
nations putrides des foffes ? comme s'il n’étoît pas
fuffifamment prouvé, que pernicieufes à refpirer
pour rhomme en fantè, elles peuvent coûter la
vie aux malades : malheur à la femme en couche,
aux fébricitans, à l’afthmatique, aux poitrinaires
■ tjui y feront expofés!
Nous pourrions ajouter, malhèur encore à tous
ceux qui ont le genre nerveux tant foit peu
fufceptible. Un de nous connoît plufieurs per-
fonnes qui , lorfqu’elles font expofées à ces
odeurs infeétes, fe trouvent mal ; & leur fanté
efl dérangée plus ou moins de temps, fuivant la
proximité & i’intenfité de l’odêur.
Malgré les avantages inexprimables du ventilateur
fur l'ancienne -pratique -, on ne fauroit diiîî-
muler, comme le remarquent très-bien les auteurs
du mémoire, qu’il ne refte beaucoup de chofes à
défirer.
i° . Le vent excité par l’aélion des foufflets,
eft-il affez confidé^able pour vaincre la pefanteur
de la colonne d’air, dont le'diamètre répond à
celui des tuyaux qui fe prolongent au-deffus des
maifons ; & par conféquent peut il faire monter
toutes les vapeurs de la foffe ? Le courant d’air
eft même li foible, qu'il ne fait pas vaciller les
lumières*des ouvriers ; ainfi il y a apparence que
la maffe ou vapeur méphitique & pernicieufe refte
prefque en entier dans la foffe, & que les ouvriers
qui la refpirent n'en courent guères moins
de danger.
2°. Mais en fuppofant, ce qui eft en queftion ,
que toutes les vapeurs des foffes foient chaliées
dans l’air , elles n’en exiftent pas moins dans
i’atmo'fphère, d’où elles retombent enfuite, &
nuifent de même aux hommes & aux animaux
par leur propriété malfaifante. Voici un fait qui
prouve cette affertion.
Le ventilateur ayant été employé fur une folié
fi tuée dans la rue Saint-Honoré, on en fit la vui-
dange , fans qu’on s’aperçût, de l’odeur dans la
maifon de qui elle dépendit; cependant, difent
les auteurs du mémoiréy-Cette même odeu'r in-
feâà l’entrée du Carroufel, quoiqu’éldigné de cent
toiles de l’endroit où l’on opéroit.
MM. Parmentier, Cadet & Laborie, difent
cependant avoir obfervé la vapeur des folles au
fortlr de l’appareil du ventilateur; ils prétendent
qu’elle forme au fortir du tuyau une fumée affez
forte pour être fenfible à la vue, ainfi qu’à l’odorat.
Cette vapeur eft colorée, a des nuances variées
de bleu , de verd, de noir, & quelquefois
d’un blanc fale, ce qui femble décider d’une manière
affirmative, la queftion fur la puiffance de
Pair des foufflets, fur les vapeurs des foffes.
Ils ont fait refpirer cette vapeur à des oifeaux
qui font tombés morts, ou du moins dans une
afphyxie qui y reffemh'.oir; un chat expofé à
cette vapeur, a eu le même fort. Ce phénomène
n’eft pas nouveau pour les ouvriers du ventilateur;
ils affurent l’avoir obfervé fouvent fur les oifeaux,
dont le hazard dirigeoit le vol trop près de cette
vapeur, qui eft fi aétive , qu’elle agit fur les
tuyaux de métal par lequel elle paffe; elle le
ronge & le détruit en peu de temps ; on nous en a
fait voir qui font criblés de trous comme une
écumoire.
MM. Cadet, Parriientier & Laborie, paffent
enfuite aux moyens de détruire la malignité de
ces vapeurs.
Le feu eft le moyen le plus efficace qu’ils emploient
; pour cet effet ils placent un fourneau
fur l’orifice fupérieur du tuyau principal de la foffe
d’aifance, où les ouvriers du ventilateur plaçoient
ci-devant l’entonnoir renverfé , dont nous avons
parlé.
