
rouille du cuivre : la plus grande partie de celui
qui fe confomme en France, vient de Montpellier
: il s’emploie dans beaucoup d’arts, & fur-
tout dans celui de la teinture : il vous donnera
une belle couleur verte pour les enluminures,
mais quand vous l’acheterez pour cet ufage, vous
demanderez au marchand de couleurs du verd
d’eau, ou bien du ver-de-gris calciné broyé à
1 huile : le premier eft en liqueur, le dernier eft
enfermé par petits paquets dans de la veffie.
Si cependant vous voulez préparer vous-même
votre verd d’eau, demandez chez un droguifte
une*once ou deux de verd-de-gris , mettez-les en
poudre au fond d’un matras avec du vinaigre dif-
tillé, en telle quantité qu’il couvre le verd-de-
gris jufqu’à l'épaiffeur de trois ou quatre doigts ;
mettez ce matras en digeftion fur un bain de
fable qui ait peu de chaleur , & remuez-le de temps
en temps , jufqu’à ce que vous voyez que la liqueur
ait pris une belle couleur très-foncée d’un
verd tirant au bleu : alors vous la laifferez pendant
quelque temps en repos, afin qu’elle devienne
claire, & vous la verferez doucement
dans une bouteille par le moyen d’un entonnoir.
S’il relie encore du verd-de-gris au fond du matras,
vous achèverez de le difloudre en ajoutant
de nouveau vinaigre, comme vous avez fait d’a bord,
& vous recommencerez une troifième &
même une quatrième fois, jufqu’à ce qu’il n’y
ait plus rien à difloudre dans le matras. Gardez
cette couleur d'ans une bouteille bien bouchée ;
& quand vous en ferez ufage, vous n’en verferez
dans la coquille ou dars le godet de faïence
que ce que vous prévoirez pouvoir employer
fur le champ. Le plus fouvent elle fera foncée,
fur-tout pour les enluminures; vous y ajouterez un
peu d’eau claire pour i'affoiblir (il vaudroit mieux
que ce fût un peu de virraigre blanc). & vous
1 effayerez d un coup de pinceau fur un morceau
de papier blanc.
On peut, de cette diflolution, tirer des cryflaux I
d’un beau verd ; mais cette^ opération ne peut fe
faire que fur une certaine quantité.
Verd de Saxe.
Le verd de Saxe a plu 6 généralemeut, qu’il y
a lieu de croire qu’on apprendra avec plaifir la
manière dont il peut être compofé; à cet effet
on va donner ici l’extrait d’un mémoire qui a paru
en 1759, dans lequel l’auteur aflüre que cette com-
pofition eft inconnue à la plupart des teinturiers :
voici comme il s’exprime :
Dans le deflein où j’étois d’imiter le verd de
Saxe , j’ai d’abord emplpyé la méthode ordinaire ;
c’eft-à-dire, je me fuis fervi du bleu & du jaune’
afin de rencontrer dans'le mélange de ces cou!
leurs une combinaifon capable de produire le verd
de Saxe; n’ay antpuy rétf.ffir psr cette voie, j’en
ai imagine une autre qui m’a donné un verd aufli
parfait que celui de Saxe, & qui réfifte plus longtemps
à l’imprelîion de l’air & à la vivacité des
rayons du foléil ; j’ai verfé de l’huile de vitriol
bien reftifiée fur de l’indigo de Gùatimala, en ob.
fervant de ne pas refpirer la vapeur.que caufe l’ef-
fervefcence de ces mixtes, & je me fuis fervi d’un
vafe de verre cinq fois plus grand qu’il ne falloir
pour contenir le tout, dans la crainte que le verre
ne caffât par l’aélion de l’effervefcence. Enfin ,
j’ai verfé peu à peu l’huile de vitriol jufqn’à ce
qu’elle furnageât de quatre doigts : j’ai laiffé les
chofes en cet état pendant deux jours,' au bout
defquels j’ai verfé la liqueur par inclination , & je
l’ai corifervée dans une fiole; je l’ai enfuite répandue
par gouttes fur un bain d’eau chaude prête à
bouillir : cette eau a pris infenfiblement la couleur
d’un beau bleu, & ma liqueur s’y étendoit parfaitement.
