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factures, le parti bien plus {impie de vendre par
feuilles.
En comparant les deux procédés employés pour
faire du verre à vitres, foit en plateaux ronds,
loit en manchons : voici des obfervations , qui,
vraifemblablement n’auront pas échappé au ie&eur.
Le verre travaillé en plateaux n’a pas befoin d’être
étendu, & parconféquent, il louffre moins de
conta&s différens, que le verre travaillé en manchons
; il doit donc être moins iujec aux raies,
aux déchirures, & enfin il conferve mieux ce poli
v i f , que l’on remarque au verre qui s’eft réfroidi
à l’a ir, fans éprouver d’autre conta â, que celui
de l’air environnant. Je ne parle pas de la couleur :
il eft fans doute aifé d’obtenir la même, quelque
méthode qu’on em p lo y ai la fabrication: on reproche
cependant au verre èn plateaux d’avoir
ordinairement une nuance plus jaune que celui
en manchons. Si ce dernier, comme nous venons
de l’expofer, paroit devoir céder, en quelques
points, au verre en plateaux, il réunit d’un autre
côté des avantages qui ne peuvent lui être con-
teftés. i° . Le plateau eft de forme ronde , & pour
le diftribuer en carreaux quarrés, il doit nécef-
fairement y avoir plus de difficulté & de perte
de verre, que pour réduire-de même en carreaux
des feuilles déjà quarrées ; a°. L’épaiffeur de la
feuille de verre fouffié en manchons , doit être
plus égale que celle du plateau de verre en boudinés
; il eft naturel que les parties qui avoifinent
la noix foient fouvent plus épaiffes que la circonférence
du plateau; $Q. la recuiffon du verre
fouffié en manchon, à caufe de l’égalité d’épaif-
feur, eft plus fûre & plus égale ; quelque parfaite
que foit la fabrication d’un plateau, la boudiné
fait toujours dans fon milieu une maffe de verre
dont le réfroidiffement ne peut pas être auffi prompt
que celui des autres parties de la pièce ; 40. dIus
d’égalité dans la recuiffon-, entraîne néceffaire-
ment plus de fureté à la coupe avec le diamant;
50. enfin , parmi les carreaux que Ton fait avec
un plateau de verre; il y en a toujours un dans
lequel fe trouve la boudiné qui emporte un affez
fort poids de verré, 8c qui ne peut être d’aucun
ufage3 tout au plus, met on de femblables carreaux
dans les lieux les moins expofés à la v u e ,
comme dans des caves ou dans des greniers.
Nous ne croyons pas devoir nous étendre ici
fur la manière dont on coupe le verre à vitres- :
cette opération fe fait, comme pour les glaces,
-avec un diamant brut, que l’on paffe le long d’une
régie fur la fur face du verre: voyez ( art. glaces
coulées) l’équarriffage des glaces. Nous préviendrons
feulement, que le verre à vitres étant beaucoup
moins épais, & fur tout beaucoup moins
dirait que les glaces , le diamant à vitres doit être
moins fort, plus léger que celui à glaces, & on
n’a jamais befoin de frapper fous le trait, pour lui
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faire pénétrer toute 1 epaiffeur de la pièce. Le diamant
à vitres n’eft pas non plus monté tout à fait
compte celui à glaces : le grain de diamant eft bien
foudé au milieu de la furface infériéure d’un petit
rabot, d’environ huit ou dix lignes de long, fur
trois on quatre de larges, & autant d’épaiffeur.
Mais à caufe des inégalités de la feuille, cette
furface inférieure du rabot eft courbe, c’eft-à-dire
forme le bateau, & du milieu de la furface fupé-
rieure du rabot, s’élève un petit manche de bois
de cinq ou fix pouces de long , qui fert à tenir
le diamant, à peu près comme on tiendroit un
crayon.
yerre façon de Bohême, ou verre eti'table.
