
56a
V E R R E A L A L AMP E ,
Appliqué spécialement aux instrumens de physique.
( Art de travailler le )
et art qui fournit aux fciences une infinité d’inf-
trumens utiles, mérite une place particulière dans
le dépôt des connoiffances humaines. Il ne devoit
pas fans doute être féparé de celui de l’émailleur :
il en eft une des branchés, & je ne l ’ignore point.
Mais l’emploi de l’émail a fpécialement , & j’ofe-
rois dire uniquement, occupé l’auteur de l’article.
Il n’a rien oublié de tout ce qui concerne l’-ap-
plication de cette matière ; fes in ftru étions font
claires , intéreflantes : dans cette partie de prédi-
leétion on reconnoit enfin la touche d’un écrivain
au niveau de fon fujer.
Mais l’étude répétée de cet article feu!, n’en-
feignera point auphÿfîcien lé moyen de faire naître
fous fes mains, quantité d’inftrumens effentiels,
& dont l’exécution ne demande fouvent qu’un travail
momentané. Cette autre partie , toute pré-
cieufe qu’elle e ft, n’a été rappelée que comme un
acceifoire d’affez peu d’importance.
En la reprenant ic i, j ’ofe compter fur- l’approbation
de ces hommes curieux qui habitent loin
des capitales, & qui, privés du fecours des artifles,
font forcés de le devenir eux-mêmes. Des notions
effleurées ne fuffifent point alors : les détails font
de rigueur, & l’encyclopédie les doit a qui veut
l’interroger. Rendons juftice à l’éditeur zéruel, qui,
fupérieur à tous bénifices perfonnels , femble n’avoir
pour but unique que la perreétion de ce grand
ouvrage. Completter chaque objet, c’eft féconder
fes vues : c’efl faire ce qu’il a fait lui-même pour
vingt morceaux de littérature. Si l’article préfent
n’ert pas joint à celui de l’émaiileur, le vocabulaire
univerfel les réunira l’un à l’autre. -
Un aflortiment de tubes, différens en grofleur
& en longueur, fournira tout ce qu’il faut pour
une multitude d’inftrumens. On faura par quel
procédé on obtient ces tubes, en confultant, parmi
les planches, l’avant dernière de la petite verrerie
©u gobeleterie, & dans le corps du dictionnaire,
le difeours qui s’y rapporte. Il feroit à defirer que
les ouvriers, à mefure qu’ils racourciffent ces tubes,
pour en compofer des paquets , ne négligea fient
point de les former par un de leurs bouts ; cette
précaution empêcheroit l’humidité de s’y introduire :
on les travailleroit enfuite avec moins de danger
de les voir éclater, & certains inftrumens y gagne*
roient en perfeéüon.
On peut, à l’aide du feu , maîtrifer le verre au
point de le forcer à recevoir prefque toutes les formes.
Un feu ordinaire ne fuffiroit cependant pas,
à moins que la pièce ne fût très mince, & qu’il
ne s’agit que d’ un changement léger. Pour un
changement plus grand ; on a befoin de plus d’aéli-,
vité.
Un fouffie continue, & qui dirige la flamme
fur la partie qu’on Veut travailler, produit cette
augmentation de chaleur. L’explication s’en offre
- d’elle-même : d’abord, la flamme, par cette im-
pulfion , fe raflemble dans un efpaceaflez reflerré:
' elle devient en outre plus denfe, & fon mouvement
naturel & de beaucoup accéléré; ces circonftances
doivent la rendre incomparablement plus énergique.
De tout ce qu’on a imaginé pour exciter ce fou file,
l’agent le plus Ample eft un chalumeau à bouche
(voyez la planche première de l’orfèvrerie-bijouterie,
fig. e ) foît de verre, foit de métal. On le fixe
fur ûné table au haut d’un petit fupport , avec
l’attention que fa pointe réponde au feu de la lampe;
par là on fe ménage la liberté des mains. Il eft bon
qu’à un pouce de cette pointe on ait pratiqué d’avance
un renflement qui ferve de réfervoir à l’air
& retienne la falive qui s’échappe en foufflant. Pour
la facilité de l’attitude, le tube en cet endroit doit
être recourbé, de manière à préfenter un angle de
120 à 140 degrés.
Mais un long ufage du chalumeau devient fatigant.
L’eolipyle lui eft infiniment préférable. Ce
fécond jnoyen, inventé depuis peu d’années ( en
V E R
f ) eft fi ingénieux, & peut, en tant d’occafions,
être utile, qu’il mérite de ma part quelques détails
particuliers.
Le diftionnaire de phyfique fait connoître cet
inftrument dont la matière ordinaire eft le cuivre.
Sa forme repréfente généralement ou une boucle
ou une poire : mais cette figure eft abfolument
arbitraire , de même que fon diamètre auquel on
peut donner depuis deux jufqu’à trois pouces. L’ef-
fentiel eft qu’il foit creux, qu’il ait peu d’épaiffeur ,
& qu’il foit garni d’un bec coudé & percé du plus
petit trou poflible. Ce bec qu’ou monte à vis, porte
un épaulement pour mieux s’appliquer ; & la jonction
eft parfaite , fi entre le vafe & l’épaulement
on interpole une rondelle de cuir aminci. Je puis,
je crois, m’abftenir d’obferver qu’au point de l’écrou
, le vafe a befoin d’être renforcé.