J’ai jettépeu à peu de la terra mérita dans
ce bain, jufqu’à ce que j’aie vu paroître la couleur
verd-de-Saxe que j’ai très-bien rencontrée de
cette façon. Avant de tremper dans cette compo-
fition le morceau de drap que j’avois deftiné à cela,
je le mis dans un bain d’eau bouillante où j’avois
fait fondre de l’alun de Rome , pefiant le quart
du"poids du morceau de drap, & du cryftal de
tartre, de la huitième partie de ce même poids:
je Je mis après cela à la cave, & je le lavai en-
fuite dans de l'eau froide. Cette préparation ayant
imprégné le drap d’un attrament propre à fixer
la couleur que je voulois lui donner, je le plongeai
dans le bain verd, & j’eus un verdrde-$axe
aufli parfait qu’on peut le fouhaiter. Il faut plonger
l’étoffe à différentes fois, jnfqu’à ce qu’elle
acquière la nuance qu’on veut lui donner. J’ai
fait teindre de cette façon un ameublement entier,
ce qui m’a parfaitement réuffi.
Verd de Veffie.
C ’eft une couleur dont on fait ufage en peinture
& en teinture, dont la préparation eft très-
facile. On prend les baies du nerprun , lorftju’eiles
font noires & bien mûres; on les preffe pour en
retirer tout le fuc, que l’on fait évaporer à un feu
très-doux; on y ajoute enfuite un peu d’alun de
roche que l’on fait difloudre dans l’eau, & que
l’on mêle avec ce fuc pour le rendre plus-haut en
couleur; on fait cuire le total jufqu’en confiftance
de miel ; enfuite on enveloppe cette matière dans
les morceaux de veffie de cochon qu’on lie bien,
on les fufpend à la cheminée pour les faire féçher.
Cette couleur s’étend dans un peu d’eau quand
on en veut faire ufage : elle eft propre aux enluminures.
Fabrique du Verdet} ou Verd diftillé.'1
Le verdet eft le réfultat de la corrofion du cuivre,
par les vapeurs acides qui s’exhalent durant
le temps que lés marcs de raifin & lavinaffe
tournent à l’aigre ; & que ce verdet fe détache
en fe gonflant de deffus le cuivre, lorfqu’on l’ex-
pofe à la chaleur du foleil.
Il y a dans le commerce, plufieurs verds de-
gris; le premier & le plus beau eft en poudre
groffière, d’ un verd velouté, & ne blanchit jamais
en féchant.
Les autres efpèces font plus ou moins mêlées
de fubftances étrangères qui paliffent leur couleur;
elles font ordinairement en groffes maffes dures
& difficiles à rompre : on les îaifle de côté quand
il s’agit de procéder à la fabrique du verd diftillé.
Depuis long-temps les Hollandois venoient acheter
à Montpellier le plus beau verd-de-gris fur le
pied de dix-huit à vingt fous la livre , puisremet-
toient dans le commerce le verd diftillé, c’eft-à-
dire , le réfultat de la diflolution complette du
verdet dans le vinaigre diftillé; réfultat groupé
en pyramide compofée de plufieurs criftaux amoncelés
, d’un beau verd velouté, obfcur, & de forme
à peu près quadrilatère.
Mais il s’eft établi il y a quelques années , à
Grenoble & à Vienne dans le Dauphiné, quelques
fabriques de verd diftillé dont voici le procédé
, que M. Demachy préfume être fuivi dans
cette province d’après fes renfeignemens.
