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pas entendre par ce mot, tourner en figure, tourner
le portrait, par exemple, d’un homme , ce que
pourtant quelques habiles tourneurs affurent pof-
fihle ; mais cela fe réduiroit à ébaucher allez
groffiérement, & avec bien du temps, les (impies
lïnéamens d’une figure, fans beaucoup de relief,
8c fans qu’on pût rendre avec netteté tous les
traits circulaires que trace l’outil en taillant, puif-
que ce n’eft qu’une pointe un peu plus greffe-
qu’une aiguille.
Mais afin qu’on en comprenne mieux le fujet
& la difficulté d’y bien réuflir, voici à peu près
en quoi confifte la machine.
On fe fert de deux poupées ordinaires , garnies
chacune d’une lunette. L’arbre a un collet a
chaque bout , & à l’un de ces bouts on attache
le creux d’un portrait fi on veut faire un relief,
ou un relief fi on veut tailler un creux.
A l ’autre extrémité du même arbre, on attache
auffi la matièreftfur laquelle on veut tracer le
portrait ; & afin que l’arbre puiffe fe mouvoir du
devant en arrière, & du derrière en avant, on fe
fert d’un reffort ou bien d’un contre-poids, pour
lui donner le mouvement pendant qu’il tourne en
rond, par le moyen d’une roue ou d’une poulie.
L ’arbre étant prêt à tourner fur les deux lunettes,
on difpofe, au devant de l’original, une touche
d’acier bien trempée & polie comme une aiguille ;
mais il faut auparavant tracer, fur cet original,
une ligne droite du centre à la circonférence, pour
fervir de guide à la pointe de la touche. Il faut,
outre cela, que la pointe foit au même niveau
que le centre de la médaille, & que la pointe de
l ’outil foit aufîi dans la même hauteur , & toujours
fituée vis-à-vis & directement à la pointe de. la
touche.
Pour donc commencer le portrait , on met la
pointe de la touche fur le centre de la médaille ,
& en même temps que l’arbre tourne, on préfente
la pointe de l’outil au centre de la matière. Si le
centre de l’original eû creux, le centre de la matière
fera en relief, & au contraire..
Le centre étant donc taillé, on avance la pointe
de la touche fur le point prochain de la ligne qu’on
a tracée fur la médaille , du centre à la circonférence,
& en même temps on avance auffi la pointe
de l’outil fur le point de la matière, direérement
oppofè au point où suppute la pointe de la touche.
L’arbre tournant fur les lunettes , & avançant
& reculant par le moyen du reffort ou du contrepoids
, fera que.la pointe de l’outil tracera , fur la
matière , une ligne circulairede la même nature
que celle que la pointe de la touche trace fur la
médaille, & ainfi de tout le refie»
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Mais parce qu’on ne peut fe fervir que d’un
outil pointu comme une aiguille , & d’une touche
pointue de même , il faut néceffairement que chaque
coup d’outil forme une trace circulaire ; ce
qui ne peut que rendre un portrait fort inégal &
fort rude , & qu’on ne peut affurément polir qu’en
effaçant beaucoup de traits qui le rendront dé»
feâueux.
Des roues propres pour le tour ^ & de leurs differentes
difpojitions.
Comme, il’ eft prefqu’impoffible de pouvoir fe
paffer de l ’ufage des roues dans l’exécution des
ouvrages du tour, pour travailler, & plus promptement
, & avec plus de facilité , j’ai voulu démontrer
la difpofition de plufieurs toutes montées ,
en forte qu’on puiffe rebander les cordes, quand
elles feront relâchées.
Mais avant que d’entrer dans le détail eft
fans doute à propos de faire favoir de quelle
grandeur elles doivent être à peu près ; quoique
véritablement il foit bien difficile d’en pouvoir
déterminer la véritable grandeur , puifque la qualité
des ouvrages & des matières en exige, les
unes grandes, & les autres moyennes..
Par exemple, fi c eft pour tourner , ou du fer,
ou de grandes pièces de bois, on doit fe fervir
! d’une grande roue à bras, femblable à celle des
couteliers, & même quelquefois plus grande ; mais
quand c’eft pour tourner feulement des pièces
délicates , ou de bois, ou d’ivoire, une roue d’environ
trois pieds de diamètre eft fuffifante pour
la force du mouvement, qu’on pourra même augmenter
en garniffant les roues par quelques platines
de plomb, afin que la pefanteur lupplée à
la hriéveté du levier, ou bien on pourra diminuer
le diamètre des arbres , fi on veut que le mouvement
fe faffe avec plus de vîteffe, particuliérement
quand on tourne fimplement en rond \ mais quand-
on veut tourner en figure , il faut diminuer, là
pefanteur & le diamètre des roues r pour que le
mouvement foit modéré ;. car par un mouvement
trop rapide & précipité, on fe met en danger de
gâter & les machines , & les ouvrages. Pour ce
fujet on peut ajufter plufieurs roues enfemble , &
toutes de différens diamètres pour pouvoir donner
un mouvement conforme à l’ouvrage.
Quant à la grandeur ou'proportion que doivent
avoir les deux roues, celle du pied & celle de
l ’arbre, qu’on appelle la poulie , je dirai que, pour
tourner fimplement en rond, il (ùffit que celle du
pied ait environ trois pieds , & celle de l’arbre
trois à quatre pouces de diamètre.
