
ils les percent à^emi avec un ferret. C ’eft par
le trou qu’ils y forment, qu’avec ce même ferret
ils les prennent pour les enfourner.
Les boules de compcfition devenues fechès
font arrangées fur le pavé d’un four à fritte rond ,
auez femblable par fa forme à un four à cuire le
pain, mais qui chauffe par un tifar fi tué fur le fol
de 1 atelier, au-deffous du pavé du four, dans
lequel la flamme s’introduit par un trou de communication
placé au centre. L ’on commence à
chauffer modérément ; à mefure que les fumées
de la fritte deviennent moins abondantes , ou
augmente le feu , & enfin on termine la calcination
à tresrgrand feu ; on juge la fritte finie, lorf-
que la matière rougie à blanc ne fume plus, &
que fa couleur blanche après le réfroidiffement
& feulement teinte légèrement en rouge par la
manganéfe, démontre à l’oeil la diffipation du
principe colorant groffier. En comparant ce procédé
avec celui.que nous avons indiqué pour faire
la fritte dans l’article glaces coulées, on fentira ai-
fément que la calcination opérée par les fabricans
de verre vert ne peut pas être complette ; les
parties intérieures des boules font à la vérité pénétrées
par la chaleur , mais elles ne font jamais
expofées à la flamme , tandis que toutes les parties
de la fritte répandue en pouffière fur le pavé
du four , félon la méthode des artiftes en glaces,
éprouvent puiffamment l’aâion de la flamme à laquelle
le mouvement du râble, les préfente fuc-
ceffivement. C ’eft principalement à la mauvaife
Qualité^ de la fritte, que l’on doit attribuer la couleur.
defagréable du chambourin, ou verre vert
commun, du moins celui que l’on fabrique en
Languedoc : car on peut voir dans l’article glaces
coulées j qu’avant que l’on eût pris dans cette fabrication
le parti d’extraire lalkali de la fonde,
c eft-à-dire, lorfqu’on employoit, pour fondant,
la.fonde d efpagne fimplement pulvérifée, la côm-
pofition étoit la même que celle de chambourin,
parues égales de foude & de fable. Nous avons
vu dans l’article précédent que le falicor différoit
peu en qualité de la barille d’efpagne, & cependant
quelle énorme différence entre le verre vert
& la plus mauvaife glace.
. La ïq ue les artiftes en verre v e r t, veulent obtenir
une couleur un peu meilleure, ils ajoutent
de 1 azur à leur compofition ; en effet le bleu qui
relulte de ce mélange , en fe combinant avec le
jaune abondant que fournit la bafe terreufe du
falicor, produit un verd nioins jaunâtre, & par
confequent plus agréable.
Les boules de compofition enfournées dans les
pots de fonte y entrent en fufion, & l’on n’attend
, pour tranfvafer le verre dans les pots de
travail, que la diffipation du fel de verre le plus
groffier ; on eft même dans l’ufage confiant d’enlever
celui-ci de deflus les pots avec des cuillers
pour hâter le moment du travail : du refte ce fuin
contenant beaucoup de fel marin , on en tireroit un
parti avantageux , principalement pour l’ufage
des troupeaux, fi la ferme des gabelles ne met-
toit des obftacles à un bénéfice dont il feroit a fiez
naturel que les artiftes -puffent jouir. Après le tre-
jettage , le verre eft plus bouillonneux , à caufe
du mouvement qu’il a éprouvé , mais une demi,
heure de chauffe fuffit pour le ramener a fon premier
état: nous pouvons affurer qu’à l’inftant qu’on
commence le travail, quoique le fuin le plus groffier
ait été enlevé ou diffipé , il en refte encore
beaucoup dans le verre. Il ne faut, pour s’en convaincre,
que jetter les yeux fur les ouvrages qui
fortent de ces manufactures , fur-tout dans le
commencement de chaque journée ; ils font remplis
de points , de bulles , ou bouillons dont l’intérieur
eft vifiblement blanc, terne & opaque,
par le fel de verre qu’ils renferment. On ne doit
pas chercher d’autre caufe au peu de folidité des
vafes chimiques fabriqués dans ces ufines, fur-
tout lorfqu’on les employé, à la diftillation en
grand des acides minéraux. Sur la fin de chaque
journée , le verre eft cependant plus épuré , le fel
de verre ayant eu plus de temps pour fe diffiper.
