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faire caffer la partie du col calcinée, & détacher
ainfi la boffe de la canne. On retourne la bofîe fur
le bequet, de forte qu’elle préfente fon fond à -
l’ouvrier : celui-ci reçoit des mains de fon garçon,
que l’on appelle auffi fermier, un ferret ou
pontil préparé ou armé, c’eft-à-dire, au bour^
duquel on a pris un coup de verre , que l’on a
enfuite marbré. Le ferret eft appliqué à la noix* j
de la. boffe, s’y attache ; cette opération eft dé- I
lignée par l’expreffion de pontiller ou attacher
la boffe, & on la voit exécutée ( h g. 2 , pl. XIII).
C ’eft la noix de la boiTe que l’on nomme auffi oeil,
& fur-tout boudiné.
On fait réchauffer la paraifon pontillée, au
grand ouvreau , pour ramollir le verre, & on a
foin , pendant cette chauffe, de tourner rapidement
la piè.e ; i ° , pour que l’a&ion du feu ne
change rien à la forme de la boffe; a0, pour que
les parties du verre, cédant à la force centrifuge,
qui réfulte du mouvement de rotation, la parai-
fon foit d’autant plus difpofée à s’ouvrir. (fig.I»
pl. XIV )'. C ’eft communément le garçon qui
donne cette dernière chauffe, & qui remet en-
fuite le pontil au maître • celui-ci continue à faire
tourner la boffe avec rapidité, tandis que le garçon
introduit, dans la paraifon , une planche de
chêne , arrondie par les deux bouts , & de fix
pieds de longueur ; on peut en voir la formé
( pl. V I , fig. 9. ) : cette planche eft appelée
branche, & la manoeuvre dans laquelle on en fait
ufage, eft défignée par l’expreffion, brancher la
boffe. Le garçon appuyant également la branche
contre les bords de la boffe, à méfure qu’elle
tourne, la force à s’ouvrir, & à fe développer
(fig. Î , pl. X IV ) .
La boffe ouverte , par l ’aélion de la branche ,
eft rapportée au grand ouvreau; le feu la ramollit,
& le mouvement de rotation que l’on
continue à lui imprimer , la détermine à s’ap-
platir de plus en plus , .( fig. I , pl. XV ). Énfin ,
retirée toute chaude de l’ouvreau, l’ouvrier la
tourne encore fur la place le plus rapidement qu’il
lui eft poffible ; elle achève de fe développer, &
elle produit un plateau rond d’environ trente à
trente-fix pouces de diamètre, & le maître porte
le pl-it,fans ceffer d,e le tourner, fur un tas de
hraife fine , ou cendres rouges applaii par le haut,
que l’on appelle pelotte, & que l’on a difpofé près
du fourneau de recuiffon.Onvoit(fig. 2, p l.X V ) ,
un ouvrier occupé à porter le plateau à la pelotte,
& dans - la fig. I , pl. X V I , il travaille à l’y pofer.
Dès que le plat eft fur la pelotte, le maître
détache fon pontil, & le .garçon prenant: 1-e piaf
fur une fourche de fer, le met dans le four à recuire.
( pl. X V I , fig. ^ ).
D ’après le détail que nous venons de donner
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des opérations fucceffives, par lefquelles on parvient
à fabriquer un plateau de verre à vitre; on lent que
le mouvementée rotation imprimé à la boffe, après
qu elle a été pontillée, eft principalement la'caufe du
développement & de l’aplatiffement du plateau.
Il importe donc qu’il foit rapide; mais, fi l’on fe
cornent3it de faire rouler la canne entre les doigts,
ou fur les mains, il feroit difficile que l’ouvrier
remplit fon objet : il arme fa main gauche d’une
mitaine, qui n’eft autre chofe qu’une plaque de
tôle b. ( fig. I , pl. XIX ) , légèrement .Courbée,
au côté creux de laquelle eft attaché, avec un
cuir , un touret, ou efpèçe de douille c que la
main faifit; la tôle déborde la main, & préfente,
en fa partie fupérieure, une échancrure d fur
laquelle, pendant le travail, la canne repofe. Les
fig. 2, & 3 , ( même planche ) préfentent les dè-
veloppetnens de la mitaine; on peut voir ( fig .2,
pl. XIV & fig. 2, pl. XV. ) l’ufage de la mitaine:
la canne trouve un point'd’appui folide dans l’échancrure
de la mitaine, tenue par la main gauche
de l’ouvrier, tandis que fa main droite peut donner
au plateau un mouvement de rotation très-Yif.