Mais fi c’eft pour tourner en figure, il faut qu®
les deux roues (oient d’un égal diamètre , à favoir,
d’environ un pied*
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Avec deux roues de cette grandeur on aura un
mouvement lent & doux , & qui ne caufera point
d’ébranlement violent, qui gâte bien fouvent, &
les machines, & l’ouvrage, fur-tout quand on n’a _
pas la main affez forte &. bien affurèe.
On ne peut fe fervir des roues fans le fecours
des cordes , dont les, unes font faites de boyau, &
les autres font faites de chanvre.
Les cordes de boyau font toujours les meilleures,
& moins fujettes au relâchement ; mais auffi les
rats les gâtent & les coupent fouvent, fi on n’a
foin, ou de les retirer la. nuit, ou de les oindre
d’huile d’afpic.
De quelque corde qu’on fe ferve , il faut les
fouder proprement, c’eft-à-dire , joindre & lier
fi bien les deux bouts, qu’ils ne puiffent fe délier,
& que même la foudure ou ligature ne paroiffe pas.
Quant aux cordes de boyau, on ne peut les bien
fouder que fur la roue des cordiers, en tordant deux
houts l’un fur l’autre.
Pour les cordes de chanvre, voici la façon la
plus propre. Il faut pour ce fujet, après que vous
aurez coupé votre corde de la longueur requife,
défiler un cordon de chaque extrémité, environ la
longueur de dix pouces. Faites enfuite chevaucher
ces deux bouts, environ un pouce plus avant que
l’endroit où on a fini de défiler les cordons : rem-
pliffez, avec le cordon dénié, la place de l’autre-;
celui-là ira aboutir un pouce par-delà celui-ci :
nouez-les tous deux de deffous en deffus , & ferrez
bien le noeud, afin que ces deux cordons ne fe
détachent ; vous aurez à l’extrémité oppofée, quatre
cordons entortillés de deux à deux; favoù, deux
longs &. deux courts. Détortillez l’un de ces eourts , *
& remplirez fa place avec l’un des deux longs,
jufqu’au milieu des jonâions des deux extrémités
de la corde , & dans ce milieu nouez ces deux
cordons de la même manière que les deux premiers.
Nouez, enfuite les deux autres cordons qui
vous reftent, & vous aurez une corde très-bien
fondée.
Le lieu & la fituation d’un tour règle & détermine
bien fouvent la place d’ une roue ; car tantôt
on eft obligé de la placer , ou fous le banc du tout.,
ou par-deffus, & tantôt à coté:; mais en quelque
lieu qu’on la mette , il faut toujours la placer dans
le plus commode , & de manière que la corde
vienne bien à plomb de l’arbre ou mandrin , &
que les deux roues, tant celle du pied que celle
de l’arbre, foient toujours dans le même plan.
Le mouvement en fera plus aifé , & il, n’y aura J
pas de danger que la corde s’échappe de la poulie
& fi la difpofition du lieu ne l’empêche , il eft j
auffi toujours meilleur que la corde fe croife entre »•
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les deux roues ; elle embraffera beaucoup plus de
leur circonférence , & facilitera davantage le mou-,
vement.
Il eft encore néceffaire pour faciliter le travail,
fur-tout quand on eft obligé de tourner foi-même
la roue, que la. pédale ait cinq à fix pieds de longueur
, fi le lieu le permet, & que la manivelle
de l’arbre de la roue ait environ un demi-piéd de
coude.
Et afin que le manche de la manivelle refte
fufpéndu de manière , lorfque la roue ceffsra de
tourner, qu’au premier coup de pied on lui redonne
fon mouvement fans être obligé d’y mettre
la main , on augmentera le poids fur le, bord de la
roue , à l’endroit oppofé à la manivelle, afin que
fon manche refte au niveau du diamètre horizontal
de la roue, quand on ceffera de tourner.
Affortiment d'un arbre & de deux poupées propres
à tourner la figure.
Cet affortiment eft des plus fimples & des plus
aifés. Il faut que la poupée antérieure foit ouverte
par le haut en devant, & fendue à chaque côté
en travers', par une mortaife ; & juftement à la
hauteur du milieu de la grande ouverture du devant
ou du centre de la lunette*
Le devant de la même poupée eft auffi percé
par en bas , pour la place d’un clou qui doit
. retenir la lunette. Les deux lèvres de la grande
: ouverture doivent être garnies chacune d’une fous-
bande de fer, percée de deux trous à écrou. -
On applique au devant de la face de la poupée
une platine de laiton fi on v eu t, pour faciliter
le jeu de la lunette , laquelle gliffera beaucoup
plus aifé ment fur une plaque de laiton bien unie,,
que fur le bois nu , tel poli & uni qu’il foit*
On doit obferver que , dans- toutes les occafions
où il y a des frottemens pour le mouvement des ,
figures & des machines qui les regardent, on fe
ferve toujours de métal, & non pas fimplement
de bois nu , & , autant qu’on pourra , du fer fur
du laiton, ou bien du laiton fur du fe r , parce
qu’ils s’entretiennent toujours bien l’un Tautre.-
Les deux extrémités des mortaifes (ont garnies-
de deux petites pièces de fer creufées au milieu
en couliffe ou rainure, pour le. jeu d’une petite
platine de fer, dont les deux- tourillons gliffent dans*
cette c oublie..
Cette platine, étant preffée par deux vis r arrête
la touche ou rencontre dans l’endroit où on veur
la mettre..
L’étrier qui fert à affermir & retenir lad ti nette v