Trois colonnes légères & placées triangulaire*
ment fur une bafe commune foutiennent à leur
femmet une zone, ou cercle dans lequel repofe
Téolipyle. Au centre de cette bafe, on place une
très-petite lampe dont le coton n’excède pas en
grofleur un grain d’avoine; on le remplit ou de
fine huile ou d’efprit de v in, &. les chofes doivent
être rangées de manière que la flamme atteigne
prefqu’à l’éolipyle placé dans fon cercle. Le cercle
& les colonnes font en fer-blanc qu’on enjolive
ordinairement par des couleurs.
Si Téolipyle eft au tiers rempli d’eau-de-vie, &
que la mèche d’enrleflbus foit allumée, il s’échappe
de .l’extrémité du b ec , un fouffle plus puiflant ,
plus fuivi que celui de la bouche munie du chalumeau,
& Tartifte, abfolument libre, n’a pas à [
s’épuifcr pour la produire.
Enfin, ceux que n’éfraieroit point un attirail
plus grand , pourroit adopter l’uiage du foufflet
à double ame. (V oy e z , planches de i’émailleur,
la vignette de la première, &. tout ce que repréfente
la fécondé).
Les trois moyens rendront également le verre
traitable. Le goût décidera entr’eux. Quant à la
t lampe à fouder, elle fera toujours la même, foit
; qu’on employé le foufflet, Téolipyle ou le cha-
■ lumeau.
Je ne parlerai pas ici de quelques outils commodes
ou néceflaires dans le cours du travail : il
fera temps de les annoncer à mefure qu’il s’agira
î des pièces qui les exigent : & comme la plupart
ae font point particuliers à cet art, je renverrai,
pour éviter les descriptions, aux planches de tel
; autre art qui les repréfente gravés.
Je fuppofe donc que la lampe foit animée par
un de ces trois moyens, détaillons maintenant les
V E R 5 6 3
procédés à fuivre pour différens ouvrages, ôi commençons
par les moins compliqués.
I. Sceller qu former un tube.
Si le tube eft mince & que fa cavité foit petite,
il fuffira d’en tenir le bout quelque temps dans la
flamme , en l’y faifant tourner lentement ; !a chaleur
l’amollira, tout le contour fe rapprochera,
& en continuant quelques révolutions encore, le
fcellement fera parfait. C ’eft environ à deux pouces
de la mèche que la chaleur eft la plus vive.
Dans le cas ou la cavité auroit en diamètre plu-
fieurs lignes, aidez-vous d’une pince ( voyez fig.
14 , planche quatrième de l’orfèvre bijoutier ) que
vous prendrez de la main droite, & tandis que la
gauche maintiendra toujours le tube dans le feu,
prenez légèrement fes bords & les conduifez- vers
un centre commun. La pince les téunira & la flamme
achèvera la foudure.
On peut opérer à ce dernier fcellement par une
autre méthode. Dès que la circonférence du gros
tube fera rougie jufqu’au blanc, appliquez contr elle
un autre tube également chauffé: en l’y agitant un
peu, toute cette circonférence s’y attachera. Tirez
à Tinftant & doucement le tube auxiliaire : il entraînera
avec lui'l’extrémité du gros, qui, en s a-
longeant fe rétrécira au point de devenir capillaire.
Dans cet état la flamme le coupera & fermera 1 o-
rifice, comme on l’a dit du tube mince & d une
cavité petite. Que fur-tout on n’accumule pas trop
de matière à l’endroit du fcellement : cette furabon-
dance le feroit fêler en réfroidiffant.
Obfervations. Un verre épais ne doit point être
plongé fubitementdms la flamme : il ne réfifteroit
pas a fon aélivité. Qu’on le difpofe a la foutenir,
, mais par degrés. Que d’abord on le préfente a
quelques pouces de ce foyer brûlant; on Ty fera
enfuite entrer, pour l’en retirer prefqu’auflitôt :
enfin on ne fe permettra de Ty laiffer qu’aprés
l’avoir fortement échauffé.
N’oubliez jamais d’effuyer un tuyau qui feroit
humide. Les précautions les plus exaâes ne le gar-
rantiffent même pas toujours d’éclater.
II. Courber un tube.
I l fuffira, fi l’intérieur en eft étroit, & que fes
parois ne foient pas très-minces , de l’amollir dans
fon pourtour, fur la longueur d’un pouce ou deux.
Les mains qui le foufiennent, lui imprimeront ai-
fément le pli qu’on voudra lui donner ; c’eft ainft
qu’on recourbe les baromètres ordinaires &c. Mais
fiTmtérieur du tube étoit large, cet effort détruirait
I totalement la forme cylindrique : il fe feroit au
I point de la courbure, un double aplatiffement.
Bbbb 2