Outre la mitaine , les gentilshommes de Normandie
qui s’appliquent à la verrerie, employent
encore des inftrumens que nous, pourrions nous
difpenfer de décrire, parce que , peu relatifs à l’art
en lui-même , ils ont fimplement la commodité
pour objet. Tels, font Y écran, ( fig. 5 , pl. XlX.)
& la demi chemife (fig. 4 , même pl. ). Le premier
eft un efpèce de cercle de bois qui fait le
tour de la tête, à laquelle il tient par. le cordon b
qui le refferre; le bois de cet écran fe prolonge au
devant des y eu x , et on y attache une efpèce de
pente de toile c qui garantit de l’action du feu,
non feuleiîient les y eu x , mais encore la joue que
l’ouvrier préfente le plus à l’ouvreau. La demi-cht•
mife, auffi en ufage dans les glaceries, (fig. 4,
pl. XIX ) eft une chemife de roulier ou charretier,
à laquelle il manqueroit une manche, & qui feroit
ouverte du haut en bas, à l’exception du collet,
du côté privé de manche ; le devant & le derrière
de la demi-chemife fe joignent feulement, de
ce côté, par des cordons que l’on attache, d’une
manière affez lâche; ce vêtement très-large garantit
de l’a&ion du feu, l’ouvrier qui paffe la
manche au bras qu’il préfente le plus à l’ouvreau.
Dans la fabrication que nous venons de décrire
, la place à boutqlle eft deffervie par un
maître ouvrier, un garçon & un gamin, & onTe
fert d’arches ou carquaifes particulières., pour la
recuiffon d’environ cinq ou fix cens bouteilles qui
font fabriquées chaque enfournement. La fabrication
du verre à vitres exige trois fortes d’ouvriers,
les cueilleurs, les paraifonniers , ou boffiers, & les
maîtres ouvriers. Leurs noms indiquent affez leurs
fondions. Les premiers cueillent le verre au bout
de la canne, les boffiers forment la paraifon ou la
. rre & la conduiront jufqu’à l’infiant auquel
.1 concilie la pièce , & les maîtres ouvriers ouvrent
la boffe, & finiffent le plat. Comme le
cueillage demande moins de temps que les ope-
rations fucceffives & héceffaires .pour faire un
„lateau, deux cueilleurs fuffifent pour fournir de
['ouvrage à trois boffiers qui à leur tour en
fourniffent à trois maîtres. Outre ces trots fortes
d'ouvriers , on ne peut encore fe paffer de ferro-
tiers ou garçons, foit pour tenir la branche don.
on fe fert popr ouvrir les boffes, foit pour préparer
& offrir le pontil., foit enfin pour mettre
les pièces dans le fourneau de recuiffon.
On chauffe les paraifons aux ouvreaux ordinaires,
jufqu’à ce que la boffe foit avancée , &
que l’on ait à la foncer, le furplus des operations
exige l’ufage du grand ouvreau ; mais, comme
néceffairement les boffes commencées ne font pas,
dans le même inftant, au même point de fabrication
, le grand ouvreau eft commun a tous les
ouvriers qui y vont chauffer fucceffivement.
On fabrique communément deux cent foiçante-
quatre plateaux par enfournement ; on les vend
encaiffés dans des paniers, formés avec des barreaux
de bois léger, dont les interftices font garnis
avec de l’ofier, ou à défaut, avec des planches
extrêmement minces , comme on peut le voir
(fig. 3 , pl. 1 , verrerie en plats ). Chaque panier
contient vingt-quatre plateaux, que l’on pofe
debout, ou fur leur épaiffeur; on a grand loin
de les féparer, foit entr’eux , foit des cotes, &
du fonds du panier, avec de la paille ou du foin,
& de les affujettir, de manière qu’ils ne foient
fufceptibles d’aucun mouvement. Le panier de
vingt-quatre plats, eft vendu ^relativement à la
qualité du verre , de 30 à 36 livres ,• & en choi-
fiffant les plateaux , on établit trois qualités differentes
, & confèqueVnment de différé ns prix. Les
ouvriers, employés à. cette fabrication , font payes
auffi , relativement à l’importance de leurs fonctions
, les cueilleurs à environ 2 livres par jour,
les boffiers à environ 4 . livres, & les maîtres
à 6 livres.
