
1
298 T R A
On faupoudre la gueufe ou le fer de fonte qui a
coulé, avec du fraifil, de la cendre ou du fable,
pour qu'il ne fe rempliffe pas de trous ou qu’il ne
devienne pas fpongieux.
Les mines pauvres , mêlées de beaucoup de
pierres, donnent, après le fer fondu, des fcories
qui recouvrent le fer fous formes d’écailles.
Lorfque la percée eft faite, on referme l’oeil
avec de la poufâère de charbon , ou de la brafque
& du fable. C’eft dans la percée qu’on peut le
mieux juger de la bonté du fer. Le fer caftant à
chaud , jette quantité de grandes étincelles, fou-
vent à la hauteur d’une aune , & il montre, avant
qu’il fe fige, çà & là des taches jaunes; & lorfqu’il
eft refroidi, il eft plus épais par les coins & au-
deftus , taché & rempli d’inégalités, comme fi des
chats s’étoient promenés deflus. Les fondeurs Suédois
leur donnent, à caufe de la reftemblance, le
nom de pieds de rats ou de chats.
Le fer caftant à froid, a l’air fin , tendre & comme
verni à l’extérieur, & l’on diroit qu’il eft recouvert
d’une couche de verre ; dans l’intérieur par contre,
il eft blanc ou a la raie blanche , à l’inftar de
l ’acier.
Les petits fourneaux ne demandent pas autant
de tracas, mais rendent par contre aufii moins.
On les emplit en premier lieu de bois fec, qu’on
allume pour fécher le fourneau.
Lorfque le bois eft brûlé, on y porte les charbons
avec une grande pelle, & la mine avec une
petite pelle. Puis on fait mouvdir l’éventail, &
l ’on porte du charbon &. de la mine, qu'on pofe
peu a peu en lits qui alternent jufqu’à ce qu’il y
ait 30 à 40 pellées de fondues. Pendant ce travail
on perce la terre avec un ringard ou une
barre pointue, pour donner un écoulement aux
fcories. La maffe de fer que l’on fort lorfque le
fourneau eft refroidi, pèfe rarement trois livres
navales de Suède, Ôt pour l’ordinaire elle pèfe
ipioins.
A d’autres endroits on procède différemment
cette fonte, par où l’on obtient auffi du meilleur
fer.
Le fer crud ou la gueufe eft portée de là dans
. les forges , où on la fond de nouveau , & où on
f l’étend convenablement fous le marteau :
1. Soit pour en féparer les parties étrangères;
ce qui occafione un déchet confidérable.
2. Soit pour que le fer acquière la duâilité
convenable par l’union plus intime de fés parties
que procure le mailéag: ; car l’expérience montre
qu,e le fer nralléé refondu eft. aufii ^.caffant que la
gueufe, à moins qu’on ne poffède le fecret des
Anglois , qui nous eft inconnu, de fondre le fer
fans qii ïl perde fa malléabiltê.
Enfin pour le rendre plus propre au comi
merce.
Dans cette fécondé fonte & malléage du fer
crud , on doit faire attention :
Que le fer ne fe brûle pas ; ce qui peut facilement
arriver fi l’air & le vent agiffent deflus,
comme nous le voyons dans les petites forges.
Qu’il ne devienne point dur & aigre par un
froid fubit ; car l’on fait que du fer doux chauffé,
trempé dans l’eau froide , devient aigre par le
refferrement fubit de fes parties.
Dans l’opération , l’on doit obferver que le
foyer doit être proportionné à la nature de la
fonte ou gueufe. Il doit être plus profond 6* plus
fpacieux quand le fer crud eft de niauvaife qualité;
s’il eft de bonne qualité, il n’a pas befoîn
d’être ni fi profond > ni fi grand ; car plus le fer
crud eft puf , plus il exige de chaleur pour fa
fonte.
Le fer doit refter au feu jufqu’à ce qu’il foît
dégagé'de touie impureté; ce qui demande moins
de temps dans les foyers peu profonds , & par
contre beaucoup de temps dans les foyers' profonds
, à caufe de la plus grande diftance de la
thuyère.
On doit mêler le fer crud , qui par lui-même
ne peut pas être rendu parfaitement duâile avec
de l’autre fer crud, pour que du mélange de ces
deux il en réfulte un métal bon & du&le. On
nomme en S.-ède la fonte crue , propre déjà pas
elle-même à être malléée, fer d’un marteaui
Plufieurs artiftes croient que l’on peut mêler le
fer fragile à froid avec le fer fragile à chaud,
pour obtenir par-là un bon fêr; mais ,1’expérience
montre que ces deux fortes de fer ne fe mêient
point intimément & ne fe diflblvem pas mutuellement,
mais qui ne fe mélangent que par grains
ou morceaux iolitaires ; ce qui produit un fer
inégal, qui dans quelques points eft duftile à
chaud, da 'S d’autres duâile à froid; de forte que
par ce moyen l’on bonifie, ii eft vrai, mais très-,
imparfaitement le fer.
On doit fe garder d’ôrer au fer toutes fes
fcories ; car en le découvrant il fe brûle , comme
l’indiquent les étincelles qui en partent.
