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ou jaunâtre, qui fait'de bon pain, de la bonne
bouillie avec du lait, des crêpes , des Râteaux,
«les galettes , &c.
Le pain que l’on fait de la feule farine de maïs,
eft jaune & pefant, parce que la pâte ne lève pas fi
bien que celle de la farine de froment ; néanmoins on
a vu des payfans qui en ont vécu pendant des années
entières fans en avoir été incommodés. Ce pain
e.t plus doux , quoique plus groffier en apparence,
que celui de la farine de froment. Mais pour en
faire un excellent pain, plus fain & plus favoureux
que le pain ordinaire y on m ê le a v a n t de pétrir,
un feptième ou un huitième de farine de maïs ,
fur fix ou fept parties de farine de froment : les
médecins les plus expérimentés le préfèrent à tout
autre pain.
On fait que le maïs efi trés-bon pour les boeufs
& pour les moutons, foit qu’on le leur donne
vert ou fec.
Quand on veut le donner en vert fur-tout
aux boeufs, s’ils.font des travaux pénibles,, on le
îeme fort épais fur la levée des orges,, moyennant
quoi ©n peut les couper pendant le mois d’oélobre
ou de novembre, pour les nourrir.
On le donne en epi ou en grains , aux befiiaux
ou aux porcs qu’on veut engrailfer ; il fait prendre
a ceux-ci un lard ferme. Les cochons de Naples,
qui Pèfent juLqii’à cinq cents livres, ne font engrainés
qu’avec le grain de maïs.
On engraifle la volaille, qui profite à vue d’oeil ,.
avec cette feule nourriture; mais avant de donner
ce grain à la jeune volaille, il faut le concaffer fous
la meule. Les chapons degreffe, qui pèfent jufqu’à
ui* j ° <2îze ^Yres •> ne doivent leur réputation qu’au
ble de Turquie, La chair des pigeons de volière,
qu on en nourrit , efi blanche , tendre ,• & leur
graiffe eft ferme & favoureufe.
On voit par tous ces détails d’utilité domefiique,
que cette culture efi trop négligée en France, &
quon ne fauroit affezla répandre & l’encourager.
Cependant on reproche au maïs que depuis que
fa culture eft introduite dans l’Angoumois, on y
a vu paroitre un infefte qui y dévore fes grains ;
mais cette obfervation eft dénuée de preuve & de
fondement, puifque le maïs ou blé de Turquie eft
exempt lui-même de ce fléau, & que cet infeéte
eft inconnu en Bourgogne, enBreffe, en Franche-
Comté , & dans tous les pays où il y a de grandes
cultures de mais établies depuis tres-lone-temps.
(M.BeguiUet). 1 6 P
Obfervations de M. Parmentier.
Il n eft prefque point de terrains q u i, avec des
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foins & de l’induftrîe , ne puiffent devenir fufcep-
tibles de rapporter du maïs. Ce grain fe plaît néanmoins
de préférence dans les terres un peu fubf-
tantielles & grafles ; il vient auffi très-bien dans
un fol léger & fablonneux, à lâ faveur des engrais :
les prairies fituées au bord- des rivières, les terres
baffes couvertes d’eau pendant l’hiver , & dans
lefquelles le froment ne fauroit réuffir, font également
propres à la culture de cette plante..
Pour difpofer la terre à la culture du maïs, 11
faut qu’elle foit travaillée par deux labours : on
doit donner le premier 3près la récolte ou pendant
l’h iver, & le fécond vers la fin de mars : il y a
des cantons dont le fol eft fi meuble , qu’un feul
labour , au moment d’ènfemenCSrfuffit, tandis
qu’ailleurs il en faut trois ou quatre;: il convient
fur-tout que la herfe paffe en tout fens y afin de
brifer les mottes, & que la terre foit divifée jufqu’à
-deux pouces de profondeur.
Tous les engrais peuvent fervir utilement au
maïs : les ferres amoncelées pendant une année,
les gafons brûlés, la chaux, la marne, les cendres,
le limon des étangs, des foffés & des rivières
; les décombres de bâtimens , le fumier,
principalement lorfqu’il a été bien confommé a
* l’abri du foleil & des pluies, lui conviennent. La
nature du fol & les reffources locales doivent, déterminer,
parmrces amendemens, l’efpèce qui doit
être préférée..
. On doit choifir 'de préférence le maïs de la récolte
précédente , & le laiffer adhérent à l’épi ,
jufqu’au moment où on fe propofe d» le femer,
afin que le germe, prefqu’à découvert, n’ait pas
le temps d’éprouver un degré de féchereffe préjudiciable
à fon prompt développement. Il faut encore
éviter de prendre les grains de l’extrémité de l’épi,
parce qu’ils font les moins nourris , & que fouvent
iis n’ont pas été fécondés : on penfe bien que le
maïs taché de moififfure ou qui auroit paffé au
four, n’eft pas propre à être enfemencé.
Il eft toujours utile de faire tremper le maïs
dans une eau de fumier un peu chauffée, vingt-
quatre heures avant de le femer. Cette précaution,
facile à employer spar-tout, ne doit être négligée
nulle part; elle a entr’autres avantages , celui de
manifefter les grains légers , qui furnagent , &
qu’on fépare avec l’écumoire, pour ne pas confier
à la terre une femence inutile pour la récolte , &
qui pourroit encore fervir de nourriture aux animaux
de baffe-cour : on accélère ainfx l’accroiffe-
ment de la plante.
