
J 9 4
Y E R D e t Y E R D E T .
( Art et fabrique du )
1-jEverdeft une des couleurs primitives des rayons
de lumière.
Le verd eft un fi jufte mélange du clair & du
fombre, qu’il réjouir & fortifie la vue, au-lieu
de l’affoiblir & de l’incommoder. C'eft un com-
pofé du bleu & du jaune. S’il tombe de l’urine.,
du jus de citron ou de l’efprit-de-vitriol fur un
ruban verd, il devient bleu, parce que ces liqueurs
mangent tellement le jaune qui entre dans
cette couleur, qu’il n’y relie plus qu'e le bleu.
On emploie le verd dans les arts, & on en distingue
différentes nuances.
iPerd des Teinturiers.
. Le verd des teinturiers n’eft pas une couleur
fimple ; mais elle fe fait du mélange de deux des
couleurs qu’on appelle /impies■ ou primitives.
C ’eft de l’union du jaune & du bleu que fe
font toutes, les fortes de verd qu’on donne aux
étoffes déjà fabriquées, ou aux foies, laines, fils
& cotons qu’on met à la teinture pour en fabriquer.
Les principaux verds que produit ce mélange,
fuivant le plus ou le moins qu’on met de chacune
de ces deux couleurs , font le verd jaune, le
verd. naiffant, le verd g a i, le verd d’herbe, le
verd de laurier, le verd de choux , le verd mo-
lequin, le verd brun , le verd de mer , le verd
obfcur, le verd céladon, le verd de perroquet, &c.
Il n’eft pas poffible de rapporter tous les diffé-
rens verds que peut produire la teinture, ne dépendant
que du teinturier d’en faire de nouvelles
nuances, en augmentant ou diminuant la dofe de
l’une & de l’autre couleur primitive avec lesquelles
il les compofe.
Les couleurs d’olive , depuis les plus brunes
jufqu’aux plus claires , ne font que du verd rabattu
avec de la racine ou du bois jaune, ou de
la fuie de cheminée.
Tout verd doit être premièrement teint en bleu,
puis rabattu avec bois de campêche & verdet,-
8c enfuite gaudé, n’y ayant aucun ingrédient dont
on puiffe fe fervir pour teindre en verd.
On appelle verd naijfant cette couleur vive &
agréable qui reffemble à celle qu’ont les feuilles
des arbres au printemps : on la nomme auffi verd
gai ou verd diémeraude.
Le verd de mer eft la couleur dont paroît la mer
quand elle eft vue de loin ; elle tire un peu for
le bleu, ou , comme on dit en terme de teinture,
elle eft plus lavée que le verd gai.
Le verd brun tire fur le noir, auffi en eft-il
mêlé pour le brunir.
L’urine, le jus de citron & l’efprit-de-vitriol
déteignent ces verds & les rendent bleus, leur
acide confommant le jaune de la gaude.
Verd d’iris.
Le verd d’iris eft une efpèce d’extrait qu’on t?re
de l’iris à fleurs bleues, & qui fert à peindre en
miniature. Cette couleur tendre fe peut faire de
la manière fuivante. •
Cueillez de grand matin , avant le lever du
fo le i ld e s plus belles fleurs d’iris : féparez-en la
partie extérieure, qui eft verte & fatinée, & ne
vous fervez que. de cette partie. Pilez-la dans un
mortier de verre ; verfez enfuite par-deffus quelques
cuillerées d’eau, dans laquelle vous aurez
fait fondre un peu d’alun & de gomme : broyez
bien le tout enfemble, jufqu’à ce que l’eau ait la
couleur & la confiftence néceffaire ; enfuite paffez
ce jus dans un linge fort, mettez-le dans des cor
quilles, & laiffez-le'fécher à l’ombre.
Verd de montagne ou. verd de Véronne.
C’eft ainfi qu’on nomme une fubftance minérale
de la couleur du verd-de-gris artificiel , qui
eft formée par la nature , & qui fe montre dans
les fouterrains de quelques mines de cuivre. Ce
n’eft autre chofe que du cuivre mis en diffolution
dans le fein de la terre. Sa couleur verte varie pour
V E R
les nuances , & eft tantôt plus, tantôt moins
foncée.
Le verd de montagne varie auffi pour la confiftence
& la figure. Il y en a qui eft comme de la
terre , tandis que d’autre eft plus compaéle &
feuilleté, & quelquefois folide comme la malachite.
Le verd de montagne eft affez fouvent en petites
houpes foyeufes , ôt formé d’un affemblage de
petites ftries ou d’aiguilles, comme dans la mine
de cuivre foyeufe de la Chine. D ’autres fois cette
fubftance eft en globules & en petits points répandus
dans de la pierre i c’eft une vraie mine de
cuivre.
La Hongrie fournit, dit-on , le plus beau verd
de montagne ; il fe trouve communément joint
avec une terre calcaire qui fait effervefcence avec
les acides. L’aétion du feu lui fait perdre fa couleur.