Les ouvriers ont chacun un banc fur lequel ils
s’affeoient pour travailler le verre qu’ils ont cueilli;
le banc eft garni de deux bras horizontaux fur
iefquels ils placent leur canne, & ils la font rouler
avec la main gauche, tandis que la droite , armée
de la palette ou des fers qu’ils appuyent par
leur partie plate, forme le cul du vafe. Leur marbre
eft placé devant eux en avant de l’ouvreau,
horizontalement : comme leur principale fabrication
confifte en petites bouteilles, ils ont leurs
divers moules pôles par terre à côté d’eux fur
des plaques deifonte. Les moules, font fimplement
des taiTeaux ou cylindres de terre à pots, recuits,
& percés dans leur milieu d’un trou dont le diamètre
règle la groffeur que doit avoir la fiole ou bouteille.
Lorfque la paraifon'eft faite, ils la préfen-
tent dans le moule qui lui convient, qu’ils lui font
remplir en fouffiant, ils la retirent du moule ,
achèvent de former le goulot en alongeant; &
appuyant le bout des fers contre le fond, ils y
font une dépreffion plus ou moins profonde à leur
gré ; ils détachent alors de la canne leur pièce
qu’ils pofent fur le marbre, & ils la pontifient par
l’enfoncement du fond, furfondent à l’ouvreau
les bords du goulot, dont enfuite, aflis fur leur
banc, ils forment l’orifice en y introduifant les fers.
Lorfqu’ils ont intention d’obtenir leur paraifon bien
ronde, ils la préfentent & la retournent en la fouf-
flant, dans un fegment de fphère creufé dans un
bloc de bois bien uni. C ’eft ainfi qu’ils font les
hâtons, qu’ils forment le plus ronds qu’ils peu"
v en t, fe contentant d’en alonger le c o l i l s com-
mencent de même les corauçs, mais ils leur don-
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tient une forme de poire en alongeant la boule|
& la plient à volonté en l’appuyant contre le
marbre. Ces fortes d’ouvrages n’ont pas befoin
d’être pontillés, parce qu’on ne travaille pas leur
orifice; d’ailleurs , le verre que le pontil laiffe
attaché à la p iècenu iroit au fervice de ces vaif-
feaux.
Les mêmes verriers font auffi de très-grandes
bouteilles dites dame-jcannes. Ils forment la paraifon
en boule dans le bloc de bois , & établirent
dès-lors le goulot de la longueur qu’ils défirent ; il
eft ordinairement fort court. Ils applattifient le
fond en prenant la canne par le milieu, & frappant
de leur paraifon perpendiculairement fur une
plaque horifontale. Ils déterminent le diamètre de
la bouteille, en la retournant , à mefure qu’ils
Ibufflent, dans un demi-cilindre creux, de fer,de
tôle? Puifque l’on fabrique, dans ces manüfaéhi-
res, des vafes fi différens en volumes, on eft obligé
de tenir les ouvreaux de diverfes grandeurs : il y
en a ordinairement un ou deux difpofés pour les
grandes pièces, & les autres font deüünés aux
plus petits ouvrages.
La recuiflon dans les verreries en chambourin,
s’exécute dans une tour placée au-deflus du four
de fufion, & qui y communique par un trou fitué
au milieu du pavé, un peu moindre que celui qui
donne paffage à la .flamme du tifar dans la cham- ,
bre fupérieure.. En effet, la recuiffon a bien moins !
befoin de chaleur que la fufion. Le pavé de cette !
tour fe prolonge en une efpèce d’étuve difpofée |
en plan incliné, qui s’éloigne du four d’environ i
dix à douze pieds ; la tour eft percée d’autant
d’ouvertures qu’il y a d’ouvreaux de travail, &
chaque ouvrier y dépofe fa pièce dès qu’elle eft
finie : les .ouvrages y font pouffés par ceux qui
font fabriqués enfuite; ceux-ci le font par de nouveaux,
ainfi de fuite jufqu’à ce que, fortis de la
tour, ils entrent dans l’étuve, où ils fe refroidif-
fent graduellement ; de forte qu’ils font totalement
froids lorfqu’ils parviennent au bas du plan incliné.