On doit fouvent afperger d’eau les charbons
ardens, pour empêcher leur confomtnarion inutile
, & pour concentrer le feu & .‘a chaleur yer$
le bas 9 afin que le fer fe purifie mieux.
Comme on peint raffiner ou dépurer le fer pur 1
ou la fonte réitérée fur le fo y e r , foit par un feu
violent en moins de temps , foit par un feu plus
doux en plus de temps , il s’enfuit qu’on peut
conftruire des foyers de différente profondeur,
produisant le même effet fi l’on compenfe le défaut
de chaleur dans les foyers profonds en employant
plus de temps, ou fi Ton abrège le temps
en diminuant leur profondeur. De la «découlent
différentes manières de forger.
On a en Suède la manière de forger :
1. Françoife ou wallone.
а. L’allemande.
3. La mi-allemande*
4. La ruftique.
5. Celle d’Ofmunds.
б. Celle qu’ils nomment Rmnfchmlede.
La forge françoife exige un double foyer; l’un
pour la ronte ou le foyer à fonte, long d’une
aune & demie, large d’une aune deux pouces &
haut de 12 pouces , dans lequel on place la
thuyère de manière qu’elle foit élevée de 7 à 8
pouces au-deffus du fond ; & que le côté du
foyer où (e trouve la thuyère , ait demi-pouce
ou un peu plus de pente vers le foyer , par où
le vent eft porté prefqu’au milieu du côté oppofé
du foyer.
L e fécond foyer fert à forger, & fe nomme
ou ftreck hetrd , & eft pour l’ordinaire de
5 à 6 pouces plus long que le premier , & de
a pouces plus petit en hauteur. La thuyère de ce
foyer a une pofition te lle , qu’elle avance de 2
pouces 3 quarts dans le foyer.
2. Ce foyer exige qu’on y emploie du fer volontaire
, qui, par les fcories avec lefquelles il fe
trouve mêlé, fond tiès-aifémenr.
3. On doit porter toute la gueufe ou la maffe de
fonte de fer fur le foyer, & l’èlever, & on l’approche
toujours plus du feu à mefure qu’elle fe
fond, pour que le fer qui s’en fond peu à peu,
puiffe couler dans le fond du foyer.
4. Il eft néceffaire d’agiter prefque continuellement
la maffe fondue avec une fpatule, & d’en
ôter la croûte occafionée par la cendre des charbons
& autres impuretés, &. qui eft fur les fcories ;
car fi on la laiffoit, elle empêcheroit aux gouttes
de fer fondu de venir jufqu’aux fcories, par où il
arriveroit. qu’une quantité confidérable de fer fe
feorifieroit avec e lle , ou devenant plus pêfante
par les particules de fe r , elle feroit précipitée &.
rendroit le fer impur.
5. Auffi-tôt que le fer fe fige au fond du foyer
fous les fcories , on doit le porter tout de luire
fous le marteau , mais en malles qui ne foient pas
plus grandes qu’il n’eft néceffaire pour une barre
de fer.
6. Mais U eft auffi néceffaire qu’on donne bon
feu au fer fondu fur ce foyer d’affinage, pour le
mieux dégager des fcories , afin qu’il devienne plus
pur ; car dans un feu plus violent les fcories fe
confument, & cela fait, le fer fe fige.
7. On nomme en Suède les morceaux fondus
& coagulés, morceaux de fonte , & on les remet
au maître de la forge, pour les porter à plus de
perfe&ion en le rougiffant & en le malléant convenablement.
On nomme en Suède le fer qui fond & dégoutté
, en rougiffant les pièces de fonte , lupp ;
61 ce fer eft de la nature de l’acier.
La méthode allemande d’affiner, diffère de la
précédente :
1. En ce que les ouvriers fe portent garants pour
les charbons qu’ils emploient, & le fer ; c’eft pourquoi
auffi les propriétaires des forges font obliges
de leur payer ce qu’ils emploient de moins de
charbons, & le fer qu’ils obtiennent de plus que
ne porte leur convention. Ils s’engagent de fournir
20 livres de fer forgé avec 26 livres de fonte ; mais
fouvent ils en fournirent plus , fur-tout fi le fer eft
forcé; fouvent 2 2 , 23 à 24livres.
• 2. Ils fondent & forgent le fer fur le même foyer.
Ce foyer a 12 , 13 à 14 pouces de profondeur,
depuis le fond à la thuyère; de manière que la
chaleur du fond eft moindre , & qu’il ne s’y brûle
pas autant de fer.
On doit obferver qu’ils fe fervent d’un foyer
profond pour le fer fulfureux , & d’un foyer moins
évafé, de dix pouces , par exemple, pour le fer
enflant à froid.
L’inclinaifon de la thuyère varie félon la qualité
du fer; elle eft forte pour du fer fulfureux, moindre
pour du fer caffant à froid, encore moindre
pour du bon fer. La thuyère doit être plus courte
à la partie inférieure de fon bec, pour que le vent
agiffe mieux fur le fer.
Dans la méthode allemande, on obtient par un
feu plus doux & plus long-temps continué , le
même but que dans la françoife, par un feu plus
court & plus v if ; mais on rifque plus de perdre
du fer & des charbons dans la dernière.
Nous n’entrerons pas dans les détails des autres
manières de forger. On peut les voir dans la Métallurgie
de Valleriu».
P p 2