifontal.
Cet arbre eft garni de plufieurs levées , qui v e nant
appuyer fur les queues des marteaux, les
élèvent à chaque révolution de l’arbre , autant
de fois qu’il y a de levées dans fa circonférence.
Au devant de l’arbre font élevés quatre poteaux
efpacés en trois intervalles égaux. Ces poteaux
font affemblés par leur partie inférieure ,
dans une femelle du patin , & par leur partie
fupérieure avec une des poutres du plancher de
l’atelier ; c’eft entre ces poteaux que font placés
les axes des marteaux. Les queues - de ces
marteaux traverfent les arbres, où elles font arrêtées
par des coins.
Ces axes terminés en pivots par leurs extrémités
, font frettés de différentes bandes de fer
pour les empêcher de fendre.
Au deffous des axes des marteaux , & parallèlement
font placés les axes des mains ou porte
cifeaux.
Le bras eft affemblé perpendiculairement fur
l’axe où il eft affermi à angles droits, par deux
écharpes qui avec Taxe forment un triangle ifo-
celle, ce qui maintient le bras dans la même fi-
tuation , & l’empêche d’avoir d’autre mouvement
que le vertical.
L’autre extrémité du bras terminée par un bof-
fage fervant de main , eft percé d’un trou vertical
circulaire 4*ns lequel entre la poignée aron-
die du cifeau affûté à deux bifeaux inégaux.
Le bras eft relevé par un reffort, & ce dernier
eft faifi par un étrier mobile fur une cheville
qui traverfe le bras de l’arbre, ou par une ficelle
qui embraffe à la fois le bras , & l’extrémité
terminée en crochet du reffort.
Ce reffort eft fixé par fon autre extrémité
dans deux pitons affermis fur l’entré-toife qui
relie enfemble deux des fix poteaux , qui avec
quelques autres pièces ferment les trois cages ou
. établis de cette machine.
La cage eft compofée de deux jumelles hori-
fontales fupportées chacune par deux poteaux ,
& vidées intérieurement pour fervir de couliffes
au chariot qui porte les limes.
Ce chariot eft une forte table de fer recouverte
d’une table de plomb, & quelquefois d’étain
, fur laquelle on pofe les limes qu’on veut
tailler ; & où elles font fixées par deux brides
qui en recouvrent les extrémités. Ces brides font