Il eft prudent d’attendre , pour femer le maïs,
que la terre ait acquis un certain degré de chaleur ,
& de ne faire les femailles que du 1 5 au 2.5 d’avril,
jamais plutôt ni plus tard, afin que cette plante
ne germe que torique les gelées font paffées, &
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que les froids de l’automne ne la furprennent pas
fur pied avant la maturité.
Quand le temps eft favorable & que la terre eft
difpofée à recevoir le maïs, il -faut s’occuper des
femailles : on les pratique de différentes manières ;
il convient de les indiquer toutes. Le cultivateur
pourra choifir à Ton gré celle qui lui paroîtra la
plus avantageufe & la plus applicable à fon terrain
; mais quelle quiPadopte , on ne fauroit trop
l’inviter à laiffer entre chaque pied, une diftance
de dix-huit à vingt pouces au moins, & à ne rien
négliger des travaux indifpenfables pour le fuccès
de cette produâion.
première pratiqué. C ’eft précifément la même que
pour le pois légume : le femeur, muni d’un panier
rempli de maïs, prend avec trois doigts deux ou
trois grains , les laiffe tomber à un pas de diftance
l ’un de l’autre, dans la raie que la charrue trace,
& qu’elle recomble au retour en couvrant la femence.
Deuxième pratique. On trace des filions à deux
pouces de profondeur & à environ un pied &
demi de diftance : on réitère la même opération
en travers, de manière que l’enfemble des filions
préfente toujours des lignes droites, coupées par
d’autres qui forment un carré parfait : on met deux
grains de maïs dans chacun des quatre coins du
carré ; & on les couvre avec de la terre , à la
profondeur d’environ ùn pouce.
Troifième pratique. On fèttié le maïs à la volée ,
affez clair, & on l’enterre à la charrue comme
les autres grains : cette pratique , plus expéditive,
il eft vrai, que celle de planter, n’eft pas aufli
fure ; la diftance entre chaque pied n’eft pas bien
obfervée, & l’on court rifque de répandre plus
de femence qu’il n’eft néceffaire.
Quatrième pratique. Celle-ci eft la plus parfaite
de toutes ; mais elle eft auffi la plus longue &
par confisquent la plus coûteufe ; ce qui fait qu’elle
n’a lieu que pour la culture en petit : elle confifte
à le mer le maïs au Cordeau, à la diftance d’un
pied & demi , en faifant, avec le plantoir , un
trou dans lequel on met un grain que l’on recouvre
fur le champ, en comprimant la terre avec
le -pied.
Rien ne contribue plus à développer, à fortifier
les tiges du maïs , & à leur faire produire des
épis nombreux & riches en grains, que des binages
donnés à propos depuis la plantation jufqu’à la
récolte : leurs effets principaux font :
1®. De rendre la terre très-meuble , & par con-
féquent propre à abforber & à retenir à fa fuper-
^cie, les principes répandus dans l’air.
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2°;T)e la purger des mauvaifes herbes qui dérobent
à la plante fa fubftance, & qui empêchent fa
racine de s’étendre.
3°. De conferver au pied de la plante de fa
fraîcheur, & de l’affermir contre les fecouffes des
vents, qui ont beaucoup de prife fur elle , à caufe
de la largeur de fes feuilles, de la force & de l’élévation
de la tige.
Il n’a lieu que quand le maïs a acquis trois
pouces de hauteur ; alors on travaille légèrement
la terre avec la houe : on la rapproche du pied de
la plante, qu’on débarraffe des herbes étrangères
qui l’environnent ', & on a l’attention de ne pas
endommager fes racines en approchant de trop
près l’inftrument : on ne laiffe fubfifter que la plus
belle , de manière que chaque pied foit tou ours
efpacé de dix-huit à vingt pouces. Cette première
opération eft dés plus effentielles ; mais on ne doit
pas la faire quand la terre eft trop humide, parce
que s’il furvenoit de la pluie enfuite, il fe formeroit
une croûte qui nuiroit à la végétation du maïs : il
y auroit fans doute autant d’inconvéniens à faire
cette opération par un grand hâle , ou lorfque la
terre eft trop fèche.
Il eft femblablé ai^ précédent ; mais on attend ,
pour le donner, que le maïs ait environ un pied
de hauteur : on fe fert, pour cet effet, d’une petite
charrue ou d’une binette, dans les cantons où la
main-d’oeuvre n’eft pas chère : on continue de
détruire les mauvaifes herbes, qui dévoreroient la
fubftance nourricière du maïs.
Dès que le grain commence a fe former dans
l’épi, il faut fe hâter de donner le troifième binage ,
parce que c’ôft précifément l’époque où la plante
en a le plus befoin : on a foin de bien nettoyer le
champ des mauvaifes herbes qui ont crû depuis le
dernier travail, & de bien butter le pied , parce
que la terre, ainfi amoncelée fur les racines , les
préferve du féjour de l’eau & de l’a&ion trop
infinédiate du foleil.
Pour tirer parti de tout, on peut, dans les terres
graffes, au moment où l’on donne le troifième
labour, femer & cultiver par rangées, dans les
intervalles que laiffent entr’eux les piedi du maïs ,
des fèves, des pois & des haricots qui grimpent
jufqu au haut des plantes du maïs, & préfentent
les avantages d’une double moiffon : cos espaces
vuides font d’autant plus propres à la culture de
ces plantes, qu’ ils ont été façonnés à la main &
à plufieurs reprifes.
Pendant que le maïs croît, il offre des reffour-
!ces dont il faut néceffairement profiter , parce
qu’en même temps c’eft contribuer au fuccès de
la récolte.
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