Celui-ci peut être couvert d’une couche de
fable tamifé , pour que les pièces ne gliffent pas
trop vite , & un ouvrier ^rmé d’un léger crochet,
les arrange fur l’étuve, & les attire fucceflivement
vers l’extrémité du plan incliné, à mefure qu’elles
fortent de la tour, & que de nouveaux ouvrages
exigent de la place. On v o it , comme nous l’avons
dit ci-deffus, qu’il doit y avoir une partie du four,
fans ouvreaux, puifqu’elle eft occupée pa.r la largeur
de l’étuve.
Les fouffleurs en chambourin fixent leur journée
a un certain nombre de pièces , relatif au volume
de celles-ci & à la contenance des pots de travail.
Dès que les pots de fonte ont fourni aux pots de
travail la quantité de verre néceffaire, on enfourne
pour remplacer le verre diftribué, de forte que
les ouvriers travaillent , tous les jours , depuis
environ deux ou trois heures aptès minuit, jufqu’à
environ midi.
Il ne feroit pas difficile de fabriquer du verre
vert avec d’autres fondans que le, falicor ou la
foude : on peut fe fervir de cendres ordinaires,
de cendres de fougère , de varech , de foude commune
, &c. obfervant les précautions que nous
avons indiquées dans l’ article précédent, en parlant
des divers fondans.
Verrerie en verre noir ou à bouteilles.
Les verreries en verre noir prennent ce nom
de la • couleur du verre qu’elles produifent ; ce
n’eft pas que ce verre foit exaâement noir, il
eft d’un jaune plus ou moins foncé ou d’un vert
jaunâtre tièi-intenfe ; ce que l’on peut vérifier
aisément, fi on l’examine en lames très-minces;
mais ce même verre de couleur très-foncée, travaillé
à une forte épaiffeùr, préfente en effet
l’apparence de la couleur noire. Nous fuivrons,
pour cette forte de verrerie, la marche que nous
avons fuivie pour le chambourin. Nous expofe-
rons d’abord la forme & la conftruétion des fours
de fufion, enfuite les matières employées. Nous
indiquerons les procédés du travail, & nous terminerons
par les moyens de recuiffon des ouvrages.
Nous nous aiderons avec empreffement lorf-
qu’il fera queftion de ces manufactures où le
charbon de terre eft employé comme combuftible,
de la defeription qui fe trouve dans l’encyclopédie
in-fol., & dans laquelle beaucoup de ren-
feignemens utiles ont été pris dans la fuperbe
manufa&ure de Sèves, piès de Paris.
Le verre noir paroît avoir été fur-tout deftiné
à renfermer les différens vins, & c’eft de cet ufage
qu’on l’appelle très - communément verre à bouteilles.
Il feroit difficile de rendre raifon de cette
préférence ; car le vin très-clair & d’une belle
couleur , paroît. plus avantageusement dans un
verre très-blanc & très-fin; mais le moindre prix
du verre noir, la propriété que lui donne fa couleur
de dérober à la vue le dépôt que les meilleurs
vins forment à la longue dans les vafes qui
les contiennent ; l’utilité même de certains marchands
qui, à la faveur de l’obfcurité du contenant
, parviennent à diflimuler les mauvaifes qualités
apparentes du contenu , ont fans doute amené
l’ufage confiant de tenir le vin dans le verre
noir.
Les diverfes provinces de France , riches en
vignobles précieux, préfèrent exclufivement cer-
i taines manufaâures, par une habitude que juflifie Ià la vérité la longue expérience d’une bonne fabrication.
En Champagne, on ne connoît que les
bouteilles de Lolembray; en Bourgogne, on ne