
Ajoutons que l’expérience a prouvé qu’un domef-
tique du gentilhomme, dontün a parlé , s’eft trouvé
très-incommodé pour avoir bu un rèfidu de vin
qui avoit féjourné dans les bouteilles de Souvigny.
On lit dans les mémoires de l’académie, pour
l’année 17 14, page 380, que des caraffons d’une
verrerie du Nivernois, fur lefquels l’eau & l’eau-
de-vie n’exerçoient aucune a&ion, étoient facilement
décompofés par .l’acide du vin & par les
acides minéraux, ceux-ci.le convertiflant même
en une efpèce de matière mucilagineufe.
Quant à l’acide du v in, il fbrmoit avec la fub-
itance de ces mêmes verres, de petits criftaux
tranfparens & de couleur verte , dont les parois
des bouteilles étoient hériffées, enforte que le verre
étoit décompofé par le v in , & le vin par le verre :
auffi l’expérience avoit elle prouvé que le vin fe
gâtoit dans ces bouteilles.
Tout ceci prouve que le verre, quoiqu’il fe
conferve pendant plufieurs fièclesj n’eft pas ëtfs
fièrement inaltérable ; car il n’y a pas de verre
qui réfifte par exemple, à l’a&ion de l’air des
écuries, des imprimeries, des hôpitau*, de certaines
manufactures, &c. &c. Au bout de quelque
temps fa furface fait iris : elle fe dépolit, forme
des inégalités, & de pareilles vitres perdent leur
tranfparence & ne font plus fufceptibles d’être
éclaircies ; quoique cependant le verre à vitré de
France foit un des meilleurs , d’ap1 es les obfervations
de M. Cadet, de l’académie des fciences, auqud
on eft redevable d’un très-grand travail fur différens
verres. ( Mérn, des Sav. étrangers, tom. V ,p. 117).
Ce chimifte y prouve qu’en rompant l’agrégation
des parties conftituantes du verre, il ne réfifte
à aucune menftrue, pas même à l’aétion de l’eau
qui, par k (impie ébulition, diffout Palkali qui
entre dans la compofition du verre y que le verre
ainfi divifé décompofé le fel, & que tous les acides
1 agiffent fur lui & en font des fels qui paroiffent
L ne pas différer entre eux par leur configuration.
Y I G N E R O N .
6A7—0O
( Art du )
L e vigneron eft celui qui travaille la vigne qui
la plante, la cultive & exprime le jus des raifins
pour en faire du vin. Le vigneron fait valoir fa
propre vigne, ou bien il travaille celle d’un propriétaire
qui l’ emploie à l’année ou à la journée ;
ou bien enfin il tient les vignes à bail comme le
fermier tient les terres.
La culture de la vigne , & l’art de faire le vin ,
font au nombre des premières çonnoiffances que
les hommes ont eues de l’agriculture. Celui-ci,
dont la perfeCiion n’efl pas moins néceffaire qu’a va n-
tageufe , a été négligé & regardé avec une efpèce
d’indifférence jufqu’à ces derniers temps où l’on
a fenti combien cet objet méritoit d’attentions,
tant par rapport au commerce qu’on en fait avec
l’étranger, que pour le bien qui en réfulte pour
les particuliers auxquels il fert de boiffon habituelle.
Cet art fi néceffaire a donc été inconnu jufqu’à
préfent, ou du moins très-borné, parce qu’on
en ignoroit les vrais principes ; & que la pratique
en étoit défeCtueufe, pour être fondée fur une mau-
vaife théorie.
La fermentation étant abfolument effentielle
pour faire du bon vin, fa bonne ou mauvaife qualité
eft toujours relative à une fermentation plus
ou moins parfaite : lofqu’elle ne fe fait que dans
une partie du moût ou jus de raifin, il n’y a que
cette partie qui puiffe faire du vin , parce qu’en
ne perdant pas fa première qualité, le refte ne peut
y contribuer pour rien.
Ce n’eft cependant point affez, que la fermentation
foit univerfelle, il faut encore qu’elle foit
fimultanée , e’eft-à-dire, que toutes les parties aient
fermenté prefque toutes â la fois; alors le vin en
eft meilleur & plus vineux. Lorfque par le défaut
de chaleur naturelle cette fermentation ri’a ni la force
ni la violence néceffaire, on peut la procurer en
verfant dans la cuve quelques chauderonnées de
raifins bouillans d’abord après le foulage & dès
que le vin commence à travailler, fans quoi il feroit
impofîible dans certaines années d’obtenir une fermentation
parfaite, & de parvenir à corriger les
vins de leur verdeur, de leur crudité & de leur
peu de chaleur.
Dès que la fermentation eft parvenue au point
qu’on la defire; il eft important de la maintenir
dans cet état : pour cet effet on couvre le vaiffeau
dans lequel fe fait le vin ; & comme dans üne
cuve où il y a plus de vide , la chaleur fe diflipe
davantage que dans celle où il n’y en a point, ou
bien peu , on doit faire en forte que le couvercle
touche au marc lorfqu’il eft dans fa plus grande
élévation ; c’efl: pourquoi il faut toujours, autant
qu’on le peut, proportionner la grandeur de la
cuve à la quantité de vendange qu’on a.
Quant à l’égrappement des raifins, il eft des
cas , comme dans les années où ces fruits viennent
en pleine maturité, où l’on peut les égrapper aux
trois quarts ou aux deux tiers ; mais dans les
années pluvieufes ou dans celles où la vendange
n’eft pas bien mûre, il faut bien fe garder d’ér.
grapper, parce que la grappe, quiv, dans les bonnes
années , durcit le vin & le rend plus groflier,
en accélère la fermentation dans les mauvaifes , &
contribue à l’améliorer en relevant fa foibleffe &
en lui donnant un cara&ère vineux.
S’il convient de favoir le fond, les détails , les
fineffes & les reffources de l’art de faire du vin ,
il n’importe pas moins deconnoître tous les degrés
de la fermentation , comme il faut procurai une
chaleur convenable, combien elle doit durer, &
quels font fes effets. Plus la fermentation eft univerfelle,
plus le v in, qui en eft le produit, eft
fpiritneux. En difpenfant le marc & la grappe avec
intelligence , en mettant plus ou moins dans la
cuve, en les laiffant plus ou moins fermenter, les
vins font plus ou moins rouges , plus ou moins
greffiers, plus ou moins veloutés, & ont plus ou
moins de corps ou defineffe. Plus on foutient, plus
on preffe la fermentation ; plus les vins perdent de
leur verdeur, & plus ils acquièrent de bonnes qualités.
Pour cet effet on 11e doit jamais ouvrir, remuer
& mouiller-le marc, parce qu’on interrompait la
fermentation , on réfroidiroit le vin , & on auroit
moins de teinture en empêchant le détachement
des parties colorantes qui font fur la pellicule du
grain. Plus le vin bout & fermente dans la cuve ,
moins il eft dur & indigefte ; plus il a eu de cha-
| leur, plus long-temps il fe conferve , parce que