On fe procure dit cet habile chimille , du v inaigre
diftillé qui ne fente pas le brûlé; & l’on met
dans des jarres vingt-cinq livres, par exemple, de
beau verd-de-gris, & jufqu’à vingt-huit fois fon
poids de vinaigre diftillé, ce qu’on fait à plufieurs
reprifes, en tenant le jarre dans un lieu chaud &
agitant la matière avec un long bâton de bois.
Au bout de quatre ou cinq jours, on verfe la
liqueur, qui eft d’un verd obfcur, qu’on met à
dépofér ; & on met en fa place de nouveau vinaigre;
il fe diffout ainfi à la longue & fucceffi-
vement vingt livres de verdet, des vingt-cinq
mifes en diflolution.
La liqueur bien éclaircie, on la met évaporer
dans de grandes chaudières de cuivre qu’on chauffe,
comme les chaud.ères à teinture, & on réduit
w liqueur en confiftance de firop un peu épais.
ae la contenance de douze pintes au plus : 0
y place des tiges de bois blanc d’un pied de long
fendues par un de leurs bouts prefque jufqu’à l’ai
tre bout qui demeure entier : on infère dans h
tentes de petits dés de bois qui tiennent écarté«
les portions fendues ; on en met au plus trois dar
chaque pot, & on les remplit de la liqueuréva
porée; on recouvre d’un limbe de bonne eau-de-
vie. cette liqueur portée à l’étuve : quelques-uns
prétendent qu’on doit ajouter de l’urine à l’eau-
de-vie.
On laiffe les pots pendant près de quinze jours
dans l’étuve médiocrement ch mde ; c’eft de cette
précaution que dépendent l’abondance & le volume
des cryflaux qui s’amoncèlent autour des
tiges de bois, & forme des pyramides qu’on met
à fécher légèrement à l’étuve pour répandre dans
le commerce fous le nom de verd diftillé en grappe.
Il y a dans les pots contre Les parois, d’autres
cryflaux , dont les uns font fort petits & peu con-
fiftans : on les enlève à l’aide d’ un peu de vinaigre
diftillé , qui rediffour aüffi quelques portions de
verdet qui fe précipite durant la cryftallifation.
Les'autres cryflaux , gros & groupés en plaques,
fe détachent pour être féchés à l’étuve & vendus
dans le commerce
L’eau-mère qui refle, fe délaye dans une eau
de chaux légère ; puis on effaye s’il lui manque
du verdet ou du vinaigre; on lui en rend & on
la fait cryflallifer jufqu’à la fin , enforte qu’il n’y
a rien de perdu de ce côté.
Le célèbre Wenzel décrit ainfi une manière fort
avantageufe de fabriquer le verd diftillé.
Il prend quarante-huit #nces de vitriol bien ;
& feixante-une onces de fucre de farurne, qu’il
fait fondre féparément dans de l’eau bouillante,
& il mêle ces diffolutions.
Alors l’acide du vitriol s’empare du plomb, &
forme avec lui un précipité ; & la liqueur qui fur-
nage , eft une union de l’acide de vinaigre, du
fucre de faturne, & du cuivie que conrenoit le
vitriol. Il fait évaporer cette liqueur, qui lui fournit
une quaiantaine d’onces de verdet difliilé.
Le précipité pèfe environ cinquante onces, &
peut fervir , après avoir été lavé , comme un excellent
blanc de plomb.
M. Wenzel remarque que, pour avoir de beaux
cryftaux rhomboïdaux de verdet, il faut évaporer
la liqueur dans des fours, pour qu’elle foît réchauffée
de tous côu s, fans quoi l’on n’obtient
que de petits cryftaux.
Les frères Gravenhorft de Brunfwic font & débitent
une efpèce de verd-de-gris diftillé, infiniment
fupérieur à l’ordinaire. Il fe diffout facilement
dans l’eau, ce que ne fait point i’autre, & il a
une couleur plus agréable qui tire fur le bleu. Us
nomment ce verd, verd de Brunfwlc diftillé.
En ayant fait l’analyfe, dit un chimifte allemand
j'ai trouvé que ce n’étoit que du cuivre diftous au