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deux ensemble avec précaution, pour en introduire
un troifième ; ainfi de fuite , jufqu’à ce que
le premier foit parvenu dans le four à étendre.
Lorfqu'on. en eft à ce point, on ne court plus de
danger, pour la confervation des manchons qu’on
introduit dans la trompe, parce qu’à mefure que
I ouvrier étendanr, prend le manchon qui fe préfente
dans- le four à étendre, on fait occuper fa
P aGe Par celui qui le fuit, en pouffant tous les
-manchons qui fe trouvent alors dans la trompe.
II relie naturellement une place vide vers Fèrifice
extérieure de la trompe , & on la garnit d’un manchon
froid : de cette forte , les manchons parviennent.
graduellement à la température du four à
étendre.
Les manchons doivent être étendus fur une
furface bien unie; on place, à cet effet, dans le
milieu du four à étendre, & à niveau de fon pavé,
une pierre quarrée, dont, les dimenfions furpaf-
fent celles du plus grand manchon que l’on aura à
applatir. Ces pierres , faites pour rélifter au feu ,
fon communément d’un grais dont le grain foit
très-fin, o u , on les conftruit, en leur donnant
environ quatre pouces d’épaiffeur, avec de l’argile
mélangée de fable, ou de ciment; mais,
laquelle de ces deux dernières fubftances qu’on
mê e à la terre,, on doit avoir attention de la
paffer pas un tamis très-fin-, de peur que quelques
grains trop gros ne rayent la feuille de verre. On
a foin de faire bien dreffer & unir les pierres à
etendre , parce qu’il eft naturel 'de s’attendre,
que le verre ramollit prendroit toutes les impref-
fions de la pierre fur laquelle i f i l’étendroit.
On placé auffi dans le four à relever, une pierre'
à étendre qui eft contiguë à celle de la partiel du
fourneau , pour que la feuille de verre , pouffée
dans la partie H , ne trouve aucune inégalité qui
^puiffe altérer fa furface,
En fuppofant que la pierre à étendre du four I
fût parfaitement droite & unie, on pourroit,
fans inconvénient, étendre les manchons fur la
pierre à nud ; mais , comme , par le fervice
même , la meilleure pierre eft fujette à s’égrainer,
ou à fe déchirer,. on la couvre communément
d’une feuille de verre, affez épaiffe, bien égale !
d'épaiffeur, & , autant qu’il eft poffible, bien I
exempte de défauts: c’eft fur cette feuille, qu’on j
appelle lagre, qu’on étend toutes les autres. L’étendeur
introduit/ 'abord fon lagre en manchon,
dans la trompe, & , lorfqu’il eft ramolli, il l’étend
fur la pierre le plus uniment & le plus exaâement
qu’il peut.
Il reste ici une difficulté, le lagre & le manchon
qu’on doit étendre deffus, fe trovant ramolli,
l’un & l’autre, & à peu près à la même température,
doivent naturellement jfe'coller : pourob-
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: vier à cet inconvénient ,■ on frotte l'intérieur du
lagre, avant de le mettre dansrla trompe, avec
: quelque^ fubftance fèche, & pulvérulente , qtlj
puiffe s’oppofer à l’adhéfion trop immédiate, de
la furface du lagre avec celle du manchon; quelques
uns employent du crocus martial, d’autres de
Y antimoine, certains , delà manganefe , d’autres enfin
, de la chaux vive. Il faut toujours que cés fubftances
foient exaélement pulvérifées & paflées par
un tamis très-fin , de peur que quelque grain n’oc-
cafionnât des dépreflions fur la furface des feuilles
de verre. L’on eft même dans l’ufage, lorfqu’en
; étendant la fubftance , dont on a voit frotté le
lagre, commence à s’épuiser, de jeter avec force
dans le tifar de la chaux vive pulvérifée ; le courant
d’air entraîne par les trous , par où le feu
communique au four à étendre , une pouffière
impalpable, qui, allant fe dépofer fur le lagre,
produit l’effet defiré.
