
On fabrique des potaffes, tant blanches que rouges
, dans plu fie u rs provinces de France, fur-tout
en Alface, en Lorraine, en Franche-Comté, &
dans quelques cantons de la Bourgogne, & de la
Champagne ;* mais celle qui abonde le plus dans
le commerce , du moins fous forme de potaffe-
blanche, nous vient du nord.
M. Baumé a employé un autre moyen, pour
priver l’alkali du phlogiftique furabondant : il a ob-
fervé que l’argent avoir plus d’affinité avec le phlogiftique
quel aikali fixe, tëc que la furfaçede ce métal
mife en conta61 avec une difloîution 'alkaline
devenoit plus ou moins noire en s’emparant du
principe colorant. Il a donc traité la leffive dans
des vaiffeaux d’argent, & en renouvelant convenablement
le contaft du métal & de la difloîution ,
il eft parvenu à obtenir un aikali déphlogiftiqué
& très-blanc. Ce procédé, quelques fuccès qu’on
en obtienne, eft trop difpendieux, pour l’employer
dans les opérations en grand de la verrerie : il faudra
donc s’en tenir à la calcination exécutée avec
foib.
La pureté de l’aljcali n’eft pas feulement altérée
par la furabondance du principe colorant, elle-
l’eft encore par le mélange de divers fels neutres,
qui n’entrent pas dans la confeâion du verre. La
différente criftallifation dont ces fubftances Câlines
font fufceptibles fourniroit^un moyen chimique
de les féparer de i’a’kali fixe : il n’y auroit
pour cela qu’à évaporer la leffive à divers degrés ,
& J a laiffer réfroidir, & repofer à différentes re-
prifes ; on reconnoîtroit alors , & on écarteroit
aifément les criftaux des divers fels neutres. La
qualité déliquefcente de l’alkali végétal fournirait
encore un autre moyen. On pourroit expofer-
à l’air libre l’alkali fous forme concrète fur un
plateau incliné de verre ou de tout autre fubftan-
ce inattaquable par Talkali : alors l’alkali réduit
en liqueur fe fépareroit des fels neutres qui n’au-
roient pas la même propriété. Ces différens procédés
avantageufement employés pour des expériences
de laboratoire font trop minutieux pour
de grands travaux , dans lefquels le temps fur-tout
èft précieux; & l’artifte verrier doit fe contenter
de choifir pour fondant, le falin ou la potaffe,
q u i, d’après l’expérience, contient le moins de
fels neutres.
Aikali minéral natron,
Parmi les aikali fixes minéraux, nous citerons
d’abord le natron ou natrum, que l’on a prétendu
être le nitre des anciens. » C ’eft, dit M. Macquer,
« un fel aikali naturel, de la nature de l’alkali mi-
" néral ou marin, qu’on trouve criftallifé en Egypte
** & dans quelques autres pays chauds, dans les
»■ fables qui bordent quelques lacs d’eau falée. »>
Cette fubftance faline n’eft pas un aikali abfolument
pur ; il eft ordinairement mêlé avec des fels neutres
& quelques fubftances terreufes. L’on s’en fert
en Egypte, pour l’ufage des favonneries, fk des
verreries ; mais il eft trop peu connu en Europe,
pour que nous entreprenions, de décrire de quelle
maniéré il fe comporte dans la Vitrification. Il y
a apparence qu’il doit s’affimiler par les effets aux
autres alkalis minéraux que nous connoiffons , mais
nous ne pourrions nous flatter de rien dire de pofitif
à cet égard , & nos artiftes ne feront jamais à portée
de choifir le natron pour fondant.
Soudes.