Ce fourneau eft^compofé d’un tour de terre
fans fond furmonté d’une chappe, qui a une ouverture
dans fa partie intérieure , par laquelle on
introduit le charbon ; cette ouverture fe ferme
par une porte de tôle qui fe meut fur de petits
gonds j la grille de fer néceffaire pour foutenir
les charbons , fe trouve placée à quelques pouces
au-deffus de-la bafe du fourneau. Dans la partie
fupérieure de la chappe, on adapte un tuyau de
tôle , dont l’orifice fupérieur furmonté le toit de
la maifon.
Le tout étant ainfi difpofé, lorfque l’intérieur
du fourneau commence à s’échauffer, fi l’on approche
un papier, ou tous autres corps enflant*
més à la porté du fourneau, la vapeur qui le tra*
verfoit prend feu fubitement, & produit une flamme
qui fe fait voir au dehors ; mais lorfque le
charbon eft une fois embrafé, cette flamme devient,
un brandon confiant, qui s’élève à deux
ou trois pieds au-deffus de la chape, lorfqu’on
le débarraffe de fes tuyaux : cette flamme diffère
r de celle qui eft produite ordinairement par les
charbons enflammes, par fà couleur , par l’odeur
qu’ëlle répand ; on ne peut mieux la comparer à
cet égard, difent les auteurs du mémoire, qu’à
' la vapeur enflammée d’une diffolution de fer dans
l’acide vitriolique connue, en chimie, fous le nom
de chandelle philftfophique.
Ces meilleurs ajoutent, qu’ayant fait une fois
cette expérience dans un emplacement défavan-
tageux, où les tuyaux n’avoient point d’iffue en
dehors, il fe répandit une odeur des plus fortes
d’acide fulphureux volatil, au point de faire croire
qu’on brûloit du foufre dans le voifinage. Ayant
enfuite fait refpirer cette vapeur à des oifeaux &
à des chats, ces animaux n’en ont point paru
être incommodés. • MM.- Cadet, Parmentier &
Laborie, ayant été eux-mêmes expofés long-temps
à cette vapeur, affûtent n’avoir éprouvé d’autre
déplaifance, pour nous fervir de leur expreffion ,
que celle que caufe ordinairement l’acide fulphureux
volatil fur ceux -qui le refpirent.
On voit par cette expérience, qui a été répétée
fous nos yeu x, que cette vapeur auffi dangereufe
que défagréable à refpirer, puifqu’elle tue , comme
nous l’avons rapporté , les animaux qui font expofés
à fon aétion, fe trouve, dénaturée par le
feu, & changée en une vapeur incapable d’altérer
la falubrité de l’air, & de nuire aux hommes &
aux animaux qui la refpirent en plein air ; les
auteurs du mémoire vont plus loin, ils la croient
capable de corriger les difpofmons putrides de l’at-
mofphère, dont l’acide fulphureux eft regardé
comme le meilleur correétif.
Le fécond & le pilus grand avantage, eft que
le fourneau fupérieur détermine un courant d’air
confidérable, attire toutes les vapeurs méphitiques
de la foffe , au point de faciliter le travail des
vuidangeurs qui peuvent le continuer , pendant
plufieurs heures de fuite, fans éprouver le moindre
accident.
MM. Cadet, Parmentier & Laborie, rapportent
que cett£ opération ayant été faite fur une
foffe réputée très-mauvaife par les ouvriers, le travail
fe continua, contre ce quon auroit ofé ef-
pérer , depuis cinq heures du foir jufqu'au len-,
demain à midi. Pour avoir un objet de eompa-
raifon, & mieux juger de la part que l’aétion
du feu pouvoit avoir aux heureux changemens
qu’on remarquait, ces meilleurs , laiffèrent éteindre
le fourneau ; mais ils furent bientôt prefque
dans le cas de fe repentir de cette expérience ,
car quelques inftans après que le feu fut éteint,
un ouvrier fut attaqué par le plomb & fortit de
la foffe ; un fécond ne s'en retira qu’à l’aide de
fes camarades, & un troifièine enfin y tomba
fans connoiffance.