La fabrication, dont nous allons entreprendre
la defeription, reffemble beaucoup à celle du verre
à vitres à l’Allemande. On appelle les verres qui
en font le produit verres en table, vraifemblablement
à caufe de la forme platte que l’on leur
donne, verres de Bohême ou façon de Bohême, parce
que ce font les artiftes de cette partie de l’Aile-
magne , qui ea ont , les premiers , mis dans le
commerce.
Les ufages auxquels on emploie le verre en
table, fo;nt de vitreries fenêtres en grand carreaux,
pour donner aux appartemens le plus beau jour
poffible , de garnir les portières des voitures, &
de couvrir les eftampes, & les tableaux en paf-
tel : il convient donc que cette qualité de verre
foit nette , d’une belle tranfparence, d’une grande
fineffe , & d’une couleur qui ne puiffe altérer celle
des objets qu’on regarde au travers.
Les fours, dans lefquels on fabrique du Verre
en table , font femblables, pour la forme, à ceux
du verre à vitres ; il arrive même quelquefois, que
dans un fourneau deftiné à ce dernier travail, on
réferve un ou deux ouvreaux , pour y travailler
du verre de Bohême. Cette pratique doit être déterminée
par le débouché que peut fe procurer
l'ar-tifte , mais pour le bien de l’art en lin-même,
je l’adopterois difficilement : la qualité des deux
fortes de verre eft fi différente, que leur compo-
fition ne fauroit être la même, & par conféquent,
on ne peut compter fur une exacte égalité dans
la durée de la fufion & de l’affinage.
Le verre en table fe fabrique en manchons,
comme le verre à vitres & les ouvreaux du four
doivent de même être proportionnés au diamètre
des canons que l’on fe propofe de fouffler.
Les plus b^aux verres façon dé Bohême que l’on
connoiffe, tels que ceux de Saint-Quirin, de
Saint-Louis , & c. font fabriqués dans des fours
chauffant en bois ; on a effayé d’employer à cette
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fabrication des fours en charbon, mais quelque j
foin que l’on fe foit donné, avec quelqne exactitude
& quelque intelligence qu’on ait clofé les
compofmoris, la couleur dés ouvragés n’a jamais
valu celle des verres, fondus avec du bois. La
fumée du combuftible eft une caufe fuffifante de
cette différence; l’influence de la fumée eft furtout
fenfible dans le cueillage, & il n’eft pas à efpérer,
qu’en fabriquant quelque verre blanc que ce foit,
avec du charbon , on atteigne la même perfection
qu’en chauffant avec du bois, à moins que
l’on ne parvienne à adapter à la fabrication dont
on s’occupe, la méthode de fondre à pots couverts.
;Ce n’eft pas que dans des fours en charbon
ea ne puiffe faire du verre en table bien fupérieur
au verre à vitres commun , mais il faut alors fe
contenter d’une qualité médiocre.
_ U eft évident, d’après la-belle qualité qu’on
exige du verre de Bohême, qu’il ne faut rien
épargner pour employer les meilleures matières,
& pour les préparer convenablement, le fable le
plus blanc, le plus pur, foigneufement lavé, la
potaffe la mieux calcinée doivent faire k bafe de
la compofition ; ces fubftances ne peuvent Qu’être
exemptes du principe colorant greffier, mais^le
feui mélange de l’alkali & du fable formeroit un
verre trop pâteux, fron n’y ajoutoit de la chaux
bien blanche pulvérîfée , ou Amplement effleurie
& tamifèe. Enfin on s’affure de la couleur , par
une jufte addition de manganèfe & de cobalt,
faffre,' ou bleu d’azur.
Deux cents livres de fable, cent vingt livres de po-
taffé, quatorze livres de chaux, deux onces de manganèfe,
forment une compofition', qui, au rapport
de M. Dantic, («T. 2 nag. 166 ) produit du
verre de la plus belle qualité; laxcouleur ne peut
en effet qu’en être bonne, & un feu convenable
procurera furement une fufion complette, & un
bon affinage. Si le fable a été bien lavé 8c féché ,
que la potaffe ait été parfaitement calcinée , 8c que
la chaux foit bien blanche , on pourroit fe difpen-
fer de faire fubir au mélange l’opération de la
fritte : elle fera néanmoins néceffaire , pour' que
• l’effet de la manganèfe foit plus fenfible, à moins
que l’on n’ajoute une certaine quantité de nître ,
qui, confervant ce demi métal en état de chaux,
manifefte fa partie colorante.