Les cendres des plantes maritimes qui fournif-
fent l’alkali minéral font aflëz communément désignées
par le nom générique de fondes, & employées
en nature, fimplement pulvérifées & ta-
mifées : elles peuvent fervir de fondant. Elles
contiennent, comme les cendres ordinaires, une
bafe terreufe unie à une partie faline. Cette dernière
confifte en aikali minéral, plus ou moins
mélangé de divers fels neutres communément à
bafe d'alkali fixe minéral, tels que le fel de glau-
bert, le fel marin. La bonne qualité de la foude
eft donc en raifon du plus d’alkali, & du moins
de fels neutres qu’elle contiennr.
La combuftion des plantes maritimes demande
certaines précautions, & s’exécute par un procédé
particulier. On creufe en terre une foffe plus ou
moins profonde : fur les côtes de Languedoc , cette
efpèce de fourneau a environ trois pieds de profondeur
, fur de quatre à fix pieds de diamètre, &
on lui donne la forme d’un cône tronqué dont le
petit cercle eft à la partie fupérieure : on ehoifit,
pour établir de pareils fours, des endroits un peu
élevés, afin d’y être à l’abri de l’infiltration des
eaux. On entaffe autour de la foffe les plantes recueillies
& affez fèches, pour s’enflammer aifément:
on fait le feu au fond de la foffe, & on lui donne
fucceffivemenr des plantes à confumer, jufqu’a ce
que le fourneau foit rempli de cendres. En raifon
de la grande abondance de la partie faline, qui,
par l’aâion de la chaleur, entre en une forte de fu-
fion , les cendres amoncelées forment une efpèce
de pâte , qui s’agglutine par le réfroidiffement, &
acquiert une dureté femblable à celle de certaines
pierres : c’eft dans cet état que les cendres prennent
le nom de foude t ou pierres de foude. La com-
buftion dure huit ou dix jours , & chaque cuite
fournit, de neuf à dix milliers de foude.
Roquette.
La foude la plus eftimée eft celle qui eft connue
fous le nom de roquette 9 ou rackette 9 poudre ou cendres
de roquette. 11 paroît que Nery & Merret
(art de la verrerie) en faifoient beaucoup de cas :
elle eft fort eu ufage en France, La roquette fe tire
du levant; au rapport de Merret, on en rapporte
d’Alexandrie, & de Tripoli. Les plantes qui fervent
à la fabrication de la foude portent pour la
plupart le nom générique de kali : celles qu’on
brille à Alexandrie pour en faire la roquette, fe
réduifent fuivant Alpinus, cité par Merret, à trois
efpèces, le kali genlculatutn nommé par d’autres
anthillis, le kali égyptien ainfi nommé, parce que
cette efpèce paroît être particulière à l’Egypte,
Colonne le.défigne par le nom de kali reptns neapo-
litanum, en raifon de ce qu’il en a trouvé de femblable
aux environs de Naples, enfin le kali épineux.
Merret obferve que la première & la troifième
efpèces croiffent abondamment dans les provinces
méridionales de l’Angleterre.
Barille d’Efpagne•
La foude d’Efpagne eft communément défignée
fous le nom de Barille. La plus eftimée fe tire d’Àli-
cante ou de Carthagènes : on donne en général la
préférence à celle d’Alicante , j’en ai cependant
employé de cartagènes, dont la qualité ne laiffoit
rien à defirer. Il eft affez vaifemblable, que ces
barilles font les mêmes, & qu’elles changent feulement
de dénomination , fuivant qu’elles font expédiées
par les négocians d’Alicante, ou par ceux
de Cartagènes. Le kali eft cultivé avec grand foin
en Efpagne : M. Dantic (p. 106 t. i.) cite comme
les efpèces de kali les plus eftimées dans cette con-
tréç y le kali à feuilles de capillaire velues , le kali à
feuilles de genejle, le kali à feuilles -de tamarifque. Si
ce ne font pas les mêmes efpèces cultivées en
Afrique, ce font fans doute des efpèces très-analogues.