Les auteurs du mémoire rapportent un phénomène
bien fingulier obfervé par les ouvriers.
Ils prétendent fentir, lorfque le feu efl allumé,
uie chaleur très-forte & inconnue jufqu’alors dans
Üfond de la foffe, quoique ce fourneau foit placé
à plus de cinquante ^ieds au-deffus du fol. Ces
meilleurs, préfument d’après ces expériences dont
Us ne nous ont pas fait part, que.cette chaleur
eft ôccafionnée par le mélange fubit de l’air extérieur
& de la vapeur des foffes ; mélange d’au--
tapt plus prompt que le feu fupérieur détermine
u:-i courant d’air très fort.*
Outre le fourneau fupérieur, dont nous venons
de parler, les auteurs du mémoire en ont encore
établi un fécond, qu'ils placent dans l’intérieur de
la,foffe même; on établit une communication par
des tuyaux de tôle entre ce fourneau , & le conduit
en poterie, fur l’orifice duquel eft établi le fourneau
fupérieur.
Pour reconnoître l’effet de ce fécond fourneau,
on l’a fait allumer tout feul ; & il a déterminé,
à l’aide des foufflets, un courant de vapeurs qui
formoit, à l'extrémité des tuyaux, une fumée
épaiffe de la groffeur du bras.
Les vuidangeurs ont imaginé une méthode, qui
reffemble en petit à celle que MM. Cadet, Parmentier
& Laborie ont exécuté en grand ; ils
fufpendent, par une ficelle, une chandelle allumée
dans le tuyau d'aifance au rez de chauffée ;
& ils defcendent dans la foffe une poêle de charbon
allumée. L’une & l’autre s’éteignent fou-
vent quand les vapeurs méphitiques font trés-
abondantes ; mais lorfqu’elles reftent allumées ,
les ouvriers en tirent un bon augure, & ils affur
rent par-là que le plomb fe précipite ( r ) .
Après les moyens dont nous venons de rendre
compte , qui nous ont paru très-efficaces pour
détruire la malignité des vapeurs des foffes d’aifance
; MM. Cadet , Parmentier & Laborie,
en propofent encore un autre, qui confilte à projeter
de la chaux en poudre, & de la mêler avec
les matières fécales. Cette méthode eft très-connue
, &c fe pratique dans plufieurs endroits du
royaume & d’Allemagne ; nous avons répété cette
expérience dans des tonneaux remplis de vannes,
& nous fommss obligés de convenir que l’odeur
affreufe, fans être détruite abfolument, a été
très-diminuée, & rendue prefque fupportable.
Ce changement s’opère affez fubitement, & ne
fe renouvelle, que lorfque les vapeurs ont faturé
la chaux, & redeviennent furabondantes, alors
fi on renouvelle les projetions de chaux, le
même phénomène a lieu , & l'odeur change de
nature ; ce qui fait croire à MM. Cadet, Parmentier
& Laborie, que pour mettre les ouvriers
à couvert de tous les accidens qui les menacent
dans les foffes, il ne faudtoit peut-être que pénétrer
& amalgamer, s’il nous eft permis de parler
ainfi, les matières des foffes avec une quantité
de chaux fuffifante. Ils propofent donc ce moyen
pour fuppléer au cabinet du ventilateur, & aux
fourneaux allumés, lorfque l’emplacement ne pei-
mettra pas d’en faire ufagê, & lorfque l’engorge-
(i) On çonçojtaisément que l’extinction plus ou moins
prompte de la .chandelle allumée , doit leur indiquer la
qualité de l’air âë la'fosse, et que la poêle de charbons allu^
mes ,'.est à l'instar dè* ce qui se pratique avec aÿantage
dans’les minés dé charbon.
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