Cependant cette règle n’eft point générale,
& M. Port a trouvé du verd de montagne fur qui
les acides n’agiffoient point. En effet, la couleur
verte du cuivre peut fe joindre avec des terres de
différentes natures.
Le verd de montagne eft une couleur qui s’emploie
dans la peinture.
Procédé d’un nouveau verd pour la peinture d'impref-
Jîon ou à la brojfe ; par M. Kinmann.
Lamine de Cobalt de Tunaberg en Sudermanie,
bien calcinée ou. grillée, fut diiloute dans l’eau
régale la diffolution mêlée avec une fois & demie
autant de diffolution de zinc dans l’eau forte,
& précipitée parla leffive de potaffe, donna une
chaux blanche avec, une petite teinte rougeâtre,
qui, chauffée à brun, en la calcinant au creufet
dans le fourneau d’ella i, donna un "verd clair ;
& chauffée à blanc, un beau verd minéral ou céladon
foncé, lequel, broyé à l’eau & gommé,
devint une bonne couleur en détrempe s’appliquant
bien, réfiftant au foleil & à l’air, ne s’altérant
même pas par les acides végétaux ; mais
changée en rouge par les acides minéraux concentrés,
broyée avec l’huile de térébenthine, &
mêlée avec l’huile de lin cuite, cette chaux con-
fervoit fa couleur verte , & s’employoit également
fur le bois 8c fur le fer blanc; elle pouvoit auffi :
fe mêler à la cérufe ; 8c paroiffoit à tous les effais
plus belle que le-verd-de-gris ou chaux de cuivre ,
ayant de plus l’avantage de ne point jaunir avec
le temps, comme fait cette dernière matière quand
elle a été employée avec l’huile de lin cuite.
Pour ce qui Concerne les propriétés de cette
couleur verte, on a déjà dit qu’elle tient à l’air
& au foleil , qu’elle eft fucéptible'du broyement
le plus parfait, & qulon peut également l’employer1
V E R % 5
avec l’eau ou au vernis, ou à.l’huile cuite. Elle
ne doit pas moins être bonne pour être employée
en paftel, comme la terre colorée la plus fine 8c
|1 plus légère , quoiqu’on n’ait pas eu ce but là en
faifant les expériences. D ’ailleurs , elle n’a point
.d’odeur défagréabîe , & n’eft d’aucun danger,
lorfqu’en peignant en détrempe, on porre à la bouche
le bout du pinceau ; .elle n’eft point altérable
par les acides végétaux, foutient le feu le plus
violent, fi on en excepte la ufion avec l’émail,
cas où le bleu feul du cobalt fe montre. Ce bleu
fe montre feul encore , quand on met le jaune
de Naples avec la chailx de cobalt dans le verre
fufible.Au refte,en changeant la quantité de chaux
de zinc, & en employant différens degrés de chaleur
dans la calcination, on peut donner à cette
couleur verte des nuances plus claires ou plus
foncées.
Il eft vrai que cette couleur , eu êgajd au cobalt
& au zinc qu’il faut diffoudre dans les acides minéraux,
peut-être un peu plus chère que le verd-
de-gris , & le prix particulier du cobalt, auffi bien
que les frais; de la calcination, y contribuent encore;
mais fi l’on fait attention que l’on peut mettre
deux ou trois fois autant de chaux de zinc
que de cobalt; que ce métal fe trouve dans le royaume
(laSuède) , quôiqu’en petite quant té , favoir
dans les mines de cuivre de Tunaberg , Erweda
& de la Rirterhitte ; enfin , que cette cou'eur eft
fiche & produit plus que les métaux qu’on y
emploie, alors on trouvera peut être les frais moins
énormes, vu fur-tout la bonté de la coukur. Enfin ,
il fe peut qu’à force d’expériences, l’on vienne à
bout delà préparer plus aifément & à moins de frais.
Autre procédé pour prépirer une nouvelle coul.ur
verte ; par M. Scheele , de l’académie de Stockholm.
Diffolvez à chaud dans un chaudron de cuivre,'
deux livres de vitriol bleu , dans fix cannes d’eau
( la canne contient huit livres ) ; diffolvez en même
temps , dans un autre chaudron de cuivre,
deux livres de potaffe blanche & bien fëche , &
vingt-deux loths (ou onze Onces) d’arfenic blanc,
pulvérifé dans deux cannes d’eau. Paffez cette
diffolution à travers un linge, verfez-en peu à peu
fur la folution du'vitriol; la couleur verte fe précipitera.
Décantez, & verfez fur ce précipité de
Peau bouillante en grande quantité, & à differentes
reprises. Lorfqu’il fera bien édulcoré, verfez
le tout fur un linge bien étendu, d’où vous tirerez
la couleur pour la faire fécher fur lé, papier Jo-
f;ph à une douce chaleur. La quantité mentionnée
des ingrèdiens fournit une livre huit onces &
demie d’une belle couleur verte.
Verd deau.
Le verd-de-gris eft, à proprement parler, la
D d d 2