L’on peut échauffer le four à étendre avec du
charbon de terre, mais pendant qu’on étend , on
fe fert du bois; i°. parce que ce combuftible
produit moins de fumée; 20. parce que le feu,
qui lie doit pas être très-violent, eft plus aifè à
ménager. On a fait bien de tentatives inutiles juf-
qu’ic i , pour employer le charbon à cet ufage.
Les outils de l’étendeur font fort (impies & peu
nombreux; ils confident en une petite fourche > ou
fourchette, l’efirique, ou le krabb, 1 e polijfoir t la
fourche à relever, ou à dreffer.
La fourchette, dont le nom feul fuffiroit pour
fa defeription, eft une petite fourche à deux fourchons
courts , & peu diftans l’un de l’autre, emmanchée
d’un léger manche de fe r , de fept ou
huit pieds de long, & elle fert à pouffer les manchons
dans la trompe, en appuyant contre leur
épaiffeur , l’entre-deux des fourchons.
L'ejlrique, ou le krabb, eft une plaque de fer
d’environ deux pouces de lo n g f u r autant de
large, & fix lignes d’épaiffeur, du milieu de laquelle
part un léger manche de fer de fept ou huit
pieds de long, de manière que, lorfqu’on travaille,
elle pofe fur une de (es grandes furfaces.
Le poliffoir n’eft qu’un morceau de bois uni,
ordinairement de hêtre , d’environ cinq ou fix
pouces .de/long , fur environ quatre de large,.&
2 j ou trois d’épaiffeur ,. emmariché comme le
krabb d’un.léger, manche de fer.
La fourche à relever ou dreffer eft à deux four-
thohs;, d’un fer plat & mince ; les fourcohns font
affez diftans entr’eux, & affez longs pour qu’on
puiffe. porter, fans danger, là feuille de verre
qui ÿ eft pofée dans l’inftant du relevage.
Après tout ce que nous venons d’expofer , l’opération
de l’érendeur 5 eft très-aifée à faifir : i|
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•«troduit fon krabb par l’ouverture, dans le
manchon, qui fe préfente au bout de la trompe ,
5 le porte fur le milieu du lagre ; .il 1 y laiffe un
inftant, pour qu’il achève de s y ramollir, par a
chaleur du four à étendre : preffant enluite , avec le
même outil, à droite & a gauche, il ouvre le
manchon ; continuant la même manoeuvre , il
achève de le développer, & paffani le krabb fur
les quatre coins, & fur les côtés de la touille, il
l’applique au lagre le plus exaftemem qu’il peut.
11 fubflitue alors le poliffoir au krabb, 8c faisant
parcourir à ce nouvel.inllrument toute la fur-
face de la feuille , il achève de l’unir. Il retire
fon poliffoir , qu’il a foin de rafraîchir , chaque
fois qu’il en fait ufage ; 8t reprenant le krabb , il
le pofe contre l’épaiffeur de la feuille, & pouffe
celle-ci dans le four à relever. Il l’y laiffe un
moment fans, y toucher, pour quelle y devienne
moins tendre, fe trouvant dans un lieu moins
chaud ; il emploie ce temps à prendre un nouveau
manchon dans la trompe. 11 retourne alors au four
à relever, 8c par Couverture , il paffe fa fourche
fous la feuille, 8c lorfqu’il l’a chargée, il va
la pofer & la dreffer contre le. fond du four,
lui donnant affez de pied pour qu’elle ne puiffe retomber
fur le pavé, 8c pas affez, pour qu’elle
plie par fon poids. Il a foin d’allumer un petit
feu de bois bien fec fur le pavé du four à relev
er, pour s’éclairer dans cette partie de : fon
travail«
C’eft par une fuite d’opérations femblables ,
que l’étendeur parvient à former, dans le fond
du four à relever, des piles de feuilles. Lorfquil
les juge affez fortes , il paffe une barre fie fer
dans un flanc horizontal, pratiqué à un des cotés
du four, & en place l’extrémité dans des trous
correfpondans , fitués dans l’autre mur .parallèle.