Les fourneaux dans lefquels on fait recuire les
plateaux de verre à vitres, mm ( pl- III »verrerie
en plats ) font bâtis en briques ordinaires ;
ils font quarrés , & ils ont environ douze pieds
de long, fur environ quatre pieds de large ; ils
font chauffes par un tifar placé au-deffous du pavé,
& communiquent à la chamtqre fuperieure. du
four, par des conduits pratiqués au travers de la
maçonnerie , ou , au choix de l’artifte, par un
trou dirigé, du tifar fur le pavé, dans le Heu le
plus commode ; nous obferverons feulement que
la recuiffon de ces fortes de verres ne demande
pas un degré de feu bien violent ; il fuffit qu il
empêche le verre d’être trop promptement réfroidi,
diffèrent en cela du feu qu’exige la recuiffon
des verres à vitres en manchons, comme
nous le verrons ci-après , puifque ce dernier doit
ramollir le verre. Le pavé du four à recuire ei
élevé d’environ trente pouces au-deffus du loi.
dé la halle : l’ouverrure par laquelle on introduit
les plateaux , a environ de trois a quatre pieds
de large ,fur de vingt cinq à trente pouces de hauteur.
La voûte du four à recuire eft circulaire,
1 & forme, d’un bout à l’autre de ce fourneau,
un berceau élevé dans fon milieu, de trente-fix a
quarante pouces au-deffus du pave. Le garçon ,
après avoir porté le plateau fur une fourche jut-
■ ques dans le fourneau , le dreffe contre un des
fonds du four ,f c’eft-à-dire , une de fes.v petites
faces, & il dreffe de même un fécond plateau
contre le premier, ainfi de fuite : lorfqu il juge les
piles.affez fortes, il introduit dans le fourneau
une barre de fer , qu’il place, par des flancs pratiqués
exprès aux murs de la carquaise, paralel-
lément aux piles déjà faites : cette barre lui fért
d’appui, pour former une nouvelle pile, & lôrf--
qu’il en eft befoin, il met une fécondé barre, &c.
Il faut que le four de recuiffon foit échauffé avec
précaution : trop chaud il ferbit plier les plateaux,
qui cédéroient à leur propre poids; trop froid ,
il en occafionneroit la caffe.
Lorfque nous , aurons expôfé la fabrication du
verre à vitres en canons , ou manchotes, nous
comparerons le réfultat des deux méthodes, &
nous préfenterons quelques obfervations à ce
fujet.
Verrerie pour verres d vitres, a P allemande, ou en
manchons , ou en canons.
La fabrication du verre a vitres en canons, ou
en manchons, eft ainfi défignée, de la forme
qu’on donne aux pièces , qui, en ce développant,
deviennent des feuilles j on 1 appelle auffi a 1 allemande
, fans doute , parce que le procédé que
l’on y emploie nous à été tranfmis par les verriers
allemands.
Les fourneaux de fufion dont on fe fert dans ce
genre de verrerie, font à deux tifars, & on les
chauffe en bois , ou en charbons ; leur conftruc-
tîon peut être afiimilée à celle des fours déjà décrits
ci-devant-, foit pour le verre noir, foit pour
le verre en plats ou à boudiné, en fuppofar.t
l’emploi des deux efpèces de combuftibles ; les
matériaux font les mêmes ; ils font préparés &
employés avec les mêmes précautions; nous nous
difpenferons donc de répéter ici les détails que
nous avons déjà préfemés à ce fujet.
Les dimensions des fours font relatives i ° . à
la grandeur „ et au nombre des pots que l'on veut
placer fur chaque fiége.; 2°. fi l’on chauffe en
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