L’alkali fixe minéral bien extrait de la barrille
d’alieante , & fuffifamment calciné , peut être employé
pour fondant, au lien de potaffe ; mais dans
tous les cas , une légère addition de bleu paroit
néceffaire pour combattre efficacement le jaune
qui pourroit fe trôuver dans le verre ; eMe eft
généralement employée, ce dont on peut fe convaincre,
en examinant l’épaiffeur du plus beau
verre en table ; on lui trouvera conftamment un
coup d’oeil bleuâtre qui décèle la préfence du co-
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balt, du faffre, ou de l’azur; une dofe d’arfénic
mife dans chaque pot à la première fonte ne fera
pas inutile, pour faciliter la dépuration, 8c favori
fer i’ébulition de la maffe vitreufe.
Le travail du verre en table eft à peu près le
même que celui du verre à vitres à l ’allemande ;
les places font difpofees de la même manière; on
façonne le verre de même en manchons ; mais
comme les feuilles font ordinairement beaucoup
plus grandes, 8c qu’un manchon trop long feroit
fort embarraffant à alonger , & fort difficile à
fabriquer bien droit, on lui donne, en lvi foufflant,
un grand diamètre.. De cette forte , la longueur
du manchon forme , après qu’il eft étendu, la
largeur de la fédilie, dont la longueur eft formée
par le développement du manchon. Ainfi , en fup-
pofant qu’on voulût fabriquer un verre en table
de quarante-huit pouces , fur îrente-fix , car les
bons ouvriers peuvent atteindre ces dimensions,
il faudroit faire un manchon, qui, après en avoir
emporté le bonnet, eût trente-fix pouces de long ,
8c environ feize pouces de diamètre.
Le verre en table eft travaillé plus épais que
le verre à vitres, & cette condition apporte encore
quelque changement dans la fabrication : en
raifon de fon épaiffeur, & de la grandeur des
pièces, on courroit trop de rifque, fi ©n laiffoir
Amplement réfroidfr, fans précaution, les manchons
fur le chevalet, comme les petits canons
pour vitres.
Le fouffleur en verre de bohème fe fert, pour
faire fes boules, d’un bloc , dans lequel on a
creufé plufieurs demi - ellipfoïdes de différentes
grandeurs. Lotfque le verre eft bien fin , & qu’il
eft parvenu, en ceffant de tifer, au degré de con-
fiftencé néceffaire, on l’écrême & on prend fur
le pot un premier cueillage ; on le retire du four,
8c pofant la canne fur la Jbigorne, on y laiffe
un peu réfroidir ce premier coup, que Ton a
uni avec le plat de la palette , faifant rouler la
canne fur la bigorne ; on cueille une deuxième
fois , on unit ce fécond coup de verre comme le
premier, & on commence à trancher le verre :
on façonne la maffe vitreufe attachée à la canne
dans le plus petit trou du bloc, en verfant de
l’eau dans celui-ci ; on cueille une troifième. fois,
on unit, on tranche ce troifièmè- cueillage , &
ou le marbre dans un trou du bloc un peu plus
grand ; ceft alors qu’élevant la canne prefque
perpendiculairement , la paraifon étant poiéedans
le bloc, & foufflant avec force, on perce le verre ;
on continue à fouffler jufqu’à ce que cette aôion
ait produit dans l’intérieur de la boule un vide
d’environ trois ou quatre pouces de long, Alois
on cueille de nouveau, & après avoir uni & tranché
ce dernier cueillage , on vient le marbrer
dans le trou le plus grand du bloc , & on fouffié
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