Cette barre lui fert à appuyer de nouvelles piles,*
il place une fécondé barre , lorfqu’il le juge convenable;
ainfi de fuite jufqu’à ce que le four
foit rempli. Alors il en marge tous les orifices,
6 démargeant peu à peu , c’eft par un refroidif-
fement gradué qui demande cinq ou fix jours,
que s’opère la recuiffon des feuilles.
On fe fert auffi d’autres efpèces de fours à étendre
& recuire , auxquels on ne fait point de
trompe, mais pour en tenirSieu, on élève à côté
delà partie du four, dans laquelle on- étend , une
efpèce de banquette, fur laquelle on conftruit un
pavé, de niveau avec celui du four à étendre ,
auquel il communique par une ouverture pratiquée
à la paroi dudit four à étendre. Ce pavé
ell recouvert d’une voûte , & peut contenir fix
ou huit manchons, placés à côté l’un de l’autre.
L’art confifte à les approcher fucceffivement &
graduellement de l’ouverture qui communique au
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four à étendre : comme cette opération peut fe
faire avec la main, & que n’ayant pas à porter
les mandions loin, on n’eft pas obligé de les
pouffer fur des barres de fer, comme l’on fe fert
. . de trempe, les feuilles fie verre font exemptes
1 des raies ou déchirures, que pourroit leur itnpri-
I mer Le contaék des barres ; mais suffi, Ion fent
J qu’il faut un peu plus d’adreffe pour amener , fans
I nique , les manchons, au degré de chaleur né-
I ce flaire, & , fous ce point de vue , je préférerois
l’ufage des trompes.
La longueur du manchon forme celle de la
feuille, & la largeur de celle-ci eft formée par
le développement du manchon, lorfqu’on l’étend ,
de forte que le manchon doit avoir pour diamètre,
environ le tiers de la largeur, qu’on exige de la
feuilLe -étendue. Comme le vérre à vitres commun
eft deftiné à faire des carreaux de vitres or-
: fiinair.es, & que ceux-ci n’ont guère, dans les
plus grandes dimenfions, que douze pouces, fur
dix, les feuilles n'ont pas befoin d’une forte
épaiffeur : auffi, fouffle-r-on les manchons affez
minces, d’autant plus qu’avec cette condition , iis
paroiffent beaucoup plus blancs. Les me fur es les
plus ordinaires des feuilles de verre à vitres, font
de vingt pouces fur douze, & dix-huit fur quatorze';
les vitriers y -coupent Leurs carreaux dans les
dimensions les plus ufitées , avec peu de perte de
verre ; on fait auffi des feuilles de plus grands volumes,
comme de 22- î 8, 24-1.8 , 24 19; mais on
n’excède guère, pour Le verre mince, 2.6 fur 20,
& encore doit-on avoir l’attention, à mesure que
les dimenfions augmentent, d’augmenter auffi un
peu l’épaiffeur.
L’ufage s*eft introduit de garnir les fenêtres de
beaucoup plus grands carreaux ; le verre façon de
Bohême , dont nous nous occuperons ci-après ,
a été employé à cet ufage, mais fort fupérieur en
qualité au verre à vitres commun ; il est auffi
d’un prix bien fupérieur. Pour porter une certaine
économie dans ce genre de luxe, & , en même
temps, pour en conferver toute l’utilité , qui con-
fifte à fournir plus de jour aux appartemens, on a
imaginé de donner plus d’épaiffeur au verre à
vitres ordinaire, & ainfi on peut l'employer en
plus grands volumes; c’eft cette forte de verre à
vitres qu’on appelle verre double ; il se vend plus
cher que le verre mince, mais beaucoup moins que
le verre façon de Bohême. Attendu la plus forte
épaiffeur on peut fabriquer le verre double fur
de plus grandes dimenfions , & donner aux
feuilles jufqu’à 34 ou 35 pouces de long, fur 26
ou 27 pouces de largej
On vendoit affez généralement le verre à vitres
par paquets ; le paquet étoit compofé de fix feuilles
, & le prix en étoit réglé fur l’étendue des
' feuilles; mais on a pris, dans beaucoup de manu»