Le voifinage des lieux, la facilité avec laquelle
certaines de ces plantes fe multiplient, même
en Angleterre , le rapport des climats,. enfin
les anciennes relations des Efpagnols avec les
Afriquains habitans des côtes voifînes, tout engage
à le préfumer.
Cendres de Sicile.
La foude qu’on recueille en Sicile , & qui eft
connue fous le nom de cendres de Sicile, peut tenir
le troifième rang, pour la qualité, parmi ces fortes
de marchandifes : elle n’eft pas de beaucoup in-
férieurè à la barille d’Alicante , & peut lui être
fubftïtué avec avantage. La meilleure que l’on recueille
dans ces parages eft celles de fcogiietti.
Soudes de France..
Nos côtes maritimes, fur-tout celles de Provence
, de Languedoc, & de Rouffillon fourniffent
auffi des fondes, mais il y a beaucoup de choix
entre les diverfes efpèces. Le kali appelé kali ma-
jus cochleato femine croit très-bien dans ces contrées,
& on y a éprouvé avec fuccès la culture des kalis'
Efpagne, de forte que l’on feroit fondé à efpérer
qu’une culture & une incinération bien foignées
des plantes procureroit à la France des foudes qui
le difputeroient en qualité à toutes celles que 1 on
connoit.
Saücor.
La meilleure foude du Languedoc eft défignée
par le nom de falicor ou falicorne. Cette matière
eft le produit de la combuftion du kali ma jus co- -
chleato femine. Le meilleur falicor eft fabriqué aux
îles dites las fantas, vers l’embouchure du Rhôn
e, & dans le diocèfe de Narbonne. Dans ces deux
contrées, le kali eft femé & cultivé avec foin ,
mais la quantité n’eft pas affez confidérable, pour
faire un objet de commerce très-étendu : les ma-
nufaâures de la province fuffifent bien pour en
faire la confommation. Quant à la qualité du falicor,
voici ce que fon analyfe a donné à M. Chaptai
profeffeur de chimie des Etats de Languedoc : une
livre de falicor pulvérifé a fourni dix'onces trois
gros de principes folubles dans l’eau ; cette maffe
faline contenoit fept onces un gros d’alkali minéral
, trois onces de fel marin , & un peu de tartre
vitriolé : d’où l’on voit que le falicor contient réellement
près de moitié de fon poids d’alkali minera!
, plus du quart de fon poids de bafe terreufe
infoluble à l’eau, & un peu moins du quart de
fels neutres de diverfes efpèces, parmi lefquels cependant
le fel marin eft le plus abondant. Ainfi
l’analife prouve que le falicor eft à peu près auffi
riche en aikali, que les barilles d’Efpagne: & les
cendres de Sicile, qui contiennent les premières
plus de moitié de bafe terreufe, les fécondés moins
de moitié de la même fubftances. Celles-là pro-
duifent à l’extn&ion environ quarante-cinq pour
cent, & celles-ci environ cinquante-cinq pour cent
de matière faline qui contient encore des fels neutres.
Le falicor le plus eftimé eft celui de las fantas :
il y a apparence que le falicor , ou falicorne tire
fon nom de celui de la plante nommée par do-
donoeus falicornïa (note de Merret. Art de la verrerie
p. 7).
Soude, ou Bourde.
On brûle auffi en Languedoc les plantes marines
que l’on ramaffe fur la côte, fans prendre
un foin particulier de leur culture, & le produit
de cette combuftion fé vend fous le nom de foude,
dans quelques endroits Bourde. Celles de ces plantes
le plus riches en aikali fe réduifent à quatre
efpèces principales défignées par les noms triviaux
de foude, clavels, doucette, blanquette, ce qui forme
autant de dénominations différentes des cendres
, lorfqu’on n’à brûlé qu’une efpèce dans chaque
cuite..
M. Chaptai a en effet fait brûler féparément ces
quatre efpèces principales de plantes , & voici ce
que lui a fait reconnoître l’analyfe de leurs cendrés*.